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Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA

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par Francis NGUEGUIM LEKEDJI
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007
  

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§ II : LA VOCATION SUBSIDIAIRE DU JUGE ETATIQUE A CONNAÎTRE DE L'AFFAIRE SOUMISE A L'ARBITRAGE

Le principe de l'incompétence du juge étatique en présence d'une convention d'arbitrage n'est pas d'ordre public. Le juge étatique peut, sous certaines conditions, connaître du litige qui devait être soumis à l'arbitrage. C'est le cas si la convention d'arbitrage est manifestement nulle (A) ; c'est aussi le cas si les parties renoncent à l'application de la convention d'arbitrage (B).

A: LA NULLITE MANIFESTE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE ENTRAINE LA COMPETENCE DU JUGE ETATIQUE

Cette affirmation découle de l'article 13 alinéa 2 AU.A qui dispose que : « Si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, la juridiction étatique doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle ». Que doit-on entendre par nullité manifeste de la convention d'arbitrage ?

L'expression « nullité » est définie comme une sanction prononcée par le juge qui fait disparaître rétroactivement un acte juridique qui ne remplit pas les conditions requises pour sa formation57(*). La nullité se distingue ainsi de la résolution dont la cause se trouve dans l'inexécution d'une prestation dans un contrat synallagmatique58(*).

Pour ce qui est de la nullité manifeste, c'est celle qui « apparaît sans examen approfondi » de la convention. Pour certains auteurs, le problème de la nullité manifeste de la convention d'arbitrage se situe au niveau de la non énumération expresse par l'AU.A des éléments qui doivent nécessairement figurer dans une convention d'arbitrage59(*). Or, on sait aussi que le principe pas de nullité sans texte est bien établi dans notre droit. Donc, il sera bien difficile d'établir la nullité d'une convention d'arbitrage entraînant la compétence du juge étatique.

Il nous semble qu'une esquisse de solution peut être dégagée, tout au moins pour ce qui concerne l'arbitrabilité du litige, à  la lecture de certains textes en vigueur dans notre législation. A cet effet, on s'appuie sur le Code civil qui énumère une liste des matières sur lesquelles on ne peut compromettre et dont la soumission à l'arbitrage entraînerait la nullité de la convention y relative. Et, par ricochet, la compétence du juge étatique. Il s'agit notamment des questions concernant l'état et la capacité des personnes, de celles relatives au divorce et à la séparation de corps60(*) ; et, plus généralement toutes les matières qui intéressent l'ordre public. Les parties ne peuvent, par convention, les soumettre à l'arbitrage.

L'intérêt d'une telle disposition est d'éviter la poursuite d'une procédure arbitrale vouée à l'échec en raison de la nullité manifeste de la convention d'arbitrage. Les auteurs pensent que la notion de nullité manifeste n'étant pas définie par les textes, sa constatation devrait résulter de l'apparence de la convention, d'un simple examen extrinsèque et non de son analyse61(*).

B- LA RENONCIATION DES PARTIES A LA CONVENTION D'ARBITRAGE ENTRAINE LA COMPETENCE DU JUGE ETATIQUE

L'article 13 alinéa 3 AU.A dispose que : « (...) la juridiction étatique ne peut relever d'office son incompétence »62(*). Il s'agit là de l'affirmation la plus patente du caractère relatif de cette incompétence. Et de fait, l'accord compromissoire signé par les parties est une convention privée qui repose uniquement sur leur volonté. Celles-ci peuvent, par conséquent, y renoncer pour recourir aux juridictions étatiques, soit expressément, soit tacitement.

La renonciation expresse ne pose pas beaucoup de difficultés parce qu'il appartient aux parties, malgré la survenance du litige, de conclure une nouvelle convention attribuant compétence au juge étatique pour en connaître.

Quant à la renonciation tacite, elle est plus subtile et nécessite beaucoup de vigilance de la part des parties et du juge étatique saisi. Il n'appartient pas au juge étatique saisi de soulever son incompétence. Ainsi, d'une part, le demandeur renonce au bénéfice de la convention d'arbitrage en assignant sur le fond son cocontractant devant le juge étatique63(*). D'autre part, le défendeur accepte cette compétence en comparaissant sans soulever l'incompétence du juge étatique. La loi type de la CNUDCI énonce que le déclinatoire de compétence doit avoir lieu au moment où le défendeur soumet ses premières conclusions quant au fond du différend, et pas après64(*). L'esprit de l'AU.A se situe sans doute dans la même voie. Des applications concrètes de ce principe peuvent être trouvées aussi bien dans la jurisprudence française65(*) que celle de la CCJA66(*) .

La vocation subsidiaire du juge étatique à connaître de l'affaire soumise à l'arbitrage est une prérogative importante dans la mise en oeuvre de la convention d'arbitrage, mais n'est pas la seule, car le juge étatique peut aussi intervenir pour aider les parties à vaincre les difficultés de constitution du tribunal arbitral.

* 57Lexique, op. cit., p. 394

* 58La résolution est l'effacement rétroactif d'un contrat synallagmatique lorsque l'une des parties n'exécute pas ses obligations. Autrement dit, comme la nullité, la résolution a un effet rétroactif, mais à la différence de la première, elle sanctionne un défaut d'exécution et non un vice de formation du contrat.

* 59P.G. Pougoué et alliés, op. cit., p. 85.

* 60Article 2060 C.civ. V. aussi article 577 du CPCC qui interdit de transiger, entre autrees, sur les legs d'aliments, les logements et vêtements.

* 61V. P. Meyer, Commentaire de l'acte uniforme sur l'arbitrage, in J. Issa-Sayegh et alliés, OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, juriscope, 2ème éd., 2002. p.119.

* 62Certains tribunaux n'appliquaient pas ce principe. Voir dans ce sens le cas rapporté par P. Meyer, op. cit. no 188 et note de bas de page 15 : TPI Ouagadougou, 14 juin 1989, Rev. bur. dr. 1991, p. 87 et s. note P.Meyer.

* 63Tel n'est pas le cas lorsque l'assignation a pour seul but d'obtenir des mesures provisoires ou conservatoires.

* 64Article 8 de ladite loi.

* 65Cass. 1er civ. 6 juin 1978, JDI, 1978. 908. note B. Oppetit ; voir aussi Paris, 15 mai 1987, Rev. Arb., 1987. 503, note L.Zollinger, qui a décidé que lorsque les parties concluent une convention d'arbitrage (en l'occurrence un compromis relatif à un litige déterminé) sans faire référence à une clause compromissoire antérieure, qui au surplus ne visait pas le différend faisant l'objet du compromis, cette clause est caduque : on doit comprendre que les parties sont censées y avoir implicitement renoncé.

* 66CCJA, 1ère ch., arrêt no 09 du 29 juin 2006, aff. F.K.A c/ H.A.M, in Juris-Ohada no 4/2006, p.2, et www.ohada.com/ Ohadata J-07-23.

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