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La couverture du risque maladie: essai d'une étude comparative entre les systèmes français et marocain

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par Jamila Zakour
Université Bordeaux IV Montesquieu - DEA de droit du travail et de la Protection Sociale 2006
  

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b) Les fondements constitutionnels et les sources internes :

La Constitution du 4 Octobre 1958 instituant la Vème République, ne contient aucune disposition relative à la protection sociale, ou à toute philosophie de gestion des risques sociaux. L'article 2 de la Constitution énonce que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. »11(*). Cependant, malgré l'insertion du terme « sociale », il n'existe aucune exégèse constitutionnelle quant à la portée de ce terme. A propos du caractère laïque ou encore indivisible de la Nation, il existe une glose abondante de la part des Neuf Sages. Mais ces derniers demeurent silencieux quant à la notion de sociale ; il y a donc une vraie carence de la part du Conseil dans ce domaine comme le déplore à juste titre Francis Kessler.12(*)

A la vérité, ce n'est pas la Constitution elle-même qui sert de véritable fondement constitutionnel mais bien son « Bloc de Constitutionnalité » composé de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, du Préambule de la Constitution de 1946, et des Principes Fondamentaux Reconnus par les Lois de la République. Et ce sera plus précisément dans le Préambule qu'il faudra chercher les sources constitutionnelles relatives à la protection sociale. En effet, l'article 10 du Préambule de la Constitution de 1946 dispose que « La Nation assure à l'individu et à la famille es conditions nécessaires à leur développement » de même l'article 11 dispose que « la Nation garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère, et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui en raison de son âge, son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ».

De ces principes énoncés à divers endroits du texte, deux conséquences doivent être dégagées. La première est le caractère non équivoque de ces principes ; en effet, si l'article 2 de la Constitution de 1958 laissait un certain flou quant à la portée du mot « sociale », ici il ne fait aucun doute qu'il s'agit de principes constitutionnels propres à la protection sociale. Et même si les notions de « famille », « d'individus » peuvent faire l'objet d'interprétations de la part du Conseil, il n'en demeure pas moins que ce sont très clairement les risques sociaux qui sont visés comme principales causes. La seconde remarque concerne l'utilisation qui est faite de ces principes par le Législateur. Celui-ci voit son activité encadrée par le Conseil Constitutionnel, mais il n'en demeure pas moins qu'il aura toute latitude pour mettre en oeuvre les politiques publiques relatives aux indemnisations chômage, ou encore aux dépenses de santé. Et si cela s'avère nécessaire, il (le Législateur) pourra tout à a fait restreindre l'application d'une liberté constitutionnelle quand est en jeu la santé et la protection des citoyens. L'exemple le plus parlant, sera celui du droit de grève, auquel il pourra être porté atteinte dans un souci de protection de la santé et sécurité des personnes et des biens13(*).

Cependant la tâche qui est dévolue au Conseil dans ce domaine n'est pas chose aisée dans la mesure où les principes particuliers au droit de la santé (comme tout principe constitutionnel pris en tant que tel d'ailleurs) ne peuvent trouver application directe sans heurter d'autres principes d'égale valeur. Il revient donc aux Sages « doser subtilement » pour reprendre l'expression du Professeur Dupeyroux14(*)ce qui relève des droits libertés qui peut se traduire par le droit de des droits qui touchent plus directement à la catégorie de la Sécurité Sociale et que l'on peut traduire par le droit à, et qui sont des droits créances qui impose une intervention législative pour en garantir la mise en oeuvre.

Le Bloc de Constitutionnalité constitue donc une source de premier plan dans la construction juridique des normes de protection sociale. Celle-ci est étroitement encadrée par des normes à valeur constitutionnelles, mais la majorité des règles qui participent de la construction juridique de la protection sociale, proviennent du Parlement et du Gouvernement. La production des normes touchant à la matière sociale, présente un certain particularisme car elle s'articule à la fois autour du pouvoir législatif et réglementaire

Initialement, dans la Constitution de 1958, rien ne prévoyait une quelconque action du pouvoir parlementaire en matière de financement de la protection sociale. En effet, l'article 34 de la Constitution dispose notamment que la Loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical, et de la sécurité sociale, à savoir son mode de gestion, les catégories de bénéficiaires et de prestations... Mais les députés ne pouvaient en aucun cas intervenir sur les orientations et l'équilibre budgétaires. Cependant, très rapidement les dépenses en matière de santé ont atteint des sommes colossales, quasiment aussi élevées que le budget de l'Etat. Un contrôle parlementaire s'est révélé indispensable. Et cela se justifiait également sur un plan constitutionnel car l'article 14 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen dispose que « Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes, ou par leurs Représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi ou d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ».

C'est ainsi qu'à partir de 1996, plus précisément par la loi constitutionnelle du 22 Février 199615(*)et la loi organique du 22 Juillet 199616(*) qui modifie l'article 34 de la Constitution, le Parlement est associé à la préparation, au vote et au suivi des Lois de Financement de Sécurité Sociale (ci-après LFSS). Ces réformes sont intervenues dans le cadre de ce que l'on appelle « le plan Juppé » du nom du Premier Ministre de l'époque, et qui a réussit là ou d'autres Chefs de Gouvernement ou députés17(*) avaient échoué, à savoir une plus grande emprise des pouvoirs publics sur le système de Sécurité Sociale.18(*) Aujourd'hui les débats portant sur la LFSS sont un moment important aussi bien dans la vie parlementaire que dans la sphère politique en général, puisque la question du financement de la protection sociale en France constitue un des axes-clés lors d'élections politiques.

Depuis 1945, c'est une tradition d'intervention étatique qui caractérise le système de la protection sociale en France. En effet, l'Etat est à l'origine des régimes-clés de la Sécurité Sociale puisque l'Ordonnance du 4 Octobre 1945 entre autre, porte création du Régime Général. L'intervention de l'Etat se caractérise par 4 points :

-L'Etat va définir le champ d'application des régimes, leur organisation et compétence19(*).

-Il fixe le niveau des prestations de la Sécurité Sociale, en précisant les conditions d'attribution, le mode de calcul, le barème...

- Il prévoit le mode de financement adéquat.

-Et depuis la réforme constitutionnelle de 1996, il veille à l'équilibre financier avec l'adoption de la LFFS.

Et si depuis la réforme constitutionnelle de 1996, le Parlement joue un rôle primordial dans l'élaboration des législations de sécurité sociale, il doit néanmoins composer avec le pouvoir réglementaire. C'est donc un partage des compétences entre les articles 34 et 37 de la Constitution qui s'applique ici. Ainsi, si l'acteur Législatif a compétence pour fixer exclusivement les principes fondamentaux de la Sécurité Sociale tels que la création de régimes autonomes (cf. : Cons.const du 2 Juillet 1965), le champ d'application de chaque régime (cf. : CE ass. 27 Novembre 1964 « caisses centrales de secours des mutualités agricoles), il reviendra au pouvoir réglementaire de mettre en oeuvre les différents principes édictés par la Loi, en faisant attention à ne pas s'éloigner de l'objet de celle-ci. Par exemple, si la Loi pose le principe d'une condition d'âge quant à l'ouverture du droit à la retraite, et bien le Règlement va préciser l'âge à retenir, la durée de la cotisation et le taux de calcul20(*). Enfin, les lois ordinaires tout comme les conventions de Sécurité Sociale, peuvent jouer un rôle de correctif dans l'application des orientations politiques car si l'important article 34 de la Constitution donne compétence au Législateur en matière de droits fondamentaux de Sécurité Sociale, celle-ci (la compétence) peut être complétée par les conventions signées entre les partenaires sociaux que ce soit pour l'indemnisation du chômage avec les accords nationaux interprofessionnels ou les prestations médicales ou paramédicales.

Avec cette mise au point des compétences entre les deux corps politiques. Le Code de la Sécurité Sociale en témoigne avec sa division tripartite : une partie législative « L » une partie pour les Décrets en Conseil d'Etat « D », et enfin une partie pour les Décrets simples « R ». C'est un véritable rééquilibrage des pouvoirs qui est mis en place, rééquilibrage accentué avec la loi du 2 Août 2005.

C'est la même dichotomie, et la même philosophie qui ont guidé le Royaume du Maroc dans l'élaboration de son système de protection sociale et donc de gestion des risques sociaux, et qui continue de le guider aujourd'hui dans sa tentative de réforme de ce dernier. Lui aussi s'abreuve à la fontaine des normes internationales comme à la source constitutionnelle et religieuse, car le Maroc est un Etat religieux.

* 11 J.Godechot, Les Constitutions de la France depuis 1789, Flammarion, 1995.

* 12 F. Kessler, op cit, p.153.

* 13 CF : décision du Conseil Constitutionnel n° 80-117 DC du 22 Juillet 1980.

* 14 J.J Dupeyroux (dir.) op. cit.p.372.

* 15 CF ; Loi n° 96-138 du 22 Févier 1996 instituant les lois de financement de la Sécurité Sociale

* 16 CF : Loi Organique n° 96-646 du 22 Juillet 1996, relative aux lois de financement de Sécurité Sociale.

* 17 Voir par exemple la tentative en 1987 de Michel d'Ornano alors Président de la Commission des Finances à l'Assemblée et à l'origine d'une Loi Organique qui proposait un contrôle du Parlement sur les finances de la Sécurité Sociale

* 18 CF : O. Pujolar, Présentation de la loi organique du 2 Août 2005 relative aux lois de financement de sécurité sociale , LEXBASE HEBDO n°179- EDITION SOCIALE.

* 19 Pour exemple, l'Ordonnance du 24 Avril 1996 qui organise la Sécurité Sociale

* 20 CF : Cons.const du 8 Août 1985.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld