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L'évaluation à  mi- parcours des projets de développement communautaire: le cas des puits à  pompe du Projet d'Appui au Développement Communautaire ( PADC ) de Mebomo et de Bikogo (Centre- Cameroun )

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par Yanik YANKEU YANKEU
Université catholique d'Afrique Centrale Yaoundé - Master en développement et management des projets en Afrique 2008
  

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2- La capitalisation des actions de développement en groupe : l'expérience de Lucien Motsala Lebelé

Les actions individuelles ont montré leur limite face aux acheteurs de cacao. A travers de multiples interactions les paysans ont compris la nécessité de se mettre en groupe. Cette prise de conscience remonte à l'intervention d'une ONG italienne. En effet, c'est à l'ONG italienne dénommée, Association Mont de gusto que revient cette initiative. En Mai 2000, cette association fait un premier pas dans les villages. Ce premier contact avec les paysans va se faire sur la base de la création d'une grande coopérative dénommée, sociétés des coopératives agricoles d'Elig-Mfomo (SOCADEL). Malheureusement, cette tentative connaîtra un échec. La principale cause de cet échec était attribuée à la technique d'approche des paysans. Des fonds alloués aux groupes de paysans par la coopération pour leur fonctionnement n'étaient pas remboursés. Or, comme le relève Lucien Motsala Lebelé « c'est le groupe qui nourrit la coopérative et non le contraire ». Ceci revient à dire que la coopération vit des contributions de ses adhérents qui sont les Gics et non la coopérative qui fait fonctionner les Gics en leur octroyant de l'argent60(*).

De cette mauvaise expérience, va naître la nécessite d'amener les paysans à s'auto-développer. Ceci va commencer par un recensement des Gics existant et une motivation des autres à se mettre en groupe pour mieux s'organiser et s'autonomiser. A partir des insuffisances des paysans, des ateliers d'animation vont être initiés et ceci pendant plus de deux ans. Ces animations concernaient tous les aspects de la vie en groupe propre à la production du cacao. Les thèmes variaient, allant des techniques agricoles (comment faire la multiplication de plants, les greffages, l'entretien des plantations et le traitement des plants à partir d'atomiseurs et de pulvérisateurs dorsaux, la maintenance des appareils agricoles, l'utilisation des intrants à dose normale) aux techniques de vente et de commerce : la négociation et l'achat directement chez les fournisseurs des intrants agricoles homologués, non périmés et non contrefaits, vente et achat groupés (les différents prix et leurs déductions).

Ces techniques agricoles et commerciales ont été intériorisées et capitalisées par certains membres de la population des villages. D'ailleurs beaucoup d'entre elles attribue à l'association Mont de Gusto le déclenchement du processus de mise en mouvement et l'exploitation méthodique des plantations dans les villages.

« Après l'échec des coopératives d'Etat, le paysan voyait les fongicides61(*) comme des produits qui viennent seulement d'Europe, il fallait attendre la manne d'un homme politique. Maintenant, les planteurs regroupés en Gic s'organisent mieux. Ils ne se laissent plus fragiliser comme par le passé » reconnait à dessein Lucien Motsala Lebelé.

Nous avons pu échanger, pendant des heures, avec ce dernier sur les interventions de l'association Mont de gusto. Il se rappelait des dates, des techniques apprises, des fongicides conventionnels et non conventionnels qu'ils utilisaient avant cette intervention. Or, ces fongicides avaient déjà fait date et étaient devenus dangereux pour les plants sous d'autres cieux pourtant les paysans les utilisaient encore. Les fongicides (Gross plan, Tioden 35, Lendalo 20, Lendalo 90, Penncap) qui étaient utilisés avant ont été remplacés par d'autres (Nordox super, Calo mille, Ok mille, Planto mille, Golden blu) et de nouveaux insecticides (Logawa, Parastar, Plantima, Supercol cent).

La première expérience pour les paysans n'était pas facile à cause du manque de moyens financiers. Pour résoudre cela, il a été organisé un système de retenu par kilogramme de cacao vendu. Ce système de retenu à la source consistait à faire une déduction sur la production cacao de chaque GIC. Cette retenu fongicide et insecticide se fait en fonction des règlements intérieurs propres à chaque GIC. C'est ainsi que les populations ont pu commencer avec cette expérience. Et les années qui suivaient ce système s'est perpétué au profit de la production de cacao et du paysan. Le système de retenu s'est généralisé à d'autres sections. Ainsi, on a des retenus santé et éducation. Même si comme le reconnait Lucien Motsala Lebelé, « d'autres privilégient les cocsages62(*) au détriment des GICs, mais sont prêts à se tourner vers un GIC en cas de besoin de fongicides lorsqu'ils sont fauchés ».

A force de mettre en pratique ses acquis au contact de ses frères63(*), Lucien Motsala Lebelé offre ses services en animation dans d'autres villages du département de la Lekié (Okola, Ebanga) voir d'autres départements (Nyong Ekellé). Actuellement, il accompagne les responsables de certains services déconcentrés de l'Etat d'Elig-Mfomo (MINADER, MINEPIA) dans la mise en oeuvre de certains programmes et projets. C'est le cas du programme national de vulgarisation des recherches agricoles (PNVRA), le but est d'améliorer les techniques agricoles, la bonne utilisation des intrants agricoles et du projet d'amélioration de la compétitivité agricole (PACA) qui vise à appuyer les agriculteurs et les éleveurs.

En fait, à travers cette expérience, nous voulons démontrer que les villages et les acteurs qui y vivent, ont des valeurs et des potentialités sur lesquelles il est nécessaire de s'appuyer pour le succès d'une initiative de développement d'envergure comme le développement communautaire.

* 60 D'après Lucien Motsala Lebelé, dans le processus de regroupement, le paysan va vers un groupe ou Gic, c'est le premier niveau de regroupement ; les Gics se regroupent en union de Gics, c'est le second niveau de regroupement ; le troisième niveau de regroupement est la fédération ou la coopérative de Gics ; et l'ultime niveau de regroupement est le niveau quatre, représenté par l'union des fédérations qui peut s'étendre sur plusieurs départements. Par exemple, les villages étudiés sont dans la fédération des unions des Gics des éleveurs et agriculteurs d'Elig-Mfomo (FUGEAEM). Elle est constituée de quatre unions de Gics (Union des Gics des éleveurs et agriculteurs de Nkengué et de Bikogo, union des Gics des producteurs et éleveurs d'Elig-Mfomo, union des Gics des éleveurs et agriculteurs d'Enigo et Enobita, union des Gics des éleveurs et agriculteurs d'Endama). Chaque Gic a son lot de cacao qu'il déclare au président de son union. Chaque président d'union déclare son stock de cacao au coordonnateur de la fédération. Ce dernier va négocier le prix du cacao au niveau des exportateurs en tenant compte du prix free on board (FOB) puis du prix coût assurance fret (CAF) et enfin du prix port champ qui revient au paysan.

* 61 Les fongicides et les insecticides sont les principaux intrants nécessaires à l'entretien des cacaoyers. En fait, avant, les paysans ne savaient pas qu'ils pouvaient eux-mêmes choisir les produits de bonne qualité, qu'ils pouvaient négocier directement avec les fournisseurs.

* 62 Le « cocsage » est une technique de vente individuelle et désordonnée puis d'achat ambulant de cacao par des commerçants qui scionnent les villages à bord de voiture pick-up.

* 63 Référence est faite ici à la mise sur pied des Gics, l'organisation des travaux collectifs sous forme de brigade d'intervention avec l'atomiseur ou les pulvérisateurs dorsaux, l'achat d'intrants de qualité chez des fournisseurs (ADER, YARA, FIMEX), la négociation des prix avec les exportateurs.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld