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L'évaluation à  mi- parcours des projets de développement communautaire: le cas des puits à  pompe du Projet d'Appui au Développement Communautaire ( PADC ) de Mebomo et de Bikogo (Centre- Cameroun )

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par Yanik YANKEU YANKEU
Université catholique d'Afrique Centrale Yaoundé - Master en développement et management des projets en Afrique 2008
  

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1- Les effets positifs des puits à pompe du PADC sur les conditions de vie des populations des villages

Les puits à pompe ont des effets positifs dans les villages aussi bien sur la santé des populations que sur leurs activités.

a- Amélioration de l'état de santé des populations des villages : réduction des maladies hydriques ou de la morbidité et de la mortalité ?

L'eau dans les ménages des villages est destinée à la boisson et aux travaux ménagers (vaisselles). Le bain se fait généralement au marigot. De par ses différents usages, l'eau est généralement source de nombreuses maladies. Les maladies hydriques les plus récurrentes dans les villages Mebomo et Bikogo sont les suivantes : la typhoïde, la Diarrhée, l'helminthiase. Ces maladies sont dites hydriques, parce qu'elles sont dues à l'usage ou à la consommation d'une eau de mauvaise qualitée. Faute de centre de santé dans les villages de notre étude, nous nous sommes référés aux données disponibles au Centre de santé intégré de Nkengué et à l'hôpital du district de santé d'Elig-Mfomo16(*). Des entretiens avec les chefs des deux villages, et ceux surtout avec Abena Faustin, il ressort que certaines maladies hydriques qui terrassaient les populations des villages, avant l'arrivée des puits à pompe, se sont réduites. Et des entretiens avec les représentants des ménages, la réduction des maladies hydriques fait l'unanimité dans les quarante huit ménages enquêtés, parmi les avantages qu'offrent les puits à pompe aux habitants du village.

Cependant, en rapprochant les données chiffrées sur la mortalité et la morbidité au centre de santé intégré de Nkengue entre les années 2004 et 2008, soit deux ans avant la réalisation et l'inauguration des puits à pompe du PADC (2006), et deux ans après, on s'aperçoit qu'il n'y a pas une nette amélioration sur l'état de santé des populations de cette aire de santé17(*). Si les taux de mortalité et de morbidité des plus de cinq ans ont considérablement baissé, et fluctuent d'un mois à l'autre, ceux des moins de cinq ans n'a pas connu une amélioration considérable. Tout au contraire, on note une hausse pour certains mois (Mai, Juin, Août 2008) par rapport aux données de 2004 durant ces mêmes mois. Comme l'atteste le rapprochement de chiffres. Ceci peut s'expliquer par l'adhésion partielle des populations aux puits à pompe du PADC. Car, comme l'approuve une étude de l'UNICEF en 2006, les enfants payent un lourd tribut du fait de la mauvaise qualité de l'eau. L'ingestion d'eau polluée provoque la diarrhée, conduit à la déshydratation, à des troubles de l'assimilation des aliments et souvent à la mort. Les enfants séropositifs sont particulièrement touchés. Leur système immunitaire affaibli ne résiste pas aux attaques de diarrhée. Les maladies parasitaires, les inflammations de la peau et des yeux sont autant d'obstacles dans la vie de ces enfants.

Tableau 3 : La comparaison entre 2004/2008 de la mortalité et de la morbidité au centre de santé intégré de Nkengue

Source : Statistiques de l'hôpital de district d'Elig-Mfomo, 2009.

En plus, en 2009, les maladies hydriques constituent, dans ce centre, la majorité des dix premières causes de consultations18(*).

Cependant, le mode de prévention et de traitement reste traditionnel. Le chef du village Bikogo, Valentin Ngono19(*), nous a confié que les populations faisaient d'abord recours aux traitements traditionnels pour combattre les maladies hydriques, qui existaient encore dans le village et lorsque le mal perdure, elles s'adressent ensuite au centre de santé intégré de Nkengué et enfin, à l'hôpital du district de santé d'Elig Mfomo. Les préventions pratiques (javellisation, ébullition) ne sont pas utilisées par les populations. Les populations des villages Mebomo et Bikogo, du fait de la grande paupérisation, préfèrent donc l'automédication. Le traitement se fait dans les différents ménages grâce à une plante. Nous remarquons d'ailleurs que cette dernière est présente devant toutes les maisons des deux villages de l'étude. Où elle sert d'abord d'ornement et en cas de malaise gastrique, elle devient une excellente tisane. Cette plante, dont le nom scientifique est le Croton, s'utilise soit par infusion ; soit par consommation directe après être lavée. Son utilisation remonte à plusieurs décennies comme le confirme le chef de Mebomo Alain Jules Avodo Ayissi. Dans les villages, il n'existe pas de pharmacies modernes et les populations en cas de besoin font recours aux pharmacies disponibles dans les centres de santé, qui sont approvisionnés en médicaments de façon périodique.

Tableau 4 : Les dix principales causes de consultation au centre de santé intégré de Nkengué

Pathologies

Nombre de cas

0-5 ans

Nombre de cas

5-15 ans

Nombre de cas

15-45 ans

Nombre de cas

> 45 ans

Femmes enceintes

Nombre total

1

Paludisme

60

27

82

25

8

194

2

Maladies de la peau

8

15

64

10

0

97

3

Broncho-pneumonie

36

8

16

6

0

66

4

IST

3

1

35

5

5

49

5

Diarrhée

26

1

10

5

1

43

6

Helminthiase

12

3

11

4

1

31

7

Traumatisme

2

3

15

10

0

30

8

Affection de la cavité buccale

1

1

20

3

1

26

9

Anémie

16

0

0

0

1

17

10

Gastrite

0

0

2

2

6

10

Source : Statistiques hôpital de district d'Elig-Mfomo, septembre 2009.

b- Puits à pompe du PADC, facteurs d'allègement des charges féminines

Avant les puits à pompe, les femmes parcourraient de longues distances en quête d'une eau potable. Ceci constituait une dépense d'énergie physique et une perte de temps pour les femmes occupées à d'autres travaux ménagers ou champêtres. Aider en cela par les enfants qu'elles accompagnent dans leur processus de socialisation20(*). Ces enfants, en plus, des occupations scolaires et péri-scolaires, constituent de véritables « lieutenants » pour leur maman. « Les sources d'eau potable situées loin des habitations constituent un terrible fardeau pour les femmes et les autres usagers » reconnait John Pickford  (1986 : 14).

Jean Marc Ela (1994 : 246-247), quant à lui, considère que

« dans les sociétés où la surcharge de travail des femmes conduit à un vieillissement précoce, on entrevoit les transformations que des technologies intermédiaires introduisent dans une multiplicité d'activités qui constituent une sorte de travail invisible où, depuis le ramassage du bois, les corvées d'eau, les travaux de cuisine ... la roue pourrait libérer des millions de paysannes ».

Les puits à pompe du PADC allègent considérablement les corvées des femmes et des enfants, et constituent un véritable gain en temps, compte tenu de la distance et de la multiplication d'autres points d'eau. Car, note l'UNICEF dans une étude en 2006, au lieu d'être en classe et d'étudier, les filles et les garçons passent, avec leurs mères, quatre à huit heures par jour sous une chaleur écrasante, pour rapporter de l'eau à la maison depuis un point d`eau éloigné.

Un autre avantage, et non des moindres, est que le puits à pompe du PADC, en se mettant en place dans des hameaux qui n'avaient pas de puits à pompe, a permis de stabiliser les populations autour de leur propre point d'eau et leur situation en bordure de route donne l'occasion même aux passants de s'abreuver en toute quiétude.

c-  Des activités et des responsabilités nouvelles dans les villages : le gestionnaire des puits à pompe

Après la mise sur pied du puits à pompe du PADC, le comité de développement du village s'est réuni autour du chef du village pour élire les membres du comité de gestion du puits à pompe21(*) nouvellement crée dans le village. Les différents postes à pouvoir étaient ceux de président, de secrétaire général et de trésorier. Toutefois, comme le relève Jean Luc Camilleri, (1993 : 20), « ce sont les paysans les plus jeunes et les plus actifs qui entrent dans le bureau (ou comité de gestion) où ils prennent le leadership à la place des vieux ». Le comité de gestion ainsi formé n'a pas reçu de formation en management et devait se contenter du terrain pour aiguiser ses armes. En plus, le nouveau travail ne prévoit pas de compensations financières et, de ce fait, relève du bénévolat. Cette situation a par ailleurs concouru à la démotivation de certains membres du comité de gestion. De trois membres, on a fini par se trouver ou à centrer les postes en un seul, celui de président. A Bikogo, c'est le secrétaire qui est trésorier et président en même temps.

Mensuellement, il doit faire du porte à porte pour collecter les sommes auprès des ménages et doit convaincre les responsables qui refusent de payer. Au quotidien, il doit être débout très tôt pour ouvrir les pompes et parfois être présent pour règlementer l'usage des puits à pompe. En cas d'absence, les tâches sont déléguées à un proche ou à un enfant mature de la maison.

Le gestionnaire du puits à pompe procède aussi à la sensibilisation des ménages ou des associations pour participer aux entretiens (nettoyage, désherbage des alentours du puits à pompe). La périodicité de cet entretien varie en fonction du moment de l'année (saison de pluie ou sèche). Et lorsque des pannes surviennent, c'est le gestionnaire qui, après constat, va, avec le président du comité de développement villageois, à la recherche de la main d'oeuvre experte pour y remédier. En premier recours, ils se tournent d'abord vers les responsables du PADC, cellule de coordination du centre. Après, ils vont rencontrer le maître d'oeuvre des travaux d'exécution des puits à pompe. La tâche n'est pas facile, mais comme l'argue Agrius Midzomo22(*)

« la gestion du puits à pompe du PADC m'aide à mieux gérer les humeurs et mieux organiser mes frères du village, une responsabilité nouvelle au sein du village. Et en cas de non disponibilité, mon fils ou ma femme s'en occupe. Ce n'est pas facile à faire sans formation initiale mais c'est maintenant que le puits à pompe est en panne que les populations reconnaissent ma valeur.»

Les avantages technologiques qu'offrent le puits à pompe aux populations locales sont ainsi perceptibles mais quelles en sont ses limites ?

* 16 Il faut noter que les deux villages font partie de l'aire de santé du centre de santé intégré de Nkengue. Les données chiffrées concernant la santé que nous avons recueillie, sont relatives à ce centre de santé intégré. Pour Albert Legrand Fosso (2009), dans le parcours des patients, le centre de santé intégré est l'unité de soins périphériques. À l'intermédiaire, se trouve le centre médical d'arrondissement et finalement, l'hôpital de district est l'ultime cadre de référence des patients.

* 17 Cf. infra le tableau comparatif entre 2004/2008 de la mortalité et de la morbidité au centre de santé de Nkengué entre 2004/2008. Pour plus de détails, Cf. annexes.

* 18 Cf. infra, tableau sur les dix premières causes de consultation.

* 19 Valentin Ngono, né en 1936, chef de 3e degré de Bikogo. Entretien du 10 octobre 2009, devant la chefferie/centre d'Etat civil du village Bikogo.

* 20 Lire à ce sujet les études de F. Ngueyap (1996 : 393-406) qui permettent de comprendre comment la mise au travail des enfants au sein de l'univers familial, en vue de leur socialisation, contribue à les forger une personnalité dans la société.

* 21 Selon la politique nationale d'approvisionnement en eau et d'assainissement en milieu rural, elle est mise en place avant même l'installation de la pompe et est constituée de quelques représentants des usagers, hommes et femmes. Sa responsabilité est d'organiser la maintenance de la pompe, en mobilisant l'artisan réparateur en cas de besoin. Les responsabilités du comité sont : de constituer et de gérer une caisse destinée à financer la maintenance ; au cas où une structure bancaire existerait à proximité, le comité est encouragé à y déposer les fonds ; de rassembler des contributions financières des usagers pour alimenter cette caisse ; de mobiliser l'artisan réparateur en cas de panne et lui payer le prix de son intervention, de ses frais de déplacement et des pièces détachées ; de mobiliser les usagers pour un bon entretien quotidien du point d'eau. La charge de travail du comité est très légère et ne nécessite pas de réunions fréquentes. Il n'est donc pas indispensable de lui imposer trop de formalisme (réunions, registre) ni de rémunérer ses membres. Cependant, la politique nationale ne s'oppose pas à la rémunération de membres, si le comité estime que s'est nécessaire pour garantir leur assiduité.

Il est recommandé que cette structure soit rattachée à un comité de développement villageois, pour assurer sa pérennité, à condition que les contributions financières pour le point d'eau ne puissent être utilisées que pour le service de l'eau.

* 22 Agrius Midzomo, né en 1960, maçon carreleur, est l'actuel président du comité de gestion du puits à pompe du PADC de Bikogo en lieu et place de feu Ngono Mebara jeanne (présidente) et de Molo Agrièce (trésorière) partit s'installer en ville. Entretien du 13/11/09 au carrefour de Bikogo.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand