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Information, sensibilisation et conscientisation dans la lutte contre les violences sexuelles par la commission diocésaine justice et paix à  Uvira dans le sud-Kivu.

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par MUKOKYA Morgan MUBENGWA
Université Catholique du Congo - Licence 2014
  

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2.2.2. Dans les us et coutumes

Toutes les sociétés humaines édictent des règles écrites ou non. Celles-ci s'imposent à tous ses membres. La transgression par un membre de la communauté de ces règles mérite remontrances et parfois des châtiments sévères. En fait, elles assurent la stabilité, l'harmonie et la continuité du groupe dans les domaines les plus divers de la vie de la communauté. Toutefois, parmi ces règles, certaines peuvent être à l'origine des violences sexuelles à l'endroit de la femme. Nombre des us et coutumes des sociétés traditionnelles africaines et congolaises en particulier en offrent des exemples éloquents. Pour l'illustrer, nous nous attarderons tout simplement sur un seul exemple : l'institution mariage dont les pratiques constituent des graves violences sexuelles.

Dans un grand nombre des coutumes congolaises et singulièrement au Diocèse d'Uvira, le mariage est une affaire des familles ou des groupes. Ainsi, le mariage d'un des membres de la famille concerne toute la communauté et pas seulement les époux. La conséquence est qu'on leur laisse peu de marge de manoeuvre quant à ce qui est du consentement et de la liberté de choix. Les époux, de temps à autre, sont passifs pour consentir à leur mariage. Dans l'optique où le mariage vise la procréation, il va de soi que des rapports sexuels entretenus dans le cadre de ce mariage forcé n'est que pure violence. C'est parfois dans ce même cadre que des mariages se contractent entre des individus appartenant à des familles proches : « Il en va de même des mariages conclus entre les membres d'une même parenté, c'est-à-dire entre les descendants d'un même parent. Ce qui implique des relations sexuelles entre un homme et une femme de même sang. Ce mariage est sacré et le refus par un des conjoints réticent peut entraîner des conséquences néfastes allant jusqu'à la mort.»34(*)

Dans les us et coutumes plus que dans les lois de la république, l'infériorité des femmes en RDC se voit et se ressent tous les jours. Cela a un impact sur la façon de réagir des communautés face aux viols perpétrés sur les femmes. Abordant la question du statut de la femme mariée, Lisiane Lacône, à la suite de Claudia Rodriguez, affirme qu'au Sud-Kivu, traditionnellement « une femme est la propriété de la famille de son mari ou devient la propriété de la communauté si son mari s'absente ou meurt.»35(*) D'après cette chercheuse, une femme, bien que mariée, ne peut nullement refuser d'avoir des relations intimes avec un autre homme si celui-ci appartient à sa belle-famille ou à sa communauté. Cette pratique, poursuit-elle, est confirmée par une autre étude faisant état du fait que dans de nombreux groupes ethniques, les femmes sont confinées au rang de propriété privée ou de bien commun dans une famille ou une communauté. Plusieurs hommes de l'entourage direct de la femme peuvent avoir des relations sexuelles avec elle, le mari étant au courant et pouvant donc faire de même avec une autre femme de sa famille.36(*)

Faisons remarquer que dans cette dernière affirmation, Liliane Lacône a omis de souligner que cette pratique se fait chez les Banyamulenge et non chez toutes les tribus habitant le Sud-Kivu, comme le confirme si bien le rapport qu'elle affirme elle-même avoir consulté: « Chez les Banyamulenge, les femmes ont longtemps été considérées comme un bien commun du clan. Le beau-père, le beau-frère, le mari de la belle-soeur d'une femme mariée, avaient le droit d'avoir des relations sexuelles avec elle. L'époux en était conscient. Ces pratiques, loin de disparaître, se sont juste atténuées sous l'influence du christianisme».37(*)

Face à ce qui précède, nous sommes enclin à considérer que les conclusions de Liliane Lacône semblent très généralisantes et un peu biaisées quant à ce qui est de la considération des femmes par les peuples du Sud-Kivu en général et en particulier ceux du Diocèse d'Uvira. Elle semble en outre faire fi du fait que chez ces peuples, l'inceste ainsi que différents tabous liés aux relations sexuelles étaient des pratiques prohibées dans ces sociétés. Pour plus d'informations à ce sujet, nous renvoyons le lecteur à consulter avec intérêt les écrits y afférents sur les Lega, Fuliro et Vira, pour qui le viol était considéré comme une abomination, une humiliation et était légalement répréhensible.38(*)

Il sied au contraire de préciser que de nombreux cas de mariages précoces, des grossesses précoces, la coutume qui autorise le jeune frère du défunt à devenir de droit le mari de la veuve, le mariage autorisé entre une jeune fille à l'issue de son enlèvement, de sa séquestration et de son viol par son futur époux, etc. sont encore relevés dans la contrée. Toussaint Muntazini le confirme quand il écrit : « Dans d'autres tribus de la R.D. Congo, à la mort de l'époux, ou de l'épouse, il est contraint (conseillé) au frère / soeur du défunt ou de la défunte de prendre en mariage la femme de son frère décédé (lévirat) ou le mari de sa soeur décédée (sororat). Même si la cause défendue est noble, un tel mariage réduit la liberté et le choix du conjoint survivant.»39(*)

D'autre part, les femmes victimes de viol sont le plus souvent rejetées par leur communauté. Et pour laver l'ignominie, certaines familles et certains chefs de village de filles violées préfèrent souvent un arrangement à l'amiable plutôt qu'une action en justice contre l'agresseur. Toutefois, d'après la Commission Diocésaine Justice et Paix du Diocèse d'Uvira, cette clandestinité n'est plus de mise car des actions en justice sont de plus en plus nombreuses. Cela est sans doute le résultat des séminaires de sensibilisation de la population sur les différentes formes des violences sexuelles.

Ainsi donc, retenons, à la suite de Lisette Banza Mbombo et M. Christian Hemedi Bayolo, que « La femme congolaise, mère et épouse, maîtresse de maison s'activant pour la survie de sa famille mériterait mieux que d'être ligotée par les coutumes en temps de paix ou de servir de « natte de combattant » en temps de guerres. »40(*)

Toutefois, on ne peut passer sous silence le fait que les femmes étaient tout de même respectées et jouissaient de nombreux privilèges de la part des hommes dans toute cette région.

* 34 MONUC, Rapport sur les violences sexuelles de la Monuc : « La protection, la violence sexuelle et les Nations Unies. Expérience de Kisangani », p. 4. Disponible sur www. monuc.org. Consulté le 20 octobre 2013 à 16h20.

* 35CLAUDIA RODRIGUEZ, Violences sexuelles au Sud-Kivu au Congo, Revue Migration Forcée, Numéro 27, Mars 2007, p. 45. Cité par LACÔNE, L., Op. cit., p. 42.

* 36 RESEAU DES FEMMES POUR UN DEVELOPPEMENT ASSOCIATIF (RFDA), RESEAU DE FEMMES

POUR LA DEFENSE DES DROITS ET LA PAIX (RFDP) ET INTERNATIONAL ALERT (IA), Le corps des Femmes comme champs de bataille durant la guerre en République Démocratique du Congo. Violences sexuelles contre les femmes et filles au Sud-Kivu (1996-2003), 2004, p.43.

* 37Ibidem, p. 27.

* 38 RESEAU DES FEMMES POUR UN DEVELOPPEMENT ASSOCIATIF (RFDA), RESEAU DE FEMMES POUR LA DEFENSE DES DROITS ET LA PAIX (RFDP) ET INTERNATIONAL ALERT (IA), Op. cit., p. 28. Lire utilement Charles BILEMBO, Le Mulega, l'homme de la tradition, Bukavu, Théologat Saint Pie X, 2005, 184p, et ISAYA MAKUNGU MA NGOZI, « Les canons de l'esthétique Lega », dans Centre d'études des Religions Africaines, Cahiers des Religions Africaines, volume 24, n° 48, 1991, pp. 123-144.

* 39 MUNTAZINI MUKIMAPA, T., La problématique de la lutte contre les violences sexuelles en droit congolais, Kinshasa, 2009, p. 5.

* 40 BANZA MBOMBO, L., et HEMEDI BAYOLO, C., La femme dans la tourmente des guerres en R.D.Congo.

Du 02 août au 30 septembre 2001. Le mémorial, Kinshasa, septembre 2001, p. 5.

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