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Le consensus en droit électoral camerounais


par Rodrigue Stéphane Agathon Ondoa
Université de Douala - Master 2 2017
  

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B- La survivance des procédés unilatéraux

Dans une société soucieuse des grands équilibres politiques, l'élaboration des règles électorales doit obéir à des mesures propres à prévenir tout « monopole politique et administratif du pouvoir». Ceci étant, la pratique électorale développée dans les pays d'Afrique noire francophone peut susciter des interrogations lorsqu'on sait toutes les difficultés politiques que ceux-ci traversent.

C'est que la législation électorale de ces pays et donc du Cameroun fait l'apologie des actes unilatéraux dans l'organisation des élections au profit du Président de la République qui, il faut le souligner est lui-même engager avec son parti dans la compétition électorale. Au rang de ces actes figurent le découpage des circonscriptions électorales 217 , la convocation du corps électoral218, la nomination et la révocation des autorités administratives et « indépendantes » chargées de l'organisation et du contrôle des scrutins.

Sur le premier moyen, les analyses du Professeur RICHARD GHEVONTIAN sont formelles en ce que, « la question du découpage électoral, c'est-à-dire la technique par laquelle le territoire national (ou une partie de celui-ci) est divisé en circonscriptions électorales dans lesquelles les électeurs sont répartis pour exercer leur droit de vote, est déterminante a plan collectif sur l'expression sincère de la volonté du corps électoral » 219 . Pour l'auteur, la délimitation géographique des surfaces électorales est d'un enjeu démocratique particulièrement important car, soutient-il, si sa finalité est détournée, et sa mise en oeuvre manipulée, le résultat électoral obtenu de façon déloyale, ne sera dû qu'à un regroupement artificiel d'électeurs220. Cette inquiétude est partagée par la plupart des organisations internationales s'étant intéressées à

217 L'on peut entendre par circonscription électorale, une « unité territoriale dans laquelle le vote définit la manière dont les sièges sont distribués parmi les candidats ou les partis politiques », RESEAU DU SAVOIR ELECTORAL, op.cit., p.53. Au Cameroun, la carte électorale est l'oeuvre du Président de la République, réalisée au terme d'un décret notamment

218 Article 86(1) du code électoral.

219 GHEVONTIAN (Richard), « Les pouvoirs du conseil constitutionnel français en matière électorale », op.cit., p.76.

220 GHEVONTIAN (Richard), « Les pouvoirs du conseil constitutionnel français en matière électorale », op.cit., p.76.

Le consensus en droit électoral camerounais

cette problématique. Ainsi par exemple, pour la fondation FRIEDRICH EBERT STIFTUNG, le fait pour le législateur de laisser la maîtrise du découpage des circonscriptions électorales à la discrétion du Président de la République, est perçu comme un moyen favorisant l'expression de la fraude électorale221. En réalité, au Cameroun il n'est pas rare que les découpages soient faits de manière totalement calculée. Dans ce contexte, l'autorité compétente en raison de ses affinités politiques n'hésite pas à allouer la majorité des circonscriptions dans des zones favorables. Cette technique selon la fondation FRIEDRICH EBERT STIFTUNG consisterait en l'utilisation du pouvoir du décret pour doter les zones favorables à certains partis politiques en vue de compenser celles qui leur seront hostiles, ou à créer de nouvelles circonscriptions électorale à la veille de l'échéance222. De même, il serait curieux de constater que malgré les règles de découpage, qu'au Cameroun la distribution des sièges soit faite de manière tendancieuse. Pour cette raison, certains pays telle l'Allemagne confie à une commission spéciale le soin de procéder à un tel découpage.

À cela vient s'ajouter la convocation du corps électoral. Encore laissée à la diligence du Président de la République, la discrétion quelle suppose permet-elle d'ouvrir une fois de plus une brèche à la fraude. C'est du moins la conclusion que la FRIEDRICH EBERT STIFTUNG tire, lorsque celle-ci permet d'entretenir un flou quant à la tenue exacte du jour de l'élection. En effet, selon cette fondation, « elle consiste à donner la latitude au Président de la République qui est un acteur et partie prenante au processus de déterminer de façon unilatérale la date des élections »223. Le Président qui détient donc seul l'agenda électoral peut allègrement utiliser ce gadget légal à des fins politiques et surprendre ses adversaires. Pour cette organisation internationale, ces deux moyens unilatéraux ne sont ni plus ni moins que des « fraudes légales ».

Cette liste non exhaustive s'accompagne de la nomination et de la révocation des organismes étatiques investis dans la conduite des élections. Laissée une fois encore à la discrétion du Chef de l'État. Aux termes de l'article 12 (3) du code électoral camerounais de 2012, « le Président, le Vice-Président et les membres du Conseil Electoral sont nommés par décret du Président de la République après consultation des partis politiques représentés à l'Assemblée Nationale et de la société civile ». Cependant, il y a un silence coupable de ce code

221 FRIEDRICH EBERT STIFTUNG, Prévenir et lutter contre la fraude électorale au Cameroun, op.cit., 15.

222 Tel fut le cas en 2007 avec la création de 60 nouvelles circonscriptions électorales créées à moins d'un mois des élections législatives et municipales. FRIEDRICH EBERT STIFTUNG, Prévenir et lutter contre la fraude électorale au Cameroun, op.cit., 15.

223 FRIEDRICH EBERT STIFTUNG, Prévenir et lutter contre la fraude électorale au Cameroun, op.cit., 15.

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Le consensus en droit électoral camerounais

non seulement sur la forme de cette consultation, mais aussi sur son sa force juridique. La nomination du Directeur Générale et du Directeur Adjoint ELECAM est régie à l'article 24(1)224.

Cet état juridique est clôturé par l'irrecevabilité des demandes formulées contre ces actes, lesquels sont qualifiés d'« actes de gouvernement » 225 et de facto couverts d'immunité juridictionnelle.

SECTION 2 : LA PRISE EN COMPTE DES CONSIDÉRATIONS D'ORDRE
CONJONCTUREL

Les organes chargés de la mise en oeuvre du consensus en droit électoral sont par nature des organes politiques. Et en dépit des moyens juridiques dont ils disposent pour réaliser l'idéal de consensus, il n'est pas rare que ceux-ci en face usage pour d'autres fins ou bien qu'ils cèdent à la manipulation. C'est dans cette logique que MPESSA ALOYS226 affirmait opportunément que « `'les institutions juridiques» ne sont jamais ce qu'on croit qu'elles sont. Produit de l'imagination intellectuelle des hommes, elles révèlent leur caractère réel au contact des réalités sociales qui les façonnent ». La combinaison des facteurs tels la dérive du pouvoir législatif (A) et la participation mitigée de l'administration dans le jeu électoral (B) tend à conforter cette thèse.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon