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Interaction Hommes/Animaux chez les Gisir Gabon

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par Bipikila Moukani Mambou
Université Omar Bongo - Maîtrise 2008
  

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3.5 Fétichisme et chasse au fusil

La chasse au fusil en milieu gisir est une pratique d'introduction récente. Selon Albert Boulikou, cette pratique a été introduite chez les Bisir par des chasseurs qui seraient revenus vers la région de Lastrouville. Cette affirmation nous a été rapportée dans l'extrait de discours suivant : « Les chasseurs qui les tuaient n'étaient pas parmi nous, ils revenaient de Lastrouville, nous les gisira nous avons appris à faire la chasse avec eux, ils avaient un rite qu'on appelait munombu133(*). Lorsqu'ils arrivaient ici ils descendaient chez les chefs. Ces chefs les montraient les forets où l'on rencontre les éléphants. Et ces chasseurs partaient accompagnés des autochtones à leur poursuite de ces éléphants. Ils les tuaient avec les flèches, une fois tués les gens du village prenaient la viande et ils récupéraient les pointes de défenses qu'ils vendaient »134(*). En effet, Jeannin Albert (1947) note qu'il y aurait dans le bassin supérieur de l'Ogooué, au Gabon, un peuple qu'il nomme les Mindassa, qui avait un cérémonial compliqué dont le rôle principal était tenu par un « nganga djoko ». Le mot « nganga djoko » signifie littéralement selon l'auteur, maître du rite de l'éléphant.

En effet, les opérations d'ordre magique, c'est-à-dire toutes les tentatives de contrainte, jouant en direction d'un objet afin que celui-ci se conforme aux souhaits de l'officiant ou des officiants, étaient d'un usage général en ce qui concernait la chasse chez nombre des peuples traditionnels. A propos des Mindassa, Jeannin Albert rapporte les propos de Even, un administrateur colonial, selon lesquels, la veille du départ pour la chasse, le « nganga djoko » dépose dans une hutte, qui correspond à un autel consacré, un panier d'écorce et un sachet fait d'une peau de chat-tigre. Le panier contient des ossements des défunts « nganga djoko » du village et ceux de leurs épouses, qui les assistaient dans les célébrations rituelles. Le sachet renferme de la cendre provenant de la carbonisation d'excréments d'éléphants et de certaines parties (trompe, pénis) du corps des grands sujets mâles qui furent tués au cours d'expédition antérieures.

Les fusils et les sagaies des chasseurs sont placés contre les parois de la hutte et à l'intérieur de celle-ci entrent le « nganga djoko » et sa femme. S'il possède plusieurs épouses, celle qui l'accompagne en cette circonstance est toujours la préférée. Ceux qui prendront part à la chasse s'assemblent au dehors. Le « nganga djoko » commence par évoquer les morts, il les appelle, les prie d'aider les hommes qui vont le lendemain chasser. Il s'adresse aux esprits des éléphants mâles dont les cendres reposent près de lui. Il les presse d'assister ses gens, de le seconder pour que, dans la chasse qui aura lieu, de nouveaux éléphants soient tués. Puis, il sacrifie d'un coup de sagaie au coeur, un mouton, et décapite des poulets. Il arrose de sang les ossements des ancêtres et la cendre des grands animaux.

Dans leurs soubresauts, les bêtes agonisantes projettent des gouttelettes sanglantes sur l'opérateur, sur les chasseurs et les armes, et ce sont là des éléments favorables, riches en vertus mystiques. Au soir, les chasseurs consomment en commun la viande des animaux sacrifiés et, lorsque la nuit vient, tous les habitants du village dansent. Le « nganga djoko » regagne sa case en compagnie de sa femme, et il est jugé bon, pour que l'entreprise du lendemain soit suivie de succès, qu'ils aient entre eux des rapports sexuels. Le lendemain, l'expédition s'effectue. Lorsqu'ils arrivent dans la zone des éléphants, les hommes construisent rapidement un campement en branches et en feuillage dans lequel la femme doit y demeurer, ayant près d'elle les ossements et les cendres, jusqu'à la fin de la chasse.

En présence des bêtes, c'est le « nganga djoko » qui tire le premier coup de fusil ou qui jette la première sagaie. Quand un éléphant est atteint et meurt, le « nganga djoko » lui coupe d'abord la queue. Il retourne, muni de ce trophée, au campement et en frappe son épouse. La femme doit quitter son abri et elle suit son mari jusqu'au « cadavre ». L'homme sectionne alors l'extrémité de la trompe et applique ce fragment sur la bouche de sa femme qui doit en aspirer le sang. Elle-même opère de cette façon sur le « nganga djoko ». L'éléphant est ensuite découpé. Les parties sexuelles et celles qui doivent être conservées et réduites en cendres sont recueillies par l'officiant, qui reçoit en outre les intestins, le foie, la trompe, et un morceau du coeur.

Le reste de cet organe est réparti à l'écart entre certains chasseurs qui sont initiés à une confrérie secrète, le « Mongala ». La nuit qui suit les chasses fructueuses, les habitants du village se livrent de nouveau à des danses et à des chants. Le « nganga djoko » de temps à autre, s'élance au milieu des cercles de danseurs et simule par ses attitudes, une profonde désolation. Il se lamente sur la mort de l'animal, il exprime une douleur considérable qui dépasse, dit-il, celle que lui a causé ou que lui causerait le décès des proches parents. L'intensité de cette souffrance fictive doit être proportionnée à la taille qu'avait la bête ; il arrive que s'il ne s'agissait que d'un éléphanteau, les témoignages de chagrin soient réduits. Ces agissements ont pour objet d'apaiser l'esprit de l'animal et même de le concilier aux hommes et de l'inciter, dans l'avenir, à favoriser les entreprises de chasse qu'ils opèreront contre ses semblables.

Si sa mort n'était pas pleurée, il pourrait au contraire en concevoir un ressentiment qui l'entraînerait à avertir ses congénères, à les protéger, à les pousser à des réactions de défense violente. Après cette phase, le « nganga djoko » enferme les cendres de l'éléphant abattu dans le sachet consacré et remercie les ancêtres par un sacrifice de poulet. Mais les prières, les offrandes et les danses rituelles, ajoute l'auteur, ne suffisent pas à obtenir un résultat da chasse heureux. Des interdits rigoureux doivent être observé qui sont indispensable au succès de l'expédition. Les chasseurs, à l'exception du « nganga djoko », particularité qui crée aux manifestations des Mindassa un caractère tout à fait spécial, doivent garder la continence depuis le cinquième jour qui précède le départ jusqu'à leur retour au village. Le « nganga djoko » y est d'ailleurs condamné également, mais après que la chasse est commencée et non dans la période qui la précède. La violation de ces défenses provoquerait non seulement l'insuccès, mais aussi des accidents, la mort d'un chasseur, par exemple. D'après Albert Boulikou, les chasseurs qui seraient revenus de la région de Lastrouville, étaient détenteurs d'un rite appelé « munombu » dont les chasseurs Bisir se seraient initiés. C'était un rite exclusivement réservé aux hommes. Camille Mboumba (corpus n°8, séquence n°2), à la suite de Boulikou Albert, nous apprend que lorsqu'un chasseur abattait un éléphant, il coupait la queue de l'animal et l'apportait au village.

Une fois arrivé au seuil du village, il brandissait cette queue et les membres de sa famille poussaient des cris de joie (gusiva milolu). Ces cris de joie exprimaient la grandeur de celui qui vient de réussir un exploit car le succès d'une chasse à l'éléphant procure grandeur, admiration, noblesse et renommée. Puis, il fallait laisser passer deux jours avant d'aller dépecer la bête. A la veille du troisième jour, une veillée du « munombu » était organisée le soir. Le lendemain, le chasseur était maquillé de kaolin rouge puis se mettait devant pour conduire les membres de la communauté indiqués à participer au dépeçage. Pendant le parcours, les gens chantaient en battant les mains. Mais cette pratique du « munombu » n'est plus d'actualité de nos jours.

Les chasseurs Bisir recourent désormais à des pratiques magiques ou « fétichistes ». Mais avant de s'initier à ces pratiques magiques, la chasse à l'éléphant avec le fusil passe avant tout par un apprentissage. C'est que nous confirme Camille Mboumba dans cet extrait de discours : « N'importe qui peut devenir chasseur d'éléphant, c'est un travail d'apprentissage il suffit d'avoir du courage parce que c'est pas tout le monde qui résiste de regarder un éléphant. Certains avec le fusil, s'ils voient l'éléphant, ils fuient, ils parviennent qu'avec les petits gibiers. D'autres arrivent à tuer l'éléphant même avec le calibre 12. La chasse à l'éléphant se donne mais tu dois d'abord apprendre »135(*). En effet, ne devient pas chasseur d'éléphant qui veut mais qui peut. Seuls les jeunes hommes les plus doués peuvent devenir chasseurs ; ils sont soumis à une dure formation, et devaient faire preuve de courage, de sang-froid et d'endurance physique car les marches peuvent durer longtemps, parfois plusieurs jours. Enfin, il importe d'atteindre une grande maîtrise dans le pistage, des dons d'habilité et être un bon tireur.

Le sang-froid est plus que jamais indispensable puisque l'éléphant doit être tué de très près comme l'indique Albert Boulikou quand il dit : « lorsque tu veux tuer cet animal tu dois être en forme. Quand tu le chasses, s'il arrive qu'il te voit le premier tu dois fuir et te cacher même derrière un gros arbre parce que s'il te poursuit avec méchanceté, même si tu tombes il va te dépasser. Et quand tu fuies, tu ne dois pas le faire avec la peur, ton fusil doit être avec toi à la main parce que si tu fuies en ayant peur, il peut t'avoir (...) lorsque tu tires sur un éléphant, tu ne dois pas être trop loin de lui »136(*). Pour cela, il importe d'apprendre à évaluer la bonne distance susceptible d'atteindre fatalement la bête. Mais l'atteindre fatalement revient également à maîtriser les points d'élection des tirs. Pour Albert Boulikou (corpus n°2, séquence n°2), les points essentiellement vulnérables sont le conduit auditif externe (tsugu diru) qui correspond au bulbe rachidien ou le trou de l'oreille, la base de la trompe (mbami), au centre de la ligne qui joint les deux yeux, le coeur en visant légèrement au-dessus du coude (mukeka urega).

L'idéal chez le chasseur est d'abattre l'animal sur place, d'une seule balle. Cette réussite supprime les risques d'une poursuite harassante, le danger de la charge de l'animal blessé et irrité. La chasse à l'éléphant est une des plus émouvantes qui soient. Cette supériorité lui vient de ce qu'elle est difficile, l'adversaire étant un animal particulièrement intelligent, et aussi du fait qu'elle peut devenir dangereuse. Chez les Bisir, c'est la chasse la plus noble, elle procure prestige et grandeur, même quand il s'agit d'un éléphanteau. Jeannin Albert (1947) notait que parmi les plus grands chasseurs professionnels occidentaux d'éléphants et gros gibiers, tous connurent le danger de la charge d'un animal blessé ou furieux et certains eurent un bref instant de défaillance ou simplement manquèrent de chance et terminèrent leur carrière sous les défenses et les sabots d'un éléphant qu'ils ne purent, à la minute décisive, arrêter. Albert Boulikou nous rapporte qu'« Ils étaient nombreux ici mais ils ont succombé, ils se faisaient tuer par les éléphants, (...) j'ai laissé parce que les faits surprenants devenaient trop (...) parfois je vais en brousse pour une autre chasse, je n'apporte pas de carabine seulement le calibre 12, je vois surgir de nulle part un éléphant au moment où je réagi, il est non loin de moi. (...) »137(*). A Mandji, de tels cas ont également été enregistrés. En effet, la chasse à l'éléphant était et est toujours une entreprise risquée. La charge d'un éléphant est fort dangereuse. Intelligent et pourvu d'un odorat très subtil, il cherche à rejoindre celui qui l'a attaqué et s'en débarrasser.

En dehors des espaces protégés et sûrs, l'odeur de l'homme éveille aussitôt en lui la crainte et la colère. S'avancer contre le vent est donc une obligation primordiale. De plus, dans le sous-bois, les choses ne vont souvent pas mieux. On ne peut savoir comment sont disposés les éléphants, quelle est leur dispersion, et on les voit très mal. On distingue à peine leurs têtes. Elles sont trop grandes, leurs têtes sont à la hauteur des branches. En les observant de loin on ne saurait différencier les mâles et les femelles et lorsqu'on est arrivé à bonne portée, ils ne sont plus aux mêmes places. On opte généralement pour celui qui a les plus belles défenses. Il y a toutes les chances pour qu'il soit le mâle le plus âgé. Mais dans ces conditions, des incidents peuvent survenir dans le déroulement de l'action. L'agressivité peut avoir des causes diverses. L'association entre l'odeur de l'homme et la douleur encore cuisante d'une blessure est la commune. Le souci de protéger les jeunes agit chez les mères.

Il y a également des animaux qui, au même titre que les humains, détestent la société en tiennent à leur solitude. Il en est qui, avec l'âge ou par suite de lésions intolérables dues ou non à des balles de fusil, font preuve d'un caractère exécrable. Il arrive aussi qu'il n'y ait pas charge d'un éléphant mais fuite de l'ensemble du troupeau. Si le chasseur n'a pas été décelé par ses effluves et que cette course folle ait lieu dans sa direction, il peut se trouver dans une situation inquiétante. Au vu de ces éventuels dangers et afin de les prémunir, les chasseurs Bisir avaient et ont toujours mis en place deux pratiques dans la chasse à l'éléphant. Ces pratiques sont celles qui font appel à des procédés magiques. La première consiste par un procédé magique à se transformer en éléphant afin de se rapprocher à son gré de ses proies et en abattre celles que l'on désire sans se faire détecter. C'est ce que nous dit Albert Boulikou dans ce fragment de corpus : « Tu pars chez une personne qui sait « féticher » l'éléphant (...) il te fabrique un éléphant mystique pour te cacher. Cet éléphant est comme une chemise que tu portes. Il te donne un dibumba138(*), ce fétiche c'est l'éléphant qui marche avec toi dans un sac. Parfois c'est une chênette qui a pour médaillon le dibumba et ce dibumba c'est l'éléphant en question. En ce moment même si celui que tu veux abattre est méchant, il ne peut pas t'avoir parce qu'il ne te voit pas comme un homme, il ne voit q'un éléphant comme lui»139(*).

Cette pratique est détenue par un nganga qui, sur la demande du chasseur lui donne un talisman fait à base des éléments recueillis sur un éléphant et bien d'autres plantes magiques. Les éléments recueillis sur l'éléphant peuvent être soit un os de la tête, soit un fruit non digérer prélevé dans l'intestin d'un éléphant récemment abattu ou de ses crottins ou bien un des poils de sa queue. Et dans cette optique, nous convenons avec Lepemangoye-Mouleka Sandry Franck quant il dit que : « les variétés animales interviennent de beaucoup dans la composition des fétiches, talismans ainsi que dans les rites sacrificiels liés à un évènement social précis. Divers fétiches et talismans apparaissent sous forme de sous-produits animaux (peaux, plumes, dents, griffes, cornes, poils) associés ou non à des plantes racines ou écorces d'arbres, statuettes ou autres objets »140(*). Ce fétiche donne au chasseur le pouvoir de se transformer en éléphant.

Et Jeannin Albert (1947) soutient cette pratique en disant : « certains hommes ont un pouvoir de dynamisme spécial. Ils peuvent se transformer en animaux et se mêler à leur gré aux bêtes sauvages, commettre des meurtres »141(*). A partir de ce moment, le chasseur transformé en éléphant est confondu au troupeau et peut abattre autant qu'il désire sans être inquiété d'une éventuelle charge. Cependant, il y a une seule et unique prescription dont le non respect conduit fatalement à la mort. C'est dans ce sens que Boulikou Albert nous a confié que : « Cependant tu ne dois pas excéder le nombre d'éléphant à abattre qu'il te donne. S'il te dit que tu abattras cinq éléphants, si tu atteints les cinq, celui que tu abattras encore est celui qu'il ta fabriqué, en ce moment tu te vends, cet éléphant te tue »142(*). Il faut dire que lorsque le chasseur va solliciter les services d'un nganga, celui-ci lui recommande un nombre limité de bêtes à tuer. Cependant, il lui sera interdit d'abattre le dernier éléphant car c'est ce dernier qui lui sert de bouclier. Mais paradoxalement, il arrive fréquemment que les chasseurs se fassent tuer par les éléphants qu'ils auraient eux-mêmes sollicités auprès des nganga. La deuxième pratique opérée par les chasseurs consiste à se rendre invisible au milieu du troupeau d'éléphants puis, en abattre le nombre voulu.

Pour illustrer ce propos, citons Véronique Daou Joiris143(*) qui, au sujet des Pygmées du sud-est du Cameroun écrivait : « les Baka disposent d'un pouvoir d'invisibilité ou encore de la possibilité de se transformer eux-mêmes en animal, une faculté qui leur permet de s'approcher des éléphants sans être repérés ». Cette pratique chez les Bisir nous est rapporté dans l'extrait de discours suivant : « Certains « fétichent » l'obscurité c'est-à-dire que même s'il pénètre au milieu des éléphants, ces éléphants ne peuvent le voir même s'il tire, ils entendent que la détonation du fusil mais ils ne le voient pas. Ces chasseurs là n'ont pas de nombre défini, il tue à volonté. Ceux-là, on leur donne parfois une corde pour attacher autour des reins. Parfois c'est un dibumba mis dans une boîte »144(*). Il s'agit comme dans la première pratique de se rapprocher d'un nganga qui lui donne un talisman au pouvoir magique que le chasseur porte sur lui. Ce talisman peut être un bracelet ou une corde attachée autour des reins.

Mais contrairement à la première pratique, celle-ci n'exige pas un nombre limité d'éléphants. Le chasseur pourra en abattre autant qu'il voudra tout au long se sa carrière. Karl Groning (1999), notait que « les peuples autochtones dans le sud du continent noir utilisaient toutes les parties du corps de l'éléphant. Avec la peau on faisait des boucliers, des tambours, de quoi se protéger contre les intempéries, ou bien des ceintures et des lanières ; les tendons servaient de fil à nouer ; les poils de la queue devenaient des amulettes au pouvoir magique (...) »145(*). C'est certainement ce pouvoir magique conféré par certaines parties de l'éléphant que les chasseurs Bisir exploitent pour se rendre invisible. Toutefois, signalons qu'à cette époque, les Bisir ne chassaient pas les éléphants pour leur ivoire. Ils les chassaient pour protéger leurs cultures et pour la viande comme le confirme les propos suivants: « Ils tuaient les éléphants à cause de la destruction des cultures vivrières qu'ils occasionnaient. Lorsque les éléphants devenaient menaçants, ils faisaient appel à un chasseur parce que à cette époque les éléphants ne se montraient pas à tout moment. (...) »146(*). Et Karl Groning (1999), pour sa part soutient en parlant des premiers chasseurs en Afrique noire que : « les premiers africains n'ont jamais chassé l'éléphant pour le seul ivoire de ses défenses. (...) mais lorsqu'au XVe siècle, les portugais débarquèrent en Afrique (...) avec leur système de valeurs, lorsque les défenses d'éléphants devinrent hautement convoitées, l'attitude des peuples et des tribus autochtones face à la chasse se transforma. L'ivoire devint alors peu à peu l'objectif principal de la chasse »147(*).

* 133 Rite lié à la chasse à l'éléphant que les Bisir pratiquaient autrefois et qu'ils auraient emprunté à un peuple de l'Ogooué Lolo.

* 134 Albert Boulikou, corpus n°2, séquence n°1.

* 135 Camille Mboumba, corpus n°8, séquence n°1.

* 136 Albert Boulikou corpus n°2, séquence n°2.

* 137 Albert Boulikou corpus n°2, séquence n°5.

* 138 Le dibumba est un talisman.

* 139 Albert Boulikou corpus n°2, séquence n°4.

* 140 Sandry Franck Lepemangoye-Mouleka (2003), Ethnozoologie du monde bantu : représentations, contextes d'usage et pratiques liés à l'écologie animale chez les Banzébi du Gabon, Mémoire de maîtrise, Université Omar Bongo, Libreville, p.113.

* 141 Jeannin Albert (1947), L'éléphant d'Afrique, Paris, Payot, Coll. Bibliothèque Scientifique, p.135.

* 142 Albert Boulikou corpus n°2, séquence n°4.

* 143 Véronique Daou Joiris, cité dans Christian Leclerc (1999), « De l'usage social de la foret tropical. L'exemple Baka du sud-est Cameroun » in : Ethnie-Document, Nature sauvage, nature sauvée ? écologie et peuples autochtones, vol. 13, n°24-25, p.88.

* 144 Camille Mboumba, corpus n°8, séquence n°3.

* 145 Karl Groning (1999) (dir.), L'éléphant : mythes ou réalités, Cologne, Ed. Konemann, p.330.

* 146 Camille Mboumba, corpus n°4, séquence n°2.

* 147 Karl Groning (1999) (dir.), L'éléphant : mythes ou réalités, Cologne, Ed. Konemann, p.330.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand