WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La licéité de l'emploi de la force par une organisation internationale: cas de l'OTAN en Libye en 2011

( Télécharger le fichier original )
par James MUHINDO BUNDUKI
Université catholique du Graben - Licence 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

SECTION II. LES EXCEPTIONS AU PRINCIPE DE NON INTERVENTION

Comme on a pu remarquer tout au long de notre travail, la règle de l'intervention du recours à la force (l'art 2§4 de la charte des Nations Unies) exclut toute intervention armée. Néanmoins, cela ne veut pas dire que tout recours à la force armée soit interdit dans les relations internationales.

95 C.I.J, Fond, 9 avril 1949, affaire du détroit de carfou, Rec.1949, P.4

96 C.I.J, A.C., 27 juin 1986, affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Rec.1986, P.14

97 C.I.J.A.C, 20 juillet 1962, affaire relative à certaines dépenses des Nations Unies, Rec. 1962, p.151

Certes, le principe général est l'interdiction du recours à la force, mais on peut envisager des situations où l'emploi de la force sera exceptionnellement considérée comme licite.

On peut citer les opérations de maintien de la paix et sécurité internationales ordonnées par le Conseil de sécurité des Nations Unies (I), du consentement de l'Etat (II), de la légitime défense individuelle ou collective (III), dans le cas d'une intervention strictement humanitaire et non discriminatoire (IV).

§ 1. Les opérations fondées sur les résolutions du CSNU

L'ONU utilise le chapitre VII en cas de risque de conflit armé (A) et lors des violations des droits humains considérées comme menace contre la paix (B).

A. Les risques de conflit armé (CAI/CANI)

Malgré le principe de l'article 2, paragraphe 7, consacrant la non-intervention par l'ONU dans les affaires intérieures d'un Etat, le Conseil de sécurité n'hésite plus à s'immiscer dans les affaires intérieures des Etats, compliquant singulièrement l'action de l'ONU. Le summum de la complexité d'un conflit interne, est bel et bien l'ex-Yougoslavie, où une série des conflits enchevêtrés ont fini par avoir une double dimension : conflits armés non internationaux (CANI) et conflit armé interétatique (CAI), au sens des conventions de Genève de 1949 et les protocoles additionnels de 1977. Il reste que la motivation des interventions de l'ONU, en cas de menace contre la paix à l'intérieur d'un Etat, peut être la violation des droits de l'homme, la violation grave du droit humanitaire ou la violation de la démocratie.

Le maintien de la paix interne a amené les Nations Unies à intervenir, à titre humanitaire, dans des contextes différents tels que la Somalie, le Rwanda, l'ex-Yougoslavie, où des violations graves du droit humanitaire s'étaient produites.

B. Les violations des droits humains comme menace contre la paix Le Conseil de sécurité peut par ailleurs qualifier des violations

massives des droits de la personne de « menace contre la paix et la sécuritéinternationales », et autoriser alors une intervention armée (article 42 de la

charte des Nations Unies). Il l'a fait à plusieurs reprises. La plupart des opérations présentées comme des réalisations du a droit d'ingérence humanitaire )) ne sont donc, si on y regarde de plus près, que des applications de mécanismes juridiques existants. Il est donc totalement erroné de prétendre que le Droit international traditionnel est incompatible avec une protection efficace des droits de la personne. En réalité, le problème est le plus souvent moins juridique que politique, dans la mesure où ce ne sont pas de nouvelles règles juridiques qui permettront d'améliorer la situation, mais une meilleure utilisation des règles existantes.

Les droits de l'homme font l'objet d'une internationalisation progressive. Le conseil de sécurité a reconnu qu'une violation massive des droits de l'homme pouvait désormais fonder sa compétence sur la base de chapitre 7. Dans la résolution 688 (199), le Conseil de sécurité a admis que : a La répression des populations civiles Irakiennes dans de nombreux parties de l'Irak, a conduit à un flux massif des réfugiés vers les frontières internationales et à travers celles-ci des violations de frontière qui menacent la paix et la sécurité internationale dans la région )).

Autrement dit, le caractère massif de violation des droits de l'homme crée le crime contre l'humanité. Dès lors, la violation des droits de l'homme devient un acte de portée internationale.

Le comportement d'un Etat envers une partie de sa population n'est plus une affaire intérieure, bien que la résolution 688 se réfère à l'article 2, alinéa 7 de la Charte : a Aucune disposition de la présente charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un Etat ni n'oblige les membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente charte ; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au chapitre VII )).

Les multiples violations des droits de l'homme et des peuples dans l'exYougoslavie ont conduit aussi le Conseil de sécurité à les condamner. Dans la résolution 770 (1992), il exhorte les Etats membres à intervenir pour faciliter l'acheminement des secours aux victimes du conflit en Bosnie-

Herzégovine et exige l'accès des organisations humanitaires aux camps d'internement créées dans la région.

Lors du drame de Kosovo, il a visé dans la résolution 1199 (1998), « les informations faisant état de la multiplication des violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, et (...) la nécessité de veiller à ce que soient respectés les droits de tous les habitants du Kosovo ».

Partant de ce principe, le Conseil de Sécurité en a consacré un autre : celui « d'accès aux victimes dans le respect de la neutralité et de l'impartialité ». Dès lors, les Nations Unies autorisent les Etats à intervenir auprès des victimes, en utilisant leurs forces armées si besoins est, pour leur fournir une assistance directe, protéger les populations civiles ou rétablir un minimum de sécurité pour qu'elles retrouvent des conditions de vie normales. Malgré la consécration textuelle d'un droit d'intervention dans un but humanitaire, le Conseil de sécurité n'a pas utilisé ses pouvoirs coercitifs dans le Kurdistan irakien car l'ONU avait conclu un mémorandum d'accord avec l'Irak le 18 avril 1991, pour obtenir son consentement. Dans l'affaire du Kosovo, en revanche, l'OTAN est le seul maître à bord au détriment de l'ONU, quitte à invoquer subtilement le principe d'accès aux victimes lors des crises caractérisées par des violations graves du droit humanitaire.

Les mécanismes de sécurité collective, institués par la charte des Nations Unies, constituent l'exception la plus remarquable du principe d'interdiction du recours à la force.

Aux termes de l'article 42 de la charte des Nations Unies, « le Conseil de sécurité a la faculté de Droit d'entreprendre, au moyen des forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge nécessaire au maintien ou rétablissement de la paix et de la sécurité internationales »98. On remarque que la charte laisse au Conseil de sécurité un large choix en ce qui concerne l'appréciation de l'opportunité et la mise en oeuvre d'actions armées. Le Conseil de sécurité dispose d'un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne

98 Article 42 (chapitre VI) de la charte des Nations-Unies, documents d'études, N°3.02, La documentation française, Paris, 2001, p.7

l'appréciation de l'existence ou non d'une menace à la paix et la sécurité internationales.

Si, selon l'appréciation du Conseil de sécurité, il existe une menace à la paix et la sécurité internationales, l'Etat touché par l'action armée ne pourra pas évoquer le principe de non-intervention prévu par l'article 2§4 de la charte.

L'action armée décidée par le Conseil de sécurité sera alors justifiée par l'article 42, méme si elle concerne des affaires relevant du domaine réservé d'un Etat membre. Ainsi, de simples troubles internes ou une guerre civile, dans lesquels n'interviendrait aucune violation du droit international, pourraient donner l'occasion au Conseil de sécurité d'engager une action militaire, à condition qu'il qualifie la situation de menace à la paix ou à la sécurité internationales. Peu importe alors si la situation concerne des affaires qui relèvent du domaine réservé d'un Etat membre, du moment où le conseil dispose de la faculté de la qualifier ou non de menace contre la paix.

C'est ainsi, que le Conseil, dans le cadre de la crise Libyenne, qualifie la situation en cause de menace à la paix et à la sécurité internationales et prend des mesures coercitives, même si le domaine visé relève des affaires internes libyennes. Ainsi, le Conseil de sécurité, en l'espèce, base sa compétence sur les risques de rupture de la paix.

De facto, le Conseil de sécurité, d'un outil de conciliation et de maintien de la paix, devient un instrument de guerre. La déclaration commune Sarkozi, Obama, Cameron de 15 avril 2011 est significative : « il ne s'agit pas d'évincer Kadhafi par la force », mais « tant que Kadhafi sera au pouvoir, l'OTAN... doit maintenir ses opérations ».

Le recours à la force armée et aux bombardements intensifs sur les villes et voies de communication n'ont qu'une seule finalité : assister le CNT de Benghazi et liquider le régime de Kadhafi, avec la promesse d'une contre partie pétrolière à l'issue du Conflit99.

99 C'est ainsi que dans les villes de Tripoli, Syrte et Shebba aucune opposition ouverte ne s'est manifestée entraînant une forte répression des civils : ces villes ont néanmoins été intensément bombardées.

La liberté d'action du Conseil en matière de sécurité collective est donc presque sans limite. Seule la théorie de l'abus de droit ou de l'application arbitraire et contraire à l'esprit de la charte pourrait limiter le Conseil dans son action. Mais pour le moment, il existe aucun précédent même si le Conseil a été fortement critiqué pour la manière dont les résolutions concerna la Libye ont été conçues.

On peut souligner tout d'abord que ces résolutions sont d'une nature contradictoire. Elles font référence à la souveraineté et à la non ingérence tant en « autorisant » les Etas membres des Nations Unies à prendre le toutes mesures nécessaires » pour la protection des civils, « tout en excluant le déploiement d'une force d'occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n'importe quelle partie du territoire libyen », étant entendu que les seuls vols autorisés au-dessus du territoire sont d'ordre humanitaire ; alors les avions de l'OTAN sont-elles aussi humanitaire.

En second lieu, ces résolutions disant tout et leur contraire (les Nations Unies jamais mis en place le comité d'état major et la police internationale prévus par la charte, créent les conditions d'une intervention de l'OTAN dont les déclarations officielles et les objectifs évoluent très vite de la dimension « protectrice » à la dimension destructrice du régime de Tripoli.

Ce pouvoir presque sans limite du Conseil pourrait être considéré comme un véritable droit d'ingérence. On pourrait encore qualifier le mécanisme de la sécurité collective comme un devoir d'ingérence, dans la mesure où le Conseil a la responsabilité selon l'art 24100 de la charte, du maintien de la paix.

Plus concrètement, on peut rappeler que les droits de la personne ne relèvent plus du domaine réservé des Etats et que, si le Conseil de sécurité le juge opportun, il peut décider que leur violation massive constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales.

On appréhende alors que les mécanismes de sécurité collective sont strictement réglementés par la charte des Nations Unies et instituent le seul Conseil de sécurité en titulaire d'un droit d'ingérence.

100 L'art 24 prévoit que : « ...les membres confèrent au conseil la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales et reconnaissent en s'acquittant des devoirs que lui impose cette responsabilité le conseil de sécurité agit à leur nom.

Le droit d'ingérence, on pourrait dire, existe seulement au profit d'un organisme unilatéral et non au profit des Etats agissant individuellement. En donnant le droit d'intervenir exclusivement au Conseil, la charte exclut les Etats d'une action individuelle. C'est ainsi que la défense des valeurs universelles telles les droits fondamentaux de la personne reste réservée à une organisation à vocation universelle qui est l'ONU.

Il faut en outre rappeler que les auteurs fondateurs de la doctrine du droit de l'ingérence humanitaire n'envisageaient qu'une intervention armée collective. Par ailleurs, d'autres auteurs considéraient que la défense des droits aussi importants que les droits de la personne ne pourrait pas être effectuée que par une collectivité d'Etats.

La charte des Nations Unies offre une solution adéquate à des violations graves des droits de la personne réalisées à l'intérieur d'un Etat en permettant au Conseil de sécurité d'intervenir et d'y mettre fin. Cependant, on a souvent mis en cause la passivité du Conseil de sécurité malgré le grand nombre de moyens techniques dont il dispose.

En pratique, cette disproportion entre les moyens techniques existants et l'absence de leur utilisation par le Conseil, existera quelle que soit la méthode de sécurité collective envisagée. En plus, on a déjà montré que les précédents où les Etats se sont unilatéralement réclamés d'intérêts humanitaires correspondaient rarement à une nécessité d'intervenir militairement pour défendre les droits de la personne.

En effet, l'article 43 de la charte, qui prévoit que les Etats membres s'engagent à la disposition du Conseil des forces armées, n'a jamais été appliqué. Aucune réelle force des Nations Unies n'a pu être mise sur pied pour mener des actions militaires. Jusqu'à maintenant, chaque fois que le conseil décide d'intervenir militairement, il procède à une sorte de délégation de l'exercice de son droit, en autorisant ses membres d'agir à son nom.

C'est ainsi, que le Conseil de sécurité par sa résolution 1973 du 17 mars 2011, autorisait les Etats membres « à prendre toutes mesures nécessaires, pour protéger les populations et zones civiles menacées d'attaque

en Jamahiriya arabe libyenne (...) »101. En l'espèce, le Conseil de sécurité a décidé d'utiliser la force et a recouru à la technique de la délégation de l'exercice de son droit.

Il convient de préciser que cette technique ne consiste pas en une délégation du droit d'agir militairement lui-même. Seul le Conseil peut prendre une décision et l'action des Etats membres est strictement limitée aux termes de celle-ci. Dans le cadre des opérations menées en vertu des résolutions, la responsabilité propre des Etats membres peut être engagée. Les Etats membres ne sont pas libres d'agir selon leurs intéréts, mais ils ont l'obligation de mettre à la disposition du Conseil les moyens nécessaires pour réaliser ses objectifs prévus par la charte. Le pouvoir discrétionnaire de mener des mesures militaires n'appartient donc qu'au Conseil de sécurité.

Par ailleurs, d'autres interventions peuvent avoir lieu avec le consentement de l'Etat victime.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams