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"patrimoine et musées; opportunités politiques, culturelles, économiques et touristiques au service des villes? Metz et l'arrivée du Centre Pompidou".

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par Mathilde Jannot
Paris Diderot-Paris 7 - Master 2 politiques culturelles 2011
  

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3. La difficile question des publics

Le Centre Pompidou-Metz propose de s'engager dans une " politique des publics généreuse et accessible ».162 Cela tend à répondre, d'une certaine façon, à la loi « Musées » avec la volonté de " rendre les collections accessibles au public le plus large » ainsi qu'en " concevant et en mettant en oeuvre des actions de diffusion visant à assurer l'égal accès de tous à la culture ». La politique des publics comprend deux orientations :

- « diversifier les publics en s'intéressant à toutes les catégories socioprofessionnelles (public individuel, familial, scolaire, touristique, senior, groupes, personnes handicapées, publics défavorisés, réseaux associatifs, entreprises...). Le parti pris de l'institution est résolument pédagogique, pour rendre accessible à tous la création artistique moderne et contemporaine, et permettre ainsi la conquête de nouveaux publics ;

- fidéliser les publics et permettre l'appropriation du lieu par les visiteurs grace à une fréquentation régulière du Centre Pompidou-Metz. A cet effet, la médiation est une priorité de l'institution et des dispositifs d'information clairs et variés sont mis en place pour une lisibilité optimale des propositions artistiques. »163

En ce sens, le Centre Pompidou-Metz a su attirer des primo-visiteurs, d'après des enquêtes de public menées par le Centre, de 10 à 15 % des visiteurs sont entrés pour la première fois dans un musée, dont beaucoup de jeunes.164 Ce qui est en soi, assez remarquable. On sait, en effet, qu'il est difficile de travailler pour tous les types de publics et faire venir des « non-initiés », le musée restant toujours perçu comme un lieu trop élitiste. Des actions de terrain et de partenariat ont été entreprises avec le rectorat, l'université de Metz et les équipes des quartiers populaires de la ville. Ce qu'Antoine Fonté cherche à valoriser :

" On a trois niveaux d'intervention, si on prend Metz, c'est le financement aux
structures installées (Pompidou, l'Arsenal, l'Opéra-Théâtre, les Trinitaires) ;

162 http://www.centrepompidou-metz.fr/la-politique-des-publics

163 http://www.centrepompidou-metz.fr/la-politique-des-publics

164Elise Descamps, « Le Centre Pompidou-Metz dépasse tous les espoirs », La Croix, no. 38859, lundi, 3 janvier 2011.

les événements comme l'été du Livre, Nuit Blanche, Metz en fête, le troisième niveau, c'est comment on va vers le public le plus éloigné de la culture. Nous avons mis en place des résidences d'artistes dans les quartiers, dans les écoles primaires, dans les maisons de retraite dans toutes les disciplines, on conforte et on aide les associations qui irriguent toute la ville et toutes les disciplines. Et ça c'est important, c'est aussi important que financer l'Arsenal car si on n'a pas ces relais-là, on perd des publics d'année en année. »165

Ainsi Laurent Le Bon et son équipe sont :

" touchés d'entendre un visiteur [les] remercier parce qu'il voyait un Picasso en vrai pour la première fois. Pour cette exposition d'ouverture, je crois qu'on a réussi le grand écart impossible entre le grand public insaisissable et le fameux expert, toujours apte à critiquer ce que vous faites. » 166

Confortant ainsi le directeur du Centre Pompidou-Metz dans son idée que " le chef - d'oeuvre, c'est le visiteur. »167 Il l'explicite déjà lors de l'exposition Chefs-d'oeuvre?168où grâce à la scénographie, des miroirs sont accrochés au dessus des visiteurs proposant un autre regard sur l'oeuvre, affirmant ainsi que c'est le visiteur qui fait le chef-d'oeuvre en donnant et en apposant à l'oeuvre, cette reconnaissance. En outre, Laurent Le Bon s'inscrit dans une certitude de réussir, en tirant le constat, que sans le visiteur l'exposition ne serait pas une réussite.

Les visiteurs ne sont pas livrés à eux-mêmes, puisque la médiation169 est une action particulièrement valorisée par le Centre. Cependant, si les médiateurs contribuent à la « médiation directe »170, faite sur le vif ; ils sont encore beaucoup trop sous-estimés par les publics, qui n'opèrent pas de réelle distinction avec la fonction d'agent de surveillance. Les médiateurs du Centre Pompidou-Metz ont la particularité d'avoir cette double vocation.

165 Interview Antoine Fonté, réalisée le 16 février, à Metz.

166 Gilles Bechet, « On ne fait plus d'expositions comme il y a quarante ans », Le Soir, samedi, 9 octobre 2010.

167 Centre Pompidou-Metz, Une nuit au musée, France 5, Emission présentée par Laurence Piquet.

168 Cf. Annexe 3

169 La médiation culturelle selon J.Beillerot (« Médiation » dans Dictionnaire encyclopédique de l'éducation et de la formation, Nathan, Paris, 2000.) « regroupe l'ensemble des actions qui visent à réduire l'écart entre l'oeuvre, l'objet d'art ou de culture, les publics et les populations ».

170 Terme utilisé par Anne Fauche dans « La médiation présence au Musée d'histoire des sciences, enjeux, objectifs, pratiques, réflexions », in La lettre de l'OCIM n° 83, 2002.

Pourtant, malgré toutes les médiations indirectes171 existantes, comme les cartels, les panneaux explicatifs, les interviews d'artiste et la scénographie172, la médiation directe est une chance à saisir pour le visiteur dont il ne sait que trop peu qu'il peut l'utiliser. C'est au visiteur de faire la démarche, ce qui reste paradoxal, puisqu'aucune indication ne lui donne la possibilité de le savoir. La direction se refuse à afficher une quelconque note pour le mentionner.173 D'emblée, pour le primo-visiteur, il paraît hautement improbable qu'il sache utiliser correctement l'outil de médiation, qui malgré tout, bénéficie à tous les visiteurs du musée.

En outre, malgré les 800 000 visiteurs de la première année, ce qui fait du Centre Pompidou-Metz, une des institutions provinciales les plus fréquentées, on peut rester sceptiques sur la rotation des collections. En effet, s'il est mentionné sur le site Internet ou annoncé à la presse, qu'il y aura environ 3 à 4 expositions par an, on peut avancer que Chefs-d'oeuvre ? a été victime de son succès. Oserait-on avancer que le rétro planning de fermeture de l'exposition a été mal orchestré ? Il apparaît en effet que de nombreux visiteurs depuis la fermeture de la grande nef et de la galerie 1 174 et malgré l'ouverture de

l' « exposition »175 Buren en galerie 3 ainsi que l'exposition L'art contemporain expliqué aux enfants176 dans le studio sont assez déçus de ce qu'ils peuvent voir au Centre Pompidou-Metz. En effet, en galerie 2, une dizaine d'oeuvres sont exposées ainsi qu'une rétrospective en maquette - environ une trentaine- de l'histoire des lieux d'exposition d'art moderne et contemporain. Pour les visiteurs qui font le déplacement, ils estiment le prix un peu trop élevé pour voir une quarantaine d'oeuvres. D'autant que s'ils ne possèdent --ou ne consultent- pas Internet, ils apprennent que plusieurs niveaux sont fermés dès qu'ils ont pris possessions de leur billets. On peut escompter dès septembre, une meilleure rotation des collections avec l'exposition Erre qui occupera deux niveaux dès septembre puis l'exposition des frères Bouroullec dès le mois de novembre. La « saison » 2011-2012 semble avoir été mieux préparée avec comme point culminant l'exposition 1917.

171 Tous les supports potentiels de médiation : cartels, panneaux explicatifs, maquettes, moulages, reconstitutions, dispositifs audiovisuels, outils multimédia, audioguides...

172 On pense notamment à la scénographie de la galerie n°2 de l'exposition Chefs-d'oeuvre ?

173 Source inédite.

174 Depuis le 12 mai jusqu'au 11 septembre 2011.

175 Peut-on parler d'exposition lorsqu'il s'agit de deux installations in situ ?

176 Exposition de Gianni Colosimo proposé du 2 juillet au 4 septembre 2011.

On peut penser qu'à cause de l'effet d'annonce et l'effet d'ouverture, l'équipe du Centre Pompidou-Metz a eu tendance à se « reposer sur ses lauriers », le succès et la fréquentation se faisant grâce à la communication et au bouche à oreille. Laurent Le Bon le concède :

« Nous avons reçu tellement de visiteurs que nous n'avons pas eu le temps de nous poser trop de questions. »177

Il est vrai que le centre, victime de son succès, a du mal parfois à répondre à toutes les demandes. Le standard explose parfois, avec 500 appels certains jours178 et des réservations de visites guidées qu'il fallait prendre au minimum trois mois en avance, ce qui reste exceptionnel en province, car les fréquentations lorraines, tout au moins, n'avaient jamais atteint ce genre de record.

Le Centre Pompidou-Metz a su afficher une politique tarifaire adaptée avec un billet à sept euros et un accès libre pour les jeunes de moins de 26 ans. L'accès libre durant la semaine d'inauguration du musée a sans doute contribué à attirer les foules. En février, lorsque nous rencontrions Laurent Le Bon, 17000 pass avaient été vendus, ce qui restait au-delà des espérances, au point que M. Le Bon nous confiait : « Je ne sais pas si ça continuera mais c'est phénoménal. C'est pratiquement un club de foot. »179 Les pass sont matières à fidéliser les publics, d'autant qu'ils sont peu chers, en comparaison ne serait-ce qu'avec le Centre parisien. Les pass pour deux personnes coütent 30€. Il apparaît que les possesseurs d'un pass sont revenus en moyenne 4 fois dans l'année. 180 Cependant, il ne faudrait pas se méprendre, beaucoup ont opté pour le pass lors des premiers mois d'affluence pour échapper aux longues files d'attente. En outre, celui-ci, méme s'il est renouvelable annuellement, n'a servi qu'une année et donc, pour voir la seule exposition Chefs - d'oeuvre ? Nous n'avons pas de projections pour les années à venir, il faut cependant rester prudent sur ce chiffre qui fléchira très probablement en année deux.

Parallèlement, il est des actions qui sont intéressantes, les dépliants et les audioguides ont
été traduits en deux langues (anglais et allemand), qui peuvent être suffisants pour le
moment. Nous le verrons ultérieurement, mais dans la mesure où les pays n'appartenant

177 Laurent Le Bon interviewé par Marion Weber, « Centre Pompidou-Metz, un an déjà... », La plume culturelle, mardi 21 juin.

178Elise Descamps, « Le Centre Pompidou-Metz dépasse tous les espoirs ». La Croix, no. 38859Culture, lundi, 3 janvier 2011.

179 Interview Laurent Le Bon, réalisée le 16 février, à Metz.

180 Martine Robert, «Fort de son succès populaire, le Centre Pompidou-Metz espère des mécènes », Les échos, mardi 10 mai 2011.

pas à l'Union Européenne restent minoritaires, il paraîtrait disproportionné financièrement d'engager des moyens dont l'utilité restera faible ; bien que ces outils contribuent à la démocratisation culturelle. En revanche, les actions de médiation à destination des publics handicapés, semblent avoir été mises en places, de façon tardive :

« A partir de septembre, le musée organisera, durant les heures d'ouverture, des visites adaptées aux handicapés moteurs et mentaux, aux malvoyants et aux malentendants. »181

Il est en effet plus simple de mettre ces actions en place dès l'ouverture d'un nouveau bâtiment, plutôt que de les réintégrer a posteriori. D'autant plus quand on est « tributaire » d'un lieu. Il reste beaucoup à faire à ce niveau, méme si les actions de première nécessité comme l'accès aux toilettes pour personnes à mobilité réduite dès le rez-de-chaussée ou les ascenseurs ont été prises en compte dans la réalisation du bâtiment. Le lieu expose aussi de façon temporaire une collection permanente, il reste difficile de créer des outils et/ ou des supports malheureusement encore chers à produire alors que ceux-ci sont destinés à être utilisés de façon provisoire. Cependant, on aurait pu penser qu'une collaboration avec Paris aurait été mise en place pour ce genre de questions.

Par ailleurs, dans les actions ayant pour fin de fidéliser les publics, il en est certaines qui fonctionnent déjà correctement. Plus de 15 000 scolaires et centres de loisirs ont fréquenté les ateliers jeunes publics entre mai 2010 et janvier 2011. Ces ateliers sont conçus par un artiste. Si en soit, ce type de dispositif avec un groupe visitant l'exposition et l'autre participant à l'atelier, n'est pas nouveau, il reste un pensum. Comme son grand frère parisien, le Centre Pompidou-Metz innove en s'adressant à un public adolescent, « qui [est] à l'âge où se créent les habitudes culturelles »182 Ces ateliers ne sont pas forcément réservés au groupe, car le week-end ils sont ouverts aux individuels.

Pour Laurent Le Bon183, il reste de nombreuses et belles pistes à définir encore à
destination des publics comme un travail plus poussé avec les associations de quartier, les
prisons, et les personnes à mobilité réduite. Cependant, c'est un travail de terrain et qui

181 Aurélie Dablanc, responsable du pôle des Publics interrogée par Christine Rigollet in « Spécial Metz Musée, mode d'emploi », Le Point, no. 1963, jeudi, 29 avril 2010.

182 Aurélie Dablanc, responsable du pôle des Publics interrogée par Christine Rigollet in « Spécial Metz

Musée, mode d'emploi », Le Point, no. 1963, jeudi, 29 avril 2010.

183 Interview Laurent Le Bon, réalisée le 16 février, à Metz.

nécessite d'être mené au quotidien. On peut penser que par la suite, cela se mettra en place naturellement. Comme le dit la maxime : « Paris ne s'est pas faite en un jour ».

Il nous reste à présent à examiner et approfondir les résultats obtenus par et grâce au Centre Pompidou-Metz.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote