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La preuve du contrat électronique

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par Florent SUXE
Université Jean Monnet Paris XI - Master 2 droit des contrats 2012
  

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Section 2 La procédure de contestation de la preuve littérale
électronique

L'article 1324 du Code civil oblige celui qui veut contester une preuve littérale à désavouer son écriture ou sa signature. Auquel cas, lorsqu'il s'agit de contester un écrit ou une signature électronique, l'article 287 alinéa 2, introduit dans le code de procédure civile par le

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décret du 3 décembre 200254, oblige le juge à vérifier « si les conditions mises par les articles 1316-1 et 1316-2 du code civil à la validité de l'écrit ou de la signature électroniques, sont satisfaites ».

Selon certains auteurs, la procédure de vérification d'écriture, ouverte à l'égard des actes sous signatures privées qui comprennent notamment l'écrit électronique, n'est pas ouverte à un simple courriel car il ne s'agit pas d'un acte sous seing privé comme les autres55. L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 30 septembre 2010 a contredit ce raisonnement en soumettant le courriel à la procédure de vérification d'écritures56.

Cependant il ne suffit pas au défendeur de soulever l'irrégularité de l'écrit électronique pour l'écarter. Ainsi, il lui appartient de dénier son engagement.

C'est d'ailleurs la solution qu'a consacrée la cour de cassation par l'arrêt du 30 septembre 2010, dans la mesure où elle n'a obligé les juges à vérifier ces conditions que dans la mesure où le défendeur avait nié être l'auteur de l'e-mail. Il s'agit au demeurant d'une condition indispensable au déclenchement de la procédure de vérification d'écriture.

Le défendeur doit donc dénier être l'auteur du message ou à tout le moins prétendre que le contenu de l'e-mail ne correspond pas à celui qui était le sien initialement. Il ne peut se suffire d'invoquer la simple irrecevabilité de l'écrit ne répondant pas aux conditions de qualification de l'écrit électronique.

Auquel cas, la procédure de contestation de la preuve littérale conduit à distinguer selon que l'écrit électronique est revêtu d'une signature électronique simple ou sécurisée.

Ainsi, lorsque la preuve électronique prend la forme d'un écrit électronique sécurisé, c'est au défendeur qu'il appartiendra d'établir les éléments aptes à convaincre le juge de la nécessité de renverser de cette présomption aux termes de l'article 288-1 du Code de procédure civile.

Pour ce faire, la démarche peut le conduire à s'appuyer sur une expertise technique ou encore sur un faisceau d'indices susceptibles de faire douter le juge en se référant à dire d'experts, à la consultation de techniciens ou de revues spécialisées ou enfin en obtenant des témoignages. A cet égard la doctrine met en garde le législateur contre le risque que représente l'invocation de l'aléa technologique57.

54 Décret n°2002-1436 du 3 décembre 2002, JORF, 12 déc. 2002, p. 20482

55 O.Cachard, « le désavoeu d'écritures : de la lettre missive au simple courrier électronique », Lamy n° 80, 2001.

56 Cass, Civ 1ère 30 septembre 2010, Bull. Civ. I, n° 178.

57 A.Penneau, « la forme et la preuve du contrat électronique », in L'acquis communautaire, le contrat électronique, Coll. Etudes juridiques, édition économica 2010.

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En effet, les juges étant souvent sensibles à cet argument, nombreux sont ceux qui redoutent une véritable défiance du juge vis à vis de l'écrit électronique et par conséquent une lecture contra legem du principe de l'équivalence probatoire de l'écrit électronique et de l'écrit papier. Une telle résistance pourrait conduire le législateur à renforcer la présomption de fiabilité attachée à l'écrit électronique sécurisé, pourquoi pas en lui substituant une présomption à caractère irréfragable.

Lorsque les parties ont mis en oeuvre un procédé de signature électronique sécurisé reposant sur une technologie de cryptographie asymétrique, on peut se demander si l'allégation par le défendeur de la perte ou du vol de sa clé privée peut suffire à renverser la présomption de fiabilité attachée à la signature électronique sécurisée.

A priori, il semble conforme à l'esprit de la présomption -sauf à mettre en échec l'autorité attachée à la signature sécurisée- d'obliger le titulaire de l'acte à établir les éléments aptes à rendre vraisemblable l'existence du fait qu'il allègue.

Quoi qu'il en soit, lorsque le défendeur est parvenu à convaincre le juge, on peut se demander s'il n'encourt pas pour autant une condamnation en responsabilité civile. En effet, si l'on reconnaît un devoir de confidentialité à la charge du titulaire des clés, sa négligence pourrait être considérée comme fautive de sorte qu'il pourrait être condamné à réparer le préjudice résultant pour le demandeur -débouté pour n'être pas parvenu à fournir un écrit sans faille- de la perte du procès.

D'ailleurs, une forme de réparation en nature de ce dommage pourrait avoir lieu en obligeant le détenteur de la clef négligent à exécuter la convention qu'il n'a pas cependant pas signé.58

En outre, une telle résistance des juges est d'autant plus redoutée pour l'écrit électronique

simple.

En effet, si l'article 1316-4 du Code civil ne semble pas l'écarter, ni même le décret de 2001 qui, mieux, le consacre en reconnaissant la signature électronique simple, il n'existe pas de régime propre à sa contestation. L'article 287 du Code de procédure civile se contente à cet égard de rappeler les exigences générales relatives à la recevabilité de l'écrit électronique.

De ce constat, il pourrait être déduit qu'il n'appartient pas au défendeur d'établir le

58 Cette théorie est notamment défendue par lemagistrat belge D. Mougenot, « Droit des obligations, la preuve », Larcier 2002, p. 228. Dans le même sens, P. Lecocq et B.Vanbrabant. Cette solution pourrait se concevoir en Droit français car le système probatoire belge mis en place par la loi du 9 juillet 2001 sur la signature électronique et les autorités de certification est similaire au système français.

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manque de fiabilité de la preuve électronique, au contraire, c'est au demandeur qu'il appartient d'établir de manière positive les éléments aptes à démontrer que l'écrit est revêtu d'une signature présentant des garanties de fiabilité.

Cette contrainte procédurale serait extrêmement lourde pour celui qui entend se prévaloir d'une preuve électronique voire impossible à réaliser. A cet égard, un auteur démontre qu'il n'y aurait donc pas que les preuves négatives qui seraient diaboliques59

Une autre voie pourrait alors être exploitée et consisterait à introduire une présomption de fait favorable à celui qui se prévaut de l'écrit électronique.

Deux types de présomption pourraient être employées. La première consisterait à nier l'opposition entre la signature électronique simple et la signature sécurisée en instaurant une présomption de fiabilité de l'écrit électronique, quelles que soient ses garanties de fiabilité. Il appartiendrait alors au défendeur de renverser la présomption.

L'autre, plus conforme à l'esprit de la loi du 13 mars 2000 attribuant une autorité supérieure à la signature sécurisée, imposerait au demandeur de justifier d'indices de fiabilité, à charge pour l'autre de les contredire60. Pour l'instant, la jurisprudence ne n'a pas entériné ces propositions.

Finalement, la démarche entreprise par le législateur n'a pas rencontré le succès qui était escompté. Les contraintes mises en place par la loi du 13 mars 2000 et du décret du 30 mars 2001 sont si lourdes qu'elles ne semblent pas prendre en compte les réalités pratiques du commerce électronique et fragilisent par conséquent le contrat électronique.

Malgré tout, l'apparente fébrilité de l'écrit électronique est compensée par un ensemble de remèdes auxquels les parties peuvent avoir recours pour solidifier la preuve de leur contrat.

59 J. Devèze, « Perseverare diabolicum. A propos de l'adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information par le décret n° 2002-1436 du 3 décembre 2002 », Comm.Comm. Elect. Mars 2003, étude n° 8, p. 12

60 C'ette thèse est notament défendue par Anne penneau, note préc.

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