2. L'accessibilité aux pratiques quotidiennes
Deux étudiants interrogés estiment que les
pratiques en termes de développement durable sont difficilement
accessibles.
« On essaye d'avoir des pratiques mais après
c'est vrai que parfois ce n'est pas facilité de ce qui nous entoure
quand on a pas les infrastructures nécessaires. Il y a très peu
d'infrastructures ici à part à Paris où ils essayent de
permettre le développement durable franchement quand on est en banlieue
il n'y en pas des masses ». L
Le discours montre qu'il existe une forme
d'inégalité dans l'accès aux pratiques en termes de
développement durable entre le centre et les villes en
périphérie. Elle estime que le développement est
difficilement accessible et qu'il subsiste une inégale
répartition des infrastructures.
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Le second étudiant considère qu'il existe un
accès difficile au développement durable non pas en terme de
pratique des citoyens mais en terme d'équipement collectif comme les
transports.
«Le développement dans les grandes villes de
transport aux communs, les tramways, les Vélibs et Autolibs. Il y a une
certaine discrimination, toutes les villes ne peuvent pas se payer ce genre de
choses. » F
On comprend donc qu'à travers ses dires, le
développement durable parait difficilement accessible tant par les
citoyens que par les villes. Il y aurait une inégale répartition
de ces équipements selon les départements.
« Par exemple, tu prends le 92 il me semble que dans
toutes les villes du 92 tu as des Vélibs et Autolib. Quand tu vois le
93, je connais que la ville de Drancy qui ait des Autolibs ». F
Le développement durable parait peu accessible que ce
soit individuellement (en terme de pratiques) ou collectivement
(équipement des villes comme les transports). Les étudiants
estiment donc qu'il y aurait un effet discriminant dans les logiques de
développement durable, dans le sens où cela ne serait pas
accessible à tous. Les entretiens ont permis de comprendre que certaines
villes seraient donc en marge de ces démarches en termes de
développement durable.
? Une notion ambiguë et « trop large
»
Les étudiants perçoivent également la notion
de développement durable comme une notion ambigu et large.
« Ce sont des mots simples normalement compris par
beaucoup de monde. Mais voilà c'est trop large : Le développement
durable ça veut tout et rien dire ! Il y a trop de choses à
comprendre. Ca englobe beaucoup de choses. Ces choses ne sont pas comprises et
cernées par tout le monde. » F
Selon l'enquêté , la notion de
développement durable est une notion très large. De ce fait, elle
recouvre de nombreux éléments qui ne sont pas forcément
compris par tous les individus.
« Le développement durable c'est plutôt
un mot fourre-tout que ce soit dans le marketing ou dans des discours
politiques.. » A
« A force de créer des concepts on le perd.
C'est beaucoup trop fourre-tout. Si on avait un concept clair par exemple le
développement durable, c'est seulement ça, ok ! Mais dire que le
développement durable c'est l'économie, la croissance,
l'environnement, les ressources naturelles, santé. Les personnes se
sentent perdues ». L
« C'est ça le problème avec le
développement durable c'est qu'ils ont mis des domaines
différents et des domaines où personnes ne peut être expert
dans ces domaines-là ». L
Comme énoncé dans le point
précédent, il y a un écart de connaissance. Les domaines
qui forment la notion de développement durable sont des domaines
explicités uniquement dans la sphère
académique/universitaire. Les discours en termes de développement
durable ne semblent pas adaptés à tous. Dans les
définitions officielles du développement durable, trois piliers
sont distingués. Néanmoins, les étudiants ont quand
même le sentiment que cette notion est vaste. Cela traduit le fait que
certaines personnes peuvent définir la notion de développement
selon sa propre perception.
25
« Quand tu demandes à un écolo de
définir le développement durable, il va prendre sa partie
à lui. Il ne va pas prendre en compte les autres piliers. »
L
Définir le développement durable selon sa propre
conviction, perception ou encore vocation, peut en définitif
déformer la définition concrète. C'est pourquoi beaucoup
d'individus considèrent le développement durable comme un concept
« ambigu ».
? Le rôle des acteurs : médias,
gouvernements
Nous avons vu que les étudiants avaient une
représentation positive de certains acteurs comme par exemple les
entreprises. Cependant, il apparait que d'autres acteurs ne sont pas
forcément bien perçus par les étudiants, c'est le cas des
médias.
Un enquêté regrette que les médias
n'informent pas suffisamment les individus sur le développement durable
et que par ailleurs, cela crée un manque de sensibilisation et
d'information. De ce fait, l'étudiant propose que le
développement durable soit davantage explicité dans les
médias comme par exemple dans les magazines
spécialisés.
« Je dirai que les médias n'en parlent pas
forcément assez. Je dirai qu'il faudrait plus de sensibilisation
à travers des revues spécialisées. Je dirai qu'il y a un
manque de transparence, un manque de développement sur ce sujet par les
médias ». F
De plus, certains étudiants interrogés
considèrent que les médias mettent en avant certains piliers du
développement durable au détriment des autres. Les entretiens
réalisés ont donc permis de distinguer deux types de discours. Le
premier discours énonce le fait que les médias mettent en avant
le pilier écologique alors que le deuxième discours affirme que
c'est le pilier économique qui est le plus exposé.
« On s'intéresse trop à
l'écologie je trouve, l'écologie c'est un fait mais faut aussi se
rendre compte qu'il y a des inégalités, je trouve que les
médias en parlent trop peu. C'est pour ça quand tu vas demander
à n'importe qui n'a pas fait de cour de développement durable, on
dit c'est quoi le développement durable il va dire `écologie'
». T
« La dimension sociale est en retrait, on se focalise
beaucoup sur l'écologie et très peu sur le social. C'est bien
beau d'avoir un environnement tout propre mais c'est bien aussi d'avoir des
humains qui se sentent bien et égaux ! » T
A travers son discours, on comprend donc que le pilier social
semble en retrait par rapport au pilier écologique. Le pilier social
semble être important puisqu'il se doit de procurer du bien être
aux individus dans la société. La surexposition du pilier
environnemental dans les médias a donc ancré cette logique dans
l'esprit des individus. Lorsque l'on demande aux étudiants de citer des
mots qu'ils pourraient associer au développement durable, on remarque
que ce sont les termes « écologie » et « environnement
» qui reviennent fréquemment. Nous pourrions donc mettre en cause
le rôle des médias dans la diffusion des informations. Cette
surexposition de la dimension écologique conditionnerait donc les
individus à penser « écologie » et donc mettre à
distance involontairement les autres piliers. Par ailleurs, cette surexposition
tendrait également à fausser la définition concrète
du développement durable.
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L'enquête a permis d'identifier un second discours. Une
étudiante estime que c'est la dimension économique du
développement durable qui est surexposée au détriment du
pilier environnemental.
« Le pilier environnemental n'est pas suffisamment
exposé » L
« En fait les médias ont souvent tendance
à communiquer cette phrase `L'environnement est important mais ce qui
est plus difficile c'est l'économie et on verra l'environnement plus
tard'. Et tous les ans l'écologie est remis à plus tard,
ça veut que ce n'est pas suffisamment important selon eux. »
L
L'étudiante juge que les médias se
préoccupent principalement de l'économie. Elle estime donc que le
pilier économique « fait de l'ombre » au pilier social. La
représentation de l'étudiante confirme un des résultats de
l'enquête du CREDOC. L'étude a montré que les
préoccupations concernant le chômage, par exemple, semblent
beaucoup plus inquiétantes que les préoccupations
environnementales. En d'autres termes, dans un contexte de crise
économique, les préoccupations environnementales sont mises
à distance en dépit de problèmes socioéconomiques.
On pourrait dire que la surexposition de certains piliers dans les
médias aurait donc une influence sur les représentations des
individus. Plus un pilier est exposé, plus il sera davantage
préoccupants dans l'esprit des individus.
Concernant les acteurs, deux étudiants avancent une
idée similaire. Ils estiment qu'il y aurait un « manque d'acteurs
» et plus particulièrement, un manque de « spécialistes
» dans les logiques de développement durable.
Une étudiante interrogée reproche le manque de
« techniciens » dans les logiques de développement durable. En
effet, elle estime que la notion de développement durable est
très conceptuelle car elle a été mise en place par des
théoriciens et non des « techniciens ».
« C'est surtout ça le problème. Je
pense que le jour où l'écologie, l'économie et le social
seront compréhensibles par tout le monde c'est le jour où les
techniciens vont essayer de vouloir reprendre ces principes là et les
recréer en fait pour être plus facilement compréhensibles.
» L
Cela pourrait expliquer le fait que certains individus n'ont
pas une idée précise de ce que signifie la notion de
développement durable. La manque de « techniciens » ou de
personnes qui mettent en place des mesures concrètes concernant le
développement durable, pourrait avoir un impact sur la perception des
individus. De ce fait, les « techniciens » seraient en mesure de
rendre la notion plus compréhensible en la concrétisant
réellement et en l'incorporant dans le quotidien des individus.
Un second étudiant déplore également un
manque de « spécialistes » en termes de développement
durable.
« J'aurai tendance à vouloir mettre des
personnes qui sont spécialisées dans les domaines en question.
Par exemple pour le développement durable je suis sure que les personnes
à la tête du ministère ils doivent être très
intelligents. Mais qu'est-ce qui en savent au développement durable ? Il
y a peut-être ce manque de spécialistes au sein du gouvernement ou
du moins leur place n'est pas valorisée. » F
L'étudiant interrogé estime que le gouvernement
manquerait d'acteurs-spécialistes dans le domaine du
développement durable et que leur place mériterait d'être
valorisée. Mettre des personnes spécialisées dans ces
domaines permettraient en définitif une meilleur compréhension de
cette notion. L'enquêté insiste sur le rôle du gouvernement.
Il considère que c'est au gouvernement d'inclure des acteurs
spécialisés.
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« Le gouvernement devrait peut- être faire de
la recherche et du développement peut être qu'ils devraient
intégrer à leur ministère des personnes
spécialisées dans les domaines. » F
Cette partie avait pour ambition de présenter les
résultats de la partie qualitative de l'enquête. Cependant, ce
n'est pas représentatif puisque 4 étudiants ont été
interrogés. Malgré que cette partie de l'enquête ne soit
pas représentative, plusieurs conclusions ont pu être
tirées. De ce fait, nous verrons si la partie quantitative confirme les
résultats de l'enquête qualitative ou si les résultats
diffèrent.
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