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Maintien de la paix et de la sécurité internationales

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par Nicanor Abraham MENDY
Université de Bamako - Maà®trise  2011
  

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PARAGRAPHE 1 : LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE ENTRE

UTILITE ET LIMITES

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Succédant à la C.P.J.I. prévue par le Pacte de la S.D.N., la C.I.J. est présentée dans la Charte des N.U. comme l'un des organes principaux de cette dernière et surtout comme l'organe judiciaire principal. Son rôle ne se limite pourtant pas seulement à une activité contentieuse mais aussi consultative dans la mesure où elle est sollicitée par le Conseil de sécurité, l'A.G. ou tout autre organe et institutions spécialisées de l'O.N.U. Cela donne à la C.I.J. une place non négligeable dans l'ordonnancement juridique international où elle est for utile (1) au règlement des différends. Mais seulement cette utilité ne va pas sans des limites au vu la multiplication des instances judiciaires internationales tel le tribunal international du droit de la mer mis né de la Convention de Montego Bay de 1982 (2).

95 Ibidem

1- Utilité de la cour internationale de justice

Lorsque des parties à un conflit ont recours à une tierce personne ou à un organe judiciaire pour trancher le litige qui les oppose, c'est qu'elles ont la ferme volonté de régler pacifiquement leur différend. A cet égard, il est louable de constater que la justice internationale a bénéficié, dès l'origine, d'une certaine institutionnalisation caractérisée par la permanence et l'indépendance témoignant de cette volonté récente mais constante d'user de la force en dernier ressort car à l'emploi de la force doit y être substitué des luttes de procédures.

Comme il importe << de faire régner la justice >>, d'après le préambule du Pacte de la S.D.N. qui se veut garant de la paix internationale, l'art. 1 de la Charte assigne comme but aux Etats membres le règlement des conflits par des moyens pacifiques << conformément aux principes de la justice et du droit international >>. Ainsi, la régulation efficiente de la société internationale avec une perspective de paix durable dépend du bon fonctionnement de la justice internationale et au-delà participer à une plus grande effectivité du droit international étant donné que la justice va agir réellement comme un pouvoir chargé de faire régner le droit.

L'utilité de la C.I.J. relève surtout du fait qu'elle peut connaître de toute affaire ou différend qui lui est soumis par les Etats, y compris les conflits armés, seulement si ces Etats concernés acceptent sa juridiction, de ce fait ils s'engagent à respecter ses décisions car le statut de la cour annexé à la Charte prévoit que tous les Etats membres des N.U. sont << parties au statut >>.

Son utilité fait que la C.I.J. jouit de garanties d'indépendance, d'impartialité et de compétence. En effet, son indépendance signifie que la répartition géographique équitable des juges fait que tous les continents y sont représentés chacun dans la proportion qui lui est acquise (Afrique : 3 ; Amérique latine : 2 ; Europe occidentale et Amérique du Nord : 5 ; Europe orientale : 2 ; Asie : 3 ; elle ne peut comprendre plus d'un ressortissant du même Etat). Une partie en litige peut choisir un juge ad hoc quand l'autre partie compte un juge de sa nationalité au sein de la cour. Ensuite, ses décisions sont prises de façon collégiale car la cour exerce ses fonctions en séance plénière << mais depuis la réforme de 1975, il lui est possible de former des chambres d'au moins trois membres >>96. Ses << arrêts sont adoptés à la majorité des juges présents. Ils sont motivés, signés avec possibilité d'opinion dissidente (désaccord sur le dispositif c'est-à-dire l'exposé par laquelle la cour tranche le différend) ou individuelle (désaccord sur la motivation de l'arrêt) >>97. Enfin, vu l'impartialité qui caractérisent les membres de la cour, ils ne peuvent exercer aucune activité professionnelle annexe et ne peuvent participer au règlement d'aucune affaire où ils sont antérieurement intervenus, à quelque titre que ce soit. Cependant, un membre de la cour ne peut être relevé de sa fonction qu'au jugement unanime de ses collègues.

Le statut de la C.I.J. est assez souple. Les juges peuvent, par exemple après accord des parties, juger aussi bien en droit qu'en équité. Toutes ces garanties assurent une bonne administration de la justice et permet aux juges de statuer ex aequo et bono. Cependant, face à la concurrence que semblent lui faire certains tribunaux, l'on serait tenté de mettre en évidence les compétences de la C.I.J. dans la mesure où les domaines qui lui étaient réservés sont investis par de nouvelles juridictions qui apparaissent dans le sillage de la justice internationale.

2- Limites de la cour internationale de justice

Depuis sa création, la C.I.J. est restée impuissante en ce qui concerne les conflits majeurs entre Etats et par conséquent politiquement plus sensibles, faute de saisine volontaire par les Etats. Durant les années 1970, certains Etats ont même refusé de comparaître devant la cour là où d'autres ont purement et simplement retiré leur déclaration facultative de juridiction obligatoire après des décisions leur ayant été défavorables. Ce fut le cas par exemple de la France en 1974 suite à l'affaire sur les Essais nucléaires et des Etats Unis en 1986 suite à l'affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci.

D'autre part, pour ne pas se discréditer dans des cas d'affaires sensibles, la cour s'est << autolimitée ». C'est pourquoi elle a refusé de statuer au fond pour l'affaire Sud-ouest africain (Ethiopie c. Afrique du Sud et Libéria c. Afrique du sud, en 1966). << Devant les refus de comparution, elle a souvent adopté une position de retrait car elle jugeait qu'il n'y avait alors pas compétence ou que l'affaire était devenue de fait sans objet. Cette attitude de la cour s'explique par le fait que les Etats n'acceptent pas ipso facto sa compétence contentieuse. Ce comportement rétif des Etats pourrait trouver son sens dans le besoin pour ces Etats de préserver intact leur souveraineté et leur volonté de ne pas se voir par conséquent opposer un mode de règlement qu'il n'aurait pas choisi98 ».

Seulement, de nos jours, la Cour n'est pas seul moyen de règlement pacifique des différends mis à la disposition des Etats. L'art. 33 de la Charte en précise un certain nombre telles que la négociation, la conciliation, la médiation, etc.

Force est de reconnaître que la multiplication des instances judiciaires internationales vient également limiter le champ d'action de la C.I.J. et de ce fait remettre en cause le rôle voire la compétence de celle-ci. Parmi ces nombreuses juridictions internationales, on peut citer le tribunal international du droit de la mer, né de la Convention de Montego Bay sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 qui empiète directement sur les compétences de la C.I.J. en matière de délimitation maritime. La création en 1993 du tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (T.P.I.Y.) puis en 1994 du tribunal pénal international pour le Rwanda (T.P.I.R.) et en 2002 de la cour pénale internationale (C.P.I.) par le Statut de Rome peuvent introduire des conflits de compétence.

Cependant pour bien saisir les limites de l'action de la C.I.J., il nous faudrait analyser l'art. 36 parag. 2 du Statut de la cour qui consacre la formule des déclarations facultatives d'acceptation de la compétence de la cour. Autrement dit, la compétence de la cour n'est mise en oeuvre qu'à une double condition : une proposition formulée par un Etat qui devra forcément être acceptée par l'autre. Toutefois, pour conforter quand même le mode de règlement pacifique des conflits, des voix semblent s'élever pour défendre l'idée de la compétence de la C.I.J. En tout état de cause, il semble que l'alternative la plus acceptable pour les Etats soit la saisine conjointe de la cour à l'occasion d'une affaire, ce qui écarte tout débat de principe sur sa compétence, même si on ne peut pas ignorer que << des divergences d'interprétation du compromis bilatéral conclu par les Etats peuvent survenir et se révéler délicates », d'après Emmanuel DECAUX.

En résumé, cette confrontation entre l'utilité et les limites de la C.I.J., le premier terme semble l'emporter finalement sur le second. Pour relativiser ses limites tenant à l'absence de la compétence obligatoire de la cour, nous dirons comme le Professeur Michel VIRALLY que la cour n'a pas vocation à << acquérir la situation de monopole dont bénéficie la justice étatique dans son ordre, même à l'égard des seuls différends portant sur un point de droit international ». En outre, la concurrence faite à la C.I.J., en matière de règlement judiciaire

98 Ibidem

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des différends, n'est pas fondamentalement une limite dans la mesure où l'objectif global de la communauté internationale demeure bel et bien le règlement pacifique des différends quel que soit le mode judiciaire autorisé auquel les parties auront recours. Cela démontre aussi que le renforcement de l'arsenal judiciaire passe également par un renouveau de la sanction qui comporte la double vertu de la dissuasion et de la coercition d'où l'institutionnalisation véritable d'une justice pénale internationale.

PARAGRAPHE 2 : VERITABLE INSTITUTIONNALISATION D'UNE JUSTICE PENALE INTERNATIONALE

Par l'expression de justice pénale internationale, il faut comprendre un système juridique qui cherche à rétablir le droit et régler les conflits en rendant à chacun ce qui lui est dû (justice) et cela à la suite d'une infraction (caractère pénal) commise par et/ou sur la communauté internationale. De ce fait, c'est à cela que la justice pénale internationale doit faire face. Derrière l'idée même d'une justice supranationale apparaît une remise en question du principe de souveraineté nationale, puisqu'en effet, la justice est l'un des pouvoirs régaliens de l'Etat. D'autre part, l'idée d'une justice pénale suppose ensuite l'existence de moyens de poursuite. Enfin, parler d'international amène à s'interroger sur la qualité et le nombre d'acteurs concernés, de même que cela suppose une certaine notion d'universalité permettant d'inclure des acteurs que des frontières physiques, spatiales ou culturelles séparent.

De ce fait, on parle alors de droit international pénal qui peut être présenté comme un droit protecteur de l'individu, du fait de la condamnation de la guerre assimilée à un comportement criminel parce qu'il donne tristement l'occasion de perpétrer des génocides, mais aussi de commettre plusieurs sortes de crime : d'agression, de guerre et contre l'humanité. La criminalisation de la guerre, c'est bien ce dont il s'agit, constitue l'angle d'attaque privilégié de la Cour pénale internationale (2) organe unique instauré par le traité de Rome au fin du droit pénal international mais avant celle-ci il y eut la mise en place des tribunaux pénaux internationaux ou tribunaux spéciaux internationaux (1).

1- Mise en place des tribunaux spéciaux internationaux :

« Pour éviter l'impunité d'actes attentatoires à l'ordre public international, le principe fondant le système de compétence universelle résulte d'infractions qui, en raison de leur nature et de leur gravité, appellent l'intervention des juridictions de l'Etat sur le territoire duquel se trouve, même momentanément, leur auteur, indépendamment de sa nationalité et celle de sa victime et en faisant abstraction du lieu oil l'infraction a été commise . La dimension humaine est incontestablement valorisée par un « droit international des hommes », qui, étant de nature impérative et non dispositive, se place au-dessus des Etats et répond à la nécessité du monde d'aujourd'hui »99. C'est ainsi qu'au lendemain de la seconde guerre mondiale, nous voyons l'apparition de tribunaux chargés de juger les criminels nazis. En effet, pour la première fois dans le monde des tribunaux spéciaux ont été mis en place afin de réprimer les criminels nazis et japonais accusés de crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Ces tribunaux militaires internationaux sont celui de Nuremberg en Allemagne (établi le 08 août 1945) et celui de Tokyo au Japon (créé le 19 janvier 1946).

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A la suite des tribunaux militaires internationaux institués au lendemain de la seconde guerre, le monde a vu apparaître au courant de la dernière décennie du XXème siècle bon nombre de tribunaux pénaux internationaux ou tribunaux ad hoc sur le plan national. Ces tribunaux ont été créés pour réprimer les criminels d'un Etat à défaut de les envoyer dans les instances internationales pour y être jugés. En effet, il se trouve que certains Etats n'ont pas les moyens d'organiser le procès de leurs ressortissants alors ils laissent le soin à la

99 P.Y. CHICOT, op cit

communauté internationale de mettre en place ces tribunaux et de juger leurs ressortissants. Cela pour dire qu'aucun crime, délit jugé celui de droit international100 ne peut rester impuni. C'est ainsi que nous avons assisté à la mise en place de différents tribunaux ad hoc pour juger des criminels de guerre, de génocide, etc. Nous pouvons citer comme exemple :

Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (T.P.I.Y.) a été créé par la Résolution n° 827 du 25 mai 1993 du Conseil de sécurité des Nations unies pour juger les responsables des crimes commis depuis 1991. Il siège à La Haye aux Pays Bas. Il existe des opinions diverses sur la responsabilité de la Serbie et de l'ex-président de la Fédération Yougoslave Slobodan MILOSEVIC (mort entre temps en prison) dans les crimes commis par les troupes des Serbes de Bosnie, comme le massacre de Srebrenica dont les responsables directs n'ont pas tous été arrêtés à ce jour. La Procureure s'est plainte à ce propos d'un manque de coopération des forces occidentales présentes sur place. Radovan KARADIC a été arrêté en août 2008. La Procureure a par ailleurs refusé de poursuivre les responsables de l'O.T.A.N. pour les bombardements de cibles civiles en Serbie lors de la guerre de 1999. Le Statut du tribunal n'avait pas repris à ce sujet le Protocole I101 de 1977 mais incluait pourtant entre autres, parmi les crimes de sa compétence, les « attaques et bombardements de villes, villages, bâtiments et habitations non défendus ».

Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (T.P.I.R.) a été créé par la Résolution n° 955 du 8 novembre 1994 du Conseil de sécurité des Nations unies pour juger les crimes de génocide102 et autres « violations graves du droit humanitaire » commis entre avril - juillet 1994 par des citoyens Rwandais. Il siège à Arusha en Tanzanie. Certains dossiers ont été transférés vers la France, la Belgique et les Pays-Bas. Le tribunal devant cesser ses activités prochainement, d'autres pourraient l'être au Rwanda, ce qui est contesté par certaines organisations doutant qu'une vraie justice puisse y être rendue et que les droits de la défense y soient respectés. Le Tribunal a rendu un certain nombre de jugements, parmi lesquels ceux rendus le 4 septembre 1998 contre l'ancien Premier ministre Jean KAMBANDA103 et le 2 octobre 1998 contre l'ancien président des milices Interhamwé Jean Paul AKAYESU. Ils sont tous les deux condamnés à la prison à perpétuité et leur condamnation fait partie des premiers verdicts que le T.P.I.R. a rendu. Des opinions diverses existent sur la justice rendue par ailleurs dans les cours de justice rwandaises en dehors des cas les plus graves traités en principe par le Tribunal international. Parmi d'autres questions évoquées par les uns ou les autres, on peut mentionner :

- La responsabilité de la France qui avait soutenu et armé le gouvernement rwandais de l'époque avant et même pendant les massacres de 1994. Des militaires français ont par ailleurs participé directement à certains crimes : une enquête est ouverte depuis 2005 au Tribunal aux Armées de Paris. Ces cas ne seraient pas isolés selon un rapport publié en août 2008 par une commission nommée par le gouvernement rwandais actuel.

- Des crimes de guerre, y compris des massacres de civils à grande échelle, auraient aussi été commis par le Front Populaire Rwandais (F.P.R.), en conflit armé avec le gouvernement rwandais de l'époque, et ses dirigeants, aujourd'hui au pouvoir, devraient aussi être jugés. Ils auraient de plus une responsabilité directe dans les crimes commis au Congo voisin après leur prise de pouvoir au Rwanda. Selon Peter ERLINDER104, le F.P.R. était de son côté protégé et soutenu par les Etats-Unis dans le

cadre des luttes d'influence entre puissances occidentales en Afrique. Il évoque entre autres crimes qu'il attribue au F.P.R. l'assassinat de l'ancien président Juvénal HABYARIMANA105 ; d'autres contestent qu'il s'agisse là d'un crime de guerre, s'agissant du chef des armées gouvernementales de l'époque.

Le Tribunal pour la Sierra Leone (T.P.I.S.) a été instauré par un accord entre le gouvernement sierra léonais et l'O.N.U. pour juger les crimes commis depuis 1996. La Sierra Leone avait été le lieu d'une terrible guerre civile depuis 1991. En 1999, un accord de paix fut conclu mais les rebelles du Front Révolutionnaire Uni (R.U.F.) reprirent les hostilités, leur chef Fodeh SANKOH fut capturé et la création du tribunal suivit. Charles Taylor, ancien président du Libéria voisin de 1997 à 2003, accusé d'une lourde responsabilité dans les atrocités commises en Sierra Léone, a été inculpé en 2003 et arrêté en 2006 au Nigeria où il vivait en exil. Son procès, débuté en juillet 2007, a repris en 2008 et se poursuit toujours à La Haye. Selon certains, le but est aussi de faire oublier les responsabilités des Etats-Unis et de la France, qui ont des intérêts économiques dans la région.

Le Tribunal institué par une loi cambodgienne de 2004, pour juger les anciens responsables khmers rouges, inclut des juges internationaux. Il a commencé ses travaux en 2006 et plusieurs des principaux dirigeants khmers rouges encore en vie ont été arrêtés fin 2007. En revanche, pas de jugement des crimes commis de 1971 à 1975 par les Etats-Unis au Cambodge pendant la période du gouvernement précédent qu'ils avaient mis en place (selon les sources, 300.000 à 700.000 victimes de 1971 à 1975, un à deux millions à l'époque des khmers rouges, 1975-1979).

2- L'instauration d'un organe unique : la cour pénale internationale

La Cour pénale internationale (C.P.I.) est une Cour permanente créée par le Statut de Rome de 1998 et entrée en vigueur en 2002. Sa vocation première est de juger les responsables de crimes de guerre, de génocide et contre l'humanité les plus graves, en complémentarité avec les juridictions nationales qui ont la responsabilité première dans ce domaine. La Cour intervient selon le Statut quand elles (juridictions nationales) n'ont pas la possibilité ou la volonté de le faire. Il faut remarquer que cette marche vers une internationalisation du droit pénal ne doit pour autant pas laisser croire que les Etats, au plan national, se voient dépourvus de toute fonction. Au contraire, le droit international pénal, droit encore jeune, doit être appréhendé comme complémentaire et subsidiaire au combat mené par les juridictions nationales contre l'impunité. Autrement dit, la priorité demeure aux actions nationales, le droit international n'intervenant qu'en cas de lacune de ces dernières.

Contrairement à la Cour internationale de justice, elle n'est pas un organe des N.U., mais résulte d'un accord entre Etats ; 108 ont à ce jour ratifié son Statut. Les Etats-Unis106, la Russie, la Chine ou Israël n'y ont entre autres pas adhéré. Elle est cependant liée de différentes façons aux N.U. Elle pourra aussi juger les crimes d'agression si les Etats parties au Statut se mettent d'accord sur la définition de ce crime : il n'y a pas eu d'accord à ce jour, semble-t-il, pour reprendre la définition donnée dans les Principes de Nuremberg107. Un des problèmes serait le souhait de certains Etats de considérer des actions militaires contre

105 Son assassinat déclencha le début du génocide.

106 Cela s'explique par le fait que le Gouvernement des États-Unis signent avec autant de pays possible des accords bilatéraux, afin d'exempter leurs nationaux de la possibilité de remise à la C.P.I. Le 30 Septembre 2002, les 15 États-membres de l'UE ont adopté une position commune qui autorise les États-membres à signer des accords bilatéraux avec les États-Unis qui instaureraient une immunité aux diplomates, et militaires américains à l'étranger.

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1071946 confirmation des Principes de Nuremberg, réécrits en 1950 par la Commission du droit international, où sont définis les « crimes de droit international » dont les auteurs et complices, y compris chefs d'Etat, doivent selon ce texte être jugés (le texte n'indique pas de quelle façon) crime d'agression ou crime contre la paix (projeter, préparer, déclencher ou poursuivre une guerre d'agression ou faite en violation d'accords internationaux, participer à l'accomplissement de tels actes), crimes de guerre (définition voisine des infractions graves des Conventions de Genève) et crimes contre l'humanité (attaques et persécutions menées contre les populations civiles).

d'autres pays non pas comme des actes d'agression mais comme de la << légitime défense à titre préventif » pour empêcher ces pays de développer certaines armes108 ou comme une riposte légitime à la suite d'accrochages frontaliers.

La Cour peut intervenir sur demande d'un Etat ayant ratifié son Statut ou du Conseil de sécurité des N.U., qui a par ailleurs, selon son Statut, la possibilité de bloquer ses actions éventuelles pour une période d'un an renouvelable. Le Procureur peut aussi mener des enquêtes de sa propre initiative si au moins l'un des Etats concernés (celui dont les suspects sont nationaux ou celui où les actes ont été commis) a ratifié son Statut ou déclare accepter sa juridiction dans le cas concerné. Elle intervient depuis 2002 dans plusieurs pays d'Afrique, soit sur demande de trois de ces pays, soit sur demande du Conseil de sécurité à propos du Darfour. Son Procureur Luis Moreno OCAMPO a demandé en août 2008 à la Cour de lancer un mandat d'arrêt international contre le chef d'Etat soudanais Omar El BECHIR109 pour génocide (selon lui).

Aujourd'hui, si la C.P.I. se permet de poursuivre des auteurs de crimes contre l'humanité, de génocide ou autres, force est de reconnaître que le droit pénal international a été consacré vers la fin du XXème siècle. Ce qui a permis la mise en place d'un nouvel ordre international qui transcende la souveraineté des Etats. Cette innovation est illustrée en premier par l'Affaire Augusto PINOCHET, qui a révélé l'apparition d'une justice hors des frontières, faisant obstacle devant les juridictions nationales, à l'immunité traditionnelle des Chefs d'Etat à partir du moment où ceux-ci sont reconnus coupables de violations des normes de base de la communauté internationale110. Pour autant, là où l'Etat de droit existe, il signifie l'obligation pour l'Etat de se conformer aux règles en vigueur, ce qui permet en définitive de contribuer de manière active à la pacification de la société. En effet, en droit international, les sujets sont à la fois producteurs et destinataires de la norme parce qu'ils se prévalent de la souveraineté. Autrement dit, l'instauration d'instances pénales internationales telles la C.P.I. ou la C.I.J. augure le parachèvement du système de justice internationale. Malgré une certaine perplexité avouée par certains auteurs tel que Serge SUR, ce renforcement de l'aspect répressif du droit international révèle un progrès remarquable dans la procédure de ce droit, précisément parce que les crimes qui portent atteinte à l'ordre international et à la conscience humaine peuvent être poursuivis et punis. Pour le Professeur Alain PELLET, << il est bon que des crimes qui révoltent la conscience de l'humanité toute entière soient jugés au nom de celle-ci par un tribunal établi internationalement et non par des juges nationaux nécessairement influencés au moins par les traditions juridiques de leur pays »111. Cette plaidoirie en faveur d'une justice universelle prend résolument le parti d'une société internationale qui se réfère toujours au droit et ceci trouve écho à travers l'instauration de la C.P.I. à l'échelle mondiale. Celle-ci a la capacité de juger toute personne physique, quelle que soit sa nationalité, et qui aura commis l'un des crimes jugé de droit international.

Depuis << l'Affaire Pinochet » en 1998, des poursuites, arrestations et des condamnations ont eu lieu dans certains pays sur la base de la compétence universelle. Elles ont concerné à ce jour des suspects d'ex-Yougoslavie, du Rwanda, d'Amérique du Sud. Il n'y a pas eu à ce jour d'arrestation et jugement de responsables d'Etats puissants, les plaintes déposées dans certains cas, par exemple contre Donald RUMSFELD112 en Allemagne et en France113 ayant été rejetées.

108 Armes nucléaires, armes de destruction massive. En fait, cette interdiction s'adresse plus aux pays comme l'Iran, la Corée du Nord qui tentent de développer un programme d'enrichissement nucléaire à des fins militaires.

109 Omar El BECHIR est le premier Chef d'Etat en exercice faisant l'objet d'un mandat d'arrêt international par la C.P.I.

110 «L'actualité du principe du règlement pacifique des différends : Essai de contribution juridique à la notion de paix durable ", par Pierre Yves CHICOT, dans « Revue québécoise de droit international" 16.1, 2003

111 Alain Pellet, « Le tribunal criminel international pour l'ex Yougoslavie : poudre aux yeux ou avancée décisive ? » (1994) 98 R.G.D.I.P. 17.

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112 Ancien Secrétaire américain à la Défense de la Présidence de George W. BUSH Jr. Les plaintes ont été déposées par la F.I.D.H., le C.I.C.R. et d'autres organisations en fin 2007.

Cette émergence du droit international est surtout le fruit d'un long processus de maturation de la communauté internationale. C'est en ce sens qu'il faut situer l'instauration des tribunaux ad hoc tels que ceux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda qui trouve son fondement dans le rétablissement de la paix et de la sécurité internationales contenu dans l'article 39114 du Chap. VII de la Charte. De même, sans rompre avec l'esprit et la lettre de la Charte, la C.P.I. représente, pour sa part, un concours essentiel à la paix qu'il s'agisse de sa préservation et/ou de sa restauration. En somme, les buts et fonctions de ces instances judiciaires relèvent d'un subtil mélange de valeurs d'humanité et de désir d'efficacité politique. Toutefois, la capacité d'intervention de la Cour est encore diminuée à la suite de l'adoption, le 12 juillet 2002, quelques jours après l'entrée en vigueur du Statut de Rome, de la résolution 1422 (2002) du C.S. qui prévoit que la cour n'engage, ni ne mène aucune enquête ou poursuite pendant une période de douze mois à compter du 1er juillet 2002 à l'encontre des responsables ou des personnels en activités ou non d'un Etat contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome, à raison d'actes ou d'omissions liés à des opérations établies ou autorisées par l'O.N.U., sauf si le C.S. en décide autrement. Cette disposition vise à garantir l'immunité aux soldats des pays non parties au Statut de Rome engagés dans des O.M.P.

La question particulière de l'impunité des Etats puissants reste poser car d'un côté, des présumés responsables de crimes contre l'humanité, génocide, massacres de civils, viols, enrôlements d'enfants soldats ont été ou sont poursuivis, y compris d'anciens chefs d'Etat. Le chef d'Etat actuel du Soudan sera peut-être aussi poursuivi par la C.P.I. Mais les dirigeants d'Etats puissants restent, eux, impunis pour leurs guerres d'agression et les crimes commis lors de ces guerres selon des méthodes dont ils sont les premiers responsables.

A la lumière de ce que nous avons développé, force est de constater, quelle que soit la volonté des hommes de vouloir préserver leurs relations, de vouloir régler pacifiquement leurs différends, de vouloir vivre dans un environnement pacifié, il arrive, dès fois, que celle-ci tourne au vinaigre, que cette cohésion voulue par les hommes soit rompue. Ainsi se trouve- ton face à une situation où la paix est rompue et où les armes sont prises pour faire régner l'ordre et la paix malgré les menaces qui pendent comme une épée de Damoclès sur leurs têtes fait produit par la communauté internationale à travers ses organes judiciaires tels que la C.I.J. ou la C.P.I. L'apparition de ces organes judiciaires a permis à la communauté internationale de sanctionner tout acte, délit ou crime qualifié de droit international et ainsi finir avec l'impunité qui semblait gangréner celle-ci. Seulement face à une situation où la paix est menacée ou rompue, la communauté internationale a mis en place une cadre pour permettre de maintenir l'ordre, la paix et la sécurité internationales et cela se traduit par une communautarisation de ses intérêts pour le bien de l'humanité.

113 La plainte a été rejetée, après avis du Ministère français des Affaires étrangères selon lequel Donald RUMSFELD devrait bénéficier « par extension » de l'immunité prévue dans l'arrêt de la C.I.J. pour chefs d'Etat et ministres des Affaires étrangères.

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114 «Le Conseil de sécurité constate l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression et fait des recommandations ou décide quelles mesures seront prises conformément aux Articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales », art. 39, Chapitre VII «Action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression », op cit.

CHAPITRE II : LA TENTATIVE DE COMMUNAUTARISATION DES INTERETS DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

Parler d'une possible communautarisation des intérêts de la communauté internationale, revient à justifier le concept de communauté internationale. Mais, au fait, c'est quoi la communauté internationale que nous entendons si souvent parler ? C'est pourquoi avec P. Y. CHICOT, on se demandera si on peut << établir une comparaison sérieuse entre la communauté étatique, dont l'illustration d'unité est apportée par l'Etat-nation, et la communauté des Etats, composée d'entités disparates et dominée par des intérêts divergents115 ». Toutefois, face à ce concept, on éprouve << plus de difficultés à trouver des objet de rassemblement et de solidarité au sein de cette communauté d'Etat116 ». Si le doute semble être permis, il faudrait que ce concept semble être justifié au vu de l'évolution du droit international si l'on s'appuie sur la notion de patrimoine commun de l'humanité.

C'est pourquoi l'analyse du concept de communauté internationale (section 1) qui ne semble pas être facile à accepter par tous si l'on veut communautariser les << intérêts de nature mondiale » nous permettra de mieux cerner les moyens mis au service de la communauté internationale à des fins de régulations (section 2).

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway