WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Cohabitation population fang/CNPN, WCS dans la conservation de l'environnement au Gabon : Analyse du cas du Parc National des Monts de Cristal

( Télécharger le fichier original )
par Aimée Prisca MEKEMEZA ENGO
Université Omar Bongo - Maîtrise 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2 - Méthodes de conservation des forêts

2.1. Etablissement des législations et sensibilisation de la population riveraine au Parc National

Dans toute la zone de l'accord, il existe une grande variété de législations nationales relatives à la conservation des espèces animales et végétales importantes en voie de disparition, menacées ou présentant une autre valeur. La législation est un instrument grâce auquel le gouvernement peut être plus efficacement habilité et mandaté pour atteindre ses objectifs dans les projets de conservation. Cette dernière tient compte de :

- la faune ;

- des zones protégées ;

- des zones humides;

- des forêts ;

- de l'étude d'impact sur l'environnement ;

- de l'accord des autorisations ;

- du commerce ;

- des taxes ;

- de l'infrastructure ;

- de l'accord des compétences aux agences et fonctionnaires gouvernementaux ;

- des autorités centrales et de la constitution ;

- des informations techniques relatives aux espèces et à leurs habitats ;

- des facteurs socio-culturels particuliers dans lesquels, les espèces et leurs usages jouent un rôle.

Les lois et règlements servent de base à la détermination des règles de conservation. Ils spécifient aussi bien la durée et le support de la conservation. Quel que soit le moyen ou la durée, la conservation doit être conforme aux principes de régularité. Au niveau national, le gouvernement a mis en place un inventaire d'articles, de décrets, textes, lois relatifs à la conservation de l'Environnement, et particulièrement du Parc National des Monts de Cristal. Ces législations sont primordiales à la conservation de cette forêt y compris des richesses qu'elle incarne. Ainsi, nous avons comme législation :

- le Code de l'Environnement n° 281 du 15 Septembre 1993 ;

- le Code Forestier n°452 du 16 Mars 2002 ;

- le Code des Pêches et de l'Aquaculture n°514 du 11 Février 2006 ;

- la Politique des Parcs Nationaux n° 463 du Décembre 2002 ;

- l'ordonnance n°16/2002 d' août 2002 (Création des Parcs Nationaux au Gabon)

- le Décret n° 1206/PR/MEPE du 30 Août 1993 (Définition des zones d'exploitation forestière) ;

- Décret n° 611/PR/MEFEPEPN du 30 août 2002 (Portant classement du Parc National des Monts de Cristal) ;

- Article 9 du code de l'environnement (Définissant les Ressources Naturelles) ;

- Articles n° 27, 28, 29 du code de l'environnement (Définissant les aires protégées) ;

- Article n°17 du Code Forestier (Définissant la gestion durable des ressources forestières) ;

- Article n°102 du Code Forestier (Condition d'attribution des permis forestiers) ;

- Articles n°208, 209, 210, 211, 212, 213, 214, 215, 216, 217,218, 219 du Code Forestier (Dispositifs à l'exploitation de la faune sauvage) ;

- Articles n° 233, 234, 235,236, 237, 238, 239,240 du Code Forestier (De la commercialisation des produits forestiers) ;

- Articles n°252, 253, 254, 255 du Code Forestier (Des droits d'usages coutumiers dans l'utilisation des forêts et des Ecosystèmes forestiers) ; pour ne citer que ceux-là.

Ces législations aident le CNPN et la WCS dans l'exercice de la conservation et de la régularisation du Parc National des Monts de Cristal. Elles tiennent compte des écosystèmes, et d'autres acteurs sociaux, tels les populations riveraines au Parc et les exploitants ou sociétés forestières. Ces dernières les normes et les contraint à l'utilisation rationnelle et durable des écosystèmes de cet espace vert. Elles favorisent la sauvegarde des écosystèmes forestiers des Monts de Cristal. Par rapport à cela, Maurice Kamto dira : « toute volonté de protection de l'environnement doit nécessairement s'appuyer sur les normes juridiques » (1996 : 215). La constitution a un rôle préventif, et curatif sur l'environnement. L'environnement et la science juridique sont liés sur le plan de la conservation. Le non respect à ces réglementations obéit à des sanctions. A la suite des législations, le CNPN et la WCS ont et continuent à organiser les campagnes de sensibilisation sur le phénomène de conservation des écosystèmes du Parc National des Monts de Cristal.

La sensibilisation consiste à informer et rendre quelqu'un sensible sur un fait. Les actions de sensibilisation des populations cibles ont été réalisées par le CNPN et la WCS, grâce aux sorties régulières sur le terrain. A travers les sensibilisations, les populations ont été informées du fait que des règlements existent au Gabon et interdisent la capture et la commercialisation clandestine des écosystèmes forestiers.

Photo 7: Une campagne de sensibilisation dans un village riverain au Parc National des Monts de Cristal.

Source : CNPN, 2005

Cette photographie présente une campagne de sensibilisation dans un village riverain au Parc, il s'agit de Mala. Ce village est situé dans le secteur Mbé du Parc, sur la route de Kougouleu. A l'arrière plan de l'image, nous avons les responsables locaux et les gestionnaires du Parc, ils sont au nombre de 5. A gauche et à droite, quelques habitants du village, soit 9. Au centre, nous pouvons apercevoir un instrument de mesure de taille, à côté, une pesée et plus près, un tas de bois. Cette image montre en effet comment se sont passées les campagnes de sensibilisation lors de la mise en place du Parc. On constate que ces dernières ne se sont pas faites dans un grand engouement. Les habitants présents ne font même pas la moitié de la population de Mela. Les populations ont été très impliquées dans le projet. Il revient alors aux gestionnaires de renforcer leurs campagnes de sensibilisation.

La stratégie adoptée pour arriver à ce résultat a été de s'appuyer sur la radio communautaire et d'organiser des animations populaires, des conférences publiques destinées aux différents groupes cibles. La radio communautaire a réalisé un travail de communication et d'information très important. Les émissions hebdomadaires en langues fang et française comprises par la majorité des habitants de la région de Medouneu, Kango et Cocobeach, étaient animées par les interventions des professionnels et par des interviews sur les sites. Leur travail consistait également à la projection des films. Pendant les campagnes de sensibilisation, les gestionnaires du Parc encourageaient la population sur les pratiques culturelles, tels l'art, l'artisanat, les danses, la médecine. En dehors de cela, ils organisaient également des conférences et des séminaires de formation à l'intention des agents des administrations telles Mairie, l'Assemblé départementale, la Préfecture et la Base pédagogique, le but étant le renforcement des capacités en matière de l'Environnement. Pendant les sensibilisations, ils distribuaient aussi les affiches et les brochures en ville et dans les villages. Ce travail a permis la sensibilisation de l'ensemble des acteurs sur la conservation, l'écosystème forestier et sur les bienfaits d'un Parc.

Pendant les sensibilisations, les thèmes abordés ont été :

- l'intérêt de préserver les écosystèmes forestiers ;

- l'Environnement ;

- les êtres vivants ;

- introduction aux plantes ;

- introduction aux animaux (animaux domestique et sauvage, les invertébrés et les vertébrés) ;

- l'interdépendance dans la nature (les régimes alimentaires des animaux, la chaîne alimentaire et la toile de la vie) ;

- la pollution de l'eau, de l'air et du sol, le braconnage et le déboisement ;

- les animaux protégés ;

- l'utilité des plantes ;

- le Parc National ;

- l'Environnement scolaire.

Ces thèmes ont été développés par la radio local, au niveau des collèges et des écoles primaires. L'éducation environnementale vise à aider les enfants à développer une sensibilisation critique envers la détérioration du patrimoine culturel, et une connaissance basique de la conservation. Les cours sur l'éducation environnemental avaient une appréciation. Les organisateurs jugeaient le niveau de chaque élève et les meilleurs bénéficiaient d'une récompense.

Malgré la disponibilité des ressources humaines, l'existence de structures de formation et de la recherche, la présence de certains projets d'éducation environnementale et de moyens de communication de masse (radio, télévision, etc.), les actions du Gabon sur le plan de la politique intégrée d'information, de sensibilisation, de formation et de recherche sur la conservation, l'utilisation durable et le partage équitable de la diversité biologique, sont encore timides. Cela se traduit par une insuffisance des connaissances de cadres formels spécialisés et d'infrastructures en matière de diversité biologique. A cela s'ajoute la dispersion des informations sur la diversité biologique au niveau des différents services techniques. Par ailleurs, les programmes de formation actuels mettent peu l'accent sur les divers aspects liés à la conservation et à l'utilisation durable de la diversité biologique. La mauvaise gestion des ressources biologiques constatée résulte de toutes ces contraintes, mais aussi de l'insuffisance de la formation et de l'encadrement des utilisateurs. Il convient alors à l'Etat Gabonais de renforcer :

- sa politique nationale d'information, de sensibilisation, de formation et de recherche, en matière de diversité biologique ;

- son système de collecte, de traitement et de diffusion de l'information sur la diversité biologique,

- sa coopération scientifique et technique régionale et internationale, dans le domaine de la conservation et de l'utilisation durable de la diversité biologique ;

- son système de recherche-développement en matière de diversité biologique.

2.2 Exclusion des « autochtones » et la Mise « sous cloche »

Les Fang sont largement reconnus comme étant  les «  premiers habitants de la région où se trouve le Parc National des Monts de Cristal, dans le nord-ouest du Gabon » disait Georges Balandier dans : (1962 : 84, 87, 88). Ils vivaient à l'intérieur de la zone couverte par le Parc. Ces deniers vivaient et subvenaient à leurs besoins principalement grâce à l'agriculture, la chasse, l'artisanat, la pêche et la cueillette. Aujourd'hui, ces activités sont devenues illégales. Les Fang savaient protéger la forêt, les animaux et autres ressources forestières. Ils avaient leurs vergers, cimetières, campements, autrement appelés « élik» etc. Ils avaient une vie agréable et digne.

Avec la création du Parc, en 2002, ils ont été expulsés et dépouillés de certains sites de la région montagneuse. Actuellement, ils sont privés de leurs forêts, auxquelles toutes leurs activités sont liées. Ces derniers ont perdu des spécimens chers tels les crânes de certains chefs de village et autres parents. Situation qui n'arrange pas ce peuple, d'autant plus que ces monuments représentaient des symboles du pouvoir. Les Fang n'ont plus la possibilité d'utiliser leurs ressources. Ils sont privés d'accès à leurs campements. Ils disent « avoir été dépouillés de leurs biens ».

Entretien 21 : OYANE NDOUTOUME Germaine, 52 ans, mariée, mère de 8 enfants, ethnie fang, village Akoga, clan Esokè, lignage Mba Zam département Haut-Como, canton Mbé, sur les inconvénients du Parc. Cet entretien s'est passé le 27 mars 2007, dans son village, particulièrement à sa véranda. Il était 10H30mn. Nous avons passé notre entretient dans un esprit de sérénité.

Texte en fang

Traduction française

1 Ave Parc aso'o, awogane bia bafan éfolaneya'a. bia twafe yem yégn, dandna nsome.Nzo'o si a dzime mane kik afan. En gua ke bia afan éna'abi. Ane anga mane gnong édi éné vèn.

1 Depuis la mise en place du Parc, nos rapports avec la forêt ont changé. Nos activités ont pris un coup, surtout la chasse. L'Etat a mal délimité les forêts. Il nous a donné une forêt pas très riche et il a pris les sites les plus importants.

2 bili melos mia, me tsi ma'a, me biere ma'a medze afan anga gnong, ve bi sefe kui ewui. Engengni bia dzime ening. Bia kowong.

2 Nos arbres fruitiers, nos anciennes plantations, les crânes de nos parents sont enterrés dans cette forêt, mais on ne peut pas y accéder. Actuellement, on vit une situation difficile. On vit dans la peur, la crainte

3 mefan mensome mento'o avitsang.bis sefe bo'o nsome ane bia koum, ébot ba ka mye mefan be zargu bi bi. Bi sefe bo'o emam be tare ye be nane be gua lik bia

3 Les sites de chasse sont devenus limités. On ne peut plus chasser librement, au risque de se faire arrêter par les agents des Eaux et Forêts. On ne peut plus faire nos rites initiatiques

4 Be gua kik afan ka'a bi dzo. Bingua yem do'o ekuè be mena'a kik. Ane bingua wok abé, éde binga sile ébore benga ke adzoté na'a adzo bia ane dzameté da'a ligue.

4 La délimitation s'est faite sans nous prévenir. Nous avons été au courant après. Face à cela, nous avons fait une guerre pacifique dans laquelle, on demandait aux gestionnaires du Parc de nous expliquer ce comportement.

. 5 Moreté ke bi ve dzom, ke bi ve miang. Bia yebe do'o akale dzo'osi égna koum na'a bi bo'o do'o.

5 Ils ne nous donnent rien en retour. Même pas de l'argent. Mais, on subit parce que c'est l'Etat qui commande, on ne peut qu'exécuter.

6 Da bo'o bia eneme abi ane benga dzime mane kik si, ye dzona'a bi ta'a bera ni mefan, ve ba vuènena'a ene bia ning été

6 Ça nous fait mal qu'ils aient mal délimité et y interdisent l'accès à nos forêts, car on se nourrit de ça.

7 Gue beto'o ki bi lik na'a bi gni éti, bia be biéne binga belane mo'o ane bia so bia bo'o.

7 Nous aurions souhaité qu'ils nous autorisent d'y entrer et nous recommande de faire une gestion raisonnable, comme nous le faisions auparavant.

A travers ce récit, on se rend bien compte que la mise en place du Parc National des Monts de Cristal ne s'est pas faite d'une manière pacifique. Elle a obéit aux normes qu'on retrouve dans tous les pays africains en matière des aires protégées. La population fang a été dépouillée de ses biens. Cette dernière a perdu le cordon ombilical qui les lie à la forêt avec la mise en place du Parc. Situation qu'elle a acceptée par contrainte. Malgré ses multiples plaintes, elle ne s'est jamais faite entendre par l'Etat Gabonais., si ce ne sont que des simples promesses auxquelles elle fait face. Les Fang ont perdu beaucoup de leurs biens mais, ils n'ont jamais été dédommagés. En plus de cela, le conservateur du dit Parc et son équipe technique notamment la WCS n'ont pas tenu compte de la culture endogène lors de la délimitation des forêts.

Les populations leur recommandent de revoir les limites afin que chacun trouve son compte. Pour eux, le Parc ne se trouve pas très loin du village et cela gène leurs activités. Les gestionnaires du dit Parc ne tiennent pas compte des recommandations instituées par l'UICN sur « la reconnaissance des droits des autochtones » (2003 : 302). Aucun village fang n'existe dans le Parc, on peut à juste titre signaler la présence de la SEEG-Gabon (Société d'Energie et d'Eau du Gabon). Le peuple fang habite aux alentours du Parc. Avec la mise en place des mesures d'application de la loi relative à la conservation de l'environnement, les Fang font figure «  d'intrus » clandestins sur leurs terres ancestrales.

Ces derniers ont été expulsés et n'ont reçu aucune indemnisation. Alors que l'UICN reconnaît la réparation des pertes subies par les populations autochtones, les Fang voient maintenant leurs conditions de vie médiocres décliner, leurs moyens de subsistance détruits. Cette communauté locale soumise aux nouvelles mesures d'application constate que la loi imposée par le Parc est désabusée, car on leur a confisqué les droits forestiers qui permettaient leur survie afin de protéger les ressources naturelles.

Les Fang souffrent d'une exclusion persistante depuis la mise en place des programmes de conservation institués au fur et à mesure de l'élaboration des plans de gestion du Parc. Cette expulsion a été promue par les défenseurs de l'Environnement. Ils ont été expulsés des forêts, de leurs campements conformément au plan de gestion du Parc qui interdit toutes formes d'exploitation afin de protéger l'intégrité de la biodiversité de la région, qui deviendra, pour le pays, « une source importante de revenus touristiques » (2003 : 302). La stratégie de conservation conventionnelle sur laquelle est fondé le règlement, interdit à la population de poursuivre ses activités de subsistance au sein des aires protégées. Or ce règlement a été imposé en l'absence de participation ou de consultation de la population quant à sa formulation et son application. Ce plan de gestion n'a fait intervenir aucune consultation éclairée des Fang. Les populations riveraines au Parc National des Monts de Cristal ont subi les pressions exercées par les gestionnaires du Parc. Ce sont eux qui contrôlent maintenant l'accès à la forêt. Cependant, l'UICN recommande une reconnaissance adéquate des droits de propriété, de mise en valeur, de maîtrise et d'exploitation de leurs terres communales, territoires et ressources dont ils sont les propriétaires ou occupations traditionnelles.

Photo 8 : Un site de chasseur mis à feu lors d'une patrouille faite par les gestionnaires du Parc en forêt

Source : CNPN, 2006

Cette photo illustre un site mis à feu par les gestionnaires du Parc. A l'arrière plan, nous avons la forêt. Plus près il est question d'une tente et à côté, nous avons des bancs sur lesquels les chasseurs s'asseyent et un gobelet de couleur jaune. Cette image montre bien la situation dans laquelle les populations se sont trouvées lors de la mise en place du Parc. Ces dernières ont tout perdu, c'est le cas de leurs campements de chasse.

Les gestionnaires du Parc disent avoir réagi contre leurs grés. Cependant, pour aboutir à une conservation durable des écosystèmes forestiers, les peuples habitant les régions se doivent de les quitter, afin de limiter l'impact de ces derniers sur les ressources. Par rapport à cela Sabine Rabourdin dira qu' : « il est bien illusoire pour protéger les écosystèmes forestiers d'en éloigner l'homme, d'autant plus que les territoires que l'on considère comme vierges et sauvages sont souvent plus ou moins influencés par une présence humaine antérieure » (2003 : 32). Marcus Colchester ajouta que : «  le rôle des autochtones est très déterminant dans les projets de conservation » (2003 : 29). L'exclusion des autochtones au sein des milieux que l'on veut protéger ne facilite pas la sensibilisation. Dans ce cas de figure, il est difficile d'espérer une cohabitation harmonieuse.

Entretien 22 : AKARE NGUEMA Victoire, 63 ans, village Avang, ethnie fang, clan Oyèk, Veuve, 10 enfants, lignage Bewe Be Zame, province Woleu-Ntem, département Haut-Como, ville Medouneu, sur le vécu des populations depuis la mise en place du Parc. Nous avons eu cet entretien le 14 Avril, 2007 dans sa cuisine. Notre entretien a mis 45 mn.

Texte en fang

Traduction française

ngueng benga zu bô parc benga mane bi dure mefan. be mane tchik mefan, belik ne biè ne bi tâ tele mebô étun afan té akal étô akal ngomane. ane benga dzona'a ngue mbot avu ékite, mboté bâ ye gne sure. ebot bakal mefan ba kal dzamte.

Lorsqu'ils sont venus mettre le Parc en place, ils nous ont arraché nos forêts. Ils ont coupé la forêt et ils nous ont demandé de ne plus jamais mettre pied dans cette partie de forêt parce qu'elle appartient désormais à l'Etat. Ils ont ajouté que si jamais quelqu'un venait à transgresser cette loi, il sera sanctionné. Les écogardes veillent sur ce principe.

Ce récit témoigne bien la situation qu'ont vécue les populations lors de la mise en place du Parc. Ces dernières ont été dépouillées de leurs forêts. Elles sont effectivement, victimes d'une interdiction d'accès à cette forêt. Les gestionnaires pensent qu'elles sont destructrices et non protectrices du massif forestier des Monts de Cristal. Après l'exclusion des autochtones, les gestionnaires du Parc ont mis la forêt « sous cloche ». La mise sous cloche se définit comme la protection intégrale d'un site contre l'action anthropique. Seuls sont autorisés un droit de passage et un droit de prélèvement, les gestionnaires et les chercheurs. Les écogardes sont chargés de sa surveillance.

L'intérêt écologique et la qualité paysagère du site dépendent particulièrement de la conservation de son couvert végétal, permettant de lutter contre l'érosion, l'effet de serre et de préserver la biodiversité. Les gestionnaires pensent que l'évaluation économique de la biodiversité a sans doute un sens plus palpable, dans la mesure où la forêt recèle des ressources qui sont largement exploitées. Pour ces gestionnaires : « La biodiversité est rentable ».

Entretien 23 : NDJIMBI Frank, 40 ans, Directeur de communication et des relations publiques au CNPN-Gabon, sur le rôle de la forêt des Monts de Cristal. Cet entretien a eu lieu au CNPN le 3 juillet 2007 à 11h10 mn.

« On met la forêt sous cloche pour plusieurs raisons : l'écologie et l'économie. La forêt lutte contre le réchauffement climatique. Elle joue un rôle important dans la séquestration du carbone. En dehors de cet apport écologique, la forêt des Monts de Cristal a également un très grand apport économique et social à travers non seulement son apport énergétique mais aussi le tourisme. Elle participe à la lutte contre la pauvreté. Elle est aussi une source de relations internationales à cause du fait que l'effet de serre soit au centre des débats internationaux ».

Après lecture de ce récit, on peut dire que les gestionnaires ne se préoccupent pas réellement de la situation des populations. Ce qui importe pour eux, c'est la rentabilité. Leur préoccupation première, c'est de protéger les forêts pour renforcer l'économie du pays et tisser les relations avec l'extérieur. Face à cette attitude, on ne peut hésiter de dire que les débats sur la conservation au Gabon sont davantage du côté du Mythe d'Eden et de l'idée que la nature est « bonne » et l'action humaine nécessairement « mauvaise », prônant alors la mise sous cloche au sein de cet espace protégé. Malgré les réticences exprimées, la théorie relative à la mise sous cloche est bien révolue au Gabon, et précisément dans le Parc National des Monts de Cristal. L'exploitation clandestine des ressources naturelles du site protégé étant très illégale d'après les gestionnaires du Parc et le code forestier du Gabon, seules les zones hors Parc sont exploitées, sur présentation d'un permis forestier d'après l'article 94 du code forestier du Gabon.

Le constat qu'on peut faire ici est que, seuls sont réellement condamnés à ne pas exploiter, les villageois. Les sociétés forestières sont des véritables envahisseurs dans ces forêts, bien que le faisant légalement mais ces dernières ne tiennent pas réellement compte des normes d'exploitation. On remarque quelque fois que certaines ne respectent pas, pour ce qui est du bois, les 60 à 80 cm de diamètre que l'on recommande. Ces auteurs exploitent toute sorte de bois. Suite à cela, Kupupu Diwa Mutimanwa a dit : « La protection est une forme de domination » (2003 : 100) et Sabine Rabourdin ajoutera que : « La mise sou cloche n'est pas toujours le meilleur moyen de préserver un écosystème, elle apparaît comme un contournement, une fuite » (2003 : 33).

On peut se permettre de dire que ce système de préservation est en effet trop inégal, favorisant quelques zones protégées de manière expérimentale au détriment du reste où il est alors loisible de s'adonner à tous les excès. Excès qui toutefois, peuvent avoir des répercutions sur la zone protégée. Pour distinguer ce site des autres qui sont soumis à l'exploitation, les gestionnaires ont procédé à la mise des étiquettes sur des arbres. Sur ces derniers, ils mentionnent le terme « Parc National ». Ce signe renseigne les exploitants forestiers. En voyant cet indice, ils sont privés de toute exploitation, quelque soit le domaine économique. Toute exploitation est soumise à une punition sévère et suivie d'une amande.

Photo 9 : Un arbre portant les limites du Parc dans le village Mbé-Akelayong

Source : CNPN, 2006

Cette photographie présente quatre agents chargés de procéder à la délimitation du Parc. Celui qui est assis à gauche porte une casquette sur laquelle est posée un GPS, appareil servant à situer les cordonnées géographiques d'un point. Derrière, on aperçoit un gros arbre qui porte des marques de peinture rouge et une étiquette de couleur jaune sur laquelle est mentionné « Parc National » et juste après, un seau de peinture sur lequel est posé un pinceau. La pose de cette marque et de cette étiquette interdit aux villageois de mener des actions dans cette zone. Ce qu'ils dénoncent par ailleurs dans leurs discours respectifs. Les villageois et les sociétés forestières ont interdiction de couper ces arbres.

Outre cet indice, ces derniers ont également construit une « Barrière » en tôle. Cette dernière sépare le site protégé des autres. Aucun individu n'est autorisé à y franchir, sauf sur lettre de recommandation du conservateur du Parc. La barrière consiste aussi à protéger les animaux et surtout les plantes, principale force de ce site, de toute agression humaine.

Entretien 24 : NDONG ALLOGHO Hervé, 34 ans, Conservateur du Parc National des Monts de Cristal-Gabon, sur les méthodes de conservation. Notre entretien a eu lieu le 4 Avril 2007 au CNPN-Gabon et il a duré 45 mn.

« Nos méthodes de conservations sont diverses. Nous faisons des sensibilisations, nous excluons la population de la zone à protéger, nous mettons des pancartes sur lesquelles nous «écrivons Parc National », sur les arbres et nous construisons une barrière à la limite avec la zone d'exploitation des populations. Nous avons conservé seulement les infrastructures qui préexistent au Parc. C'est le cas de SEEG ».

A travers ce récit, on peut retenir que le CNPN et la WCS ont des méthodes de conservation qui se différencient de celles des populations autochtones. En effet, nous avons l'exclusion autochtone et la mise sous cloche de la forêt. Cependant, ces méthodes ne s'appliquent pas sur tout le monde, nous avons des exceptions. C'est le cas de la SEEG. Cette société préexiste au Parc, ce qui à prévalu à sa maintenance dans le site destiné à la préservation. Par rapport à cela, la question reste : Est-ce fondamentalement pour son rôle économique que les gestionnaires ont accepté de la garder dans le Parc où pour la simple raison qu'elle préexiste au Parc ?

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote