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Construction des infrastructures sociales pour les Bakola/ Bagyelli et incidence sur la coexistence avec les Bantou: contribution à  une ethno- anthropologie du conflit

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par Bernard Aristide BITOUGA
Université de Yaoundé I Cameroun - Master en anthropologie 2011
  

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IV-2-2-L'occupation des terres appartenant aux Bantou comme cause des conflits

Les dynamiques à l'intérieur des sociétés qui conduisent celles-ci vers une certaine évolution marquée par la domination de certains groupes sur d'autres ; allant du simple exercice du pouvoir à l'appropriation du pouvoir. Cette situation a comme conséquence la confiscation du territoire par ceux qui exercent le pouvoir et qui conduit ces derniers à protéger cet espace et à refuser tout partage de celui-ci avec d'autres groupes partageant le même espace territorial. Un responsable de l'ONG dénommée GRAD-PRP basée à Lolodorf nous a répondu parlant du problème foncier à Ngoyang en ces termes :

La question foncière est un problème très sérieux entre les Bantou et les Pygmées. Les Ewondo sont allés jusqu'à dire que comme les ONG soutiennent les Pygmées dans tout ce qu'ils font, les ONG doivent leur donner de l'argent pour leur terrain sur lequel est construit le foyer. La raison évoquée par ceux-ci vient du fait qu'ils disent que ce sont eux qui ont donné les terres aux Pygmées pour que ceux-ci puissent s'y installer. Les Bantou affirment avoir été abusés parce que, disent-ils : « Nous croyions que les Pygmées étaient juste là pour quelques temps et qu'après ils devaient retourner en foret». C'est la raison pour laquelle ils ont demandé au SAILD de les payer pour leurs terres qu'ils avaient cédées aux Pygmées57.

Telle semble être la dure réalité à laquelle sont confrontés les Bakola/Bagyelli. Que l'on soit à Bidjouka ou à Ngoyang, la réalité est la même sur le terrain. Les Pygmées se plaignent d'être victimes de marginalisation au niveau de l'accès à la terre pour pouvoir exercer des activités qui sont de divers ordres : agricole, d'exploitation forestière, de mise en valeur, d'occupation domestique, etc. Un Pygmée interrogé à Ngoyang au sujet de l'accès à la terre nous a répondu en ces termes : « Les Ewondo disent que tout ça ce sont leurs terres. Ils disent que nous les Pygmées nous devons quitter d'ici et que le terrain leur revient ». La protection des terres par les Bantou est l'un des enjeux majeurs des nombreux conflits ayant jonché les rapports de cohabitation entre ces communautés territorialement voisines. De prime abord, on peut être amené à penser que les Pygmées n'ont pas le droit de posséder les terres. Ce qui est faux ; au regard de la Déclaration universelle des droits des peuples autochtones58 qui dit en sa partie six(6), en ses articles 25 et 26 que :

57 MIMBOH Paul-Félix/ Responsable GRAD-PRP, entretien réalisé le 05/01/2010 à Lolodorf

58 Déclaration universelle des droits des peuples autochtones ; voir en Annexe

Article 25

Les peuples autochtones ont le droit de conserver et de renforcer les liens particuliers, spirituels et matériels , qui les unissent à leurs terres, à leurs territoires, à leurs eaux fluviales et côtières, et aux autres ressources qui constituent leur patrimoine, ou qu'ils occupent ou exploitent, traditionnellement, et d'assumer leurs responsabilités en la matière à l'égard des générations futures.

Article 26

Les peuples autochtones ont le droit de posséder, de mettre en valeur, de gérer et d'utiliser leurs terres et territoires, c'est-à-dire l'ensemble de leur environnement comprenant les terres, l'air, les eaux, fluviales et côtières, la banquise, la flore, la faune et autres ressources qu'ils possèdent ou qu'ils occupent ou exploitent traditionnellement.

Mais il faut dire que la vérité est tout autre sur le terrain au regard des menaces et du refus de l'accès aux terres dont les Bakola sont l'objet de la part des Bantou. On pourrait donner raison à MENARD qui dit à propos :

L' " aversion », le " sentiment d'être des étrangers et des ennemis l'un pour l'autre », apparaissent comme la " forme latente » d'une forme plus générale de socialisation conflictuelle : Sans cette aversion, la vie [...], qui met chacun de nous quotidiennement en contact avec d'innombrables autres individus, n'aurait aucune forme pensable59.

Pour résoudre ce problème de l'accès aux terres par les Bakola, il va falloir que l'Etat puisse prendre à bras le corps la défense des intérêts des Pygmées qui méritent en tout de point de vue de vivre où bon leur semble. Il faut ici dire que la Constitution du Cameroun qui fut adoptée par la loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 02 juin 1972. La Constitution du 18 janvier 1996 est l'une des rares, sinon la seule de l'Afrique subsaharienne à faire usage du mot « autochtone ». Elle dispose à cet effet dans son préambule que : « l'Etat assure la protection des minorités et préserve les droits des populations autochtones conformément à la loi ». Cette disposition de la loi fondamentale Camerounaise est renforcée par sa tradition orale reconnaissant à certaines communautés des droits immémoriaux sur certaines terres. La Constitution reconnaît en outre l'égalité de tous les Camerounais en droits et en devoirs et dispose que « l'Etat assure à tous les citoyens les conditions nécessaires à leur développement ». Et selon la lettre de l'article 2 de cette constitution, la République du Cameroun « reconnaît et protège les valeurs traditionnelles conformes aux principes démocratiques, aux droits de l'homme et à la loi ». Cela dit, il n'y a

59 O, MENARD ; Le conflit, op.cit

aucune loi de ce pays qui n'explicite pas ces dispositions constitutionnelles. Toutefois, on note sur le terrain que ces dispositions de la loi ne sont pas appliquées et ceci au grand dam des Pygmées qui sont victimes des abus de pouvoir des Bantou. On peut dire avec Crozier que :

Le phénomène du pouvoir est simple et universel, mais le concept de pouvoir est fuyant et multiforme...quel que soit en effet son « type », c'est-à-dire ses sources, sa légitimation, ses objectifs ou ses méthodes d'exercice, le pouvoir-au niveau le plus général-implique toujours la possibilité pour certains ou groupes d'agir sur d'autres individus ou groupes60.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille