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L'intervention de l'état constitue-t-elle un fait justificatif de l'entente ?

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par François VOIRON
Paris II Panthéon Assas - Master II Droit européen des affaires 2010
  

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Partie I : L'applicabilité de la prohibition des ententes à l'État

La première question à se poser pour déterminer si l'intervention de l'État constitue un fait justificatif de l'entente est celle de savoir si le fait que l'État intervienne dans un domaine contredit l'application normale de la prohibition des ententes.

Pour y répondre, il est indispensable de s'interroger sur les modalités de détermination du champ d'application de la prohibition des ententes et donc plus largement du droit de la concurrence, à la fois d'un point de vue communautaire (Section 1) et d'un point de vue national (Section 2), pour déterminer si l'État peut être un sujet de droit de la concurrence.

De plus, il convient de déterminer si l'État, même lorsque ses activités échappent à l'interdiction des ententes, n'est pas tenu d'une obligation générale de respect du droit de la concurrence communautaire en vertu de son obligation de coopération loyale vis -à-vis de l'Union Européenne (Section 3).

Enfin, il semble nécessaire de vérifier si les conditions spécifiques applicables aux services d'intérêt économique général permettent de faire échapper à la stricte application du droit de la concurrence certaines activités particuliéres identifiées par l'État (Section 4).

Section 1 : La notion d'entreprise en droit communautaire

L'applicabilité de l'article 101§1 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne est conditionnée à l'existence d'une entreprise. Néanmoins, la notion d'entreprise revêt une acceptation autonome en droit communautaire, détachée des conceptions nationales5 pouvant exister en droit des sociétés ou en droit fiscal. La Cour de Justice de l'Union Européenne estime en effet qu'une entreprise est une « organisation unitaire d'éléments personnels, ma tériels et immatériels rattachée à un sujet juridiquement autonome et poursuivant de façon durable un but économique déterminé »6.

Cette définition particuliére de l'entreprise ne s'attache donc pas aux critéres liés à la structure de l'entité mais bien à l'existence d'un but ou d'une activité économique

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Cour de Justice des Communautés Européennes, 30 janvier 1985, BNIC contre Clair, 123/83.

6 Cour de Justice des Communautés Européennes, 13 juillet 1962, Mannesmann AG contre Haute Autorité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, 19/61.

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exercée au sein de l'entité en cause , et possède en cela un caractère fonctionnel. Du fait de ce caractère fonctionnel, les activités de l'État et de ses démembrements ne sont pas par principe exonérées du respect du droit de la concurrence.

L'existence d'une entreprise est subordonnée à l'exercice d'une activité économique. Cette notion a été définie par la jurisprudence communautaire comme une << activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné >>8. Le caractère général de cette définition a obligé les juges de Luxembourg à préciser les contours de la notion et à en définir les modalités d'appréciation (§1) ainsi qu'à exclure certains types d'activités liés à l'intervention de l'État du champ d'action du droit de la concurrence ( §2).

§1 : L'appréciation fonctionnelle de l'existence d'une activité
économique

En raison de son caractère fonctionnel, la notion d 'activité économique ne tient pas

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compte de l 'existence d'une personnalité juridiqueet s'applique aussi bien aux personnes

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morales qu 'aux personnes physiques . De plus, le statut de droit public d'une entité ne

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permet pas en tant que tel d e lui faire échapper au droit de la concurrence . Il n'existe donc pas d'exemption automatique dès lors qu'une entité est liée à l'État.

Le premier problème d'application concerne l'activité à prendre en compte pour identifier une activité économique. S'agit-il de l'activité <<aval >> ou de l'activité << amont>> ? Le problème des activités d'achat est l'illustration parfaite de cette problématique : une entité n'exercant pas une activité économique en aval est-elle soumise au droit de la concurrence lorsqu'elle effectue des achats sur un marché concurrentiel oü s'exerce une activité économique ?

7 Cour de Justice des Communautés Européennes, 23 avril 1991, Klaus Hfner et Fritz Elser contre Macrotron GmbH, C-41/90: << la notion d'entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statutjuridique de cette entité et de son mode de financement >>.

8 Cour de Justice des Communautés Européennes, 16 juin 1987, Commission contre Italie, 118/85 (de manière implicite) puis Cour de Justice des Communautés Européennes, 18 juin 1998, Commission contre Italie, C-35/96.

9 Cour de Justice des Communautés Européennes, 28 juin 2005, Dansk Rrindustri A/S et autres, C-189/02, C-202/02, C-205/02 à C-208/02 et C-213/02.

10 Cour de Justice des Communautés Européennes, 12 septembre 2000, Pavel Pavlov et autres contre Stichting Pensioenfonds Medische Specialisten, C-180/98.

11 Cour de Justice des Communautés Européennes, 16 juin 1987, Commission contre Italie, 118/85.

Le Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes est venu répondre à cette question, à propos d'organismes chargés de la gestion du système de santé espagnol, en indiquant que l 'applicabilité du droit de la concurrence aux achats était subordonnée à

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l'exercice d 'une activité économique en aval par l 'entité acheteuse . Par la suite, le Tribunal a affirmé le caractère général de cette jurisprudence (au-delà des organismes sanitaires ou sociaux) en précisant qu'il n'était pas possible de déduire de la nature économique de l'activité d'achat la nature de l'activité << aval >> en indiquant à l 'inverse que << le caractère économique ou non de l 'utilisation ultérieure du produit détermine nécessairement le caractère de l 'activité d'achat >>13. La Cour a confirmé cette analyse suite au recours effectué dans cette même affaire14. Il appartient donc de vérifier le caractère économique de l'activité << aval >> pour décider de soumettre ou non l'activité <<amont>> au droit de la concurrence.

Pour déterminer ensuite si l'activité <<aval >> d'achat de l'entreprise constitue une activité économique, il est nécessaire d'effectuer une analyse multicritères et adaptative selon les particularités de chaque cas d'espèce.

Tout d'abord, il convient de s'attacher à la présence ou l'absence de but lucratif pour l'entité en question. Ce critère n'est pas déterminant en lui-même : l'absence de but lucratif ne permet pas de préjuger de l'absence d'activité économique. L'absence de recherche de profits peut néanmoins constituer un indice sur la nature de l'activité en cause. Ainsi, une association effectuant une activité non-lucrative peut tout de même être soumise au droit de la concurrence si son activité entre en concurrence avec l'activité exercée par des organismes lucratifs15. En conséquence, l'absence de but lucratif est un critère

pertinent

mais non suffisant pour écarter l'existence d'une activité économique.

Pour identifier une activité économique, la jurisprudence analyse également la nature de cette activité. Pour ce faire, elle utilise le critère de l'exercice de la même activité

12 Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, 4 mars 2003, Federación Nacional de Empresas de Instrumentación Cient'fica, Médica Técnica y Dental (FENIN) contre Commission, T-319/99.

13 Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, 12 décembre 2006, Selex Sistemi Integrati SpA contre Commission, T-155/04.

14 Cour de Justice des Communautés Européennes, 26 mars 2009, Selex Sistemi Integrati SpA contre Commission, C-113/07.

15 Cour de Justice des Communautés Européennes, 1er juillet 2008, Motosykletistiki Omospondia Ellados NPID (MOTOE) contre Elliniko Dimosio, C-49/07.

par une entité privée. Il s'agit alors de vérifier si l'activité exercée par une entité pourrait être exercée de la même manière par un opérateur privé. Si tel est le cas, l'existence d'un marché de biens ou de services est donc démontrée, ce qui permet de caractériser une activité économique. Ainsi, la Cour a jugé que l'activité de placement de main d'Ïuvre pouvait être exercée par des entités privées et donc qu'elle constituait une activité

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économique, même si elle était en l'occurrence exercée par une personne publique . Il en fut de même pour l'organisation de compétitions sportives par une association sans but lucratif17, mais à l'inverse pas de l 'élaboration de normes techniques par un organisme de contrôle18.

Ce critère n'est cependant pas utilisé de facon autonome, faute de quoi il conduirait à faire une application trop extensive du droit de la concurrence, notamment pour des activités étatiques (maintien de l'ordre ou éducation).

Il est donc combiné avec d'autres critères permettant de circonscrire utilement la notion d'activité économique et de limiter le champ d'application de l'interdiction des ententes.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery