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L'intervention de l'état constitue-t-elle un fait justificatif de l'entente ?

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par François VOIRON
Paris II Panthéon Assas - Master II Droit européen des affaires 2010
  

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Introduction

Confronter un objectif de concurrence libre et non-faussée avec l'intervention étatique conduit de prime abord à identifier une contradiction de principe.

Cette apparente opposition trouve à s'exprimer principalement en ce qui concerne les aides d'État, domaine oü l'empire du droit de la concurrence dans le giron de l'État s'exerce à plein. En effet, l'État peut, par son intervention sous forme d 'aides, fausser le jeu de la concurrence existant sur un marché en accordant un avantage à une ou plusieurs entreprises par rapports à leurs concurrents. Ainsi, des dispositions spécifiques c réant des obligations à la charge des États membres existent dans le Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne et conditionnent la légalité des aides accordées par les États à l'octroi préalable d'une autorisation par la Commission Européenne.

L'opposition entre l'objectif de libre concurrence et la politique étatique trouve également à exister en matière d'interdiction des abus de position dominante, notamment pour les secteurs économiques faisant l'objet d'un monopole national, mais elle existe aussi en ce qui concerne les problématique d'ententes.

L'entente anticoncurrentielle est concue comme une action collective ayant pour objet de fausser ou d'entraver le jeu de la concurrence, formalisée dans un accord ou résultant seulement d'une pratique de concertation. Ce type de pratiques est prohibé à la fois dans l'ordre juridique communautaire et dans l'ordre juridique interne. L 'article 101§1 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne dispose ainsi que Ç Sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d 'associations d 'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l 'intérieur du marché intérieur È. Quoique rédigé différemment, l'article L.420-1 du Code de Commerce contient la méme prohibition: Ç Sont prohibées même par l 'intermédiaire direct ou indirect d 'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu 'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions È.

Les interconnexions entre l'interdiction des ententes anticoncurrentielles et l'intervention de l'État paraissent moins évidentes: elles sont pourtant importantes. Le principal problème posé par ces interconnexions concerne la justification d 'une entente anticoncurrentielle par une intervention étatique. Se pose donc la question de savoir si

l'État peut, dans l'exercice de son autorité, affranchir les entreprises du respect de leurs obligations de respect du droit de la concurrence en général, et de la prohibition des ententes en particulier.

En premier lieu, se pose le problème de l'applicabilité de la prohibition des ententes aux activités de l'État (entendu largement comme l'État et ses démembrements et l'ensemble des autorités publiques). Il n'est en effet pas possible de conclure à l'absence de relations entre l'État et le droit des ententes, seulement du fait que la section du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne contenant les normes relatives aux ententes et abus de position dominante soit intitulée ÇLes règles applicables aux entreprises È, par opposition au droit des aides d'État destiné aux organes de la puissance publique. En effet, les dispositions aussi bien nationales que communautaires prohibant les ententes s'adressent à l'entreprise définie par la jurisprudence communautaire comme une Ç entité exercant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement È1. L'activité économique consiste à offrir des biens et services sur un marché, et subsiste méme en l'absence de but lucratif.

Cette définition fonctionnelle et économique n'accorde aucune importance à la forme de l'entreprise ou à son statut juridique (il ne s'agit pas obligatoirement d'une société commerciale ou d'un commercant). Dès lors, il est possible que l'action de l'État, par le biais de différents types de démembrements, soit considérée comme une activité économique d'entreprise soumise en tant que tel au droit de la concurrence, dès lors qu'elle ne fait pas appel à des prérogatives de puissance publique. Il existe donc bel et bien des rapports entre la prohibition des ententes et l 'intervention étatique, dont la complexité résulte principalement de la place ambiguë qu'occupe le droit de la concurrence.

