WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Pénalisation et dépénalisation (1970 - 2005)

( Télécharger le fichier original )
par Gatien-Hugo RIPOSSEAU
Université de Poitiers - Master II Droit pénal et sciences criminelles 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B- La dépénalisation de fait d'infractions courantes : l'exemple du vol simple230(*).

La petite délinquance et notamment le vol simple (art.311-1 CP) occupe une place prédominante dans les faits constatés par les services de police et de gendarmerie : les vols simples constituent près de 45% des faits constatés en 2001. Cette infraction recouvre l'ensemble des soustractions frauduleuses sans violences telle que les vols de véhicules, les vols à l'étalage chez les commerçants ou les vols sans violence sur la voie publique. Le nombre de vols simples constatés par la police et la gendarmerie a augmenté de 6% entre 1991 et 2001231(*). Cette infraction représente d'ailleurs encore près des trois quarts de l'ensemble des infractions de vol et recel constatés par la police au cours d'une année.

D'un point de vue judiciaire, le traitement de cette infraction a subi d'énormes transformations au cours des dix dernières années et ce, au service de l'économie du système pénal, qui, s'il avait pour objectif d'apporter une réponse traditionnelle à tout ces faits de petite délinquance, risquerait de défaillir confronté à ce contentieux de masse. C'est donc pour sauver le système pénal d'une véritable apoplexie, que le vol simple a fait l'objet d'une véritable dépénalisation de fait, par une opération de tri des affaires poursuivies entre classement sans suite, procédures alternatives aux poursuites et poursuites à proprement parler.

Une étude réalisée récemment portant sur l'activité des parquets des sept principales juridictions d'Ile-de-France232(*) (représentant 20% de l'activité nationale) donne une vision détaillée du traitement des affaires pour vol simple.

La décision la plus fréquente reste le classement sans suite, principalement pour préjudice peu important. Pour des raisons identiques qui tiennent au caractère souvent bénin de ce type de délit, le vol simple fait l'objet de procédures alternatives plus souvent que d'autres contentieux. Ces dernières représentent en effet 23% des orientations pour ce type d'affaires contre 21% tous contentieux confondus. Enfin, 25% des affaires de vol simple sont poursuivis par les parquets soit un taux très inférieur à celui observé pour l'ensemble des affaires (43%).

La part des vols simples au sein des condamnations pour délit se situe autour de 20% de 1984 à 1993. Elle diminue ensuite et tombe en dessous de 10% à partir de 1999 pour atteindre 7,6% en 2001233(*).

A la lecture de ces quelques chiffres, il apparaît qu'outre le classement sans suite qui a toujours représenté une part importante dans le traitement des vols simples, les procédures alternatives aux poursuites remplissent un rôle qui ne cesse de croître en la matière. Le législateur a dû trouver une solution pour répondre rapidement et efficacement à un fort contentieux de masse (au sein duquel le vol simple représente une part non négligeable) et surtout ne pas laisser se développer la pratique du classement sans suite, véritable déni de justice même lorsqu'il concerne des infractions de faible importance comme le vol simple : c'est donc une logique pragmatique qui a gouverné l'émergence de ces procédures alternatives aux poursuites ainsi que leur développement postérieur234(*).

C'est ainsi que l'arrivée et le développement de des procédures alternatives a été le moyen de cette dépénalisation de fait qui a touché le traitement judiciaire du vol simple235(*). Le développement des procédures alternatives aux poursuites a donc offert aux parquets la possibilité d'orienter les affaires de vol simple en fonction de la gravité des faits et de la qualité de l'auteur, de sorte que la réponse pénale se trouve graduée. C'est cette graduation de la réponse pénale qui a conduit à privilégier les voies alternatives pour les primo délinquants et donc à réserver le cas des poursuites aux récidivistes, présentant un risque particulier de récidive. Ainsi, la part des récidivistes au sein du nombre total des condamnés pour vol simple est passée de 31% en 1989, à 49% en 2001 et le nombre de condamnations pour vol simple a chuté de plus de 73% de 1984 à 2001.

Toutes les évolutions conduisant à une baisse des condamnations pour vol simple, sans modification substantielle des sanctions, il s'ensuit logiquement une baisse des incarcérations pour de tels faits : ainsi, entre 1993 et 2002, les entrées en établissements pénitentiaires justifiées par une affaire de vol simple sont divisées par deux236(*). Cette diminution des flux s'accompagne d'une baisse de moitié de ce type de délinquants dans la population des condamnés incarcérés237(*). Apparaît alors le second impératif poursuivi par le processus de dépénalisation des vols simples par la création des procédures alternatives aux poursuites : la, maîtrise de la surpopulation carcérale qui est devenue, au même titre que le traitement judiciaire rapide des infractions courantes de la petite délinquance, une véritable préoccupation de politique criminelle.

* 230 Ces développements ont été effectués à partir d'une publication faute de documentations dans ce domaine malgré l'ampleur du phénomène : INFOSTAT JUSTICE n° 74, mai 2004.

* 2311 702 890 vols simples constatés en 1991 contre 1 811 852 en 2001.

* 232 Etude réalisée sur les sept parquets d'Ile de France grâce à l'Infocentre alimenté par le système de gestion de la « Nouvelle chaîne pénale ».

* 233 Cette forte diminution des condamnations pour vol simple a eu peu d'incidence sur la nature des peines prononcées.

* 234 La loi du 4 janvier a instauré la médiation pénale (art. 41-1 Code de procéd. pén.). Ensuite, la loi du 23 juin 1999 a introduit dans l'article 41-1 du Code de procédure pénale, des modes alternatifs de règlement des litiges encore plus souples que la médiation pénale (rappel à la loi, orientation vers une structure sanitaire sociale ou professionnelle, la régularisation de la situation, la réparation du dommage, etc.). Cette loi a également mis en place la composition pénale de l'article 41-2 du Code de procédure pénale.

* 235 La création avec le nouveau Code pénal de 1994, du délit de vol avec destruction, dégradation ou détérioration (art.311-4 CP), a déplacé une partie des vols simples vers les vols aggravés ; la création de cette nouvelle infraction a donc également contribué à la baisse des condamnations pour vol simple, mais dans une mesure qui reste marginale (2% des condamnations).

* 236 15 300 en 1993 et 7800 en 2002.

* 237 Au 1er janvier 1993, 22% des condamnés l'étaient pour des faits de vol simple ; au 1er janvier 2002, ils n'en représentaient plus que 11%.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore