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La dynamique associative dans le secteur de l'artisanat à Kandi: un enjeu de développement ?


par Hugues Tayé ADJOVI
Université d'Abomey-Calavi
Traductions: Original: fr Source:

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CHAPITRE V : L'ABANDON DES ATELIERS EN PERIODE DE LABOUR.

La commune de Kandi, comme d'ailleurs toute la région septentrionale du Bénin est caractérisée sur le plan climatique par deux saisons : une saison sèche allant du mois d'octobre au mois d'avril et une saison pluvieuse allant du mois de mai au mois de septembre. Chacune de ces saisons constitue pour les paysans une période cruciale. La culture des champs, en l'occurrence, celle du coton suppose certaines préparations de la terre et tout un dispositif de mains d'oeuvre et de matières premières pouvant s'échelonner sur l'ensemble des deux périodes. A côté des traditionnelles cultures agricoles, la culture du coton constitue un réel atout pour les agriculteurs. Les revenus qui en découlent sont plus consistants. Ce qui fait que cette activité n'est plus le seul apanage des agriculteurs devenus pour la plupart cotonculteurs.

En effet, tous ceux qui disposent de terres, à défaut de les cultiver eux-mêmes, engagent de la main d'oeuvre pour les mettre en valeur. Les artisans non plus ne se font pas prier. Selon les périodes, ils sont mobilisés à faire le débroussaillage, la préparation du sol avec de l'engrais, la semence, le suivi de l'évolution des plantes, la récolte, l'acheminement du coton brut dans les usines d'égrenage, le suivi du tonnage et la vente du coton après son égrenage. Toutes ces opérations demandent du temps surtout si la surface emblavée est vaste et une réelle présence sur le terrain. Les ateliers des artisans " cotonculteurs " sont, soit temporairement, soit définitivement fermés. Les mois d'octobre à janvier pour la saison sèche et de mai à juillet pour la saison des pluies sont des mois de forte mobilisation.

Quelles sont alors les principales causes de ce départ massif des artisans de leurs ateliers ?

Section 1 : Les causes.

L'abandon des ateliers par les artisans en période de culture du coton est un phénomène cyclique d'une part, et revêtant un caractère collectif d'autre part. Deux causes principales ont été identifiées pour expliquer ce phénomène. Il s'agit en l'occurrence des causes économiques et culturelles.

1. Les causes économiques.

La fermeture temporaire ou définitive des ateliers par les artisans est en partie due à certaines causes économiques. En effet, pour beaucoup d'artisans, c'est la pauvreté caractérisant le secteur de l'artisanat qui les pousse à s'adonner à l'agriculture. Cette pauvreté se traduit par l'insuffisance de sources de financement, de débouchés, l'inconsistance des commandes, le manque de fonds de roulement et d'équipement etc. Dans la majorité des cas, les artisans n'ont pas de garanties à pourvoir auprès des institutions financières pour bénéficier de prêts. Leurs investissements sont généralement réalisés par autofinancement, par prêt familial ou avec la tontine.

Par ailleurs, ces derniers manquent de débouchés pour écouler facilement et rapidement leurs produits. Très souvent, les montants des commandes ne suffisent pas à couvrir toutes leurs charges. Ils manquent de fonds propres pour mener leurs activités ou acquérir des équipements. Tous ces facteurs expliquent la fermeture des ateliers en période de culture du coton. Comparativement à l'artisanat, la culture du coton offre beaucoup plus de ressources. Les revenus tirés de cette culture sont investis dans d'autres domaines ou secteurs. Mieux, ils aident les artisans à renforcer leurs fonds de roulement et à équiper leurs ateliers.

2. Les causes culturelles.

Le fait que les artisans s'adonnent à la culture des champs s'explique aussi par des causes culturelles.

En effet, sur les dix (10) arrondissements que compte la commune de Kandi, sept sont ruraux. Les autres arrondissements qualifiés d'urbains ne répondent pas scrupuleusement aux critères de définition d'une ville. Le volume humain qui occupe l'espace de ces arrondissements n'est pas assez dense, l'urbanisation n'est pas profonde, le niveau des échanges commerciaux est faible, les moyens de communication et les bâtiments administratifs ne sont pas bien répartis géographiquement etc. Tous ces facteurs dénotent de la faible complexité de la vie à l'intérieur de ces arrondissements. De fait, la prégnance de la culture dans les habitudes est encore très forte. Les relations que les paysans ont avec la terre sont très prononcées car la terre en tant qu'élément physique, occupe une place centrale dans leur culture. Non seulement, elle fournit les éléments nécessaires à la satisfaction des besoins des paysans, mais elle constitue également le cadre d'exercice de différentes activités religieuses, économiques, culturelles etc. pour ces derniers. Diverses cérémonies sont faites par les paysans en direction de la terre à certaines périodes de l'année pour des buts bien définis ; soit, c'est pour symboliquement rendre la terre plus fertile, soit c'est pour remercier les dieux de la terre qui ont gratifié d'une abondante récolte.

Fortement moulés dans leur culture, certains artisans ne peuvent se soustraire à ces us et coutumes. Quand vient le moment indiqué, ils quittent les villes vers les villages pour sacrifier à la tradition et cultiver la terre. Plus qu'une nécessité économique, le retour à la terre constitue un devoir culturel ; en quelque sorte un fait social.

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