En effet, au sein de l'organisation juridique classique sous forme de branches, le droit de la concurrence n'est jamais concu ni comme un pur droit privé ni comme un pur droit public, mais davantage comme un droit économique empruntant des aspects à chacune des branches, publique et privée. Ce manque de clarté dans le positionnement de la matière est dü à plusieurs facteurs. Tout d'abord, le droit de la concurrence s'adresse à la fois aux entreprises et aux

États. Il gouverne donc à la fois des rapports entre personnes privées et des rapports entre personnes privées et publiques. En second lieu, le droit de la concurrence possède un double aspect de sanction et de réparation. En effet, l'objectif des sanctions

1 Cour de Justice des Communautés Européennes, 23 avril 1991, Klaus Hfner et Fritz Elser contre Macrotron GmbH, C-41/90.

2 Cour Européenne des Droits de l'Homme, 21 février 1984, Oztürk contre RFA.

L'intervention de l'État constitue-t-elle un fait justificatif de l'entente? (dont le pénal reconnu par Cour des 'Homme 2

caractère est la Européenne Droits de l , tout

comme l 'Union Européenne 3

la Cour de Justice de et la Cour de Cassation4) n'est pas de

protéger des personnes privées (concurrents, clients, consommateursÉ) mais bien de sauvegarder une forme d'intérêt général, l'ordre public économique. A l'inverse, le versant civiliste du droit de la concurrence permet à des entreprises et/ou des consommateurs de demander réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait des pratiques anticoncurrentielles de leurs concurrents ou fournisseurs.

En conséquence, le droit de la concurrence entretient des rapports complexes avec les différentes formes que peut emprunter l'intervention de l'État puisqu'il ne les gouverne pas complètement mais n 'y est pas non plus totalement étranger. La complexité de ces rapports est particulièrement topique en ce qui concerne les ententes anticoncurrentielles ou cartels.

En second lieu, un problème parallèle se pose lorsque l'État met en Ïuvre des dispositions de politique économique allant à l'encontre des règles de concurrence et de l'interdiction des ententes anticoncurrentielles.

L'entreprise soumise à une norme nationale anticoncurrentielle se retrouve dans une position extrêmement délicate puisqu'elle doit appliquer ladite norme mais reste soumis e à la prohibition des ententes. Dès lors, quelque soit son attitude, elle se trouvera en infraction vis-à-vis de l'une des deux normes.

De plus, la qualification du comportement anticoncurrentiel d'entente nécessite un élément intentionnel caractérisé par un concours de volontés entre entreprises indépendantes (par le biais d'un accord, d'une décision expresse ou taciteÉ). Est-il toujours possible de qualifier un tel comportement si l'entreprise est contrainte de l'adopter du fait d'une norme nationale ? L'autonomie de l 'entreprise dans la décision d'enfreindre le droit de la concurrence n'est-elle alors tout simplement annihilée? Cette circonstance particulière oblige à ce que ce type de situations soit pris en compte de facon spécifique par les législations et les autorités de concurrence.

La question de savoir si l'intervention de l'État constitue un fait justificatif de l'entente soulève donc deux types de problématiques.

2 Cour Européenne des Droits de l'Homme, 21 février 1984, Oztürk contre RFA.

3 Cour de Justice des Communautés Européennes, 17 décembre 1998, Baustahhlgewebe GmbH contre Commission, C-185/95.

4 Cour de Cassation, Chambre Commerciale, 5 octobre 1999, SNC Campenon Bernard et autres.

Tout d'abord, l'État est-il soumis, dans l'exercice de ses différentes activités, au respect de la prohibition des ententes anticoncurrentielles? L'État est-il destinataire des normes de droit de la concurrence dans le cadre de ses activités?

D'autre part, l'intervention de l'État à l'encontre de la libre concurrence fait-elle échapper les comportements des entreprises à la prohibition des ententes anticoncurrentielles ? Existe-t-il une forme d'exemption tirée de l'action étatique ?

Afin de répondre à ces interrogations, ii convient de déterminer de quelle manière l'interdiction des ententes constitue une contrainte de l'action étatique (Partie I) avant d'analyser la facon dont l'intervention étatique peut constituer un fait justificatif d'une entente anticoncurrentielle pour les entreprises, à la fois en droit interne et en droit communautaire (Partie II).

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams