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Environnement psychosocial et attitudes vis-à -vis de la langue maternelle : le cas des adolescents "balengs " de la ville de Yaoundé

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par Heritt Bertran NEMBOT TATIO
Université de Yaoundé I - Maà®trise 2007
  

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PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE

CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE DE L'ÉTUDE

Il est question dans ce chapitre de poser le problème, formuler la question de recherche, présenter les objectifs et les intérêts de l'étude, délimiter l'étude et définir les concepts clés.

I.1. CONTEXTE DE L'ÉTUDE

Le Cameroun est l'un des pays africains confrontés à la réalité du multilinguisme. Avec plus de 14 millions d'habitants, il compte environ 283 langues locales. Celles-ci sont en contact avec deux langues européennes exogènes, héritées de l'époque coloniale : le français et l'anglais (Grimes, 2005). Aujourd'hui, cette richesse linguistique et culturelle semble être en danger de disparition. D'après Ngalasso (2006 : e-texte), « le phénomène de mondialisation constitue une menace pour les pays africains sur plusieurs plans. » Sur le plan linguistique, « les langues et les cultures africaines sont susceptibles d'être phagocytées par celles des pays riches, et partant, elles sont condamnées à disparaître » (Ngalasso, op.cit.).

Comme tout pays en voie de développement, le Cameroun connaît aujourd'hui une urbanisation galopante qui provoque un exode rural massif des membres de communautés ethnolinguistiques variées, originaires des milieux culturels divers vers les métropoles dans le but soit de trouver un emploi, soit de poursuivre leurs études. Partant, les écoles, loin d'être homogènes en ce qui concerne les langues maternelles des élèves, présentent des mosaïques ethnolinguistiques de plus en plus complexes. Ainsi les phénomènes de mondialisation et d'exode rural agissent en concomitance pour mettre en danger les langues locales. Ce d'autant plus que les langues dites « officielles » sont les seules langues de scolarisation. Ceci suscite ainsi un questionnement sur le devenir des langues africaines, porteuses de cultures, dans ce «  rendez-vous, des donner et des recevoir qu'est la mondialisation » (Ngalasso, op.cit.). Face à cela, les gouvernements affrontent deux injonctions contradictoires : « sauver l'extraordinaire diversité culturelle qu'a créée la diaspora de l'humanité et, en même temps, nourrir une culture planétaire commune à tous » (Morin, 1993, cité par Zouali, 2004 : 34).

Sur le plan international, l'UNESCO en vue de protéger les langues du monde, patrimoine de l'humanité, recommande aux responsables des politiques éducatives de prendre à propos des langues, de la scolarisation et des programmes scolaires, certaines  décisions et relève également qu' « il est nécessaire de veiller à ce que l'éducation assure à la fois, et d'une manière équilibrée, la capacité à employer les langues locales et un accès aux langues mondiales de communication.» (UNESCO, 2003 : 4)

La politique éducative camerounaise quant à elle, en adoptant le français et l'anglais comme langues de communication formelle et donc langues de scolarisation, recommande et encourage en même temps l'apprentissage et l'utilisation de la langue maternelle en milieu familial. Dans ces circonstances, on s'attendrait à ce que tout citoyen normal soit à mesure de parler au moins deux langues: d'abord sa langue maternelle, et par la suite au moins l'une des langues officielles qui sera pour lui l'instrument de communication dans les situations extrafamiliales et administratives. D'ailleurs, selon les linguistes, la langue maternelle est supposée être la première langue acquise par l'individu dès le bas âge. Chomsky (1965, cité par Piatelli-Palmarini 1979 : 53) souligne qu'elle est une langue qui se développe « naturellement » par l'interaction verbale, sans grande intervention de la conscience. Par contre la seconde langue fait appel à des activités conscientes et à des stratégies cognitives. De même, on s'attendrait logiquement que chacun aime et parle sa langue maternelle. Car il existe un attachement personnel ou émotionnel entre elle et l'individu. C'est ainsi qu'elle est appelée langue première (Gfeller, 2000).

Cependant, on observe qu'aujourd'hui les individus se détachent progressivement de leur langue maternelle pour s'attacher plutôt aux langues secondes. C'est ce que Lambert (1974) appelle « bilinguisme soustractif». Autrement dit, l'acquisition de la langue seconde n'est plus complémentaire à celle de la langue première, mais en relation de compétition avec celle-ci.

Ainsi, selon certaines prévisions, les langues locales connaîtront dans les décennies avenir, un sort tragique si rien n'est fait dans l'immédiat. En ce sens, une étude réalisée par Person (1980, cité par Ngamassu, 2006) prévoit l'extinction irrémédiable de l'ensemble des langues locales au Gabon, dans le sud du Cameroun et en Côte d'Ivoire pour les années 2030-2040.

Bitjaa Kody, révèle à travers une enquête quantitative menée en 2000 sur la dynamique des langues à Yaoundé, que l'usage des langues nationales est en voie de disparition jusqu'au sein des ménages endogamiques, lieux par excellence présumés de leur usage. A travers cette étude, les adultes francophones déclarent qu'en famille, ils utilisent la langue maternelle dans 52% des situations évoquées contre 42% de temps d'utilisation du français. Les jeunes de 10 à 17 ans interrogés dans les mêmes ménages, déclarent qu'ils utilisent le français à 70% dans les mêmes situations de communication familiale contre 25% de temps d'utilisation des langues familiales potentielles. D'autre part, 32% des jeunes de 10 à 17 ans interrogés dans la ville de Yaoundé ne parlent aucune langue camerounaise et ont le français comme seule et unique langue de communication.

Au vu de tout ce qui précède, on peut constater que le phénomène est important et que les langues locales seraient réellement vouées à la disparition. Ce phénomène est particulièrement remarquable chez les adolescents de la communauté baleng de la ville de Yaoundé.

En observant de près ces derniers, nous avons constaté qu'effectivement ils parlent de moins en moins leur langue. Dans la majorité des situations, le français se pose comme l'outil de communication le plus sollicité ou simplement préféré. On serait ainsi très admiré par son entourage si on a un niveau de maîtrise élevé en français ce qui n'est pas le cas avec la LM. Parmi ces adolescents, on peut observer une catégorie qui, dans toutes les situations de communication (famille, amitié, école...) n'emploie que le français même si leurs parents utilisent couramment la LM. C'est ainsi que l'on rencontre dans des foyers les enfants qui répondent toujours en français à leurs parents au cours des conversations. Pourtant, la parole leur est adressée en LM. Certains n'utilisent que rarement ou encore jamais la LM hors du cadre familial. Pour d'autres, ce serait un scandale de parler cette langue en présence d'un étranger ; ils éprouvent parfois de la honte de dire aux amis leurs origines ethnolinguistiques. Ceci est parfois un signe de modernité pour les uns ou une manière de faire la différence pour les autres. C'est pourquoi le fait de s'exprimer en LM devient parfois l'objet de railleries. D'où les expressions du genre «  ne faites pas descendre la pluie !» ou encore « ne nous parlez plus le chinois !» Ceci montre que les langues maternelles devraient être reléguées au second plan voire abandonnées.

Si certains parents réagissent parfois contre ce comportement, d'autres par contre restent indifférents. Car, pour eux, en ce qui concerne la maîtrise des langues, la priorité devrait revenir aux langues officielles qui sont un atout pour la réussite scolaire et sociale de leur progéniture. Il en ressort un problème d'évaluation en termes d'avantages et d'inconvénients liés à la maîtrise d'une langue ou de jugement sur le prestige de celle-ci.

Nombreux sont ceux qui indexent les parents comme responsables d'un tel phénomène. Certains sociolinguistes à l'instar de Hamers et Blanc (2000) ont désigné l'environnement social urbain comme un déterminant crucial du type de bilinguisme à développer. Ce milieu étant caractérisé par les contacts de plusieurs langues, il favorise par là, la perte des langues d'origine des individus. Pour Gardner (2001), l'attitude envers l'apprentissage et l'utilisation d'une langue serait déterminée par la motivation de l'individu. Il s'agit pour cet auteur, d'une motivation relative à l'utilité de la langue ou au besoin d'intégrer le groupe qui la parle.

Nous avons pensé qu'en psychologie et dans notre contexte, il serait plus pertinent de prendre en compte plusieurs facteurs pour expliquer ce phénomène qui s'impose. Ainsi à partir des faits susmentionnés, nous avons formulé quatre questions de recherche.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams