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Contribution aux études méditerranéennes: les relations turco-tunisiennes (1956-2001)

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par Meriem JAMMALI
INALCO - Maîtrise de langue et de civilisation turques 2003
  

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CHAPITRE III : QUAND ANKARA ET TUNIS COMMUNIQUENT...

1. Introduction au dialogue diplomatique turco-tunisien

Le dépouillement des documents diplomatiques auxquels nous avons pu accéder montre que les relations entre la Turquie et la Tunisie ont connu la même évolution que celle entre la Turquie et le monde arabe. En effet, jusqu'aux années 60, la plupart des pays arabes était sous la domination coloniale. Cela signifiait que tout contact officiel d'ordre diplomatique ou autre devait forcément passer par l'autorité colonisatrice.24(*)

C'est dans ce contexte même que la politique extérieure turque était orientée en fonction des intérêts de la Turquie et de ses relations avec les pays occidentaux, notamment la France et le Royaume-Uni. La Turquie voulait en effet épouser la modernisation et adopter un alignement politique avec l'Occident, quitte à renier le soutien qu'elle a toujours apporté à la lutte des pays colonisés, y compris les pays arabo-musulmans25(*).

En effet, depuis la création de la République turque et jusqu'à l'émergence du problème chypriote au début des années 60, noyés dans leurs environnements respectifs, le monde arabe et la Turquie s'ignoraient mutuellement. Les Turcs et les Arabes ne communiquaient que pour s'accuser mutuellement. En Turquie, on a vécu la révolte, en 1916, des provinces arabes contre le pouvoir ottoman comme « un coup de poignard dans le dos ». Tandis que les Arabes considèrent la Turquie, -héritière directe de l'Empire ottoman - comme la cause directe de leurs problèmes. Les réformes religieuses entreprises par Atatürk n'ont fait qu'empirer les choses. Ce qui a nourri un sentiment anti-turc, surtout dans les pays du Proche-Orient qui vécurent des siècles durant sous la domination ottomane. Par conséquent, toute tentative de réconciliation entre les deux parties devait se heurter aux faits du passé.

Néanmoins, la période d'isolement sur la scène internationale que la Turquie a traversée dans les années 60-70, a profondément marqué la diplomatie turque. En effet, déçue par la politique occidentale relative au problème chypriote26(*), la Turquie se sentait isolée du reste du monde surtout du bloc afro-asiatique. Il en est résulté une volonté turque de dialoguer avec les pays qu'elle avait jusque-là ignorés. La Tunisie en faisait partie.

De son côté, Tunis ne pouvait pas rester insensible à la démarche d'Ankara pour renouer avec le monde arabe. Le portrait de la Turquie dressé par la presse tunisienne tout au long de la période étudiée (1956-2001) laisse transparaître une nette évolution de l'image que les Tunisiens se font de la Turquie. En voici quelques éclaircissements.

En effet, les journaux tunisiens d'avant 1956, date d'indépendance tunisienne, on ne parlait ni de la Turquie ni de la nécessité d'oeuvrer avec elle. Les deux pays s'ignoraient mutuellement. Mais à partir de 1956, la donne a changé. Car la dizaine d'organes de presse tunisienne que nous avons consultés dressent dans la plupart des cas un portrait élogieux de la Turquie. Etant pro-gouvernementaux, ces organes reflètent la position officielle du gouvernement tunisien vis-à-vis de la politique internationale du pays.

La visite de Bourguiba à Ankara en 1965 marqua un tournant décisif dans la diplomatie des deux pays. Elle inaugura une nouvelle ère dans l'histoire de la coopération bilatérale, traduite, entre autres, par la visite effectuée en Tunisie en 1966 par le président turc Cevdet Sunay. Cette phase de découverte mutuelle allait se poursuivre jusqu'au début des années 70. C'est à partir de cette date que la presse tunisienne commence à évoquer la Turquie en tant que partenaire économique et politique avec qui la Tunisie pourrait entrer en partenariat.27(*) Dès lors, on la présentait comme un pays frère avec lequel on doit entretenir d'excellentes relations, dans la mesure où les deux pays sont à la fois méditerranéens et membres de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI).

Pour illustrer ces propos, la presse tunisienne ne manquait pas de recourir si besoin est à l'histoire de l'Empire ottoman ainsi qu'aux défis et aux objectifs communs. Ils sont confrontés aux mêmes difficultés engendrées par une économie mondiale mouvementée d'où la nécessité de renforcer la coopération bilatérale. En témoigne cet extrait d'un article de L'Economiste Maghrébin, publié suite à là la visite de Ben Ali en Turquie en 2001 :

« Tunisie-Turquie ! Deux destins qui se sont pendant longtemps croisés à travers l'Histoire et qui convergent de nouveau. Comme un jeu de miroir d'une marche forcée des deux pays à travers les méandres d'une réalité mondiale baptisée pudiquement globalisation. »28(*)

A présent, nous proposons de revenir sur le contenu et l'évolution des relations diplomatiques entre les deux pays pendant la période étudiée (1956-2001).

* 24 Orhan KOLOðLU «The Turkish-Libyan relations», dans Turkish Review of Middle East studies, 7 (1993), passim.

* 25 L'attitude très critique d'Atatürk envers l'héritage religieux musulman a suscité bien des réserves au sein des pays musulmans.

* 26Rappelons ici la prise de position américaine vis-à-vis de la Turquie en rapport avec le problème chypriote. En effet, dans une lettre adressée le 5 juin 1964 au premier ministre turc, le président américain, Johnson, déclare que les Etats-Unis ne sont pas prêts à défendre la Turquie contre une éventuelle menace soviétique. La Turquie, bien qu'elle fasse partie de l'OTAN, s'est sentie déçue de l'attitude occidentale. Les Américains voulaient certainement ménager les Britanniques, ex-puissance coloniale à Chypre ainsi que la Grèce, membre actif de l'Alliance atlantique. Cette situation allait conduire les Turcs à ajuster leur politique internationale, en essayant de créer une atmosphère de détente avec l'URSS et en s'approchant davantage des pays arabo-musulmans.

* 27 Dans Le Temps du 23/3/1979.

* 28Hédi MECHRI « Ben Ali en Turquie, coopération », dans L'Economiste Maghrébin, n°284, du 28/3 au 11/4/2001.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus