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La preuve en droit fiscal

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par KAMOUN Fériel
Université de Sfax-Tunisie -  2003
  

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Paragraphe II : Le problème de la preuve par la comptabilité

En matière d'administration de la preuve, le contribuable se trouve « piégé »5. Le piège se referme lorsque le contribuable voulant administrer cette preuve au moyen de sa comptabilité6 se voit opposer l'irrégularité de celle- ci7.

Le contribuable taxé d'office suite à un rejet de comptabilité se voit privé d'un moyen de preuve pertinent8. Le scandale est d'autant plus sensible, écrivait un commissaire de gouvernement, que le seul élément dont le contribuable puisse faire état au soutien de son point de vue - sa comptabilité- est a priori réputé tendancieux : l'administration objecte, la plupart du temps, qu'elle n'a pas enregistré la totalité des recettes9.

La situation du contribuable est précaire au niveau de l'administration de la preuve. Quand il n'a pas la charge de la preuve car sa comptabilité est régulière, il peut théoriquement prouver. Or, quand il a la charge de la preuve suite à une taxation d'office par rejet de comptabilité, il ne peut pas prouver. « Il

n'étais pas à un endroit revient à prouver que j'étais autre part. la preuve négative est donc transformée en preuve positive.

Bien différente la situation lorsque le fait négatif invoqué ne comporte pas d'antithèse. Exemple si je prétends que je ne devais rien à cette personne parce que j'ai jamais contracté avec elle, il m'est pratiquement impossible de prouver ce que j'avance car ma prétention se fonde sur ce que l'on appelle une proposition négative indéfinie.

M.-C. BERGERES, << Contrôle fiscal : prérogatives du fisc et droits du contribuable >>, Masson- Encyclopédie Delmas, Paris, 1988, p. 119.

Sur la preuve d'un fait négatif voir

1 M.-C. BERGERES, << Contrôle fiscal : prérogatives du fisc et droits du contribuable >>, op.cit., p. 119.

2 M.-C. BERGERES, << Contrôle fiscal : prérogatives du fisc et droits du contribuable >>, Masson- Encyclopédie Delmas, Paris, 1988, p. 119.

3 - C.E. 19 décembre 1973, plén. n°87649, D.F. 1974, n°11, comm. N°314, concl. Madame Latournerie ;

- C.E. 4 avril 1979, req. n°6673 et 8675, D.F., n°51 comm. 2513 ;

- C.E. 21 novembre 1980, req. n°13329 et 13330, D.F. 1981, n°17 comm. 922 et 923.

4 Sur la question du déplacement de l'objet de la preuve voir aussi : B. DELIGNIERES, << Comment un déplacement de l'objet de la preuve a conduit à l'érosion des pouvoirs de l'administration en matière de taxation d'office des revenus ( L.P.F., art. l. 69 ) >>, D.F. 1993, n°7, p.336-339.

5 Conclusions sur l'arrêt du CE, 25 mars 1983, req. n.34, D.F. 1984, n°14, comm. 694.

6 En pratique, c'est essentiellement par sa comptabilité que le contribuable va tenter de prouver l'exagération de l'imposition.

7 J. BOULOUIS, << Procès du juge fiscal >>, RSF 1957, n°4, p.645.

8 En France, l'exemple de la << Pizza Vittori >>, est très illustratif. En effet, non seulement elle s'est mise dans le cas de l'imposition d'office, mais elle ne peut pas faire la preuve à partir de sa comptabilité puisque celle-ci est inutilisable. Il faut donc qu'elle fasse des `raisonnements extra-comptables'. C'est toujours plus ou moins sujet à caution. Et elle n'est arrivée, en l'espèce, à convaincre le juge que sur cette affaire de vin et d'apéritifs qui e exposé dans l'arrêt. Michel Rougevin-Baville, Renaud Denoix de Saint Marc, Daniel Labetoulle, << Leçons de droit administratif >>, Paris 1989, p.529.

9 Conclusions sur l'arrêt du CE, 25 mars 1983, req. n.34, D.F. 1984, n°14, comm. 694.

existe en la matière un véritable paradoxe : quand le contribuable n'a pas à prouver, il peut prouver ; en revanche, quand il doit prouver, il ne dispose pas de preuve préconstituée >>1.

En France, le juge fiscal applique les règles de preuve avec une certaine souplesse. Il vient quelquefois au secours du contribuable taxé d'office en allégeant le fardeau de la preuve qui lui incombe2.

D'une part, la jurisprudence a fait preuve d'un certain libéralisme. Elle considère que certains éléments de la comptabilité peuvent être retenus malgré des erreurs3. Cette jurisprudence se traduit donc par la fourniture d'éléments de preuve préconstituées qui avaient été écartées par la procédure de taxation d'office4.

D'autre part, le conseil d'Etat, par un arrêt très important du 19 décembre 1973, a décidé que le contribuable « peut s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses revenus en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie en vue de démontrer que cette méthode aboutit, au moins sur certains points et pour un certain montant, à une exagération des bases d'imposition, soit encore, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge une nouvelle méthode d'évaluation permettent de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode primitivement utilisée par l'administration >>5.

Ainsi le conseil d'Etat intervient pour sauvegarder les droits des contribuables qui ne peuvent s'appuyer sur une comptabilité régulière et probante. Cette jurisprudence permet au contribuable taxé d'office d'apporter la preuve qui lui incombe en présentant une critique de la méthode de l'administration. La critique de la méthode d'imposition dans son principe suffit à décharger le contribuable sans qu'il ait à établir l'exagération de l'imposition.

Ainsi, selon le conseil d'Etat, la preuve incombant au contribuable est considérée, dans certaines hypothèses, comme apportée même si le contribuable n'établit pas l'exagération de l'imposition, dès lors que l'administration utilise une méthode radicalement viciée ou excessivement sommaire6.

Depuis l'arrêt du conseil d'Etat du 19 décembre 1973, les possibilités de contestation juridictionnelles des bases d'imposition arrêtées d'office se sont sensiblement ouvertes sous la condition du respect de certaines règles de preuve7.

Par ailleurs, il faut noter que « les chausse-trappes de la charge de la preuve sont surtout préjudiciables aux contribuables qui, sans être tous et toujours parfaitement honnêtes - il ne faut pas rêver, sont néanmoins, pour la plupart d'entre eux, des naïfs qui ne savent pas se mettre en situation de force devant le fisc. Alors que d'autres, beaucoup plus avisés et souvent plus malhonnêtes savent

1 M.-C. BERGERES, << Contrôle fiscal : prérogatives du fisc et droits du contribuable >>, Masson- Encyclopédie Delmas, Paris, 1988, p. 120.

M.-C. BERGERES, << Le principe des droits de la défense en droit fiscal >>, thèse, Bordeaux, 1975, p. 325.

2 Voir sur la question Jean-Pierre MAUBLANC, << L'interprétation de la loi fiscale par le juge de l'impôt >>, thèse, université de Bordeaux I, faculté de droit des sciences sociales et politiques, 1984, p.278.

3 Maurice-Christian BERGERES, << quelques aspects du fardeau de la preuve en droit fiscal >>, Gaz. Pal. 1983, n°1, p.149.

4 M.-C. BERGERES, << Le principe des droits de la défense en droit fiscal >>, thèse, Bordeaux, 1975, p. 326.

5 C.E. 19 décembre 1973, plén. n°87649, D.F. 1974, n°11, comm. N°314, concl. Madame Latournerie ; Lebon p.734 ; Dupont 1974 p.90.

On lira avec profit la chronique de Philippe CROUZET, << Administration de la preuve >>, R.J.F. 1986, n°6, p.347-350. Et DELIGNIERES (B.), << Preuve fiscale >>, (impositions établies sur la base de données comptables, preuve comptable et extra-comptable), juris-classeurs, Proc. Fisc., Fasc. 382, 1994.

6 La notion de méthode excessivement sommaire est apparue pour la 1ère fois dans la décision du C.E. 21-10- 1981 puis sa décision du 22-12-1982.

7 Alain FRENKEL, in << La taxation d'office à l'impôt sur le revenu >>, ( actes des journées d'études organisées par la société française de droit fiscal à Strasbourg 3 et 4 mai 1979), Annales de la faculté de Droit et des Sciences Politiques et de l'institut de recherches juridiques, politiques et sociales de Strasbourg, Tome XXXI, L.G.D.J. 1980, p.95.

se mettre en bonne situation par la pratique des montages juridiques, des structures apparentes et, surtout, des preuves préalables autant que préfabriquées que tout contribuable conscient et organisé peut se créer à soi-même, nanti de bons conseils >>1.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe