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Le système de preuve devant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda

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par Liliane Egounlety
UNIVERSITE D'ABOMEY-CALAVI (Bénin) - DEA Droits de l'Homme et Démocratie 2005
  

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PARAGRAPHE 2 : LA DIFFICILE RECHERCHE DE L'INTENTION SPECIFIQUE

Le dol spécial est un élément très spécifique du génocide. La difficulté à laquelle se heurte la poursuite est celle de savoir à quel niveau cette intention spécifique doit être recherchée. Elle est encore plus difficile à démontrer lorsque l'accusé occupe un poste élevé de responsabilité. Les juges du TPIR l'ont recherché tantôt au niveau de l'auteur présumé (A), tantôt en analysant dans le contexte de perpétration des crimes, les éléments indicateurs de l'existence de cette intention spécifique (B).

A- La qualité de l'auteur

L'article 6 du Statut du TPIR renseigne sur les conditions dans lesquelles peut être engagée la responsabilité pénale individuelle de toute personne accusée par lui. Il en ressort que toute personne dont on fait la preuve qu'elle est à l'origine ou mêlé à la mise en oeuvre d'une politique de destruction entrant dans le cadre de l'article 2 du même Statut peut voir engagée sa responsabilité personnelle pour génocide217(*).

Ainsi, un responsable hiérarchique ou un simple agent exécutant peut voir sa responsabilité pénale individuelle engagée dès que la preuve est établie qu'il a participé à un complot en vue de commettre le génocide. La responsabilité directe du supérieur hiérarchique218(*), ainsi que sa responsabilité indirecte du fait de ses subordonnés219(*), sont ainsi prévues. Mais comment établir cette responsabilité individuelle en tenant compte de la position de l'accusé dans la société ?

Pour déterminer l'intention génocidaire, le juge doit considérer un certain nombre d'éléments qui lui permettront de voir dans quelles mesures les actes posés par l'accusé étaient susceptibles d'engendrer la destruction du groupe visé par la politique discriminatoire220(*). Ainsi dans chaque affaire qu'il aura à connaître, l'appareil juridictionnel devra analyser la position de l'accusé pour déterminer de ses écrits, actes et paroles, lesquels ont pu conduire à la commission du génocide. La poursuite devra également démontrer comment l'accusé, en raison de son autorité de droit ou de fait, a pu instiguer le crime ou manquer à son obligation positive d'empêcher la commission des crimes qui se commettaient sous sa responsabilité, dans sa juridiction et dont il était informé. Des éléments pertinents doivent donc être mis à jour pour établir la participation réelle de l'auteur présumé dans la conception ou la mise en oeuvre du plan génocidaire.

Dans le cadre général des violations massives de droits de l'homme perpétrées au Rwanda, les chambres ont reconnu que les tueries générales et systématiques perpétrées à l'échelle du pays visaient l'extermination du groupe Tutsi221(*), et que le génocide paraissait avoir été minutieusement organisé222(*).

Plus précisément, dans l'affaire AKAYESU, il a été démontré que l'accusé, en sa qualité de bourgmestre, était, durant toute la période visée dans l'Acte d'accusation, chargé du maintien de l'ordre public et de l'exécution des lois dans la Commune de Taba et qu'il exerçait une autorité effective sur la police communale. De plus, en tant que "dirigeant" de la Commune de Taba, dont il était l'une des plus importantes personnalités, les habitants respectaient et suivaient ses ordres.

L'accusé a reconnu lui-même devant la Chambre, qu'il avait le pouvoir de rassembler les populations et que celles-ci obéissaient aux instructions qu'il leur donnait. Il est également établi que de très nombreux Tutsi ont été tués à Taba entre le 7 avril et la fin de juin 1994, alors qu'il était bourgmestre de la Commune. Ayant eu connaissance de ces massacres, il ne s'y est opposé et n'a tenté de les empêcher que jusqu'au 18 avril 1994, date à partir de laquelle il n'a non seulement plus essayé de maintenir l'ordre dans sa commune, mais a même assisté à des scènes de violence et à des tueries, et a quelquefois lui-même ordonné qu'il soit porté atteinte à l'intégrité physique ou mentale de certains Tutsi et a cautionné, voire ordonné, les meurtres de plusieurs Tutsi223(*).

Il apparaît ainsi que la qualité de bourgmestre de l'accusé a pesé dans la perpétration du génocide dans cette commune du Rwanda. Mais cette qualité, à elle seule, ne suffit pas pour déterminer entièrement l'intention génocidaire.

* 217 Statut du TPIR, art 6, §1.

* 218 Ibid., § 2.

* 219 Ibid., § 3.

* 220 Anne-Marie LA ROSA, op. cit., p. 407.

* 221 Aff. n° ICTR-96-4-T, Le Procureur c/. Jean-Paul AKAYESU, § 112.

* 222 Ibid., § 126.

* 223 Ibid., § 704.

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