1.2 Les représentations positives à
l'égard du développement durable
? La dimension environnementale toujours
ancrée
L'ensemble des entretiens révèlent que les
étudiants interrogés semblent avoir conscience de ce qu'est le
développement durable. En effet, ils estiment que le
développement durable est « quelque chose de positif
» et un ensemble d'actions, de démarches en faveur de
l'environnement. De même, il apparait que le développement durable
est perçu comme un processus « important ». Au
premier abord, c'est la dimension environnementale qui est
dominante. Comme pour les enquêtes menées
auprès des ménages par le CREDOC, la dimension environnementale
semble encore bien ancrée dans l'esprit des individus. Les
étudiants interrogés attribuent, en premier lieu, le
caractère environnemental pour définir le développement
durable. On remarque que les autres piliers ne sont pas mentionnés dans
leur définition. C'est uniquement au fil des entretiens que la
définition du développement durable tend à
s'élargir.
« Ce qui m'évoque en premier c'est faire
attention à l'environnement » F.
« Selon moi, le développement durable serait
la capacité que les sociétés pourraient avoir pour
garantir le futur de la terre. Garantir l'existence de toute les
espèces, les faunes marines comme les terrestres et ainsi que les
ressources durables. » L
On remarque bien, que la dimension naturelle et
environnementale prime dans le discours des enquêtés concernant la
notion de développement durable. De même lorsque l'on demande quel
pilier leur semble plus important, c'est le pilier environnemental qui
resurgit.
« Le pilier environnemental parce que selon moi quel
que soit l'économie dans laquelle on est, l'environnement ça
reste le pilier essentiel pour toute croissance économique. »
L
Pour résumer, la définition de
développement durable selon les enquêtés reste très
marquée par la prédominance de la dimension écologique. De
même, lorsque l'on leur demande d'associer des termes à la notion
de développement durable, on remarque que « environnement
» et « écologie » sont les termes les plus
employés. Il existe donc une similitude au niveau des résultats
par rapport aux enquêtes déjà réalisée
auprès des ménages12. En effet, le volet
environnemental prime dans le discours des enquêté au début
des entretiens.
? L'enseignement, au secours des idées
pré conçues
12 CREDOC, 2013 IFOP, 2007
19
Un aspect positif a été mentionné par
trois des étudiants interrogés. Ils estiment que l'enseignement
de Madame Petia KOLEVA, dans le cadre du Master 1 MECI, a été
très bénéfique. En effet, cet enseignement proposé
leur a permis d'être davantage sensibilisé au développement
durable. De plus, les étudiants pris conscience que d'autres aspects et
acteurs pouvaient intervenir dans des logiques de développement
durable.
« Je trouve qu'elle a réussi à nous
sensibiliser sur le fait que les entreprises font du profit, cherchent à
faire du profit mais derrière faut quand même penser qu'il y a un
environnement qu'il faut protéger mais aussi une société
qu'il faut surveiller » T
« On a eu droit au cours de développement
durable et ça nous permis de comprendre qu'il faut essayer de garder les
ressources, de les travailler correctement pour ne pas les épuiser et
aussi pour ne pas dégrader l'environnement ». F
En somme, cet enseignement a permis aux étudiants
d'élargir leur vision du développement durable qui semblait se
limiter à la dimension écologique. De même, il semblerait
que les enquêtés ont appris sur la dimension économique,
particulièrement sur le rôle des entreprises, que sur les autres
aspects.
« Pour moi le développement durable
c'était surtout un acte citoyen et avec le cours de madame Petia KOLEVA
je me suis rendue compte que les entreprises avaient aussi une grande part dans
le développement durable ».L
Les enquêtés avaient des idées pré
conçues sur le développement durable, c'est l'enseignement qui
leur a permis d'avoir une vision plus large. De ce fait, ils semblent avoir
obtenus de nombreuses connaissances sur la question.
« J'ai appris beaucoup de nouvelles choses. Disons
que j'avais une certaine idée du développement durable, j'avais
une certaine base et que cette base s'est solidifiée, s'est
imprégnée de son cours ». F
On ne peut exclure le fait que l'enseignement suivis par les
étudiants a été déterminant dans la suite des
entretiens réalisés. A l'inverse des individus interrogés
par l'IFOP ou encore le CREDOC, le « public » étudiant est
avantagé dans la mesure où le développement durable leur
aie enseigné. Ils sont, a priori, en mesure de répondre car ils
disposent de toutes les informations nécessaires en termes de
développement durable. Cela s'inscrit dans leur quotidien puisqu'ils
étudient la question. Pour finir, l'enseignement a dans un premier temps
sensibilisés les étudiants à la question du
développement durable mais il a , par ailleurs, « éteints
» certaines idées pré conçues qu'avaient les
étudiants du développement durable. L'enseignement semble avoir
forgé leurs opinions et notamment permis aux étudiants
d'établir une grille de lecture sur les problématiques de
développement durable. Il aurait été intéressant
d'administrer des questionnaires avant l'enseignement proposé pour ainsi
comparer les résultats de l'étude.
? L'importance du rôle des
entreprises
L'étude a révélé que les
étudiants ont pris conscience du rôle qu'ont les entreprises dans
les logiques de développement durable. En effet, comme dit
précédemment, les enquêtés avaient des idées
pré conçus. Cela se limitait à l'environnement. Selon les
étudiants, l'entreprise agit dans le but de « rendre le monde
meilleur ».
20
« L'entreprise ce n'est pas du profit à tire
largo c'est aussi essayer de rendre le monde un peu meilleur. L'entreprise peut
être là pour faire du profit mais peut être là aussi
pour améliorer les droits du travail dans un pays où il n'y en a
très peu. [..] Elles peuvent aussi apporter des solutions ».
T
Le discours de l'enquêté laisse à penser
que les entreprises ont un rôle aussi déterminant que l'Etat dans
ces dynamiques. En effet, les entreprises doivent également assurer le
bien-être des salariés.
« En Tunisie par exemple, il y avait la pratique
courante de proposer aux employés un séjour à la Mecque
offert par l'entreprise. » F
Les enquêtés semblent donc avoir conscience que
les entreprises n'ont pas pour unique objectif de faire du profit mais
d'assurer le bien-être des salariés. Ils comprennent donc que la
dimension sociale concerne le monde de l'entreprise. De même, les
étudiants semblent attribuer une place importante au rôle des
entreprises. De ce fait, certains étudiants interrogés estiment
que les grandes entreprises se préoccupent uniquement du pilier
économique alors que les « jeunes entreprises » du pilier
social.
« Déjà souvent les grandes entreprises
quand elles pensent développement durable elles pensent écologie
et pas forcément social. Et les plus jeunes entreprises pensent plus au
social/environnemental. » T
En d'autres termes, l'enquêté oppose grandes et
petites entreprises. Selon lui, les grandes entreprises se préoccupent
davantage du pilier écologique que du pilier social alors que les
petites entreprises se concentrent sur le pilier social ainsi que sur le pilier
environnemental.
En somme, les étudiants interrogés semblent
comprendre la place qu'occupent les entreprises dans les logiques de
développement durable. Au départ, ils avaient une vision «
éco centrée » de l'entreprise. A présent, ils
parviennent à comprendre les enjeux sociaux autour des entreprises. De
même, les entreprises sont perçues comme des acteurs
incontournables du développement durable.
? Le développement durable : un effet
générationnel
L'étude a mis en évidence que le
développement durable est à la croisée de plusieurs
générations dans lesquelles il y aurait des écarts de
connaissance. Nous pourrions donc dire qu'il existe un effet
générationnel. Une étudiante interrogée a
expliqué qu'il y a trois générations qui se suivent et que
le développement durable n'était pas « pratiqué
» ou compris de la même manière selon les
générations.
«J'ai l'impression d'être à cheval entre
une génération qui s'en préoccupait pas du tout du
développement durable et une génération qui l'a
complètement intégré [...] Ma belle-mère qui vient
de la génération de mes parents, ne se pose pas du tout la
question [des déchets, de préserver la planète] et
ça ne fait pas partie de ses pratiques alors que votre
génération oui ». A, 32 ans
L'enquêtée distingue donc une
génération qui n'est pas du tout sensibilisée aux
problématiques de développement durable, une
génération « entre les deux » et enfin une
génération sensibilisée et ayant intégré le
développement durable.
21
Par ailleurs, elle explique que les anciennes
générations ne sont pas sensibilisées au
développement, par le fait que ce sont des générations
ayant connu des « privations ».
« Faut dire que la génération de ma
belle-mère c'est une génération qui a connu des privations
ou alors, c'est considéré comme un progrès d'avoir
accès à l'opulence ». A
En effet, les années 1950 sont marquées par le
début de la société de consommation (société
où les consommateurs sont incités à consommer des biens
avec abondance). De ce fait, avoir accès à la consommation de
manière abondante était synonyme de mutation, voire de
progrès, de la société. Rappelons que c'est en 1972
(période de croissance) que les problématiques en termes de
développement durable ont commencé à émerger
auprès de l'opinion publique. Ce qui pourrait expliquer le degré
de sensibilisation de ces anciennes générations.
« Moi mes parents ils s'en foutent
complètement de l'écologie, ils ne votent pas ils ne votent pas
EELV13, c'est générationnel, c'est évident
». T
Par ailleurs, l'étudiant interrogé pense que cet
effet générationnel peut évoluer de manière
positive. Selon, lui les générations futures seront encore plus
sensibilisées. « Nous oui on est sensibilisé à
ces choses-là, peut-être que les générations futures
seront encore plus sensibilisées parce qu'elles seront encore plus
ancrées dans ces enjeux écologiques et sociaux ». T
Un autre étudiant affirme également que le
développement durable est une « question de
génération ».
« Quand je vais chez certaine personne de ma famille,
ceux qui font du tri ce sont ceux qui sont proches de ma
génération. Mais c'est sûr qu'au niveau des parents,
grands-parents ou de ma famille d'un certain âge, il n'y a pas vraiment
de tri. » F
A travers cet exemple, on remarque que le rapport au
développement durable diffère selon la génération
notamment à travers les pratiques comme le tri. Il apparait donc que les
générations anciennes semblent moins préoccupées
par les démarches de développement durable. Pourrait-on dire que
ces générations ne se préoccupent pas aux enjeux du
développement durable en raison du degré de connaissance de la
notion ? L'enquête du CREDOC menée en 2013 a mis en
évidence qu'il subsiste un clivage générationnel. 56 % des
18-24 estimaient avoir une idée précise du terme contre 32% des
70 ans et plus. On pourrait peut-être établir un lien entre le
degré de connaissance et le degré de préoccupation aux
problématiques du développement durable. Plus une personne
connait et maîtrise la notion de développement durable plus elle
serait préoccupée à ces enjeux.
Une quatrième étudiante a montré qu'il
existait aussi un effet générationnel. A l'inverse des autres
étudiants interrogés (qui estimaient que les anciennes
générations étaient beaucoup sensibilisées et
préoccupées par le développement durable), L pense que les
générations anciennes sont aussi sensibilisées. En effet,
l'enquêtée explique que ses parents viennent du Cameroun et que
les conditions de vie n'étaient pas les mêmes qu'en France. Par
exemple, les personnes étaient contraintes de récupérer de
l'eau dans un puit car l'Etat n'avait pas pu construire de canalisations pour
l'eau.
13 Europe Ecologie Les Verts, parti politique écologiste
Français
22
« En fait, c'était pas la même vie, mes
parents viennent du Cameroun. Là-bas la vie n'était pas la
même par exemple y'a des coupures d'électricité assez
souvent [...] donc les modes de vie n'étaient pas les mêmes.
» L
Elle explique alors que sa mère a gardé des
habitudes en raison de ses conditions de vie. Elle a donc des pratiques en
termes de développement durable comme par exemple la gestion de l'eau.
« Ma mère a gardé cette idée de ne pas gaspiller
l'eau. » L.
A travers ce discours, on remarque que la mère de
l'enquêtée a adapté ses comportements en fonction du cadre
de vie. De même, le manque a permis d'être plus vigilant aux
ressources naturelles et énergétiques.
« Elle fait quand même plus attention qu'une
personne qui aurait vécue avec de l'eau et de
l'électricité à disponibilité ». L
Les différents discours des étudiants ont
montré qu'il existait bien un effet générationnel en
termes de développement durable. Cet effet peut s'expliquer par le
contexte socioéconomique (l'essor de la consommation de masse par
exemple). Par ailleurs, les entretiens ont également montré que
les conditions de vie pouvaient avoir un impact sur les pratiques en termes de
développement durable.
Les anciennes générations apparaissent encore
comme des générations peu sensibilisées ou peu
informées en comparaison avec les générations actuelles,
même si il existe des exceptions (par exemple, les conditions de vie qui
peuvent entraîner des comportements et pratiques en matière de
développement durable). Cet écart de connaissance a un impact sur
les pratiques des individus. Les plus jeunes semblent plus sensibilisés
aux logiques de développement durable.
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