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Incidences de la crise économique mondiale sur les pays en voie de développement: cas de la Côte d'Ivoire

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par Aimeric Laurent ATSIN
Université Laval, Québec - Maitrise 2010
  

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A. Historique de l'économie ivoirienne

La Côte d'Ivoire est un pays en voie de développement francophone située en Afrique de l'ouest avec comme capital politique Yamoussoukro et pour capitale économique Abidjan. Elle a une superficie de 322 462 km2 et est limitée au nord par le Burkina Faso, à l'ouest par le Liberia et la Guinée, à l'est par le Ghana et enfin au sud par l'océan Atlantique qui en fait un pays non enclavé. Le pays a obtenu son indépendance en 19603 et depuis a pour monnaie nationale le franc CFA4 (rattaché à l'euro).

Depuis son indépendance, la Côte d'Ivoire a opté pour une stratégie de développement économique axée sur l'agriculture et une ouverture sur l'extérieur. Une stratégie de développement qui a permis, grâce au boom des cours du café et du cacao, d'asseoir un développement avec une croissance économique soutenue durant deux décennies (qui s'étend de 1960 à 1978) et d'ériger la Côte d'Ivoire au titre de Locomotive de la sous région ouest Africaine5 (elle représente 39% de la masse monétaire et contribue pour 40% au PIB de l'UEMOA en 1970). Cette période exceptionnelle marquée par une croissance moyenne annuelle du PIB par tête de 5,7%, est le fruit du développement extensif de l'agriculture d'exportation portée par le binôme café-cacao mais aussi par des investissements publics améliorant les infrastructures locales. Ces programmes d'investissements ont permis la modernisation du port d'Abidjan6et l'amélioration des infrastructures routières. Tous ces programmes ont été suivis par une politique de recrutement des fonctionnaires et une expansion du secteur tertiaire.

La deuxième période de son développement, de 1979 à 1993, est marquée par une crise économique dont la cause principale est l'effondrement des cours du café et du cacao. Cela a entrainé une croissance annuelle négative au cours de la décennie 1980 à 1990. Cette période a dévoilé les insuffisances et les faiblesses de la stratégie de développement adoptée depuis 1960. En effet, le binôme Café-cacao influence de manière significative l'économie ivoirienne en ce qu'il a permis une forte croissance et une injection d'importants flux financiers dans l'économie. Cela avait permis à l'État d'accroître ces recettes fiscales liées aux commerces extérieurs par le biais de taxes, de les redistribuer dans le circuit économique aux ménages à majorité des paysans producteurs de café-cacao. En outre, aux entreprises essentiellement publiques, aux banques d'avoir de forte marge bénéficiaire et tout cela a permis un accroissement des avoirs extérieurs donc d'avoir une balance commerciale excédentaire.

3 Le premier président s'appelait Félix Houphouët-Boigny né le 18 octobre 1905 et est décédé le 7 décembre 1993.

4 Franc de la Communauté Financière Africaine regroupant 15 États Africains.

5 Durant cette période, elle était surnommée le « Japon noir ».

6 Crée officiellement le 10 novembre 1950.

Toutefois, cette dépendance vis-à-vis des produits d'exportation, en considérant une détérioration des termes de l'échange, peut s'avérer aussi fort préjudiciable pour l'économie. Ainsi, dès 1979 la Côte d'Ivoire, qui s'était lancée durant la période post indépendance à la mise en oeuvre d'une politique monétaire et fiscale expansionniste appuyée par les exportations, va subir de plein fouet la baisse des prix des produits café-cacao, qui s'est traduit par une dépression sévère. Il en a résulté un fort endettement extérieur conjugué à un taux d'échange réel surévalué créant une perte de compétitivité de l'économie ivoirienne pour déboucher sur un déficit du compte des opérations courantes (17% du PNB) et 60% de la valeur des exportations entre 1979 et 1981. La gestion de cette crise a donc vu la naissance du plan de politique d'ajustement structurel7 proposé par les institutions de Bretton-Woods (le Fonds monétaire internationale et la banque mondiale).

La troisième période de son développement débute par la dévaluation du Franc CFA8 (1994) et se poursuit jusqu'en 1999. La monnaie locale, face aux effets persistant de la crise des années 80, à été dépréciée de 100%. Malgré le plan d'ajustement structurel (PAS), le pays fait toujours face à un endettement intérieur et extérieur excessif, à un déséquilibre des finances publiques toujours persistant. Cette dévaluation a permis de rééquilibrer les comptes publics et aussi de redonner une certaine compétitivité à l'économie ivoirienne en relançant les exportations du pays et en réduisant les importations, favorisant ainsi les producteurs locaux. Il est à noter que cette dévaluation a été accompagnée, durant cette période, par la hausse des cours du café et du cacao et de nouvelles mesures d'accompagnement sous la forme d'un nouveau programme d'ajustement économique et financier dénommée « Facilité d'ajustement structurel avancé ». Ces mesures ont permis la relance économique marquée par un solde commercial positif, ce qui a permis à l'économie ivoirienne de souffler un peu et de se reprendre même si cette phase de relance est partiellement imputable à une conjoncture plus que favorable.

La quatrième phase est celle marquée encore par une autre crise mais plutôt politique celle là (1999 à nos jours). Alors que la conjoncture commençait de nouveau à être défavorable à cause de la baisse des prix des produits exportés, des tensions sociales font leurs apparitions ponctuées par un coup d'état en décembre 19999, précipitant le pays dans la récession et annihilant tous les efforts entrepris jusqu'à lors. Le taux de croissance négatif -2,3% enregistré en 2000 témoigne de cet état de fait qui voit l'activité économique ralentie, l'aide internationale arrêtée, les équilibres budgétaires fragilisés plongeant l'économie sous la barre des 0% de taux de croissance. La crise politico militaire de 200210 n'a fait qu'envenimer la situation économique déjà compliquée, par l'exode massif de nombreuses populations (1,7 millions de personnes) vers les zones dites sécurisés, l'administration publique qui ferme dans les zones assiégées, la destruction d'infrastructures économiques. Tous ces facteurs entrainant une perte de recettes fiscales pour l'état sur une grande partie du territoire, accentue l'impact de la récession économique avec un taux de croissance économique de -6%.

7 Programmes de réformes économiques mis en place par le FMI et la banque mondiale permettant aux pays touchés par de grandes difficultés économiques de sortir de la crise.

8 Elle a été à hauteur de 50% pour l'ensemble des pays de la CEMAC (communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale) et de l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest africaine).

9 Prise du pouvoir par le général Robert Gueï, en destituant le régime du président Konan Bédié.

10 Tentative de coup d'État déjoué qui a coupé le pays en deux.

B. Les canaux de transmission de la crise économique
aux pays en voie de développement
: Cas de l'Afrique
subsaharienne

Dans ce contexte, comment la crise économique mondiale a-t-elle affecté la Côte d'Ivoire? Pour jeter un éclairage sur cette problématique nous allons examiner de quelles manières les autres pays de l'Afrique subsaharienne ont été affectés par la crise.

Selon la littérature, les états africains, spécifiquement ceux de l'Afrique subsaharienne11 n'étant pas suffisamment intégrés dans le système financier mondial, ont été relativement protégés contre les effets directs de la crise sur leurs économies comparativement aux pays dits développés et aussi aux pays émergents. Cette particularité (c'est-à-dire leur degré de résilience) des économies africaines leur a permis de ne pas subir de forts coups en 2007 lors de « la crise des Subprimes » et en été 2008 avec la crise bancaire. En effet, les économies africaines sont généralement caractérisées par des systèmes financiers avec un secteur bancaire dominant et des marchés financiers peu développés, parfois même inexistants. Les emprunts des institutions financières auprès des banques étrangères sont contrôlés dans le cadre du contrôle de change et les banques ne font pas face à des risques liés aux engagements hors bilan, d'où l'impact limité sur le secteur bancaire en Afrique comparativement aux pays développés. Toutefois les effets de la contagion se sont quand même traduits par des pertes importantes en valeur et des sorties de capitaux sur les marchés financiers africains. En février 2009, l'indice composite de la BRVM12 en Côte d'Ivoire a perdu 30,18% de sa valeur. Au cours de la même période l'indice NSE All share au Nigéria et le JSE All Share index en Afrique du sud ont perdu respectivement 55% et 25,05% de leurs valeurs de référence datant de juillet 2008.13

Les effets dits indirects de cette crise qu'ont subie les pays d'Afrique subsaharienne concernent principalement quatre canaux de transmission qui sont l'évolution des prix mondiaux et le volume des échanges commerciaux, les envois de fonds par les travailleurs émigrés, les investissements directs étrangers et l'aide publique au développement.

11 L'Afrique au sud du Sahara ou l'Afrique « Noir », sont donc exclus les pays au Nord du Sahara (Maghreb, Égypte).

12 BRVM : Bourse régionale des valeurs mobilières, NSE : Nigeria Stock Exchange, JSE : Johannesburg Stock Exchange.

13 Banque Africaine de Développement (BAD), Département des statistiques, 2009

Canaux de
transmission de la
crise

Importations Investissements

PIB

Consommation Revenus Exportations

PE/PL

PCI

PC

Emplois

Avec :

PWX : Prix international des exportations

EXDO : Demande mondiale de biens exportés

PWM : Prix international des importations

IDE : Investissement direct étranger

PC : Prix des biens composites

PCI : Prix des biens de consommation intermédiaire

PE : Prix reçu par les producteurs pour leur vente sur le marché étranger PL : Prix reçu par les producteurs pour leur vente sur le marché domestique PIB : Produit intérieur brut

1. Les cours des matières premières et les échanges commerciaux.

Avec l'intensification de la crise économique dans les pays développés et la Chine, on a enregistré une accélération de la chute des cours des matières premières, principaux produits d'exportation dans les pays d'Afrique subsaharienne. Cela a eu un effet négatif à la fois sur les réserves de changes, la capacité de financement de l'État et les investissements dans les secteurs dits porteurs dans ces économies (industrie extractive par exemple). Par ailleurs, toujours vu sous l'angle commercial, on observe aussi une baisse de la demande mondiale de produits africains d'exportation sur les trois principaux marchés d'exportation (Europe, États-Unis, Chine). Les pays dits développés, faisant face à un important ralentissement de leurs économies, vont donc revoir à la baisse leur demande de matières premières, de biens manufacturés et de services. La croissance réelle des exportations est passée de 8,7% en 2007 à 4,3% en 2008 jusqu'à atteindre -11,7% en 2009, et celle des importations de 14% en 2007 à 13% en 2008 sur le continent Africain. D'une manière

globale, le taux de croissance du volume des échanges internationaux mondiaux, il est passé de 7,1% en 2007 à 2,7% en 2008 ensuite pour atteindre -12,3% en 2009 selon le FMI14, Ceci a donc provoqué une dégradation de la balance commerciale du fait que, les recettes générées par les exportations de matières premières, étant un socle dans la croissance des pays africains, vont enregistrer une baisse à cause de cette chute des prix combinés à une baisse du volume des exportations. En Côte d'Ivoire, les recettes d'exportations sont passées de 10,4 milliards de dollars à 7,7 milliards de dollars en 2009 selon l'OMC15 . La croissance mondiale étant à la baisse suivant celles des pays industrialisés et émergents (Inde et Chine), les principaux demandeurs de matières premières, la demande mondiale baisse. Concomitamment la dégradation des anticipations sur les marchés à terme pousse les prix des matières premières à la baisse. Le prix du baril de pétrole en est un exemple, il est passé de 125,73 US$ au début de la crise à 43,48 US$ au début du mois de janvier 2009. Cette baisse pourrait s'avérer bénéfique économiquement parlant pour les pays importateurs de pétrole qui verraient le coût de leurs importations de pétrole baisser significativement. Au Burkina Faso, le rythme de la croissance des exportations a été ralenti, passant de 6,9% en 2007 à 3,5% en 2008 en raison de la chute de la production de coton et de la baisse des exportations de fibres de coton. Le solde de la balance des paiements en a subi le fort coût passant de 160 millions de F CFA en 2007 à 12 Millions de F CFA en 2008, accroissant aussi le déficit du compte courant de 3,8%.

Par ailleurs, un aperçu de l'évolution des cours des différents produits exportés durant cette période traduit bien l'impact négatif de la crise économique. Par exemple, pour les produits non pétroliers l'évolution de l'indice des prix montre une forte baisse de juillet 2008 à mars 2009 où il passe de 168,79 à 108,72 soit une chute globale de -35,59%. Mais pris de manière globale, l'indice des prix de toutes les marchandises faisant l'objet d'exportations est passé de 218,99 à 96,48 soit une variation négative de -55,9% entre juillet 2008 et février de l'année suivante, pour ensuite croître à partir de mars 2009 dans un contexte d'après crise énergétique et alimentaire (voir graphique 1). Toujours de juillet 2008 à février 2009, on a observé, comparée aux autres produits, une importante chute des cours des produits pétroliers dont l'indice des prix est passé de 248,43 à 78,27 selon le FMI, soit une variation de -68,5% avant de se redresser à nouveau à partir de mars 2009 tout comme l'ensemble des marchandises.

Le graphique qui suit montre l'évolution des cours des trois grands groupes principaux de produits d'exportation en Afrique :

14 IMF, World Economic Outlook 2009 and World Economic Outlook 2010 (Update)

15 Rapport de la commission de l'union africaine, « la crise financière mondiale : son impact sur l'Afrique, les mesures à prendre et la voie à suivre », 13 mai 2009.

Graphique 1 : Evolution mensuelle des indices généraux des prix des trois grands
groupes de produits exportés par l'Afrique.

Source : FMI (2010a).

De par l'historique de la Côte d'ivoire et en analysant sa structure économique, qui témoigne d'un pays assez extravertie, nous pouvons déjà présumer d'une incidence négative sur les variables macroéconomiques des effets « commerce » de la crise économique.

Graphique 2 : Taux de croissance des volumes d'échanges commerciaux
internationaux de 2006 à 2011.

Source : FMI

2. Les flux de capitaux privés.

En ce qui concerne les flux de capitaux privés qui regroupent les investissements directs étrangers et les transferts de fonds des migrants, ils subiront aussi les effets de la crise.

De prime abord, les investissements directs étrangers (IDE), premier des canaux de transmission en ce qui concerne les flux de capitaux privés, témoignant des impacts négatifs de la crise économique sur les pays d'Afrique subsahariennes, sont aussi en baisse. On en veut pour preuve que de 2007 à 2008, on a noté un taux de croissance des IDE de l'ordre de + 30,7%, contribuant ainsi au financement des déficits de compte courant. Par contre l'entrée de capitaux privés a radicalement baissé pour enregistrer un taux de croissance négatif de -39,1% en 2009 selon les données du FMI (voir Graphique 3)

Graphique 3 : Variation en % des flux des IDE dans le monde de 2007 à 2009.

Source : FMI.

En outre, les transferts de fonds des migrants, deuxième des canaux de transmissions concernant les flux de capitaux privés, sont devenus ces dernières années une importante source de financement externe pour les pays africains et sont fortement affectés par le ralentissement économique dans les pays développés. Les envois de fonds à destination de l'Afrique Subsaharienne sont passés de 4,6 milliards de dollars en 2000 à 20 milliards de dollars en 2008. Ces transferts de fonds, pour certains pays africains, dépassent même l'aide publique au développement, constituant une source importante de financement (au Liberia et au Lesotho par exemple, cela représente 10% du produit intérieur brut). Le montant total de ces transferts pour l'Afrique s'est élevé à 38 milliards de dollars en 2007. On est donc en droit de penser qu'une baisse du volume des transferts à un impact direct sur le revenu des ménages et donc de leur budget de consommation car ils sont souvent utilisés principalement pour couvrir les besoins primaires (nourriture, santé et éducation). Selon la banque mondiale, de 2008 à 2009, on a observé, au niveau de l'Afrique subsaharienne, une variation négative (-2,9%) des envois de fonds (Voir graphique 4).

Graphique 4 : Variation en % des flux des transferts de fonds internationaux reçus de
2006 à 2009.

Source : Banque Mondiale

3. L'aide publique au développement (APD).

Le quatrième et dernier canal de transmission de la crise à l'Afrique est celui de l'aide publique au développement. Cette aide est une composante importante de source de revenu pour les états leur permettant de financer leurs programmes économiques. Dans certains pays, elle représente près de 30% des recettes publiques du budget. Le montant de l'APD reçu par les pays en voie de développement est passé de 40 à 87 milliards de dollars de 2002 à 2008 depuis l'adoption du consensus de Monterrey en 2002. L'APD représente 5,8% du revenu national brut dans les pays de l'Afrique subsaharienne et 13,9% des importations de biens et services.

Graphique 5 : L'évolution de l'aide publique au développement reçu de 2001 à 2008
en Afrique (en millions de dollars US).

Source : OCDE

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille