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L'émigration dans le Damga: l'exemple du village de Wodobéré dans la moyenne vallée du fleuve Sénégal

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par Abdoulaye THIOYE
Université Cheikh Anta Diop - Maà®trise en Géographie 2009
  

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CHAPITRE I : Les transferts d'argent et leur utilisation à Wodobéré

I. Les transferts d'argent : origines géographiques et volume des fonds

Si d'aucuns combattent l'émigration dans nos pays du sud, c'est sans aucun doute par manque de réalisme ou par l'ignorance de ce que celle-ci représente vraiment. L'émigration constitue le socle sur lequel repose l'économie des ruraux. Les émigrés, à travers les remises migratoires, constituent la charpente du P.I.B par habitant dans les pays en voie de développement. Selon la Banque Mondiale (BM) << 3% de la population mondiale contribuent au développement des pays pauvres deux fois plus que l'aide mondiale publique »39. Il est donc évident que les émigrés participent activement au développement de leurs pays d'origine. Cette participation peut être vue sous plusieurs angles car nonobstant les mandats envoyés, les émigrés contribuent à l'éveil des consciences et diminuent les risques d'implosions sociales dues au chômage et à la précarité de la vie. C'est ainsi dire que l'apport de l'émigration pour nos pays est d'une importance incommensurable.

Aujourd'hui, sans l'apport des émigrés un bon nombre de nos Etats en voie de développement seraient instables parce que la famine, la misère et la précarité pousseraient les populations arrivées au bout de leurs souffles à se révolter contre les systèmes. Dans la vallée du fleuve Sénégal en général, à défaut d'une intervention énergique de l'Etat dans le domaine de la création de l'emploi et de secteurs rentables permettant le maintien de la population dans son terroir, les populations vivent principalement de l'émigration.

D'aucuns disent que l'émigration est la source vitale de cette contrée du Sénégal. Ainsi, comme l'atteste le Tableau 7, 76,66% de la population dudit village ont comme source de revenu principale la manne migratoire, contre seulement 11,66% pour l'agriculture. Cela est rendu possible grâce à l'appui indéfectible des migrants. Les émigrés constituent le fer de lance de l'épanouissement des populations restées au village. Ainsi, << le migrant participe individuellement ou collectivement à la vie quotidienne de son village natal. Etant théoriquement plus aisé, il contribue notablement par l'injonction de flux, à la transformation de la situation tant économique que sociale de son village »40. Cet état de fait justifie l'ampleur de l'émigration dans cette localité.

39 FAUJAS Alain : Emigration : << Les femmes sont les grandes bénéficiaires des phénomènes migratoires », Le Monde du 30 juin 2007

40 AHIANYO.A- AKAKPO: «L'impact de la migration sur la société villageoise: approche sociologique (exemple Togo-Ghana)», in Les Migrations contemporaines en Afrique de l'ouest, p159

Au cours de l'année 2008 quelques 929.754.199 francs CFA (Graphique n°6) ont pu être envoyés à des parents par les émigrés du village de par le monde. Dans cet ordre d'idées, nous montrerons dans les paragraphes qui suivent l'origine et la représentation en termes de quantité de ces transferts d'argent.

Tableau 7: Source de revenu principale de la population

Sources de revenu principale

Population

Pourcentages

Agriculture

7

11,66

Artisanat

4

6,66

Elevage

2

3,33

Migration

46

76,66

Autre

1

1,69

Total

60

100

Source : Enquête de terrain, 2008

I.1. Origine géographiques des flux financiers transférés vers Wodobéré

L'étude des origines géographiques des transferts d'argent vers le village de Wodobéré révèle trois pôles principaux : l'Europe, les Etats Unis d'Amérique et, à une moindre importance, le continent africain.

Au niveau du vieux continent, la France est de loin la plus grande pourvoyeuse de fonds avec 75 % (carte n°3) des transferts d'argent. Elle est suivie par l'Espagne avec 4% alors que l'Allemagne, l'Angleterre, l'Italie et la Suisse participent moins de 1% du montant total envoyé vers Wodobéré. Le fort taux de transfert d'argent à partir de la France est corollaire à la forte présence sur le territoire français des sénégalais en général. En outre, cette présence massive s'explique, comme nous l'avions vu précédemment, par l'influence et par les réminiscences de la métropole sur ses anciennes colonies. Des liens de dépendances voire d'affections entre la puissance colonisatrice et les populations autochtones ont subsisté après les indépendances. Très tôt, les gens de la moyenne vallée du fleuve Sénégal ont commencé à émigrer vers la France. Cette longue histoire migratoire a fait de la vallée du fleuve Sénégal, durant plusieurs années, la principale casemate d'émigrations vers l'ancienne métropole.

74

Par contre, l'Espagne, nouveau pays d'immigration, est selon les émigrés d'une économie fragile. Sur le plan de la sécurité sociale, la France offre de meilleures possibilités, d'où la faible présence des émigrés sur le territoire espagnol. En effet,

l'Espagne constitue un pays de transit vers la France. La conjugaison de tous ces facteurs fait que les transferts d'argent venant l'Espagne vers Wodobéré sont moins importants. La faiblesse des flux financiers venant de l'Allemagne, de l'Italie et de la Suisse est due elle aussi à faible représentativité des émigrés dans ces différents pays.

En plus de l'Europe, 10 % des transferts d'argent viennent des Etats unis d'Amérique. Ce taux s'explique non pas par l'importance du nombre d'immigrés aux pays de l'oncle Sam mais par la différence de devise qui est à la faveur du dollar. Par contre comparés à la France, les fonds venant des Etats Unis sont moins importants. Les barrières linguistiques, l'absence d'une sécurité sociale adéquate et la lourdeur des formalités pour l'obtention d'un titre de voyage font que les Etats unis d'Amérique n'occupent que moins de 1% de la diaspora villageoise. Les Habitants de Wodobéré émigrent très peu vers les Etats Unis.

Sur le continent africain les principaux transferts en direction de Wodobéré viennent de Dakar (Sénégal) avec 7% des flux. Cela s'explique par la forte concentration des immigrés originaires de Wodobéré dans la capitale. Pôle économique et l'antichambre des différentes destinations internationales, Dakar est par sa position géographique et par ses attributs, la première et la principale destination africaine des migrants.

Par ailleurs, à l'exception de Dakar, les destinations africaines ne fournissent que moins de 1% des transferts. Cela découlerait non seulement de la faible présence des émigrés du village dans ces pays mais aussi de la pauvreté qui sévit dans ces pays d'accueil.

76

I.2. Le volume des flux financiers selon les origines

Source : Bureau de poste de Wodobéré, 2008

Les flux financiers en direction de Wodobéré sont d'une importance capitale. Avec une population de 3873 habitants seulement en 2002, le montant annuel des transferts d'argent des différents pays d'immigration vers Wodobéré s'élève à 929.754.199 francs CFA en 2008 (Graphique 6). Ces chiffres représentent uniquement les mandats envoyés par les canaux traditionnels de transfert d'argent dont les plus utilisés sont Western union, Money express, Mandat placid et « des points fax ».

Les points fax sont des moyens de transferts établis par les émigrés qui se sont regroupés en `' GIE» servant de véritables relais pour la transmission des mandats de l'étranger vers leurs pays d'origine. Avec deux structures parallèles, une à l'étranger servant à collecter auprès des immigrés souhaitant envoyer de l'argent à leurs parents et une autre structure au village permettant la transaction. Le GIE constitue un canal privilégié et moins coûteux pour la diaspora. Ainsi, après avoir reçu l'argent de l'émigré avec une commission, le GIE établi dans les pays d'accueil ordonne à son représentant au village de remettre la somme équivalente aux destinataires (graphique 7).

Graphique 7: Représentation schématique du mode de fonctionnement des points

fax

Emigré

Pays d'accueil

Intermédiaire Pays d'accueil

Appel téléphonique

Appel
téléphonique

Intermédiaire Pays de réception

Receveur du

transfert

d'argent

Légende:

 
 
 

Transaction

Appel téléphonique

Parallèlement aux structures traditionnelles de transferts d'argent, un autre canal informel est utilisé par les émigrés. Il s'agit du transfert du << main en main >>. Les émigrés reviennent périodiquement au village. Ce qui permet à plusieurs d'entre eux de rapporter de l'argent vers Wodobéré sans le moindre coût. C'est-à-dire que les émigrés remettent l'argent à transférer à leur compatriote, le plus souvent qui leur est proche, en partance pour le pays. D'après nos enquêtes cette forme de transfert est fréquemment utilisée par la diaspora. Ce qui revient à dire que les canaux traditionnels de transfert d'argent ne permettent pas de connaitre avec exactitude le volume des flux financiers. Le volume des fonds envoyés par le biais des deux dernières formes de transfert à savoir les points fax et le rapatriement par un proche, reste très difficile à quantifier. Selon la BAD << les transferts de fonds par les canaux informels représentent 46% des transferts totaux reçus par le Sénégal en 2005 >>41.

En effet, les montants des transferts d'argent diffèrent selon les pays d'immigration. Sur les 929.754.199 francs CFA (Graphique n°6) envoyés en 2008 par la diaspora villageoise de Wodobéré, 720.929.307 francs CFA viennent de la France. Cette manne financière est en corrélation avec le nombre d'immigrés vivant dans l'hexagone. Après la France, les flux

78

41 Gaye Daffé : << Les transferts d'argent des migrants sénégalais : Entre espoir et risques de dépendance >>, p111

financiers les plus importants viennent des Etats Unis d'Amérique avec 92.359.894 francs CFA du total annuel.

L'Afrique est faiblement représentée dans les transferts d'argent. Hormis le Sénégal (Dakar) avec 69.471.618 francs CFA, les transferts venant des autres pays africains n'excèdent jamais les dix millions de francs par an. Par ailleurs, la primauté de Dakar sur les autres régions africaines dans la répartition des transferts de fonds n'est point le fruit de l'importance des immigrés à Dakar. D'après nos sources, malgré la forte présence des émigré à Dakar, il s'agit des transferts d'argent qui viennent de l'étranger mais qui transitent par Dakar. Il s'agit pour la plus part, de l'argent des émigrés qui ont souhaité transférer d'abord à un tiers basé à Dakar. Ce dernier se chargera par suite de le transférer vers Wodobéré.

Cependant, ce déséquilibre entre le nombre de migrants et le volume des transferts d'argent s'explique, d'une part, par la différence de devises et, d'autre part, par l'importance des salaires et les possibilités d'emploi au niveau des pays d'accueil. Non seulement il est beaucoup plus facile de trouver un emploi dans les pays développés que dans les pays en développement mais aussi la différence de devises fait que les transferts des émigrés internationaux sont plus consistants que ceux des émigrés internes.

II. L'utilisation des transferts d'argent

Les fonds transférés vers Wodobéré à titre collectif sont consentis à la réalisation des ouvrages de prestige destinés à la communauté toute entière alors que les flux financiers à titre individuel servent pour l'essentiel à garantir la sécurité alimentaire et le bien être des familles d'émigrés. << Le transfert à vocation économique présente une part résiduelle »42 dans les montants envoyés chaque année.

II.1 Utilisation collective de type social

Les émigrés du village de Wodobéré, à travers leurs différentes associations, ont réalisé d'importants ouvrages à destination collective. Ces associations, à l'instar de l'Association de Wodobéré pour le Développement, l'Education et la Santé (AWDES), ont permis la construction et l'équipement des ouvrages allant du social aux infrastructures pour l'épanouissement, la vulgarisation et la formation de la population résidente.

42 SALL Babacar : << Migrations, transferts financiers et initiatives économiques en Afrique subsaharienne ». In Objectif développement : Migrations, transferts de fonds et Développement, p284

Nonobstant les transferts qu'ils effectuent individuellement en direction de leurs familles, les émigrés orientent leurs actions vers la gestion collective des ressources drainées par l'émigration.

« Les associations visent une utilisation plus rationnelle de l'épargne des émigrés, un transfert des connaissance acquises et des normes de consommation - en somme les émigrés recherchent une rentabilisation plus efficace au village de leur séjour en France»43.

Ainsi, ils mettent aussi leur savoir faire au profil de la communauté d'origine. Ce qui fait d'eux des piliers fondamentaux pour l'évolution et l'éveil des consciences des non-émigrés.

Les aspects religieux

Constitués exclusivement de confession musulmane, les habitants du village de Wodobéré, comme partout ailleurs au Fouta, ont très vite embrassé les préceptes de l'Islam. L'éducation, la formation et la pratique de cette religion sont le soubassement de la vie sociale. Ainsi, l'Islam occupe une place de choix dans l'orientation des actes et de la politique régissant la vie communautaire.

Les émigrés, dans leur majorité ont eu à bénéficier de l'appui des dignitaires religieux pour la réalisation de leur projet migratoire. Il n'existe pas un seul émigré pour lequel le départ n'est pas accompagné d'incantations et autres prières des hommes de foi. C'est ainsi dire que les émigrés accordent une grande importance à la religion musulmane et à ses recommandations. Cet attachement des émigrés à la religion constitue souvent le soubassement de plusieurs actes qu'ils posent.

Ainsi, après la réussite, les émigrés oeuvrent soit pour témoigner leur

reconnaissance à leur guide, soit pour bénéficier de beaucoup plus prières de la part des représentants religieux. C'est dans ce cadre que plusieurs actions afférentes à la religion ont été faites. A titre individuel, les émigrés paient de billet de pèlerinage à certains marabouts, leur achètent des voitures et/ou leur construisent des habitations. A titre collectif et par le biais de l'association des ressortissants du village de Wodobéré, ils ont permis la construction d'une mosquée dont le coût s'élève à plus de 70 millions de FCFA en 2000 (Photo 2).

80

43 Quiminal Catherine : Le rôle des immigrés dans les projets de développement et les formes de coopération possibles dans la vallée du fleuve Sénégal, p.330

Photo 2 : Mosquée construite par l'association villageoise en 2000

Les infrastructures

Village de moins de 4000 âmes et se trouvant à plus de 600 km de la capitale du Sénégal, Wodobéré est caractérisé par l'absence de l'action de l'Etat si ce n'est que pour fournir le personnel pour le fonctionnement de certaines structures. Il n'y existe aucune infrastructure dont la réalisation a été l'oeuvre du pouvoir central. En effet, il accompagne les populations quand il s'agit de fournir le personnel nécessaire au fonctionnement des structures telles que les bureaux de poste, les écoles, les postes de santé entre autres.

Conscients des difficultés rencontrées par les habitants de cette localité dans le domaine de la santé, de l'éducation, de la communication, et des risques encourus, les émigrés ne lésinent pas les moyens pour mettre en pratique les services sociaux de base. C'est dans ce cadre qu'ils ont construit un Bureau de poste en 1991 pour faciliter la communication entre le village et sa diaspora. Dans ce même registre, ils ont financé intégralement la construction d'un Collège d'enseignement moyen en 2006, devenu aujourd'hui Lycée de Wodobéré. Ce dernier est d'une importance incommensurable quand on sait que le Lycée le plus proche est difficilement accessible. La construction de ce Collège par les émigrés permet une scolarisation des filles beaucoup plus efficiente.

C'est dans cette même perspective, pour pallier les problèmes récurrents de l'accès aux services de la santé, que les émigrés ont financé la construction d'un Poste de santé en

2005. L'action des émigrés dans cette localité est loin de connaitre son épilogue car ils sont parvenus à tisser des réseaux de relations leur permettant d'atteindre leurs objectifs. Ainsi, pour participer à l'éducation des jeunes, les émigrés, par le biais de l'AWDES ont, en collaboration avec l'ONG française Co-Développement, construit une seconde Ecole élémentaire en 2008. Cette dernière dont le coût s'élève à 68 millions de FCFA a été construite avec un apport de 13% des émigrés. Ainsi, << ces investissements concourent à densifier l'espace et à promouvoir le développement local »44.

II.2. Utilisation de type familial des transferts financiers

« Si la France va bien, le village va bien ». Cette petite phrase lancée par un de nos interviewés nous enseigne à quel point la vie socioéconomique du village est assujettie aux transferts de fonds issus de l'émigration. La dépense alimentaire, l'habillement, la santé, l'éducation, le logis et l'ensemble des besoins primaires des habitants sont subjugués aux fonds envoyés. Ces transferts << constituent une forme de protection, d'assurance face aux incertitudes et à la précarité des populations »45. Ils permettent d'alléger les incidences du déficit pluviométrique sur la production agricoles.

La transformation du bâti

Tableau 8 : Le pourcentage du patrimoine bâti selon la matière de construction

Nature des bâtiments

Effectifs

Pourcentages

En dur

44

73

En banco

15

25

En paille

1

2

Source : Enquête de terrain, 2008

Si dans les années précédent l'émigration des habitants du village de Wodobéré vers les pays du Nord, l'essentiel des matériaux constituant les habitations était en banco, aujourd'hui on peut apercevoir à travers le bâti une nette amélioration du cadre de vie. Les photographies 3 et 4 sont révélatrices de cette transformation en dur du patrimoine bâti qui était naguère en banco. La construction d'une maison en dur au village constitue l'une des matérialisations de la réussite de l'émigré. Les transferts d'argent alloués à la construction de logements familiaux représentent 5,6% des montants reçus par les familles d'émigrés (Tableau 9). Ce qui fait que << le plus souvent aussi, le migrant envoie de l'argent et des

44 Raunet Mireille: Op.cit., p343

82

45 Raunet Mireille: Ibid., p342

matériaux pour qu'on puisse lui construire une habitation plus conforme à son nouveau standing [...] »46.

« L'émigration fait notre fierté » scande un habitant avec lequel nous avons eu un entretien. Aux yeux de ces habitants la construction d'une belle maison, la sécurité alimentaire, entre autres, sont les baromètres de la réussite sociale pour les émigrés. Cela se traduit par une augmentation considérable des surfaces bâties mais également par une prolifération des bâtiments en dur. Les demeures en dur représentent 73% (Tableau n°8) du patrimoine. L'augmentation des surfaces bâties contribue à l'amélioration des conditions de vie des non-émigrés

Photo 3: Maison en construction Photo 4 : Maison d'un émigré établi en France

Cependant, les émigrés manquent de réalisme et sont parfois animés par d'autres ambitions que de se servir un habitat acceptable. Dans un village, où la ressource foncière est à perte de vu et les familles peu nombreuses, il est un paradoxal d'y construire des bâtiments de standing R+. Le bâtiment en construction (Photo 3) est un exemple illustratif de l'existence de ces châteaux dans le désert. Il se pose tout simplement un problème de priorités parce qu'en lieu et place de ces constructions ostentatoires, qui ne peuvent pas d'ailleurs être utilisées dans leur intégralité, les émigrés auraient beaucoup à gagner s'ils investissaient dans les secteurs pouvant absorber la main d'oeuvre existante.

En effet, cette manie de construction des émigrés réside dans leurs soucis de notoriété au sein de la communauté villageoise plutôt que de leur besoin d'abri acceptable. Cela est d'autant plus vrai que les émigrés se dépouillent de toute leur fortune pour ne

46 AHIANYO.A- AKAKPO : Op.cit., p159

construire qu'un bâtiment qui à la limite ne leur servira pas subséquemment. Ceci parce qu'ayant toute leur famille dans les régions d'accueil.

La sécurité alimentaire

Au Sénégal, « comme la quasi-totalité des pays d'Afrique subsaharien, les études montrent, en effet que les transferts de fonds sont prioritairement et majoritairement destinés à alimenter le budget de consommation de la famille d'origine du migrant47 ». Au niveau local, il en est de même parce qu'à Wodobéré 85,1% (Tableau n°9) des flux financiers de l'émigration sont destinés à l'entretien de la famille de l'émigré. Cet argent couvre l'essentiel des besoins de la famille. Il sert d'assurer la dépense quotidienne, l'achat de l'habillement, à financier certaines cérémonies mais également à couvrir les dépenses liées à la santé.

L'importance accordée à la sécurité de la famille dans l'utilisation des transferts d'argent trouve ses explications dans les déterminants de l'émigration. Cette dernière est d'abord économique et une stratégie de survie des populations pour diversifier leurs ressources. La première raison d'émigration est d'asseoir une alimentation suffisante à la famille de l'émigré. Il est donc tout à fait logique pour l'émigré que les fonds consentis à l'alimentions soient beaucoup plus importants.

En effet, il se pose aujourd'hui la question de savoir comment pallier cette dépendance alimentaire vis-à-vis des retombées de l'émigration. Il est d'autan plus inquiétant que la vie de ces foyers vivant directement et exclusivement des ressources tirées de la migration est assujettie aux rythmes des politiques étatiques régissant les migrations, mais aussi au cours des marchés mondiaux. Malgré la distance qui peut séparer ces familles aux pays d'accueil, les pertes d'emploi liées aux différentes crises internationales sont ressenties au niveau local parce que l'émigré constitue le garant de la famille.

Tableau 9 : Ratios d'utilisation des transferts d'argents reçus par les ménages (en%).

Utilisation

Pourcentage

Entretien de la famille

85,1

Construction d'un habitat familial

5,6

Remboursement de prêts

3,7

Investissement productifs

3

Autres

2,6

Source : Enquête de terrain, 2008

84

47 Gaye Daffé : Op.cit., p118

L'amélioration des conditions de vie

En plus de la sécurité alimentaire des non-émigrés, malgré la précarité des conditions de vie dans le monde rural, les émigrés veillent au bien être de leurs compatriotes restés au village. Ils ne ménagent aucun effort pour mettre leurs parents à l'abri du besoin. Ainsi, de la téléphonie mobile à l'électroménager, de la construction d'habitation à leur équipement, les émigrés n'hésitent pas à dépenser des sommes faramineuses pour le bien être de leurs parents. L'essentiel des ménages de Wodobéré a accès à l'eau et à l'électricité (Tableau 10).

Aujourd'hui, les émigrés envoient également en nature. D'ailleurs, depuis un passé récent cette forme de transfert connait une évolution spectaculaire. Il s'agit pour l'essentiel des objets usités dans les pays occidentaux tels que des voitures, des ordinateurs, des réfrigérateurs, des téléviseurs etc. Ainsi, dans tous les ménages où il existe un/des émigré(s) les familles disposent de certaines commodités.

Tableau n°10 : Equipement des ménages

Eléments

Population

Pourcentage

Raccordement en
électricité

48

80

Adduction d'eau

52

86,66

Ordinateur

7

11,66

Voiture

4

6,66

Réfrigérateur

27

45

Téléphone fixe

31

51,66

Téléphone cellulaire

54

90

Poste radio

54

90

Téléviseur

48

80

Sans équipement

00

00

Source : Enquête de terrain, 2008

II.3. Les investissements économiques individuels

Si les premiers émigrés ne se souciaient que du bien être de leurs parents restés au village, ceux de ces dernières années pensent de plus en plus à investir dans des secteurs plus ou moins rentables. Ils sont nombreux à intervenir dans le transport, le commerce et dans l'immobilier.

En effet, comparés aux montants accordés aux autres secteurs, les fonds réservés aux investissements productifs sont très minimes. Ils ne représentent que 3% des transferts d'argent reçus par les ménages. Cela s'explique par la « [...] la capacité limitée des bénéficiaires à entreprendre des activités productives d'une part, et par le manque de confiance des migrants dans les structures intermédiaires d'autre part»48. Cela s'explique également par l'illettrisme des émigrés parce qu'ils sont constitués dans leur majorité par des gens qui n'ont pas fréquenté l'école ou, du moins, qui ont quitté très tôt les bancs.

L'immobilier

Pour un bon nombre d'émigrés, l'immobilier constitue le secteur le plus sûr car ne nécessitant pas l'intervention ou la gestion d'un tiers. Ils se chargent eux-mêmes ou par l'intermédiaire d'un proche d'acheter des maisons à Dakar. Ainsi, l'immobilier fait l'objet de convoitise des émigrés parce que les barrières administratives sont beaucoup plus souples et sa gestion beaucoup plus facile. C'est sous cette optique que la plupart des émigrés analysent la rentabilité de leurs investissements.

En effet, l'importance accordée à l'investissement dans le secteur de l'immobilier découle de leur manque de moyens pouvant financier de gros projets. Avec leurs pécules redistribués d'abord à travers les taxes et pour honorer leurs engagements dans les pays d'accueil, puis par les transferts d'argent envers leur famille respective, les émigrés ne peuvent pas épargner pour le financement de grands projets. Ce qui explique leur ruée vers l'immobilier.

Le commerce

Au demeurant le commerce n'est pas pour les émigrés une activité dans laquelle ils cherchent à avoir du profit. Quand ils interviennent dans ce secteur c'est, soit pour créer un emploi à leurs frères restés au village, soit pour préparer leurs retours définitifs de l'émigration. Au village de Wodobéré, la quasi-totalité des boutiques sont financées par les émigrés.

Le transport

Le village de Wodobéré a été pendant plusieurs années marqué par son enclavement et par des difficultés dans les déplacements de sa population. Aujourd'hui, avec la construction d'une piste en latérite sur la route régionale (R42), on note une certaine amélioration dans les conditions de déplacement des populations. Ainsi, pour faciliter l'interconnexion du village et le reste du pays, les émigrés, par le biais de leurs

86

48 Gaye D : Op.cit., p120

associations, ont d'abord mis à la disposition des habitants une voiture leur permettant de voyager à moindre coût. Par la suite, d'autres ont commencé à intervenir à titre individuel en achetant des taxis brousses (Photo 5). Depuis lors, des actions allant dans ce sens se sont multipliées mettant en place un véritable réseau routier.

Photo 5 : Deux taxis brousse appartenant à des émigrés

CHAPITRE II : Les facteurs négatifs de l'émigration sur la population résidente

Le voyage a toujours été l'un des vecteurs de changements et de transformation dans les habitudes, dans les comportements et dans les manières de vivre de ceux qui le font. Des changements non seulement pour celui qui l'effectue mais aussi, dans le cadre de l'émigration massive, pour toutes les personnes qui gardent des rapports étroits avec ces derniers.

Ainsi, le séjour dans une communauté avec des réalités différentes se traduit soit par l'intégration de l'immigré, soit par son repli sur lui-même à travers les associations de ressortissants. S'il s'agit du premier cas, l'acculturation de l'émigré peut devenir l'aboutissement de l'intégration à la communauté d'accueil. Dès lors, l'émigré devient un véritable pilier de la mondialisation parce qu'il va servir de relais entre le pays d'accueil et le pays d'origine. Cette mondialisation, avec des flux d'information à sens unique (nord/sud), ébranle les sociétés traditionnelles Ouest africaines en générale et du Damga en particulier. Elle installe de nouvelles pratiques, de nouveaux comportements et une nouvelle identité au détriment de la vie communautaire et des rapports sociaux basés sur l'entraide et la solidarité.

Le village de Wodobéré est aujourd'hui au coeur de ce remue ménage incongrue, qui est la conséquence directe des influences comportementales de l'homme migrant.

I. Les facteurs socioculturels

L'émigration a des conséquences socioculturelles sur la population résidente. Ces conséquences sont la désintégration des liens de solidarités, le dépeuplement des zones de départ, la fréquence des actes d'adultères etc.

I.1. La désintégration des liens de solidarité

Contrairement à ce que l'on croirait, l'émigration n'est pas uniquement un manque à gagner pour les populations concernées. Elle est aujourd'hui un facteur provoquant l'avènement de nouveaux rapports sociaux qui n'existaient naguère.

88

Si, à son origine dans la moyenne vallée du fleuve Sénégal en général et à Wodobéré en particulier, l'émigration était inscrite dans les stratégies mises en place par les familles pour leur assurance contre les aléas naturels et pour se mettre à l'abri du besoin, elle est aujourd'hui source de distanciation des liens familiaux et de discorde. Au gré des vents de la mondialisation, on assiste à l'avènement de familles nucléaires et à un individualisme

grandissant dans une société à mode de vie communautaire. L'argent corrompt les moeurs légères et éloigne certains de leur communauté. Avec la réussite sociale de certains émigrés obnubilés par le pouvoir de l'argent, l'éclatement des familles qui, il y'a de cela quelques décennies vivaient sous les mêmes toits, est devenu une constante. L'unité familiale n'est plus la concession composée par plusieurs ménages dans une même concession mais, se constitue plutôt autour d'un seul fooyré.

En plus de la désintégration des liens de solidarité au niveau des familles, il y a également le développement de nouveaux types de rapports basés non pas sur les liens conviviaux mais sur des jeux d'intérêt. Il est fréquent, dans nos communautés villageoises à forte composante migratoire, de voir des relations extra-familiales beaucoup plus nourries que celles qui existent entre des frères de même sang. Cette situation se traduit par la désagrégation des familles et l'apparition de relations de plus en plus tendues.

I.2. Le dépeuplement

La première conséquence visible de l'émigration quant on arrive dans les localités à fort taux d'émigration c'est la prépondérance des jeunes de moins de vingt ans, des femmes et des vieux. Autrement dit, la quasi-totalité des hommes valides, c'est-à-dire dont l'âge se situe entre 20 et 64 ans, est absente. Ainsi, à la lumière du Tableau 11, il n'existe que 10,35% d'hommes présents au village contre 23,7% de femmes. Parallèlement, pour la même classe d'âge, on note une suprématie des hommes sur les femmes résidents hors du village avec respectivement 11,98% et 6,36%.

Cela s'explique, comme nous l'avions dit précédemment, par le rôle de l'homme dans la répartition des responsabilités familiales, par les effets de l'émigration sélective et par la structuration de la société. Village marqué par une société inégalitaire, tant du point de vu du sexe que du point de vu de l'âge, Wodobéré est habité majoritairement par des femmes.

Cette situation favorise le dépeuplement, d'une part, parce que les naissances sont très espacées et, d'autre part, parce que les épouses d'émigrés ont tendance à rejoindre leurs maris dans leurs destinations respectives. Pire, les émigrés qui, à leur départ du village, étaient célibataires peuvent contracter des mariages et fonder des familles dans les régions d'accueil.

Ceci se traduit au niveau local par un dépeuplement de plus en plus pressent mais aussi par l'absence des actifs censés venir à la rescousse des vieux qui représentent

d'ailleurs une importante partie dans la population résidente. D'autant plus que ces vieux ont besoin de l'aide et de l'assistance pour se maintenir.

Au niveau de la reproduction également, les conséquences de l'émigration masculine se font sentir. Il faut le rappeler, les courts séjours des émigrés au village conjugués aux longues durées qu'ils restent à l'étranger amenuisent les chances de fécondité de leurs épouses. Ce qui se traduit par des naissances très espacées chez les unes et par une baisse notoire de la fécondité chez les autres. Ces revers de l'émigration sont très mal vécus par certaines épouses d'émigrés qui finissent par se livrer à des actes qui ne les honorent pas.

Tableau 11: Rapport entre la population absente et la population présente selon l'âge et le sexe (%)

Sexe Tranches d'âge

Féminin

Masculin

Totaux

Présentes

Absentes

Présents

Absents

Eff.

%

Eff.

%

Eff.

%

Eff.

%

Eff.

%

00-19

166

15,07

34

3,08

177

16,07

49

4,45

426

38,6

7

20-64

261

23,7

70

6,35

114

10,35

132

11,98

577

52,3

8

65+

43

3,9

8

0,79

30

2,72

17

1,54

98

8,95

Totaux

470

42,67

112

10,22

321

29,14

198

17,97

N=1101

100

Source : Enquêtes de terrain, 2008

I.3. La fréquence d'actes d'adultère, facteur d'infanticides

Comme nous l'avions vu précédemment, l'émigration dans cette contrée du Sénégal se caractérise par la durée des voyages et l'absence des maris de leurs foyers durant de longues années. Cette absence est souvent source de frustration et de résignation chez les femmes d'émigrés. Les moins pudiques, pour assouvir leurs besoins, se tournent vers des actes coupables. Ainsi, on note une récurrence des actes d'adultères liés au caractère des migrations internationales. La fréquence des cas d'infanticide est étroitement liée à ces actes d'adultère de femmes d'émigrés.

90

En plus de l'absence des maris qui est une source de tentation, la fréquence des actes d'adultère est liée à l'influence des rentes migratoires. Les femmes de cette localité, comme il est souvent le cas partout ailleurs, ont un besoin pressent de liquidité pour, non seulement, avoir une certaine aisance financière mais aussi pour assouvir leurs besoins en objets de parure. Ainsi, certaines femmes, obnubilées par le pouvoir de l'argent et qui, par

mal chance n'ont pas de mari émigré, se livrent à une prostitution déguisée. Prostitution déguisée parce que, même si ces dernières ne squattent pas les rues et ruelles du village, elles cèdent sous le pouvoir de l'argent. Profitant de cet état de fait, des hommes usant ou pas de leur statut d'émigré, se permettent d'abuser de ces femmes contre quelques petites liasses de billet de banque.

En effet, les raisons avancées si dessus ne sont pas les seules causes de la fréquence des actes d'adultère dans les communautés à forte migration en général et à Wodobéré en particulier. Ces actes peuvent être le résultat de l'hypocrisie et de la malhonnêteté des émigrés eux-mêmes. Notre interviewé, émigré de son état, témoigne que :

« Les relations heurtées entres compatriotes en France sont souvent à l'origine de l'infidélité des femmes au village. Un émigré avec lequel tu as eu quelques couacs en France peut se permettre d'abuser de

ta femme une fois au village pour, se disant il, te faire du mal ».

Ainsi, on est arrivé finalement à forger une société où la perte de valeur et le manque d'éthique ont conduit à la dégradation notoire des moeurs qui étaient naguère la fierté de toute la communauté villageoise.

I.4. L'émigré et le sida

Plusieurs études ont mis en relation la propagation de la pandémie du sida à l'émigration dans la moyenne vallée du fleuve Sénégal. En effet, rares sont ceux qui ont essayé d'étudier les effets psychologiques et comportementaux de la maladie du sida sur les non-migrants d'une part et sur les émigrés d'autre part.

Si l'on affecte la propagation du sida à la mobilité et aux comportements sexuels à risque des migrants, certains émigrés font aujourd'hui l'objet d'accusations et de stigmatisations non fondées. Pour un émigré de retour des régions africaines il est interdit de montrer la moindre faiblesse sur le plan de la santé. Tout émigré revenant des destinations africaines avec un état dépressif est de facto suspecté par la population résidente. Cette caricaturisation des émigrés est aujourd'hui source de discorde et de refoulement. Un émigré en retour de la Cote d'Ivoire témoigne de sa mésaventure :

« Je suis victime des représentations non fondées faites sur les émigrés des régions africaines. A mon retour au village, mon épouse m'a abandonné prétextant que j'étais porteur du sida vu la faiblesse de mon poids ».

Cette situation a suscité beaucoup de débat dans le village et allant même jusqu'à réveiller de vieux démons parce que ne s'arrêtant pas uniquement au couple.

92

Au niveau des veuves, dont les maris étaient des émigrés de destinations africaines, la stigmatisation et le refoulement sont également de mise. Il est quasiment impossible pour elles de trouver de nouveaux maris.

En effet, l'émigration peut être tout de même à l'origine de la propagation du sida. Certains émigrés avec des comportements sexuels à risque, c'est-à-dire qui font souvent recours aux prostituées lors de leurs voyages, peuvent à leur retour contaminer leurs épouses si toute fois ils sont infectés. Quand on sait que les systèmes de lévirat et de sororat sont pratiqués dans cette partie du pays, nous pouvons dire qu'à travers l'émigré la maladie peut se propager dans les familles.

II. L'émigration, facteur de dégénérescence de l'économie locale

L'émigration joue certes, un rôle de premier plan dans le développement de nos jeunes nations, mais elle n'est pas pour autant sans conséquences sur le plan économique. Ponctionnant des villages de leurs bras valides, elle affecte les productions agricoles si elle ne les dévalorise pas totalement.

Ainsi, on assiste aujourd'hui à une surévaluation de l'émigration par rapport à tous les autres secteurs d'activités. Elle est à l'origine de l'abandon de l'agriculture, de la dévalorisation de l'artisanat par la population locale mais également du désintéressement des jeunes à l'éducation et à la formation.

II.1. L'abandon de l'agriculture

Si à l'origine, par le biais du troc, l'agriculteur pouvait échanger son mil au poisson du pêcheur, l'éleveur, son lait au mil de l'agriculteur, aujourd'hui toutes les transactions se font avec de l'argent. Il est quasi impossible de trouver une denrée alimentaire, vile soit elle, sans posséder de l'argent. Ainsi, les remises migratoires, c'est-à-dire les retombées financières de l'émigration, sont devenues la seule alternative existante pour assouvir les besoins les plus élémentaires de la population. L'argent c'est le pouvoir pour certains; parce que non seulement les remises permettent l'achat des denrées alimentaires, dont la production nécessite des efforts humains considérables et mobilise des moyens qu'elle ne permet plus de compenser, mais aussi parce qu'elle met les populations à l'abri de tout besoin. Cette situation de dépendance face à ces remises est de nos jours à l'origine de la décadence de l'agriculture.

En plus de cela, l'essentiel des denrées alimentaires consommées par les populations locales est importé. Du riz au poisson en passant par les autres ingrédients,

tous ces vivres viennent de l'intérieur du pays voire même au-delà. On préfère le riz importé plutôt que celui des paysans locaux, des pattes plutôt que les plats à base de mil. Les produits locaux sont peu commercialisés et par conséquent ne permettent pas aux agriculteurs de vivre de leurs productions. Ce qui pousse les habitants de cette contrée à chercher l'argent avec lequel ils peuvent acheter des produits agricoles plutôt que d'en produire pour vendre par la suite. Cette situation est à l'origine du désintéressement de la population en général et des jeunes en particulier de l'agriculture.

De plus, comme nous l'avions mentionné précédemment, l'agriculture souffre des aléas climatiques et du manque de bras pour la mise en valeur des terres arables. La répartition dans le temps et dans l'espace des pluies et des crues ne permet plus une production en quantité et en qualité des denrées pouvant assurer la subsistance des populations comme il l'était à l'époque.

Ainsi, aux yeux des jeunes, l'émigration reste la seule option sur laquelle ils peuvent compter pour pallier ces problèmes. Ceci parce qu'en dépit des difficultés pour sa réalisation, elle permet le plus souvent à ces jeunes d'atteindre les fins escomptées. Avec les ressources qu'elle génère, les populations ont fini par abandonner tout bonnement l'agriculture qui est considérée comme une activité vétuste et appelée à disparaître.

En effet, le manque de bras pour la mise en valeur de l'agriculture et les aléas climatiques ne sont que les motifs superficiels avancés par les populations. Par ailleurs, il existe des considérations autres que ces motifs qui ont conduit à la dégénérescence de l'agriculture. Il s'agit des ambitions nourries par les transferts financiers. Autrement dit, les ménages qui reçoivent régulièrement de l'argent par les émigrés finissent tout bonnement par abandonner toute forme d'activité pour ne vivre que de ces envois mensuels.

II.2. La dévalorisation de l'artisanat

Tout comme l'agriculture, l'artisanat n'a pas résisté face aux opportunités offertes par les migrations. Etant un artisanat non structuré et utilisant des moyens rudimentaires, il était tout d'abord confronté à la concurrence des produits manufacturés, qui sont de meilleure qualité et bon marché. Les industries fabriquent en quantités, en qualités, sur des temps records et à moindre coût tout ce que les artisans produisent avec des investissements en moyens et en efforts colossaux. Ce qui se traduit sur le marché par la cherté des produits artisanaux par rapport aux produits manufacturés.

Ainsi, l'artisanat souffre de nos jours du désintéressement même des artisans. Il ne permet plus à ces derniers de bénéficier de ses retombées financières. Si à une époque

94

récente la vente des produits artisanaux recouvrait les besoins des artisans, aujourd'hui il ne permet plus à ces derniers de vivre dignement de leur art. Les conditions dans lesquelles les artisans travaillent sont devenues de plus en plus précaires, d'où la reconversion de ces derniers dans d'autres activités. C'est dans ce cadre que nombre d'entre eux sont devenus des émigrés potentiels.

II.3. Le désintéressement de la population à l'éducation et à la formation

Nos Etats en voie de développement sont caractérisés, d'une part, par l'étroitesse du marché de l'emploi et, d'autre part, par de mauvaises politiques de recrutement des travailleurs. Ceci, parce que non seulement les offres d'emploi ne sont que très rarement publiés pour le grand public, mais aussi, même pour celles qui sont publiées, il n'existe aucune objectivité dans le traitement des dossiers.

Certaines personnes ayant des réseaux de relations plus denses bénéficient d'un favoritisme aberrant au dépend de la masse. Ce manque d'objectivité et de rigueur dans les politiques de recrutement entraine le chômage de milliers de diplômés. Ceci est aux yeux des habitants de la localité de Wodobéré une source de démotivation aussi bien pour les parents que pour les jeunes eux-mêmes.

Par ailleurs, à l'opposée, l'émigration offre, sans distinction aucune, l'opportunité de réussir en des temps records. Si, pour les instruits il faut passer plus d'une vingtaine d'années sur les bancs de l'école, décrocher certains diplômes pour une éventuelle réussite sociale, l'émigré en ce que le concerne peut rivaliser, au moins sur le plan financier, avec les fonctionnaires de l'Etat en une période de cinq ans. Ainsi, non seulement il gagne beaucoup plus en terme de temps mais aussi en terme de revenus car il s'agit, pour la majorité, de l'émigration internationale tournée vers France. Notre interviewé témoigne que « rien qu'avec le smic tu peux gagner plus de 500.000 FCA à la fin du mois ».Cette situation explique aujourd'hui le désintéressement des parents et surtout des jeunes à l'éducation et à la formation.

CHAPITRE III : Le village de Wodobéré face aux défis de l'émigration I. La permanence des facteurs d'émigration

Dans le village de Wodobéré la réussite de l'émigration se mesure par le nombre d'émigrés d'une même famille à l'étranger, la qualité de l'habitat et la régularité de la dépense quotidienne. En plus de cela, l'immobilier à Dakar, des taxis brousse au Fouta restent les seuls baromètres d'une émigration réussie. Ce sont là les seuls secteurs d'investissement auxquels les émigrés s'adonnent. Le village de Wodobéré se caractérise par la morosité des secteurs d'investissement des émigrés.

Malgré les montants colossaux envoyés par les émigrés chaque année en direction du village, les facteurs qui étaient à l'origine de leur départ existent encore. L'émigration est un fait qui est devenu une chaîne. Loin d'éradiquer les facteurs qui étaient à son origine, elle est source de motivation pour les nouveaux candidats à l'émigration.

Ceci parce que les émigrés, par illettrisme, ne songent pas à trouver des créneaux d'investissement leur permettant d'apporter les bonnes réponses à la précarité des conditions de vie des habitants, condition sine quoi none pour estomper les flux migratoires.

Quant on sait que c'est la pauvreté, la précarité des conditions de vie et l'insécurité alimentaire entre autres qui sont à l'origine des départs, les ressources tirées de l'émigration devraient permettre de lutter contre ces facteurs. En effet, en dehors des secteurs sporadiques cités ci-dessus et qui font l'objet de convoitise par les émigrés, il n'existe aucune autre structure pouvant créer de l'emploi. Cependant, ces différents domaines d'investissement des émigrés, à savoir la construction des immeubles et l'achat des taxis brousse, ne permettent ni à absorber la main d'oeuvre existante encore moins à susciter l'appropriation du milieu par les jeunes.

Il est aujourd'hui paradoxal de bâtir des étages dans ce minuscule village alors que, d'une part, la ressource foncière est à perte de vue et, d'autre part, les facteurs d'émigration subsistent encore. Ces émigrés auraient beaucoup à gagner s'ils investissaient cet argent dans des secteurs permettant de trouver un remède à l'hémorragie que constitue la ponction du village de ses bras valides. La manne financière que l'émigration génère fait que les jeunes sont toujours obnubilés par l'envie de quitter le pays.

Pour ces jeunes, l'émigration constitue la seule alternative valable pour l'épanouissement de la population. Ce qui fait que l'émigration a fini par tuer toutes les autres activités pouvant conduire à un développement endogène. Ceci, parce qu'au lieu de

96

créer des pôles d'emploi et retenir les jeunes, la construction de ces bâtiments et l'achat de taxis brousse ne feront que créer, chez les jeunes, l'envie d'émigrer. L'émigration se résume à un épanouissement individuel ou familial au détriment de la collectivité. Elle ne permet pas à la société de tirer un profit commun de la mobilité. Tant qu'il n'existe pas une réponse locale et collective aux besoins de la population, l'émigration demeurera.

II. Perspectives d'investissements pour l'arrêt définitif des départs

Il est important, pour un arrêt définitif des flux migratoires de Wodobéré vers le reste du monde, d'élaborer des actions et des politiques d'appropriation du terroir par les populations. La création des centres d'intérêt et des cadres d'expression, où des politiques d'appropriation du milieu peuvent être élaborées, reste la seule alternative probable pour retenir l'attention des jeunes. Ainsi, avec les ressources tirées de l'émigration, en lieu et place des constructions ostentatoires, les émigrés doivent doter le village d'outils et de moyens de production aussi bien dans le social que dans l'économie. L'émigration ne doit pas être une fin en soi, mais une passerelle vers le développement endogène.

II.1. Sur le plan social

Sur le plan social, plusieurs actions peuvent être menées pour non seulement une bonne utilisation des ressources tirées de l'émigration mais aussi pour abroger ses principaux facteurs. Il s'agit pour l'essentiel de:

- mettre sur pied des centres d'alphabétisation pour une meilleure formation des jeunes et des adultes qui n'ont pas eu la chance de fréquenter l'école et d'y rester. Il sera question dans ces centres de former la population en coiffure, en couture etc. Ils peuvent également être la charpente d'une politique de sensibilisation sur les problèmes de santé, de la reproduction et surtout de la gestion des ressources disponibles;

- créer des mouvements d'élèves et étudiants forts et susceptibles de constituer un vecteur important dans les politiques d'appropriation du milieu par la population. Ces mouvements se chargeront de promouvoir l'éducation, base de tout développement, le patriotisme et la valorisation des études.

Ainsi, avec la réussite scolaire de bon nombre d'élèves, il se crée une certaine émulation entre les jeunes. Ce qui se traduit par une scolarisation massive des enfants qui, avec la création très récente du Lycée de Wodobéré, vont rester plus longtemps à l'école. Cela va se traduire par le refus des élèves, qui atteindront un certain niveau d'étude, d'abandonner l'éducation et la formation au profit de l'émigration. Déjà, le mouvement

actuel des élèves et étudiants montre les prémices d'un avenir meilleur car non seulement les élèves y adhèrent mais aussi il trouve un écho favorable au niveau de la population. Il suffit juste de consolider les acquis, d'encourager les élèves qui font de bons résultats et enfin de sensibiliser d'avantage les parents. Ce qui va constituer un pas important pour l'abrogation des facteurs d'émigration.

II.2. Sur le plan économique

Songer au développement de nos pays relève de l'utopie si des politiques agricoles fiables ne sont pas mises en place. Ceci est valable pour l'ensemble des campagnes du pays. Il faut impérativement assurer l'autosuffisance alimentaire des populations par le développement de l'agriculture pour que leur amour du terroir et de ses activités soient effectif. L'agriculture doit être le socle sur lequel repose l'économie rurale susceptible de prôner un développement par le bas.

A défaut de l'action de l'Etat, les zones d'émigration doivent prendre leur destin en mains. Pour atteindre ces objectifs, les émigrés doivent collecter des fonds, travailler d'avantage avec les institutions publiques, les partenaires au développement et avec les ONG. Ainsi, ils n'auront qu'à orienter leurs investissements vers le développement des activités agricoles. Le village de Wodobéré, avec une aire importante de plaine alluviale et avec la disponibilité des ressources en eaux, peut faire l'objet d'une production intense de riz, de maïs et du mil. L'exploitation des terres du walo et la mise en culture des casiers rizicoles pouvaient être une alternative considérable au chômage des jeunes de ce village. Pour cela, il suffit juste d'utiliser à bon escient les fonds envoyés chaque année par l'achat d'intrants et l'exploitation subséquente des terres arables et de l'eau du fleuve.

Les études récentes de la SAED, en collaboration avec le ministère de l'agriculture, ont montré que près de 125 ha, jouxtant le village de Wodobéré, peuvent faire l'objet d'une riziculture. En mesure d'accompagnement, la SAED promet de mettre à la disposition des riziculteurs des tracteurs et des batteuses. En plus de cela, pour une transformation des productions, une rizerie sera implantée à Matam.

En effet, il n'existe pas jusque là des investisseurs intéressés par ce secteurs. Mais, en dépit d'une implication de l'ensemble des émigrés par le biais de l'association villageoise établie en France, les intéressés doivent se regrouper en G.I.E à l'image de ce qui se passe à Ndouloumadji Dembé, où les principaux agriculteurs sont des investisseurs émigrés. Ensuite, ils doivent impliquer les femmes. Ces dernières sont la plupart du temps

98

celles qui dirigent les ménages d'émigrés. Donc, le rôle de second qui leur était assigné jusque là doit être remplacé par leur responsabilisation.

Parallèlement, les ressources en eaux telles que le fleuve doivent être utilisées en bon escient. Elles permettront de développer la pisciculture et le maraîchage. Les émigrés à travers des G.I.E doivent réunir des fonds pour la mise sur pied des bassins de fécondation d'où seront issus les alevins. Le développement de la pisciculture va pallier le problème récurrent de la provision en poisson à une certaine période de l'année. Quant on sait que le poisson consommé à Wodobéré et dans plusieurs villages du Fouta vient de Richard Toll, de Saint-Louis voire de Dakar. On conviendra que la pisciculture est un secteur qui peut rapporter gros dans cette région. L'exploitation de cette aubaine permettra de retenir les jeunes, de faire du village un pôle attractif de la région de Matam.

Enfin, les fermes peuvent également être un outil pour le développement endogène qui arrêtera les flux migratoires. La mise sur pied d'une ferme à Wodobéré constituera une première dans la zone. Ce qui permettra de centraliser l'ensemble des animaux, dont la divagation est d'ailleurs source de conflits entre agricultures et éleveurs. Avec ces fermes, c'est la production de produits animaliers et de leurs dérivés qui s'en suivra. Ainsi, les exploitants fourniront à la région les produits nécessaires.

CONCLUSION

100

Avec une société hiérarchisée, le village de Wodobéré, comme partout ailleurs dans le Damga, est marqué par la prédominance de l'effectif des jeunes, des femmes et des vieux sur l'effectif des hommes actifs. L'émigration touche l'essentiel de la population masculine active.

En effet, malgré l'existence des ressources foncières et hydriques potentiellement exploitables, cette partie du Sénégal se caractérise par une économie attardée et par l'inexistence d'activités génératrices de revenus pour les populations. Les secteurs clés de l'économie locale sont assujettis aux vicissitudes du climat, c'est-à-dire qu'ils dépendent très fortement des conditions climatiques.

Ainsi, pour répondre à un besoin pressent de liquidité devenue nécessaire, l'émigration a supplanté toutes les autres activités économiques. Cependant, les facteurs qui régissent cette émigration sont divers et variés. Il s'agit des effets conjugués de la conjoncture internationale, de l'histoire même du peuplement du Fouta en général, des politiques structurelles mais aussi de la structuration de la société. Parmi ces facteurs, nous avons la chute des productions agricoles suite aux années de sècheresses, l'échec des politiques agricoles de l'Etat durant les années de P.A.S, mais aussi l'aspiration des jeunes à la réussite par l'émigration. Au-delà de ces facteurs, il y a des facteurs sociaux tels que l'émulation entre les jeunes, les regroupements familiaux et la réussite de certains émigrés. La réussite de ceux qui sont partis crée une certaine jalousie chez les jeunes restés au village. Ce qui conduit à de nouveaux départs. Les candidats à l'émigration sont aussi réconfortés dans leurs choix de partir par les facilités offertes par les réseaux de passeurs, les structures d'accueil à savoir la diaspora et l'appui des parents.

En effet, cette émigration, masculine dans sa majorité, est facilitée d'amont en aval par l'existence d'une chaîne à maillons multiples. Elle est d'abord entretenue par les revenus qu'elle génère puisque l'essentiel des voyages des nouveaux candidats à l'émigration est financé par des parents qui ont déjà émigré. Elle est ensuite le résultat d'une complicité étroite entre les émigrés, les démarcheurs de visa et les autorités administratives. Ce qui se traduit par l'existence de réseaux et de couloirs migratoires spécifiques pour les migrants.

En ce qui concerne les types d'émigration, nous avons constaté que, selon la durée, il en existe trois. L'émigration saisonnière qui se caractérise par des mouvements rythmés par les saisons. En saison sèche, les émigrés migrent vers les centres urbains et en saison des pluies, ils reviennent épauler leurs parents dans les travaux champêtres. C'est une émigration de moindre importance. L'émigration temporaire est pratiquée par ceux qui

102

disposent de cartes de séjour et qui reviennent périodiquement au village. Et enfin, l'émigration définitive qui résulte de l'échec des émigrants. Elle se traduit par l'intégration de l'émigré dans son pays d'accueil.

Ce qui nous a conduits a parler des principaux pays de destination. La France se taille la part belle dans la distribution des émigrés du village dans le monde. Cela s'explique par l'attachement de la population a l'ancienne puissance coloniale. Elle est suivie, de loin, par l'Espagne et par quelques pays africains comme la Cote d'Ivoire, le Congo et le Gabon. Les exemples de réussite de l'émigration dans certains pays plutôt que dans d'autres pèsent sur le choix des destinations.

Les transferts financiers ont supplanté les autres formes de ressources dans la survie de la population. Ils ont considérablement contribué a la mutation de la structuration de la société mais aussi a la reconfiguration des rapports sociaux.

Ainsi, l'essentiel des transferts est consenti a l'alimentation et a l'entretien de la famille de l'émigré. Ces fonds viennent pour majoritairement de la France et sont envoyés le plus souvent a titre individuel. Ils ne sont pas orientés vers des secteurs productifs. En dehors de la sécurité alimentaire de la famille, les fonds envoyés sont destinés a la construction de l'habitat et a la mise sur pied de projets peu productifs tels que le transport, l'immobilier ou le commerce. En effet, les émigrés agissent collectivement quand il s'agit de mettre en place des infrastructures et des constructions de prestiges. Il ressort dans cette étude que les émigrés, a travers leur association, ont permis la construction et l'équipement des infrastructures pour les services sociaux de base.

Cependant, l'émigration n'est pas exempte de conséquences négatives sur la population résidente. Elle est a l'origine de plusieurs dysfonctionnements tant au niveau des familles d'émigrés qu'au niveau de la communauté villageoise. Elle est a l'origine de l'avènement de nouveaux rapports sociaux basés sur la nucléarisation de la société et par l'égocentrisme. Le fooyré se substitue a la concession créant ainsi l'éclatement des familles et l'effritement des liens sociaux. C'est la désintégration totale des liens de solidarité. L'émigration a également contribué fortement a la dégénérescence des autres secteurs de l'économie tels que l'éducation, l'artisanat et l'agriculture.

Dans l'ensemble, il ressort de cette étude que les facteurs de l'émigration, multiples et variés, sont toujours présents. L'émigration, loin d'endiguer ses causes en créant des activités susceptibles de retenir la jeunesse, a fini par tuer l'économie locale. Les ressources qu'elle génère n'ont permis ni a éradiquer la pauvreté ni a abroger les facteurs

de l'émigration d'où la nécessité de l'intervention des différentes composantes de la société.

Il est important, aujourd'hui, de mettre sur pieds des politiques d'appropriation du milieu par la population et de trouver des solutions adéquates pour l'arrêt définitif de l'émigration. Lesquelles des solutions, si elles sont appliquées, permettront un développement endogène. Il s'agit de promouvoir des centres d'alphabétisation, de créer des mouvements de jeunes et de cultiver l'esprit d'appropriation du milieu chez les populations. Les émigrés doivent réorienter leurs investissements vers le secteur agricole et vers la création des entreprises en collaboration avec les institutions publiques, les partenaires au développement et les ONG. Il faut également qu'ils impliquent les femmes dans la gestion du terroir et de ses ressources.

La problématique de l'étude de l'émigration dans le Damga reste cependant inachevée. C'est une étude qui mérite d'être approfondie par les chercheurs pour une meilleure compréhension de la question des migrations et surtout des rapports entre émigrés et non-émigrés.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld