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Développement durable et gestion des forêts du bassin du Congo: étude comparative des politiques forestières du Cameroun et de la République du Congo

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par Parfait Oumba
Université de Limoges - Master en Droit international et comparé de l'environnement 2007
  

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II- Intérêt de l'étude

Les forêts amazoniennes et asiatiques étant fortement détruites, le Bassin du Congo, une sorte de no man's land juridique et judiciaire de fait, reste un des derniers bastions forestiers mondiaux dont l'exploitation continue de soulever des problèmes. La contrainte du respect indispensable d'un équilibre durable entre une exploitation forestière écologiquement saine et un approvisionnement suffisant des industries (tant sylvicoles que pharmaceutiques) est au coeur du débat économique des pays du bassin du Congo, au moment où, les différents acteurs impliqués dans l'utilisation de cette ressource naturelle (primaire ou dérivée) font l'objet de critique et d'un contrôle de plus en plus accru des lobbies écologiques. C'est à ce titre que les vocables de gestion, de conservation et d'exploitation durable des forêts ont droit de citer dans les discours et les programmes d'action tant nationaux qu'internationaux.

Sur le plan socio culturel, la société est le réceptacle et le champ d'application de toutes les implications pouvant découler de la mise en oeuvre du droit international de l'environnement. Dans le cas du bassin du Congo, les individus sont pour la plupart étroitement liés aux écosystèmes, c'est le cas des peuples autochtones Pygmées en ce qui concerne la forêt. Ces populations dépendent directement et totalement des fleuves, des forêts et d'autres ressources naturelles. Ainsi, l'effectivité du droit international de l'environnement permettrait une protection incidente de ces peuples, et partant, de la richesse de la diversité culturelle à laquelle ces peuples contribuent. La survie même de la plupart des Etats d'Afrique centrale dépend directement des ressources naturelles. En effet, le sous-sol de ces pays représente un vrai scandale géologique, car il regorge des richesses diverses à savoir : le pétrole, l'or, le diamant, le cuivre et autres. Quant aux forêts, cette zone représente la deuxième réserve mondiale en terme de biodiversité de la faune et de la flore. Partant, les Etats d'Afrique centrale ont donc intérêt à promouvoir le développement durable dans la gestion des forêts par le biais de leurs législations respectives. L'effectivité du droit international de l'environnement en Afrique centrale contribuerait de manière efficace au développement de cette partie de la planète.

III- Revue de littérature

Comparées à d'autres forêts tropicales, les forêts du Bassin du Congo sont relativement intactes. Cependant, sous ce qui semble être une canopée intacte, de sérieuses dégradations sont en cours. En effet, de larges blocs de forêts sont déjà devenus des forêts vidées de toute leur grande faune et sont de ce fait dépourvues des ressources nécessaires à la survie des peuples de forêt et à celle de la faune. À moins que la tendance à l'accélération de la dégradation ne soit inversée, les forêts du bassin du Congo pourraient connaître une destruction de même ampleur que celles survenues pour les forêts de l'Afrique de l'ouest et celles de l'Asie du sud-est9(*).

Au cours des dix dernières années, le secteur forestier mondial s'est tourné de manière croissante vers des formes plus sophistiquées de planification de la gestion. Dans le Bassin du Congo, les codes forestiers du Cameroun et de la République du Congo exigent maintenant l'élaboration et l'application de plans d'aménagement forestier. L'amélioration de la capacité de gestion de beaucoup de grandes entreprises indique toutefois une évolution positive en direction d'une utilisation plus rationnelle et plus saine des forêts qui pourra être étendue à l'intérieur du bassin.

La progression d'un certain nombre d'entreprises vers la certification constitue une avancée notoire en direction d'une exploitation durable des forêts du bassin du Congo10(*). La transparence accrue dans l'attribution des concessions forestières constitue aussi une autre avancée majeure dans le développement du bassin du Congo. Les négociations traditionnelles à porte fermée font place à des systèmes plus ouverts d'offres publiques opérant suivant des critères techniques et financiers plus transparents. Non seulement cette évolution a amélioré la transparence et conduit à la suppression de permis d'exploitation non équitables, mais elle a aussi permis aux États de recouvrir une portion plus importante de la rente forestière au travers des taxes annuelles11(*).

Toutefois, les politiques et stratégies mises en place par le Cameroun et la République du Congo, doivent obéir aux critères et indicateurs de gestion durable des forêts. Selon une étude menée par la FAO sur la Promotion de la gestion durable des forêts et de terres boisées en 200312(*), les critères et indicateurs sont des outils servant à définir, évaluer et surveiller les progrès vers la gestion durable des forêts. Le terme « critère » désigne les éléments ou principes de base par rapport auxquels est jugée la durabilité, en tenant compte du rôle de production, de protection et social des forêts et des écosystèmes forestiers. Chaque critère est défini par des indicateurs quantitatifs et qualificatifs qui sont mesurés et surveillés régulièrement afin de déterminer les effets des interventions de la gestion ou de l'absence d'intervention. Les critères et indicateurs au niveau national peuvent servir à orienter les politiques, les règlements et la législation. En outre, désormais, la plupart des processus élaborent, expérimentent et mettent en oeuvre des critères et indicateurs au niveau de l'unité de gestion forestière. De plus en plus souvent ces activités s'adressent aux organismes publics, aux ONG et aux propriétaires forestiers, y compris le secteur privé.

En ce qui concerne les nouvelles politiques forestières formulées par le Cameroun et la République du Congo, leurs objectifs généraux s'articulent d'une part, autour de la contribution du secteur forestier au développement économique et social et, d'autre part, de la conservation, la protection et la régénération de la forêt afin d'assurer le maintien de la biodiversité et des fonctions écologiques, sociales et économiques remplies par les forêts. Les concepts tels que le domaine forestier permanent et non permanent, l'aménagement durable, la gestion participative, la conservation de la biodiversité, la certification des bois tropicaux constituent aujourd'hui la toile de fond de toutes les politiques et lois forestières de ces deux Etats. « Ces nouvelles politiques forestières sont aussi caractérisées par la mise en cause de la vision sectorielle de la gestion forestière. Il se dégage une tendance à l'intégration de la foresterie au développement rural, en général. Cette approche holistique s'est nettement imposée ces dernières années dans l'élaboration des stratégies nationales de réduction de la pauvreté»13(*)

Toutefois, certains experts estiment qu'en l'état actuel des choses, les politiques forestières élaborées dans la plupart des Etats de l'Afrique centrale paraissent désuètes, ce qui explique « la difficulté qu'éprouvent les décideurs à concevoir et à mettre en oeuvre des politiques de développement rural qui soient à la fois cohérentes c'est-à-dire propres à satisfaire les besoins humains actuels et futurs, mais aussi compatibles avec les capacités de production et de régénération des ressources forestières. En d'autres termes, l'incohérence des politiques de développement rural et les financements inconséquents qui y sont consacrés constituent les causes fondamentales de la déforestation et de la dégradation des forêts en Afrique centrale »14(*).

Ainsi, Patrice BIGOMBE LOGO15(*), pense que la réconciliation entre les politiques forestières des pays du Bassin du Congo et leurs populations est nécessaire pour assurer la protection des écosystèmes forestiers. L'objectif de cette réconciliation est de tenir compte, dés la conception de ces politiques, des mentalités, possibilités technologiques nationales, capacités institutionnelles réelles, conditions socio-économiques et politiques de chaque pays. C'est dans le même sens qu'aborde Cléto NDIKUMAGENGE16(*), lorsqu'il estime que la solution à la protection des écosystèmes forestiers du bassin du Congo réside en priorité dans l'harmonisation des politiques forestières des Etats de la sous-région.

Par contre, pour le Professeur Maurice KAMTO17(*), la protection des écosystèmes forestiers du bassin du Congo passe nécessairement par l'adoption, l'application et l'aménagement adéquat des moyens juridiques et institutionnels nationaux et internationaux existants. Le professeur Jean Didier BOUKONGOU18(*) estime pour sa part que la protection des écosystèmes forestiers du bassin du Congo ne pourra être efficace que si les pays parviennent à relever les défis de la bonne gouvernance : l'amélioration souhaitée du cadre juridique et institutionnel de l'accès à l'exploitation, de commercialisation ou de la conservation des écosystèmes dans le bassin du Congo par les différents acteurs ; la mise en route effective et transparente du processus de certification des produits de l'économie de la nature (bois, produits végétaux et autres minerais) ; la « traçabilité budgétaire » des ressources issues de la gestion des forêts.

Il faudra aussi souligner ici, les lacunes observées dans la plupart des politiques forestières élaborées par les pays du bassin du Congo. Ces lacunes sont d'ordre juridique, mais aussi pratique.

Dans le cadre juridique, on observe par exemple un vide juridique en ce qui concerne l'institution d'un plan d'aménagement forestier qui devra définir la politique forestière nationale19(*). La plupart des textes se contentent d'en affirmer le principe sans en déterminer le contenu. Seules les lois congolaises et camerounaises vont plus loin en instituant non seulement un « plan d'aménagement forestier » mais aussi en annonçant le contenu minimal des plans d'aménagement dont elles imposent l'élaboration pour chacune des forêts domaniales. Le vide juridique s'observe aussi en ce qui concerne les forêts communautaires20(*). Au Congo par exemple, les « forêts de développement communautaire » n'ont pas un statut particulier, la loi se contentant de dire qu'elles sont affectées à la subsistance des populations y résidant.

Sur le plan pratique, plusieurs législations forestières de la sous-région ne traitent que partiellement de certains aspects liés à la protection de leurs écosystèmes forestiers. Ces aspects sont restés une préoccupation secondaire des législateurs. C'est le cas en ce qui concerne la protection des forêts contre les facteurs de déboisement et de dégradation tels que les défrichements, l'exploitation des ressources minières21(*) et les feux de brousse. Sur ce dernier aspect, les codes forestiers camerounais et centrafricain constituent des exceptions car ils apportent des précisions quant à la prévention des incendies en énonçant les règles de prudence que l'on doit observer dans l'utilisation du feu, et rappelant les moyens classiques de le contenir. Le Cameroun va plus loin en édictant les sanctions pénales applicables en cas de manquement aux obligations légales en la matière.

* 9 Rapport CARPE, Les forêts du bassin du Congo: Évaluation préliminaire, 2005, p. 1.Le texte de ce document est disponible à l'adresse Internet suivante: http://carpe.umd.edu/products/PDF_Files/FOCB_APrelimAssess.pdf

* 10 Dans le but de communiquer des informations critiques aux marchés internationaux de bois tropicaux et d'augmenter la transparence dans le secteur forestier, l'initiative Global Forest Watch (GFW) du World Resources Institute (WRI) a établi un partenariat avec l'industrie, les gouvernements et la société civile afin de développer un système indépendant et volontaire de suivi des concessions (FORCOMS). Au début de 2004, la Congolaise Industrielle des Bois (CIB), une entreprise allemande, a annoncé son intention de tendre vers les standards de certification du Forest Stewardship Council (FSC), un système reconnu internationalement. Avec des financements de CARPE et de ses collaborateurs, la Wildlife Conservation Society (WCS) a travaillé avec CIB depuis plusieurs années afin d'améliorer la gestion des forêts au travers du contrôle de la chasse commerciale et du braconnage. Aussi bien CIB que WCS ont investi des ressources significatives dans une période bien définie pour atteindre la certification. Cette collaboration CIB-WCS est importante pour deux raisons. Tout d'abord, la CIB exploite une concession de 1,3 millions d'hectares qui forme une zone tampon tout autour du parc national de Nouabalé-Ndoki dans le nord de la République du Congo et assure la continuité de ce parc national avec la réserve communautaire du lac Télé au sud. Ensuite, en prenant cette décision, CIB a relevé la barre et initié de nouveaux standards pour l'exploitation forestière en Afrique centrale.

* 11 Rapport CARPE, Op. cit., p. 19.

* 12 Document FAO, 2003

* 13 FAO, Evaluation des besoins en formation dans le secteur forestier en Afrique centrale, 2003, p. 9.

* 14 KOYO (J.P.) in «  Politiques forestières des pays d'Afrique centrale : le levain de l'espoir », revue Zamba N°0001, p, 6.

* 15 BIGOMBE LOGO (P.), Le retournement de l'état forestier : l'endroit et l'envers des processus de gestion forestière au Cameroun, Presses de l'Université catholique d'Afrique centrale, Yaoundé, 2004, p.332.

* 16 NDIKUMAGENGE (C.), Bases pour la mise en cohérence des politiques forestières pour l'Afrique centrale, UICN, Yaoundé.

* 17 KAMTO (M.),  Droit de l'environnement en Afrique, op.cit., p.110.

* 18 BOUKONGOU (J. D.), « La protection du bassin du Congo, un enjeu multilatéral », Géopolitique Africaine.

* 19 Cas du Gabon, de la Guinée équatoriale et de la République centrafricaine.

* 20 Sur cet aspect, la loi camerounaise constitue une exception car, ces forêts sont prévues dans la loi : voir art 37, loi de 1994.

* 21 Dans ce sens, la loi camerounaise n'évoque que de manière très brève les carrières ou la situation des sociétés minières.

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