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Les apprentissages entre pairs: construction d'une identité plurielle

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par Carine Amouriaux-Menou
Université Rennes 2-Haute Bretagne - Master 2 Education, apprentissage et Didactique. Département des Sciences de l'éducation 2013
  

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4.1.1.2 Relation à autrui

A l'évidence, apprendre entre pairs signifie améliorer ses connaissances techniques et théoriques. Mais ce que j'observe et entends m'oblige à penser que c'est plus que cela : être en binôme sous-entend un regard et une attention du P1 sur la façon dont procède le P3 pour entrer en communication avec un patient. Charlène, P3, explique : « on sait comment ça se passe avec un patient103.» Helena, P3, précise : « c'est davantage les P3 que les profs qui montrent comment on parle avec le patient104.» Alicia, P3, confirme : « c'est le plus «âgé» qui parle le plus avec lui [le patient], ça se passe toujours comme cela.105» C'est un apprentissage implicite et empirique qui

101 A. Bandura, Ibid.

102 Cf. annexes entretiens de P1, A. 26 et F.20 : « on n'apprendrait pas beaucoup de choses si on ne changeait pas de binôme, si on était toujours avec la même personne ». Clara, P3, pense que « c'est bien de changer de groupe, ou de binôme [...J c'est ça qui est enrichissant, d'avoir différentes personnes qui nous expliquent comment faire, car elles n'ont pas toutes la même façon de montrer, d'expliquer ».Cl.8 et 26.

103 Cf. annexes entretiens Ch. 56.

104 Cf. annexes entretiens H. 12.

105 Cf. annexes entretiens A. 64.

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s'effectue dans ces situations. Implicite parce qu'il n'est jamais évoqué par l'équipe pédagogique, empirique car cet apprentissage se passe au cours de mises en situations pratiques, c'est-à-dire avec des patients. Jusqu'à présent, les notions de communication, de relation entre un soignant et un soigné n'étaient pas théorisées dans la formation au métier de pédicure-podologue. Elles apparaissent aujourd'hui dans le nouveau référentiel de formation (en application depuis 2012, dans le cadre des réformes des études paramédicales), dans le cadre d'unités d'enseignements en sciences humaines, mais ne survient dans les programmes qu'au cours de la deuxième année. C'est sans doute une des différences majeures entre les formations au métier du soin : les études d'infirmiers ou d'ergothérapeutes, par exemple, abordent depuis très longtemps les disciplines de la psychologie, sociologie, pédagogie, contrairement aux études de pédicures-podologues. Ce nouveau référentiel marque sans doute une volonté des équipes pédagogiques à changer de paradigme, peut-être moins techno-centré, davantage tourné vers la personne, vers l'humain...

Jusqu'à présent, les étudiants pédicures-podologues n'étaient pas vraiment sensibilisés à ces notions, si ce n'est au travers de ces situations entre pairs, de façon implicite. Ce qui me laisse penser que ce n'est donc pas seulement pour des raisons techniques que certaines équipes de formateurs, dans leurs instituts, ont instauré ce mode d'apprentissage entre soi, même si les raisons de ces organisations restent opaques dans les projets pédagogiques que j'ai pu consulter.

Cet apprentissage à la relation à l'autre, ce que les professionnels en milieu médical nomment « relation soignant-soigné », s'effectue à deux niveaux. D'un côté, les formateurs s'entretiennent avec les patients au cours des stages pratiques, devant les étudiants. Les attitudes, les discours des enseignants sont perçus par les P1 et les P3. Mais dans l'exercice de l'apprentissage à l'acte de soin, le formateur passe peu de temps avec le patient. C'est donc l'étudiant qui échange davantage avec lui. « C'est nous qui l'accueillons, c'est nous qui lui parlons pendant le soin, c'est nous qui lui donnons des conseils même si, le formateur arrive et qu'il complète, mais on l'a [le patient] du début à la fin, donc oui, c'est plus les P3 qui montrent ça106». C'est le P3 qui conduit cette relation privilégiée puisque le P1 considère que c'est son « ainé » qui est le plus à même de mener les échanges. Le P3 reproduit donc des savoir-faire inculqués par le formateur et les reformule à sa façon devant le P1. On est donc face à

106 Cf. annexes entretiens H.12.

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des savoirs intégrés, retransmis d'une génération d'étudiants à une autre107, ce qui permet d'enrichir la relation à autrui par une diversité des approches. En soi, l'apport des pairs est « complémentaire de ce que peut apporter le formateur108» : transmettre des savoirs théoriques et des compétences relationnelles avec un patient sont des actions partagées entre les enseignants et les tuteurs. L'apprenant devient un partenaire actif du dispositif de formation.

Savoir comment se comporter avec un patient pour que la relation soit satisfaisante au regard de l'exigence d'acquisition de compétences professionnelles, confortable, agréable pour l'étudiant109 et la personne soignée, s'effectue essentiellement lors de ces situations entre pairs. Les étudiants apprennent à communiquer, à échanger lorsqu'ils sont ensemble.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld