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D'une motricité subie à  une motricité agi : le soin psychomoteur comme soutien à  l'élaboration d'une motricité intentionnelle chez l'enfant porteur d'autisme


par Juliette Landeau
Université Claude Bernard Lyon 1 - ISTR - D.E. Psychomotricien 2022
  

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3.1.4. Quatrième séance : mise en danger

La séance qui suit se déroule avec beaucoup d'agitation chez Jamil. S'il escaladait déjà beaucoup le mobilier lors des séances précédentes, cela est encore plus marqué lors de celle-ci. Jamil est très actif et nous peinons à le maintenir sur les activités. Plus que d'habitude, Jamil se met en danger en grimpant sur les agrès, l'espalier, en prenant des positions d'équilibre instable, il lâche par exemple les mains, ne tient que sur un pied, se jette sur le mobilier.

Sur le temps sensoriel, que nous avons décidé de maintenir en début de séance, Jamil utilise la balançoire et se jette dedans, la fait monter très haut en ne prenant pas en compte d'autres enfants qu'il pourrait blesser ou de sa propre sécurité. Nous ne parvenons pas à lui faire réaliser le parcours, et encore moins à l'aider à se poser pendant le temps calme, durant lequel il pousse des cris en courant notamment.

L'après-midi qui suit, nous apprenons qu'au cours d'une promenade, Jamil a chuté du haut du toboggan d'une structure pour enfant. Il était toujours dans des comportements d'escalade et de mise en danger et la chute lui a causé de se casser les incisives supérieures. Les professionnels nous rapportent que Jamil a réagi très fort à la vue du sang, et probablement à la frayeur de la chute, en hurlant et pleurant. Ils identifient difficilement si la réaction est due à une douleur ressentie ou non.

Après cet évènement, je ressens une inquiétude vis-à-vis de cet enfant. Je me demande comment l'aider à contrôler son besoin de sensations vestibulaires, à lui faire comprendre les situations de danger dans lesquelles il se place. J'ai l'impression que son besoin sensoriel n'est jamais rassasié, qu'il a toujours besoin de plus, et je me sens impuissante face à cela.

LANDEAU (CC BY-NC-ND 2.0)

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LANDEAU (CC BY-NC-ND 2.0)

3.1.5. Cinquième et sixième séance : mise en place d'une routine

Les séances suivantes se ressemblent, les conduites d'escalade et de course de Jamil sont toujours présentes, répétées et leur forme ne change pas. Le cadre de la séance semble compris par Jamil, et plutôt bien intégré, mais il est toujours difficile de lui faire réaliser une activité du début à la fin.

La sixième séance se déroule en deux temps, car il manque des professionnels sur les unités, la monitrice-éducatrice ne peut pas nous accompagner. Dans un premier temps, nous accueillons sur le groupe Jamil et l'enfant avec qui il avait déjà partagé une séance, puis dans un second temps nous accueillons les deux autres enfants du groupe. Jamil ne se montre pas plus perturbé par ce changement du cadre, peut-être parce que cette configuration a déjà eu lieu, et que la psychomotricienne et moi sommes mieux intégrées par ces enfants. Jamil accepte de réaliser les activités de déplacements et de parcours aisément, même si cela est parasité par ses échappées vers l'espalier ou les agrès. Je suis surprise de le voir continuer à escalader l'espalier et se balancer toujours aussi fort alors qu'avant les vacances de Noël, Jamil a fait une chute effrayante. Il ne montre pas d'appréhension, ce qui me questionne sur ce qui fait trace chez cet enfant. Depuis mon arrivée, Jamil montre des conduites d'escalade pendant les séances, son besoin de grimper semble toujours le même. C'est comme s'il était impossible à satisfaire sur le plan sensoriel. Est-ce alors que son besoin est trop grand pour parvenir à en atteindre la satisfaction ? Ou est-ce parce que les expériences ne font pas trace, et que tout « repart à zéro » à chaque fois qu'il descend ?

En prêtant plus attention à ces moments où Jamil escalade le mobilier ou se place en cochon pendu les yeux fermés sur l'espalier, je remarque que plus rien d'autre ne semble exister pour lui. C'est comme s'il n'y avait plus que lui, ses sensations, et que les autres enfants, les professionnelles et tout autre élément de la pièce disparaissaient. En nous manifestant verbalement, en lui demandant de descendre et de réaliser l'activité, nous sommes de nouveau présentes, pour un court moment.

Ce sentiment de ne plus exister aux yeux de Jamil me fait presque violence, quand je le réalise, comme si je cessais réellement d'exister. C'est comme si son regard, son attention conditionnait ma présence, et qu'en l'absence de celle-ci je n'étais plus. Comme je l'ai déjà mentionné, la constante vigilance qu'il provoque chez l'autre en se mettant facilement en danger lui permettrait peut-être d'exister au travers de cette attention. Ainsi, mon sentiment serait un miroir de ce processus : tout comme il n'est plus sans le regard de l'autre sur lui, je n'existe plus sans son regard à lui.

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LANDEAU (CC BY-NC-ND 2.0)

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