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Le monitoring des élections présidentielles au Cameroun de 1992 à  2011.

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par Jean Pierre Loic NKULU ATANGANA
Université de Douala - Master II Recherche  2012
  

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B. La mise en place d'institutions de plus en plus fiables, la construction d'une culture des principes démocratiques et le monitoring des instruments juridiques électoraux

Il faut rappeler que les missions de monitoring des élections présidentielles ont considérablement réformé les pratiques politiques et juridiques au Cameroun. L'une des fiertés majeures reste pour le moment le dessaisissement de l'organisation des élections au MINATD depuis la création de l'ONEL en 2000 d'ELECAM en 2006 d'autre part. Les suspicions qui ont toujours pesé sur le MINATD ont conduit les acteurs politiques camerounais à remettre en cause cette administration dans la gestion. Cette récusation du MINATD dans la conduite des processus électoraux en général a animé la première moitié des années d'ouverture démocratique au Cameroun. La méfiance nourrie à l'égard de cette administration est justifiée par son inféodation par le parti au pouvoir et les forfaitures commises par cet organe au Cameroun.

L'obligation de rendre compte qui pèse sur lui s'étend également à ses représentants, dans les circonscriptions administratives, en charge du pilotage, à la base, du processus électoral. Ce noyautage de toute la chaîne du processus électoral et ses démembrements territoriaux par le gouvernement a été très vite perçu comme un facteur négatif limitant l'épanouissement du jeu démocratique dans la toute nouvelle démocratie en construction au Cameroun, à l'occasion de l'élection présidentielle de 1992. Cette administration a joué un rôle majeur dans la gestion de ce scrutin, qui a connu une issue somme toute trouble avec des résultats différents301. Il n'est nullement de nature à offrir les traditionnelles garanties minimales de neutralité, d'impartialité, de transparence et de sincérité dans l'expression du suffrage et du scrutin du 11 octobre 1992. Or, l'existence d'un cadre organisationnel crédible permettant un déroulement harmonieux du processus électoral emportant la confiance et l'adhésion de tous les protagonistes du jeu électoral à des règles consensuelles est le gage minimal d'une élection régulière, transparente, sincère et loyale302.

La suspicion ou la méfiance qui pèse sur le Ministère de l'Intérieur n'est pas dénuée de tout fondement. Ainsi, comme précédemment souligné, l'appareil étatique en charge de l'organisation des élections a, pendant longtemps au Cameroun, fait

301 Le résultat proclamé par la Cour suprême à l'issue du recensement de tous les votes donnait vainqueur le candidat du parti au pouvoir, alors que les observateurs du NDI donnaient vainqueur le candidat de l'opposition. Toutefois, il faut souligner que la Cour suprême relevait que les irrégularités constatées dans l'organisation de l'élection ne pouvaient pas entacher le résultat de ce scrutin. Cependant, les observateurs du NDI mettaient en cause les responsables de l'administration d'avoir manipulé les résultats en faveur du candidat au pouvoir vu le score et l'écart entre les deux candidats. Lire à ce sujet NDI, Déclaration post-électorale préliminaire du 14 octobre 1992 et du Rapport provisoire de la Mission d'Observateurs Internationaux du NDI à l'élection présidentielle du 28 octobre 1992 pp. 259-263. Lire aussi Déclaration du Pr. Kontchou Kouomegni Augustin, exemple de malentendu à éviter : réponse du gouvernement du Cameroun du 30 octobre 1992, pp. 255-256.

302 Le spectacle très peu reluisant de l'élection présidentielle anticipée du 11octobre 1992 a poussé les principaux acteurs de la scène politiques camerounaise à ne pas se présenter à l'élection présidentielle suivante c'est-à-dire celle du 12 octobre 1997, étant aussi donné que beaucoup de leurs revendications n'avaient pas été pris en compte, à savoir, par exemple, la mise sur pied d'un organe indépendant de gestion du processus électoral.

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preuve d'imperfections, de fraudes et de partialité. En effet, la contestation du rôle de l'administration dans la gestion des élections s'est engagée suite aux irrégularités et autres fraudes ayant entaché l'élection présidentielle anticipée du 11 octobre 1992303. Ce sont ces raisons qui ont poussé les acteurs politiques, dans le cadre du renouveau démocratique, à engager un dialogue politique pour dessaisir l'administration, à travers le MINTAD, de l'organisation des élections en général et présidentielles en particulier.

Ce dessaisissement partiel304 dans certains cas et total dans d'autres305 ne s'est pas fait au premier au coup il a fallu attendre les années 2000 pour voir la mise sur pied de l'ONEL. Si ce nouvel organe créé pour la gestion des processus électoraux bénéficie de tous les pouvoirs nécessaires pour l'accomplissement de sa mission dans le cadre du dessaisissement total, il ne joue que le rôle de supervision306. Si nous parlons la construction d'une culture des principes démocratiques, c'est parce que nous établissons une distinction entre la culture démocratique qui est intériorisation et la traduction effective des principes démocratiques dans le fonctionnement des régimes politiques par une adaptation des instruments juridiques et des mécanismes politiques au Cameroun307. Les institutions politiques reflètent cette culture nouvelle et cette ambition. Plus simplement, l'habillage démocratique existe bel et bien au Cameroun. Il n'y a qu'à voir la diversité d'opinions, même si la remise en cause du pouvoir politique reste encore très partiellement admise par ceux qui exercent le pouvoir. Cela témoigne des effets des longues années de parti unique et parfois de répression que l'histoire et les changements en cours permettront certainement de résoudre. Quoiqu'il en soit, le déploiement des missions de monitoring des élections présidentielles aura au moins eu deux mérites de fond : celui de la matérialisation de l'indissociabilité des principes de la démocratie et des élections d'une part et celui de la faveur de l'émergence progressive d'une culture démocratique d'autre part. Cette double évolution de fond a inéluctablement eu des conséquences sur la forme.

Quant à l'évaluation des instruments juridiques, les observateurs sont tenus de coller à ces derniers car c'est en effet eux qui déterminent les travaux de la mission et ce sont eux qui permettront, par exemple, de porter un jugement fiable sur la mission qui leur aura été confiée. Cette évaluation rigoureuse des instruments juridiques et des institutions mises en place existe à cet effet tant du point de vue de l'organisation que de celui du déroulement effectif de scrutin. En plus des institutions et de leurs compétences, les missions de monitoring des élections procèdent à l'évaluation des lois électorales proprement dites. Ainsi vont-elles être amenées à se prononcer sur leur capacité ou non de garantir la liberté, la fiabilité et l'indépendance d'une élection308. En effet, on est toujours responsable devant celui dont on tient la

303 Rapport provisoire de la mission d'observateurs internationaux du NDI, « Election présidentielle anticipée du 11 octobre 1992 », in Les Droits de l'Homme au Cameroun. Livre Blanc publié par le gouvernement de la République du Cameroun, Yaoundé, Editions de l'Imprimerie Nationale, 1994, p. 259.

304 Au Sénégal et au Cameroun.

305 Cas du Togo, du Benin, du Gabon...

306 C'est le cas de l'ONEL au Cameroun qui jouit d'un dessaisissement partiel alors que toutes les opérations matérielles sont encore à la charge de l'administration étatique.

307 En ce qui concerne l'élection présidentielle du 11 octobre 2004, le Cameroun, étant Etat partie à la Déclaration de Bamako, a honoré ses engagements en arrimant le scrutin présidentiel selon les principes de cette déclaration, ainsi qu'au respect de la déclaration de Harare. Lire à ce sujet l'OIF, Rapport de la mission d'observation de l'élection présidentielle du 11 octobre 2004 au Cameroun, pp. 10-25.

308 Cf. Rapport de l'élection présidentielle du 11 octobre 2004 au Cameroun.

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légitimité. Tout ceci démontre que les missions de monitoring des élections peuvent être amenées à remettre en question une loi électorale309 qui serait susceptible d'entraver même indirectement la régularité du scrutin. Le monitoring des élections n'est donc pas ici une simple formalité. Elle est davantage le lieu privilégié de l'évaluation de l'adéquation des valeurs démocratiques avec les lois camerounaises régissant l'élection présidentielle ou toute autre élection. Il s'agit en effet d'un véritable test d'évaluation des capacités à l'assimilation des valeurs démocratiques.

Il faut dire que ces mérites de fond ont conduit à une amélioration des mérites de forme.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault