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La communication participative communautaire au Sénégal

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par Sébastien Froger
Universite Stendhal Grenoble 3 - Institu de la communication et des médias - Master 2 communication scientifique et technique 2005
  

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II.2. Adaptation de la démarche au développement de la culture scientifique

S'il n'y a pas de méthode à appliquer pour le déroulement d'un projet, on peut tenter de donner une méthodologie de la démarche participative «générique», traitant des différentes étapes, sans donner de chronologie, pour mettre en place un démarche participative au niveau communautaire.

Il s'agit plus de conseils pour mettre en place le projet, dont le programme sera mis en place par la suite avec la communauté sous l'angle communication (au sens large), destinés aux chercheurs et agents de développement devant agir dans un projet participatif.

Ces conseils sont adaptés à une démarche visant le développement de la culture scientifique et la sensibilisation par la même occasion à des sujets en rapport avec des activités de recherche. Mais ils devraient être aussi applicables pour d'autres objectifs, comme faciliter des programmes de recherche participative, ou le transfert d'une innovation à une communauté.

27 BESSETTE Guy, Communication et participation communautaire : Guide pratique de communication participative pour le développement, Les Presses de l'Université Laval, 2004, p 10.

a. Entrer en contact avec la communauté et s'informer du contexte local

Cette première phase est très importante puisqu'elle conditionnera en grande partie les relations futures avec la communauté.

Il faut bien sûr se renseigner avant d'entrer en contact directement avec la communauté, sur le milieu de vie, la culture, les activités, les contraintes, les personnes clés (chef de village, marabout, sous-préfet, instituteurs...).

Ensuite les premiers contacts avec la population peuvent être établis, en corrélation avec la façon de faire locale (aller d'abord voir le chef de village par exemple, ou le maire, le directeur de l'école...).

Après avoir rencontré la communauté, il faut prendre le temps d'identifier les différents groupes et personnes-clés, qui pourront aider à mise en place du projet, par leur statut dans la hiérarchie, ou leur compétence, ou encore leur situation au plus près des enjeux ou problèmes à identifier s'il y a lieu.

Dans le cadre du développement de la culture scientifique, on ira principalement identifier les groupes de personnes susceptibles de s'impliquer le plus dans le projet.

La difficulté dans ce domaine spécifique est que selon le niveau de culture scientifique des personnes, le projet ne sera pas mené du tout de la même manière.

Dans le cas spécifique du développement de la culture scientifique, nous pensons que les cibles privilégiées sont les enfants scolarisés. D'une part, parce qu'ils sont dans une infrastructure qui pourra aider à la mise en oeuvre de la démarche, d'autre part, parce qu'ils possèdent un niveau de connaissance préalable qui facilitera l'acquisition d'une démarche scientifique et d'un esprit critique envers l'activité scientifique. De plus, cette génération prendra le relais des aînés par la suite. En effet, il s'agit d'un processus long à mettre en oeuvre, et des résultats durables ne sont valables que sur le long terme, il nous semble donc plus pertinent de miser sur les jeunes générations.

Enfin, ils peuvent constituer des relais efficaces vers leurs familles, leurs amis. Dans quasiment toutes les familles au Sénégal, que ce soit dans un milieu rural ou urbain, au moins un enfant par famille est scolarisé. Les espoirs d'ascension sociale reposent souvent sur lui, et cette place au sein de la famille en fait un membre à qui l'on accorde plus de crédit qu'un autre, en dehors du chef de famille bien sûr.

Les personnes clés seront alors le directeur de l'école, éventuellement l'inspecteur d'académie, les professeurs, le maire ou le chef de village, et bien sur les écoliers.

Dans ce cas précis, on pourra considérer que l'école constitue la communauté, avec les familles des membres de cette école par extension.

Cette façon de cibler peut poser problème dans le sens où elle s'adresse à une frange quelque peu privilégiée de la population, laissant de côté les analphabètes, qui représentent la majorité de la population. Ce ciblage peut sembler aller à l'encontre des principes de la démarche participative énoncées auparavant, sauf si on considère l'école comme base de la communauté.

Mais rien n'empêche d'initier un projet au niveau de la communauté au sens large, s'adressant aux adultes également.

Les personnes ressources ne seront bien sûr pas les mêmes dans ce cas.

On peut même imaginer que les acteurs les plus impliqués dans cette démarche soient les enfants scolarisés, mais qu'ils ne laissent pas pour autant de côté les autres membres de la communauté, qui auront un rôle peut être moins participatif.

Toutefois comme le rappelle Chin Saik Yoon 28 :

« Si on se réfère à un public très général en parlant de «la communauté », ou « des habitants de tel village », il est peu probable que les gens se sentent concernés par le processus de communication. Chaque groupe qui forme la communauté - qu?on les classe selon l?âge, le sexe, l?origine ethnique, la langue maternelle,

l?occupation ou les conditions sociales et économiques - présente ses propres caractéristiques, son propre point de vue sur un problème et ses solutions et sa propre façon de passer à l?action.

La communication participative pour le développement vise à rejoindre certains groupes particuliers dans la communauté.»

Mais il faut surtout garder à l'esprit qu'il n'y a pas de règle préétablie, et que ces problèmes sont à élucider en fonction de chaque communauté, avec les membres de celle-ci. Une communauté s'orientera naturellement vers un travail avec les enfants scolarisés, une autre vers les adultes analphabètes.

b. Faire participer la communauté

Cette deuxième étape intervient une fois la relation de confiance établie entre les intervenants et la communauté, les mécanismes de collaboration mis en place, et les rôles et responsabilités négociés.

28 YOON C. S., La communication participative pour le développement [en ligne] in La communication participative pour le développement, Un agenda ouest-africain CRD I, Montréal, 1996, disponible sur http://www.idrc.ca/fr/ev-30910-201-1- DO_TOPIC.html (consulté le 04/08/2005).

Dans cette deuxième étape, le ou les intervenants ou animateurs, qu'ils soient agent de développement, chercheur ou autre, feront participer la communauté en fonction des personnes ou groupes ciblés.

C'est à ce moment que la communauté doit cerner le ou les problèmes, en discuter les causes et trouver des solutions potentielles.

Dans les cas où l'intervention ne procède pas de l'identification d'un problème, mais d'un but collectif, ce qui est le cas dans le développement de la culture scientifique, le processus est similaire : la communauté participe au choix de cet objectif, des activités et des conditions nécessaires à sa réalisation et à la prise de décision visant à mettre en oeuvre cette initiative.

S'il s'agit de développer la culture scientifique au sein d'une communauté, on déterminera en partenariat les besoins, les objectifs et les activités de communication.

Par exemple, une communauté décidera de traiter d'un sujet qui est en relation avec des préoccupations liées à son environnement. Dans un village de pêcheurs, on s'intéressera peut- être aux ressources halieutiques et leur gestion. Dans un village de brousse enclavé, c'est le recours aux soins qui intéressera les membres de la communauté.

Ensuite, il faudra décider avec ces derniers de quelle façon répondre à ces objectifs. Par exemple, comment acquérir des connaissances sur ces sujets, comment acquérir une démarche scientifique, en fonction des moyens potentiellement disponibles, tant au niveau matériel que humain.

Ce peut être par exemple en menant une enquête auprès de la population, en participant à une activité de recherche, ou encore en faisant des manipulations en laboratoire si les moyens le permettent.

c. Choisir les outils de communication appropriés

Ces activités choisies et planifiées, il faut choisir les outils de communication. Ceux-ci doivent bien sûr être appropriés à la démarche participative, c'est-à-dire être facilement manipulables par la communauté.

En effet, l'outil de communication aura ici une nature instrumentale : le but des médias utilisés n'est pas de diffuser l'information, mais bien de soutenir le processus de communication participative.

Par exemple, la production d'une vidéo n'aura pas pour but de diffuser une information sur tel avantage à adopter une attitude ou une innovation, mais plutôt de provoquer le débat, d'inciter à la discussion au sein de la communauté, pour soulever des questions.

Comme nous venons de l'évoquer, il est préférable d'utiliser des outils déjà connus par la communauté et auxquels ses membres ont souvent recours. Cela permettra une utilisation plus aisée et une appropriation de l'outil plus rapide.

Il faut garder à l'esprit que le but poursuivi est de faciliter la réalisation d'une initiative communautaire que les habitants ont eux-mêmes choisie. Développer la culture scientifique en ce qui nous concerne.

Par exemple, si nous choisissons de faire des sketchs pour sensibiliser à un problème particulier, le but premier ne sera pas le message avant tout, mais d'abord de sensibiliser ceux qui auront participé à sa réalisation, puis susciter le débat au sein de la communauté.

Le choix de cet outil sera fonction des habitudes de la communauté.

Bien sûr il faut prendre en compte les considérations techniques et le coût de tels médias. Si le choix retenu nécessite des compétences que les gens n'ont pas, ou que les lieux ne sont pas appropriés, un tel outil ne pourra pas être retenu.

Enfin, le choix de cet outil devra être déterminé par son usage. En effet, si on utilise le théatre-débat comme outil de communication, celui-ci pourra être efficace pour soulever les problèmes de la communauté par exemple. L'utilisation de médias de ce type permet d'inciter à la discussion. Dans le cas présent, l'avantage du théâtre est de présenter des situations et des personnages fictifs. Il sera alors plus facile de soulever de mauvaises attitudes, des scènes délicates que dans des situations réelles.

d. Planifier le suivi du projet

Il est préférable d'organiser les activités en fonction des disponibilités des participants, en rappelant les rôles et responsabilités de chacun.

Mener de telles activités n'est sûrement pas dans les habitudes de la communauté, le fait de planifier de façon formelle, de travailler en collaboration avec des partenaires inhabituels, nécessite une organisation concertée, sous peine de difficultés probables.

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Une fois la stratégie mise en place, le planning défini et les rôles distribués, l'animateur ou intervenant pourra garder un rôle moins important, consistant à faciliter la communication entre les partenaires, à réviser la planification si nécessaire, et suivre le bon déroulement des activités.

Moins l'intervenant aura à agir, mieux ce sera : c'est que la communauté aura pris en main son projet, en autonomie quasi complète dans l'idéal.

Mais encore une fois, cela dépend beaucoup du type de projet. Par exemple, pour reprendre notre projet fictif de développement de la culture scientifique auprès d'une communauté, l'intervenant pourra être un scientifique, épaulé ou non par un animateur.

Celui-ci devra directement intervenir dans le déroulement des activités, surtout s'il s'agit de permettre aux gens d'acquérir une démarche scientifique et/ou d'être sensibilisés à un thème en lien avec les recherches de ce scientifique.

Ces interventions peuvent revêtir plusieurs formes, en fonction des objectifs, des outils et des activités décidées par les partenaires, tenant compte des objectifs et enjeux soulevés.

Il pourra par exemple aider à la mise en place d'un protocole expérimental, à l'élaboration d'un questionnaire, à la réalisation d'affiches de sensibilisation, etc.

Dans ce cas, le rôle du chercheur est assez complexe. En effet, il doit sans imposer le contenu du médium ni la manière de l'utiliser, initier à une démarche scientifique.

Cela requiert de la pédagogie, et de ne pas intervenir dans le rendu final, même si celui-ci n'est pas de grande qualité.

Le piège étant de retomber dans un schéma vertical de type diffusionniste, le chercheur imposant au final ses idées. Sa méthode sera peut être la plus rigoureuse, mais coupera court à l'initiative des autres partenaires.

f. Etablir une méthode d'évaluation et d'exploitation des résultats

Le projet une fois lancé, il y aura inévitablement des ajustements, des améliorations à apporter, pour atteindre au mieux les objectifs. Il est très important d'élaborer des outils d'évaluation qui permettront d'améliorer le déroulement du projet.

S'il s'agit d'un projet à courte échéance, cette évaluation servira à la communauté pour savoir où étaient les lacunes.

S'il s'agit d'un projet à plus long terme, elle servira à améliorer en continu le processus.

De plus, cela permettra aux intervenants de faire leur auto critique et d'améliorer leur savoir faire pour d'éventuels futurs projets.

g. Se retirer de la communauté

Suite à l'évaluation et à l'exploitation des résultats, les intervenants pourront se retirer progressivement de la communauté.

S'il s'agit d'un projet voué à l'autonomie et mené à long terme, ce qui est le but premier de la démarche participative, les intervenants pourront garder un contact avec les différents partenaires de la communauté, de l'extérieur.

Il est préférable que ce retrait se fasse de manière progressive, pour être assuré du suivi et de la reprise du rôle de l'intervenant par la collectivité.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon