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Le statut et les droits de la femme dans la pensée de John Stuart Mill

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par Camille Lepoutre
Université Paris 2 Pantheon Assas - Master 2 Recherche Philosophie du droit et droit politique 2017
  

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Chapitre 2 : La nécessaire intervention des lois civile et pénale pour empêcher cette tyrannie

John Stuart Mill préconise donc que les lois et institutions soient adaptées en fonction non des hommes bons, qui n'abusent pas de leur pouvoir, mais des hommes mauvais (Section 1). A cet effet, l'auteur adopte des positions très progressistes, notamment concernant la question du divorce

60 Orazi (F.), op.cit. p.120

61 Stuart Mill (J.), « L'asservissement des femmes », op.cit. p.68

62 Stuart Mill (J.), op.cit. p.78

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(Section 2).

Section 1 : L'intervention de la loi pour réprimer la tyrannie

Comme nous avons eu l'occasion de l'évoquer, le mariage tel qu'il existe à l'époque de Mill favorise la tyrannie du mari. Le problème des violences conjugales et même sexuelles est abordé par ce dernier dans De l'assujettissement. C'est ainsi qu'il fait état de la condition d'esclave de l'épouse à qui l'on peut imposer jusqu'à « la dégradation la plus vile [...] servir malgré soi d'instrument à une fonction animale »63. Il ne s'attarde pas sur cette violence particulière, sans doute par bienséance.

Cette violence, sous toutes ses formes, est rendue possible par la loi qui accorde au mari un pouvoir sur son épouse et ne le sanctionne que rarement en cas d'abus. C'est la raison pour laquelle Mill défend tout d'abord le principe de l'égalité dans le mariage (§1). En l'absence de supériorité légalement accordée, l'époux commettrait peut-être des violences mais n'y serait, en tout cas, pas incité. De plus, dans le cas où ces violences subsisteraient, Mill considère que c'est à la loi et à la justice pénales d'intervenir et de protéger davantage la femme de son mari (§2).

§1 : La nécessité d'instaurer le principe d'égalité dans le mariage

Pour Mill, il s'agit de l'unique moyen de faire du mariage une « relation particulière conforme à la justice ». Il considère que la société moderne doit et est en train de s'établir sur un principe d'égalité qui permet le bonheur et la vertu de tous. Ici est introduit un principe essentiel de l'oeuvre de John Stuart Mill et que nous développerons ultérieurement : l'utilitarisme.

Il est convaincu que nombre d'époux vivent déjà dans un mariage régi par des principes « de justice et d'égalité »64 et les appelle à soutenir son projet d'instaurer une égalité juridiquement reconnue entre le mari et la femme. Il est probable que Mill s'inclut lui-même parmi ces couples dont la morale est supérieure à l'état de la législation anglaise. La déclaration qu'il a pu faire à l'occasion de son union avec Harriet Taylor Mill le démontre. Il y renonçait, par principe et sachant que cela n'avait aucunement valeur juridique, au pouvoir et aux privilèges légaux qui auraient dû lui être accordés par ce mariage.

63 Stuart Mill (J.), op.cit. p.70

64 Stuart Mill (J.), op.cit. p.90

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Mill a conscience que « l'égalité de nom »65 ne s'accompagne pas nécessairement d'une égalité réelle. Le mari peut toujours maltraiter ou négliger sa femme. C'est pourquoi derrière la loi civile, qui doit consacrer le principe d'égalité, la loi pénale doit se porter garant de la protection de l'épouse.

§2 : La nécessité de protéger davantage la femme par la loi et la justice pénales

Cette nécessité est énoncée par Mill dans le Chapitre II de De l'assujettissement. Elle découle de façon logique du fait que le mariage est une institution commune à toute la société et donc à tous les hommes, y compris les plus vils. Sur ces derniers, Mill considère que « la société n'a d'autre pouvoir, en dernier recours, que les sanctions prévues par la loi »66.

Cette même idée est défendue, par exemple, dans les Principes d'économie politique. John Stuart Mill y défend, comme nous l'avons déjà évoqué, le fait que nul système de protection n'est encore justifié dans la société moderne. Ainsi, le seul protecteur dont les êtres humains aient besoin seraient les lois, « lorsqu'elles ne manquent pas criminellement à leur devoir »67. L'auteur fait ainsi peser une grande responsabilité sur les pouvoirs législatif mais aussi judiciaire.

En effet, il dénonce le manque de protection légale des femmes mais aussi le manque d'inflexibilité des tribunaux. C'est d'ailleurs à partir de cette critique qu'il introduit une proposition, à certains égards, étonnante : celle du divorce ou, au moins, de la séparation judiciaire.

Section 2 : La question spécifique du divorce

Nous pouvons être surpris de voir apparaître, dans des écrits du XIXe siècle, une opinion favorable au divorce. Mill défend en effet cette possibilité très jeune, dès 1832, dans Du mariage, exposé personnellement dédié à Harriet Taylor Mill. Il utilise alors le terme de « dissolubilité » du mariage. Pour Mill, le caractère actuellement indissoluble du mariage constitue une explication essentielle de la condition de la femme. Celle-ci est privée de tout moyen de se libérer de l'union, et ce quel que soit la manière dont son époux se comporte avec elle.

Il défend encore cette idée dans son ouvrage principal consacré aux femmes, De

65 Orazi (F.), op.cit. p.80

66 Stuart Mill (J.), op.cit. p.75

67 Orazi (F.), op.cit. p.120

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l'assujettissement. Il y déplore le fait que l'épouse « n'a pas les moyens de se soustraire »68 à son mari. Ainsi, seule la séparation légale prononcée par un tribunal peut être accordée à la femme et ce, uniquement « en cas de désertion ou d'extrême cruauté du mari »69. Mill va plus loin encore dans la suite de l'oeuvre en affirmant que les tribunaux doivent donner ipso facto à la femme le droit « de divorcer ou au moins d'obtenir une séparation judiciaire »70 s'ils souhaitent que l'effort répressif envers les époux violents soit efficace. En effet, un argument logique plusieurs fois avancé par Mill est que l'on ne peut espérer d'une épouse qu'elle porte plainte, intente une action en justice, témoigne contre son époux, .. si elle sait que rien ne sera mis en oeuvre pour la protéger de ce dernier après cela.

Pour Mill, l'argument de l'égalité est également essentiel dans la question du divorce. Dans Du mariage, il considère déjà que « parler d'égalité alors que le mariage est un lien indissoluble est absurde »71. Ainsi, la possibilité d'obtenir le divorce serait une condition sine qua non de l'égalité de principe au sein du mariage. Il est ainsi rapproché de la notion juridique de contrat : on choisit d'y entrer, on peut choisir d'en sortir ; et éloigné de toute conception religieuse notamment, à laquelle Mill ne fait jamais référence.

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