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L'infraction politique en droit pénal camerounais

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par Thomas OJONG
Université de Douala - DEA de droit privé fondamental 2005
  

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Paragraphe II : La conception subjective : le critère psychologique.

Les théories subjectives de l'infraction politique ont leur origine dans la pensée des libéraux pour qui : le révolutionnaire aux idées nobles et aux intentions désintéressées constitue le modèle du délinquant politique. Mais comme le fait remarquer Papadatos, si le mobile est un élément important pour apprécier le degré de culpabilité et surtout de criminalité d'un accusé, il ne peut suffire d'aucune façon à servir comme seul critère de l'infraction. Si l'on considère les mobiles ou le but poursuivis par les délinquants politiques, dans les éléments subjectifs du crime, on peut constater que ceux-ci sont, en général, mus par des mobiles qui dépassent leur intérêt personnel. Ceux qui tiennent toutefois compte de cet élément subjectif prennent soin de distinguer la nature des infractions (A), ce qui en principe rend indifférent le mobile du coupable lorsque son acte s'est avéré odieux et barbare (B).

A- LA NATURE DES INFRACTIONS

Une distinction est faite selon que l'infraction est complexe (1) ou connexe (2) à l'infraction politique principale.

1- Les infractions complexes

Les infractions complexes sont celles qui, tout en lésant directement un intérêt privé, sont commises dans un but politique. Pour savoir si elles peuvent être considérées comme des infractions politiques, il faut distinguer entre les infractions de terrorisme et les autres.

Devant l'inquiétante montée du terrorisme depuis quelques années, les législateurs se trouvent placés devant un choix de politique criminelle : ou bien considérer les actes de terrorisme comme des infractions politiques, ou bien considérer ces actes comme des infractions de droit commun au motif que l'auteur23(*) se conduit de manière odieuse.

Naguère, la doctrine s'est efforcée de définir l'infraction de terrorisme. H. Donnedieu de Vabres écrivait en 1947 : « l'originalité de cette infraction réside dans la réunion des caractères suivants : a) elle est le fait de bandes, souvent internationales, ce qui la rend particulièrement efficace ; b) les procédés dont use le délinquant sont de nature à provoquer la terreur : explosion, destructions de chemins de fer ou d'édifices, ruptures de digues, empoisonnement d'eau potable, propagation de maladies contagieuses...c) elle crée un danger commun24(*).

Le législateur adopte une voie un peu différente. Ainsi, sont complexes et assurément pas politiques, les infractions en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur. Il s'agit donc d'infractions de droit commun, et qui plus est d'infractions sévèrement traitées. On est là aux antipodes de l'infraction dont l'auteur est animé d'un mobile noble.

L'importance du terrorisme occulte un peu aujourd'hui certaines autres infractions complexes qui ont pourtant naguère retenu beaucoup l'attention. L'idée générale est que ces infractions se voient presque systématiquement refuser la qualification politique. Ces infractions, par leur nature et quels qu'en aient été les motifs, constituent des infractions de droit commun. Il en est ainsi notamment de l'attentat à la vie d'un chef d'Etat, d'un membre de sa famille25(*), de l'attentat à la vie des personnes ayant droit à une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, de même que des coups et blessures volontaires commis sur les agents de la force publique.

Si la qualification politique n'est pas admise lorsque l'infraction se présente sur les formes sus-évoquées, tel n'est pas le cas lorsque l'infraction est située dans la sphère du connexe.

2- Les infractions connexes

Ce sont des infractions de droit commun commises à l'occasion d'événements politiques, et liées d'une façon plus ou moins étroite à ces événements. Il s'agit d'une infraction qui se rattache par un rapport de causalité à une infraction politique. A titre illustratif, des insurgés, criminels politiques, pillent une armurerie pour pouvoir s'introduire de force dans un palais gouvernemental. Ce pillage doit-il être considéré comme une infraction de droit commun ou comme une infraction politique ? La réponse doit être nuancée. Au siècle d'avant, la jurisprudence retenait la qualification de droit commun26(*). Mais tout récemment il a été retenu que « ces infractions présentent dans leur ensemble un caractère politique27(*) ».

Malgré cette tentative de différenciation de l'infraction subjectivement politique, la part d'arbitraire est, et demeurera sans doute bien importante, en ce qui a trait notamment au sort que les diverses législations et pouvoirs étatiques réserveront aux délinquants politiques.

Toutefois, la jurisprudence a limité le critère subjectif. Le conseil d'Etat a déclaré que le fait que les crimes reprochés auraient eu pour but de renverser l'ordre établi en Allemagne ne suffit pas, compte tenu de leur gravité à leur conférer un caractère politique. Juridiquement, cette formule implique que hormis le cas de l'infraction connexe, la jurisprudence est en principe indifférente aux mobiles allégués par le coupable.

B- L'INDIFFERENCE DE PRINCIPE DU MOBILE DU COUPABLE

En dehors de l'hypothèse de la connexité (2), la jurisprudence refuse en principe de reconnaître le caractère politique à des infractions qui ne seraient pas politiques par leur nature (1).

1- L'absence de prise en considération du mobile du coupable par la jurisprudence

On peut affirmer que la jurisprudence se refuse totalement à prendre en compte les mobiles du coupable pour conférer un caractère politique à une infraction qui, par sa nature intrinsèque, ne présente pas a priori un tel caractère. Le principe a été tout d'abord affirmé à propos des atteintes à la vie dans un arrêt de la chambre criminelle rendu le 20 août 1932 dans la célèbre affaire Gorguloff, assassin du président de la République Paul Doumer. Le geste de Gorguloff avait été incontestablement inspiré par des motifs politiques et revêtait donc un caractère politique d'un point de vue subjectif. La cour de cassation refusa cependant de prendre en compte cet élément et considéra l'assassinat du chef de l'Etat comme une infraction de droit commun28(*). Gorguloff fut donc condamné à la peine capitale29(*).

La solution ainsi dégagée a été par la suite appliquée en matière de violences contre les personnes. La chambre criminelle considère que les mobiles politiques de ceux qui exercent de telles violences, en particulier sur des agents de la force publique, ne retirent pas à l'infraction son caractère de droit commun, sauf s'il s'agit d'une infraction connexe.

2- L'assimilation des infractions connexes à l'infraction politique

Aux infractions politiques par nature doivent être assimilées les infractions connexes qui, bien que constituant, par leur nature, des infractions de droit commun, prennent la qualification politique attachée à l'infraction principale à laquelle elles sont liées. S'agissant de l'application des règles du droit pénal interne, l'assimilation était écartée par la jurisprudence, celle-ci retenait la qualification de droit commun. Mais, dans un temps pas très lointain, la jurisprudence a déclaré lors d'un jugement concernant la tentative d'assassinat et l'association de malfaiteurs connexes à un crime d'atteinte à la sûreté extérieure de l'Etat que « ces infractions présentaient dans leur ensemble un caractère politique ».

Ainsi, lors de la « guerre d'Algérie », des algériens condamnés pour divers crimes et délits de droit commun ont été dispensés de la contrainte par corps parce que ces infractions étaient connexes à l'infraction politique principale d'insurrection pour laquelle ils avaient également été condamnés30(*). Par ailleurs, la solution est identique en matière d'extradition31(*) et se trouve en outre fondée sur de nombreuses conventions d'extradition, comme la convention européenne du 13 décembre 1957 dont l'article 3 exclut expressément l'extradition pour des « faits connexes » à une infraction politique. L'infraction connexe sera donc considérée comme politique pour l'extradition, si trois conditions sont réunies : le mobile doit être politique, l'infraction doit avoir été commise dans un Etat de guerre ou d'insurrection, l'acte répréhensible ne doit pas être contraire au droit des gens.

Ainsi, lorsque l'infraction est naturellement politique, ou connexe, ou encore remplit les conditions ci-dessus évoquées pour l'extradition, un régime particulier doit lui être appliqué.

* 23 V° Tekamdjo Djate H. Bethel : Le terroriste en droit international, Mémoire de DEA, université de Douala, 2003-2004

* 24 Donnedieu de Vabres (H.), Traité de droit criminel, n°208.

* 25 Convention franco-camerounaise de 1974 sur l'extradition.

* 26 Crim., 9 mars 1849, affaire du général Bréhat, sommaire, 1849, I, 200.

* 27 Crim., 18 novembre 1959, J.C.P., 1960, II, 11475, note A. Légal.

* 28 Desportes (F.) ; Le Gunehec (F.) : op.cit, pp. 105-106.

* 29 Peine qui n'était pas applicable aux infractions politiques ; Crim. 20 août 1932, DP, 1932, I, 121, conclusion Matter

* 30 Crim., 18 novembre 1959, JCP, 1960, II, 11475, RSC, 1960, p.276, note Légal

* 31 Paris, 22 avril 1953, Gazette du Palais, 1953, II, 113.

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