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Documentation sur le statut des métis de pères Allemands au Togo entre 1905 et 1914. Présentation de documents allemands avec traductions ou résumés en français

( Télécharger le fichier original )
par Essosimna Tomfei Marie-Josée ADILI
Université de Lomé (Togo ) - Maà®trise en lettres allemandes 2012
  

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1.4.4 - L'arbre qui cache la forêt: le cas de Nicolas Grunitzky (1913-1969)

De tous les métis allemands« du Togo, Nicolas Grunitzky est incontestablement le mieux connu sur le plan national et international, parce qu'il est le seul qui soit parvenu au plus haut sommet de l'Etat. Mais aussi, c'est « l'arbre qui cache la forêt » : la grande majorité des métis allemands« sont totalement inconnus, parce qu'ils n'ont pas bénéficié du soin et de la formation nécessaires pour percer dans la société togolaise. Nicolas Grunitzky n'a jamais revendiqué un statut de « métis allemand », et n'en a jamais fait un fonds de commerce, il fait sans doute la fierté de tous les métis togolais en général, et des métis allemands« en particulier.

Illustration n° 10 : Nicolas Grunitzky (source : Cornevin 1969 : 160b)

Né le 5 avril 1913 à Atakpamé, le peit Nicolas n'a guère connu son père, un officier allemand originaire de Dantzig (Petschull 1984 :131) nommé Harry Grunitzky, reconverti dans le commerce colonial au Togo, et d'une mère togolaise originaire d'Atakpamé nommée Sossimè (de « famille royale » selon Cornevin 1969 : 410). D'ailleurs, selon le site wikipedia, le père est mort « quelques mois après la naissance du petit Nicolas », et « le jeune métis sera l'un des tous premiers boursiers togolais à être envoyés en France »55 où il fait ses études en France, d'abord au Lycée de Mignet à Aix-en-Provence, puis à Paris des

55 Site www.biographie.tv/nicolas-grunitzky.htm consulté le 13 octobre 2011

études d'ingénieur en travaux publics. Ensuite, il intègre d'abord l'administration coloniale française, avant de créer sa propre entreprise. Il est l'un des membres-fondateurs du PTP (Parti Togolais du Progrès) créé en 1946 et qui l'emporte aux élections législatives de 1951 sur Martin Aku, député sortant (Cornevin 1969 :387). Lorsque le 30 août 1956, la République autonome du Togo est proclamée, Nicolas Grunitzky est investi le 10 septembre 1956 comme premier ministre et forme le premier gouvernement autonome du Togo le 18 septembre 1956. Le 21 septembre 1956, le Ministre de la France d'Outre-Mer installe solennellement la République Autonome du Togo avec Nicolas Grunitzky à sa tête. Mais aux élections du 27 avril 1958, le parti de Nicolas Grunitzky (PTP) est battu par celui de Sylvanus Olympio (CUT) à la majorité absolue. Et Sylvanus Olympio remplace Nicolas Grunitzky. Le 13 janvier 1963, un coup d'Etat met fin à la vie et au gouvernement de Sylvanus Olympio, et « un Comité militaire insurrectionnel » fait appel simultanément à Nicolas Grunitzky. Mais un nouveau coup d'Etat militaire survenu le 13 janvier 1967, amène les militaires à reprendre le pouvoir à Nicolas Grunitzky (Cornevin 1969 :412). Nicolas Grunitzky part en exil pour la Côte d'Ivoire, ce qui met fin à la carrière politique du premier métis allemand, qui a joué un rôle majeur dans la vie de son pays le Togo. Il est mort à Paris le 27 septembre 1967 dans un accident de voiture.

Nicolas Grunitzky est le benjamin des métis nés du commerçant Harry Grunitzky qui a eu au total 11 enfants au Togo. De sa femme Ayoko, originaire d'Aného Legbanou, il a eu cinq enfants : Walter Grunitzky (né en 1906), Maria Grunitzky (née en 1900), Eleck Grunitzky (année de naissance non connue), Berta Grunitzky (année de naissance non connue), et Pazian Grunitzky (né le 9 août 1912). De son autre femme nommée Hodjinga, originaire de Keta, il a eu deux enfants qui sont Dina Grunitzky (née en 1903) et Felix Grunitzky (né en 1905). D'une troisième femme nommée Otodopé et originaire de Eoué en zone anglaise, il a eu une fille nommée Victoria Agnès, née en 1905. De la quatrième femme nommée Nadou, originaire d'Aného, il a eu aussi une fille nommée Paulina, née en 1912. La cinquième femme, Dédé, originaire de Lomé, lui a fait un garçon nommé Friedrich-Franz, né en 1907. Il en ressort que Sossimè, la mère de Nicolas Grunizky, originaire d'Atakpamé, est la sixième femme africaine de l'Allemand Harry Grunitzky. On peut considérer, à juste titre, que cet Allemand a vécu en Afrique quasiment comme dans un ménage polygame africain. C'est un phénomène de son temps.

Il faut noter que le petit Nicolas est né en 1913, précisément dans l'anné même de la
promulgation de l'ordonnance sur le nom des métis. A l'issue de longues consultations

menées avec les diverses composantes de la communauté des Allemands du Togo (évidemment, les autochtones, principaux concernés, n'y ont pas été conviés), l'ordonnance le 18 octobre 1913 par le gouverneur, déclarait ce qui suit56 :

En vertu de l'article 2 de l'ordonnance impériale du 3 juin 1908 relative à la création de l'administration et aux usages coutumiers dans les colonies africaines et du Pacifique (Journal officiel du Reich, p. 397), il est décrété avec l'accord du Chancelier impérial, ce qui suit:

§ 1: Les indigènes ne sont pas autorisés à porter ou à ajouter à leur nom, un nom allemand comme nom de famille, pour leur propre compte ou pour le compte de leurs parents, sans l'autorisation du Gouverneur.

§ 2: Tout acte contraire à cette disposition sera puni d'une amende allant jusqu'à 150 marks, et si cette somme ne peut pas être payée, il sera infligé en compensation une peine de prison maximale de 6 semaines avec travaux forcés.

Fait à Lomé le 18 octobre 1913 Le Gouverneur

Duc de Mecklenburg.

Le problème était ainsi tranché sur le plan du droit, mais sur le terrain concret de la vie quotidienne, il n'était pas réglé, comme le montre l'article sur le cas exemplaire de Fritz Kuawovi Durchbach, métis de la toute première génération, connu comme fils de Durchbach et qui portait ce nom depuis longtemps, mais qui, au regard de la nouvelle loi, n'avait plus le droit de porter ce nom (Béré-Coulibaley & Oloukpona-Yinnon 2007).

Comme Harry Grunitzky, plusieurs commerçants allemands ont eu des enfants métis au Togo. C'est le cas du métis Otto Hundt, fils d'un commerçant de Hambourg.

56 Auf Grund des § 2 der Kaiserlichen Verordnung betreffend die Einrichtung der Verwaltung und die Eingeborenenrechtspflege in den afrikanischen und Südsee- Schutzgebieten von 3, Juni 1908 (Reichsgesetzblatt s. 397) wird mit Zustimmung des Reichskanzlers verordnet, was folgt.

§ 1: Eingeborene dürfen ohne Genehmigung des Gouverneurs einen deutschen Namen als Familiennamen sich oder ihren Angehörigen nicht beilegen oder führen.

§ 2: Zuwiderhandlungen werden mit Geldstrafe bis zu 150 Mark bestraft, an deren Stelle, falls sie nicht beigetrieben werden kann, Gefängnisstrafe mit Zwangsarbeit bis zum Höchstbetrage von 6 Wochen tritt. Lomé, den 18. Oktober 1913

Der Gouverneur, Herzog zu Mecklenburg«.

Extrait de : Amtsblatt für das Schutzgebiet Togo (1913), Nr. 59, pp. 313-314

Illustration n° 11a : Otto Hundt

Illustration n° 11b : Otto Hundt avec les photos de ses parents57

Otto Hundt, fils d'un commerçant allemand de Hambourg, fut Président du « Club des Métis allemands » du Togo, et à ce titre, il avait coutume de dire : (Petschull 1984 :119): « Die Deutschen sind alle unsere Brüder und Schwestern ». Mais la réalité coloniale fut

totalement différente: la loi du Reich n'avait pas prévu l'existence des métis allemands« dans les colonies : "[...] le métis n'avait pas d'existence légale aux yeux de la loi allemande qui n'a pas prévu son existence. La plupart des métis n'ayant pas été reconnus par leurs pères, ne sont

57 NB : Comme pour Josef Comla Köhler et Hans Komla Gruner, ici aussi les parents de ces métis n'ont visiblement jamais apparu sur une même photo (ou dessin), et pour cause : leur union ne fut jamais officiellement sanctionnée par un acte qui aurait mérité d'être immortalisé. C'est donc l'histoire qui se charge aujourd'hui de réunir leur photo entre les mains de leurs progénitures respectives

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pas aussi reconnus par la loi qui les ignore» (Ali, 1995, p. 850). Même les « métis allemands » reconnus par leurs pères allemands selon les coutumes africaines, n'étaient pas allemands au regard de la loi allemande. C'est ainsi que les enfants métis de père allemand étaient devenus un problème. C'est à la résolution de ce problème que l'administration coloniale allemande s'est attachée à partir de 1905, à travers divers mesures dont nous présentons quelques documents ici.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard