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L'agriculture périurbaine au risque de la ville? (le cas de Diamniadio, Dakar, Sénégal)

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par Virgile Mendret
ULP Strasbourg I - Master I Géographie Humaine 2006
  

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3 Le cadre législatif et réglementaire de la croissance urbaine

Depuis l'indépendance, l'Etat sénégalais tend de plus en plus à réglementer et à diriger l'occupation de l'espace, qu'il soit rural ou urbain. On peut affirmer cependant que le droit ne

fait pas la ville : l'extension de Dakar continue de s'opérer mais sans toujours obéir à la norme juridique, occupant souvent les emprises d'infrastructures en projet. Il a aussi été montré que les bailleurs de fonds cherchent une légitimité autre que celle apportée uniquement par l'Etat.

Dans un premier lieu, nous verrons que les législateurs ont eu une propension affirmée

à puiser leur inspiration dans des règles en vigueur en Europe, où ces instruments visent à développer la concertation et la participation des habitants des communes aux choix d'urbanisme. Puis il faudra signaler la refonte du droit de la domanialité publique, dans un sens qui se veut assez proche de la tradition africaine. Telle est l'originalité de la législation relative au domaine national. A l'origine, cette législation intéresse plus l'aménagement du territoire rural que l'aménagement des villes, mais elle permet le lancement d'agglomérations nouvelles, telles Diamniadio. En effet, si les collectivités locales font autorité pour la gestion

du domaine national en zone rurale, l'Etat s'arroge les compétences foncières des communes urbaines. L'Etat peut-il faire la ville ? La question peut étonner, après s'être attaché à montrer que la pression foncière était la conséquence d'interactions entre échelles, dépassant souvent

le cadre national, et d'acteurs privés locaux bénéficiant de marges de manoeuvre. Mais à Diamniadio, à l'aide de ressources providentielles, l'Etat veut réaffirmer son autorité de seul maître de la terre. Quitte à appliquer la politique du bulldozer.

A) Des instruments législatifs empruntés à la France mais inadaptés à une pression urbaine aigue.

L'énumération de quelques outils d'urbanisme souligne que dès l'origine, l'Etat

sénégalais a intervenu massivement dans la production et la gestion urbaine, et de manière particulièrement marquée dans la région du Cap Vert. Mais il ne faut pas perdre de vue que

ces outils traduisent une mauvaise appréhension du phénomène urbain. En effet, ceux-ci sont dépassés par l'ampleur de la croissance urbaine, et ne permettent pas une planification locale

des équipements, des réseaux et des réserves foncières à la mesure du développement que connaît la capitale. Les restructurations urbaines, les déguerpissements ont été des réponses apportées a posteriori par l'Etat sénégalais à ses propres carences en matière de planification

urbaine.

Le Code de l'Urbanisme fait l'objet d'une loi et comprend une partie législative et une partie réglementaire. La partie législative traite des conditions d'élaboration et d'approbation des plans cadres d'urbanisme ; quant à la partie réglementaire, elle traite essentiellement des aspects liés aux autorisations de lotir, et du contrôle des constructions. Ce code se base sur quelques outils d'aménagement calqués sur le droit français. Ce sont le Plan Directeur d'Urbanisme (PDU), la Zone d'Aménagement Concerté (ZAC), le Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme (SDAU), et enfin le lotissement.

Les plans directeurs d'urbanisme (PDU) sont élaborés par la Direction de l'Urbanisme et de l'Aménagement (DUA) du ministère de l'urbanisme. Sa vocation principale est de permettre aux services de l'Etat de gérer avec une plus grande précision l'attribution et l'utilisation du sol urbain qui échappe donc aux autorités locales, qui, dans les textes sont associées à l'élaboration du PDU. La part d'association de celles-ci dépend cependant de la qualification de leur personnel, et elle fait souvent défaut. Mais, faute d'une mise à jour régulière, les investissements programmés et non réalisés par manque de moyens sont reportés d'une année à l'autre, quelle qu'ait pu être l'évolution de la ville concernée. Ces PDU fixent les orientations générales et indiquent les éléments essentiels de l'aménagement urbain dans le cadre du plan national d'aménagement du territoire. Ils comportent :

- la répartition et l'orientation du sol en zones suivant les affectations ;

- le tracé de toutes les voies de circulation ;

- l'organisation générale des transports ;

- les emplacements réservés aux activités ;

- les installations classées et d'intérêt général ou à usage public ;

- éventuellement les éléments de programmation et de coût des équipements publics et d'infrastructures ;

- les schémas directeurs des réseaux.

Les plans d'urbanisme de détails (PUD) reprennent à plus grande échelle les dispositions d'aménagement d'une zone ou des parties des plans directeurs et schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme. Ils doivent préciser et compléter ces dispositions

en fonction des spécificités de chaque secteur concerné, notamment la délimitation des zones d'affectation en considération de la nature des sols. Les plans d'urbanisme de détails

comportent un règlement qui fixe les servitudes relatives à l'utilisation du sol.

Les Zones d'Aménagement Concerté ont pour objet l'aménagement et l'équipement

de terrains, notamment en vue de la réalisations d'infrastructures et d'équipements collectifs publics ou privés, de construction à usage d'habitation, de parcelles d'habitation viabilisées,

de commerce, d'industrie ou de service. Les ZAC doivent permettre de coordonner ces investissements, dans des zones stratégiques où la pression foncière est particulièrement forte.

Le premier projet a été la ZAC de Mbao Gare (environ 650 hectares) située à l'entrée

de Rufisque, le long des axes principaux de transport (route nationale et chemin de fer), où de nombreux promoteurs et coopératives d'habitat se sont procurés des terrains.

L'opération jugée très intéressante à été étendue à grande échelle avec la création de

six autres zones d'Aménagement concerté, dont cinq concernent les villes de l'intérieur (Thiès, Louga, Kaolack, Saint-Louis, Richard-Toll), et une à Diamniadio, avec cette fois ci une place importante accordée aux collectivités locales dans la mise en oeuvre. L'aménagement des 5 premières zones d'aménagement concerté fournira 500 hectares aménagés avec 100 hectares par ville.

Par contre, la ZAC de Dakar / Diamniadio concernera l'organisation et l'aménagement

de 2500 ha, avec une première tranche de 1250 ha, pour offrir des terrains pour l'habitat, l'industrie, l'artisanat et le commerce. Afin de regrouper toutes les collectivités locales intéressées par ce projet, les élus ont demandés la création d'un groupement mixte, tel que décrit dans le code des collectivités locales.

Les schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme (SDAU) fixent les orientations fondamentales de l'aménagement des territoires concernés, compte tenu des relations entre ces territoires et les régions avoisinantes et de l'équilibre qu'il convient de préserver entre l'extension des agglomérations, l'exercice des activités agricoles, des autres activités industrielles, économiques et la préservation des sites naturels.

Les schémas directeurs prennent en compte les programmes de l'Etat, des collectivités locales, des établissements et services publics et privés. Ils déterminent la destination générale

des sols, la nature et le tracé des grands équipements d'infrastructures en particulier de transport, la localisation des activités les plus importantes, ainsi que les zones préférentielles d'extension ou de rénovation. Le SDAU s'applique à une commune, à une communauté

rurale, à un ensemble de communes ou des communautés rurales.

Les lotissements semblent considérés, et ce depuis l'ère coloniale, comme le mode d'aménagement unique de la ville africaine. Tout le centre de Dakar est marqué par cet urbanisme colonial en damier. Sa création, coûteuse, relève de plusieurs étapes. Après l'obtention de l'immatriculation des terrains, première étape qui peut durer longtemps, un géomètre quadrille, borne et lotit, en établissant un plan masse et un règlement de lotissement.

La vente ne peut s'effectuer qu'après approbation officielle : les lots peuvent être alors titrés

et entrer dans la filière légale de construction. Ce type de lotissement est la plupart du temps occupé par les couches sociales moyennes ou supérieures, proches de l'administration et mieux informées des démarches à suivre et capables de supporter le coût des titres fonciers et

des travaux demandés.

Comme mentionné précédemment, les 12 000 lots enregistrés par l'ancienne communauté rurale de Yène sont remis en cause par la ZAC de Diamniadio, l'enjeu des communes étant de pouvoir honorer les demandes déjà perçues.

La réalisation de ces SDAU, PDU, PUD, ZAC et lotissements, en raison des lenteurs des procédures administratives, du manque de moyens, prend souvent beaucoup de retard. Aussi ces plans sont très vite dépassés par des extensions urbaines incontrôlées et irrégulières, qui hypothèquent souvent la réalisation de certains grands équipements d'infrastructures prévus (autoroute Dakar-Thiés, voie de dégagement Nord etc.) et/ou engendrent des coûts hors prévisions pour leur réalisation.

Afin de pallier ces occupations spontanées de l'espace, l'Etat utilise deux pratiques

urbanistiques, qui ne s'appliquent pas à des cas précis ; leur application varie en fonction des options politiques : on veut récupérer le terrain (déguerpissement) ou on veut régulariser la situation de personnes qui ont peu de droits ou pas du tout (restructuration urbaine).

La restructuration urbaine consiste en une opération d'aménagement des zones non loties, vétustes ou insalubres caractérisées par une occupation anarchique de l'espace avec notamment des parcelles enclavées ou mal desservies, et un manque d'équipements collectifs.

Il s'agit d'asseoir une utilisation et une organisation plus rationnelle de l'espace, d'améliorer

le cadre de vie et de régulariser la situation foncière des ayants droit, conformément à un plan

de restructuration conçue avec la participation des populations concernées.

La procédure consiste à immatriculer au nom de l'Etat tous les terrains occupés illégalement, pour permettre ensuite la production de titres fonciers. Côté restructuration, il s'agit de libérer des emprises pour une voirie minimale, de raccorder le quartier aux réseaux d'électricité et d'eau, en associant les habitants au remodelage de leur quartier, en dégageant

les zones habitables occupées illégalement.

Un phénomène de spéculation peut se développer dans les quartiers visés, parvenant à contourner les règlements pour tirer un profit financier de l'opération. A Diamniadio, cette opération sera-t-elle récupérée par les populations solvables et des dakarois aisés ?

Les déguerpissements concernent certaines personnes qui se sont installées en dehors

des lotissements, mais ont acheté leur terrain aux propriétaires coutumiers Lébous. Pour la plupart, ils ont assuré eux même la construction de leur maison. Lorsque ces installations sont

sur l'emprise de projets d'aménagements, l'Etat procède à leur déguerpissement, effectué manu militari. Le projet de Diamniadio prévoit la destruction d'habitations, et des expulsions s'apparentant à des déguerpissements ont déjà eu lieu (sur l'emprise de la Sodida2). A Dakar,

la procédure de déguerpissement ne constitue pas en soi une politique urbaine mais est présentée comme la conséquence de l'offre insuffisante en logements qui provoque l'urbanisation illégale et souvent anarchique des espaces libres. Cette situation est aggravée

par la promulgation de la loi sur le domaine national de 1964.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote