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Droit de la condition des étrangers les limites du droit applicable au regroupement familial

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par Dominique Arnaud Christ DINGHAT
Université Bourgogne - Master 2 2010
  

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2- Les enfants «recueilis »

Les enfants ayant une filiation légalement établie, en vertu d'une décision d'adoption, peuvent bénéficier du regroupement familial. En revanche, les enfants simplement recueillis ne sont pas en principe, titulaires du droit au regroupement familial114.

Le regroupement familial vise non seulement les adoptés sous la forme plénière115, mais aussi les mineurs adoptés sous la forme simple116. Le regroupement familial des enfants adoptés est soumis à un régime spécifique puisque le procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est domicilié le demandeur contrôle la régularité de la décision d'adoption et son caractère définitif quand elle a été prononcée par une autorité étrangère117. En outre, lorsque le regroupement familial est sollicité pour un enfant adopté alors que son retour au foyer de ses parents biologiques est possible, la demande de regroupement familial doit être examinée au regard du respect de l'intérêt de l'enfant. Par exemple, il a été jugé que le refus du regroupement familial motivé par la possibilité d'un retour de l'enfant au foyer de son père biologique méconnaissait l'intérêt supérieur de l'intéressé car, adopté à l'âge de trois semaines et ayant depuis toujours vécu auprès de ses parents adoptifs, son retour aurait porté atteinte à son équilibre psychologique et à ses liens affectifs118. Le regroupement familial peut donc être sollicité pour les enfants adoptés. Mais les autres modes d'accueil ou de prise en charge d'un enfant, telle que la kafala119 n'ouvre pas, en principe, ce droit.

114Dans un arrêt isolé, le Conseil d'État a assimilé une décision juridictionnelle de kafala à une adoption: le regroupement familial d'une mineure marocaine bénéficiant d'une kafala avait été autorisé, mais le consul avait refusé de délivrer le visa. Considérant que l'enfant devait être regardée comme ayant fait l'objet d'une adoption, le Conseil d'État a estimé que l'autorité consulaire n'était pas fondée à s'opposer à la délivrance du visa (CE, 8 juin 2005, req. N° 221774, Mohamed A.).

115Adoption provoquant une rupture de tout lien juridique entre la famille d'origine et l'enfant adopté et assimilant ce dernier à un enfant légitime dans la famille légitime. Cf. Art. 343 s. du Code civil

116Adoption laissant subsister des liens juridiques entre l'enfant et sa famille d'origine, tout en créant des liens de filiation entre l'adoptant et l'adopté. Cf. Art. 360 s. du Code civil.

117cf. Articles L.411-4 et L. 314-11 du CESEDA

118CAA Paris, 5 décembre 2000, req. n°98PA02437, Epoux Neggaoui, Rec Lebon,T., pp. 1037-1038. 119A l'instar de l'adoption (plénière ou simple), il existe deux types de Kafala

-La kafala notariale ou adoulaire établie devant notaire, qui correspond le plus souvent à une adoption intrafamiliale, les

parents de l'enfant étant connus et déléguant leurs droits et obligations à un membre de la famille ;

-La kafala judiciaire, ordonnée par un juge lorsque l'enfant a été déclaré abandonné, qui permet à un enfant qui en est

dépourvu d'avoir une famille dans laquelle s'épanouir.

Quelque soit sa forme, la kafala se définit habituellement comme un engagement à titre volontaire de prendre en charge les besoins, l'éducation et la protection d'un enfant mineur « de la même manière qu'un père le ferait pour son fils ». Aucun nouveau lien de filiation ne se crée, la filiation avec la famille d'origine, ou l'absence de filiation, devant rester gravée sur les registres, d'état civil. En revanche, la kafala entraine l'exercice de l'autorité parentale par le « kafil » ou le parent recueillant et une obligation de prise en charge et d'entretien de l'enfant qui cesse à sa majorité.

Par ailleurs, la kafala est un concept juridique particulier aux pays musulmans, qui s'appuie entièrement sur une

En 1987, le tribunal administratif de Limoges a considéré qu'un enfant confié à un étranger séjournant régulièrement en France pouvait être admis aux fins du regroupement familial. Il a estimé que la prise en charge par des époux marocains d'une jeune fille aux termes d'une décision de justice étrangère qualifiée « d'acte de remise d'enfant » attestait l'existence d'un lien juridique leur octroyant « une véritable autorité parentale dont le plein exercice [supposait] la normalité d'une vie familiale commune » et impliquait donc que la jeune fille pût entrer en France au titre du regroupement familial120.

Cette interprétation n'a pas été reprise par le législateur français. Le regroupement familial est réservé aux enfants du demandeur ou de son conjoint à l'égard desquels la filiation est établie. Or, si la kafala opère un transfère d'autorité parentale, elle ne modifie nullement le lien de filiation existant entre l'enfant et ses parents biologiques121. Le parent à qui il est confié ne peut donc se prévaloir d'un lien de filiation avec l'enfant sur le fondement duquel il pourrait revendiquer le droit au regroupement familial. Il en va de même en cas de délégation de l'autorité parentale122.

La jurisprudence du tribunal Limougeaud n'est plus d'actualité, mais elle n'est pas anachronique puisque dans le cadre de l'Accord franco-algérien, ce droit est reconnu. Par application de cet accord, l'enfant juridiquement à charge en vertu d'une décision judiciaire algérienne peut rejoindre les parents à qui il a été confié123. Dès lors, un préfet ne peut refuser la demande de regroupement familial à un algérien résidant régulièrement en France présentée pour sa nièce dont la garde lui a été confiée par un jugement d'un tribunal algérien124. A l'exception des enfants algériens, les enfants recueillis, ceux qui sont seulement à la charge d'un membre établi en France ou ceux qui font l'objet d'une délégation de l'autorité parentale ne sont pas titulaires du droit au regroupement familial.

interprétation de certains articles du Coran sur la question de la filiation. Elle est reconnue par la Convention des Nations unies du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant , mais pas par la Convention de la Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, dont le champ recouvre toutes les formes d'adoption créant un lien de filiation. La kafala est donc exclue de son champ.

120TA Limoges, 17 décembre 1987, Mme Khatouff.

121Cass. Civ. 1Ere, 10 octobre 2006, bull. Civ. I, n°431 et 432, pp. 370-372 ; D. 2007, jurisp. ,pp. 816-821, note H. FULCHIRON.

122CE, 18 octobre 1996, req. n°153669, Oustou, D. 1998, somm. comm., p.17, comm. F. Julien-Laferrière.

La délégation de l'autorité parentale peut être totale ou partielle, mais jamais définitive. A tout moment, les parents peuvent recouvrer leurs droits vis-à-vis de leurs enfants. On distingue deux types de délégation d'autorité parentale qui sont : la délégation volontaire et la délégation forcée.

123Cf. le titre II du protocole annexé à l'Accord franco-algérien du 27 décembre 1968 prévoit que le regroupement familial peut être sollicité pour les enfants mineurs d'un ressortissant algérien ainsi que pour les enfants de moins de dix-huit ans dont il a juridiquement la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne. « Les membres de la famille s'entendent du conjoint du ressortissant algérien de ses enfants mineurs ainsi que des enfants de moins de dix huit ans, dont il a juridiquement la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne dans l'intérêt supérieur de l'enfant. »

124TA Limoges, 24 juin 1993, Merouani, JCP G 1994, IV, 744, pp. 97-98.

Toutefois, dans des circonstances particulières, le respect de la vie familiale est susceptible de fonder l'admission de l'enfant sur le territoire français. Sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, il appartient aux autorités préfectorales de s'assurer qu'une décision refusant le bénéfice du regroupement familial sollicité pour un enfant n'appartenant pas à l'une des catégories visées par les dispositions légales, ne porte pas une atteinte excessive aux droits des intéressés au respect de leur vie privée et familiale et ne méconnaît pas l'intérêt supérieur de l'enfant125.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault