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Contextualisation et variation de la langue française dans l'écriture littéraire au Cameroun: le cas de l'invention du beau regard de Patrice Nganang

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par Simplice Aimé Kengni
Université de Yaoundé I - Maitrise en Lettres Modernes Françaises 2006
  

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I.1.2.2 De l'appropriation du français en Afrique perçue par les enseignants de la faculté de lettres de l'université de Yaoundé I.

Ces travaux font le point sur les différentes transformations imposées par la prise en charge des réalités socioculturelles des langues africaines dans le français.

J. TABI MANGA mentionne à cet effet que :

Les cultures africaines traversent la langue française et y laissent des traces durables. Ces dernières transforment et bouleversent profondément les repérages sémantiques classiquement répertoriés dans les dictionnaires de référence.23(*)

Dans la même lancée, il souligne que cette variation du français serait due au reflet de la personnalité africaine dans l'usage du français ; facteur qui selon lui, est de nature à accélérer la dialectalisation du français.

Abondant dans le même sens, P. ZANG ZANG présente cette dialectalisation comme tendance évolutive du français en Afrique. Pour lui, la dialectalisation du français est un processus de différenciation linguistique qui tient compte du fait que :

Le peuple [...] s'approprie la langue et en fait un instrument de communication linguistique adapté à la satisfaction de ses besoins et conforme aux structures déjà établies par les langues locales24(*)

Ceci revient à montrer l'influence qu'exercent les langues locales sur le français.

Par ailleurs, A.-M. NTSOBE pense que l'appropriation du français en Afrique résulte du souci de décrire un univers spécifique et des émotions particulières. Cela étant, il ajoute qu'

Un constat supplémentaire devrait susciter une contextualisation de la norme : du moment où le français n'est pas un arbre, on devrait moins se soucier de chercher ses racines dans le sol, mais se préoccuper de l'intercompréhension dans le cadre d'une grammaticalité contextualisée.25(*)

Cependant, le danger majeur à éviter est celui d'assimiler l'enrichissement de la langue à un anarchisme où toutes les structures sont permises sous le manteau d'appropriation.

C'est ce qui justifie ici la position de L. M. ONGUENE ESSONO26(*) qui remarque que les différentes appropriations, la lexicalisation et les néologies débridées dans le cadre d'enrichir la langue française risque de la dénaturer. C'est pourquoi il pense qu'il est nécessaire de recentrer la problématique pour éviter à la sociolinguistique de servir de dépotoir linguistique, malgré les situations dramatiques que vivent des locuteurs soucieux de s'exprimer en français, mais en mal des termes idoines.

Cette nouvelle orientation de la problématique amène à nouveau A. M. NTSOBE à recentrer le débat. De ce fait, il suggère que la norme du français doit être une et commune relativement aux usages particuliers dans les pays francophones. Aussi affirme-t-il :

La norme standard du français s'impose à tous, il convient de la respecter même s'il faut, à chaque fois, adapter la langue à chaque situation de communication. Dès lors, il semble plus raisonnable de parler de problème de niveau, de registre de langue que de norme.27(*)

Cela se vérifie dans la mesure où la norme endogène ne vise nullement pas la déstabilisation de la langue, mais la prise en compte de certaines variations qu'on ne saurait bannir.

C'est en fait ce qui amène G.-M. NOUMSSI et FOSSO28(*) à noter que les variétés rencontrées dans la langue résultent du fait que, le locuteur, soucieux de décrire la réalité de son milieu, ne peut que chercher dans le lexique du français des équivalents périphrastiques.

Dans une position plus tranchée, J. M. ESSONO remet en question l'assimilation à une norme standard comme mentionnée supra. Selon lui, toutes ces barrières normatives des puristes étouffent le locuteur qui voudrait s'exprimer, transmettre librement son message et communiquer son expérience avec autrui. C'est ainsi qu'il présente la langue comme :

Un bien commun, une institution sociale, un trésor collectif au service d'une communauté linguistique bien déterminée [...] le peuple façonne la langue à sa guise au détriment des intellectuels et grammairiens qui formalisent des lois et des règlements pour régenter cette même langue. Or, trop de règles tuent la langue. [...] face à la norme, la masse oppose l'usage. Par la loi du nombre, elle dicte et impose son parler populaire.29(*)

Cette pression de l'usage qui hante désormais toutes les structures du français en Afrique pousse E. BILOA à dire que le français dans divers milieux francophones prend très souvent une coloration locale, au point que sa phonologie, sa morphologie, son lexique, sa syntaxe et sa sémantaxe s'en trouvent affectés.

En somme, cette revue de la littérature fait ressortir l'influence indéniable de la contextualisation et de la variation qui s'impose désormais à l'utilisation de la langue en milieu social. Pour ce qui est de la variation du français en Afrique, elle résulte comme le souligne J. TABI MANGA de la volonté réelle d'appropriation de la langue par les Africains afin de répondre aux besoins langagiers particuliers et ces besoins sont contextualisés.30(*)

Par ailleurs, ces travaux présentés supra montrent que ce phénomène porte non seulement sur l'usage de la langue à l'oral, mais aussi à l'écrit. C'est pourquoi J. TABI MANGA31(*) a relevé les procédés conduisant les auteurs vers une écriture insolite, vers une domestication de l'écriture, ayant pour corollaire la subversion du français. Reste à présent à savoir si ces écarts d'écriture relèvent d'un phénomène expressif ou d'une acquisition insuffisante de la langue.

* 23 J. TABI MANGA, « Modèles socioculturels et nomenclatures » in Inventaire des usages de la francophonie : nomenclatures et méthodologies. Éd. AUPELF/ UREF, Paris, 1993, p.37

* 24 P. ZANG ZANG, Le Processus de dialectalisation du français en Afrique : le cas du Cameroun.Etude fonctionnelle des tendances évolutives du français, thèse de Doctorat 3ecycle, Université de Yaoundé I

* 25 A.-M. NTSOBE, « Le Français en Afrique, variation, viabilité, perspective didactiques et mondialisation »in Langue et communication n°03 vol II, oct. 2003, université de Yaoundé I, p.

* 26 L. M. ONGUENE ESSONO, La Norme en éclat pour un français au Cameroun, in Langue et communication n°3, vol II, oct.2003, université de Yaoundé I, pp.

* 27 A.M. NTSOBE, Avant propos à la langue de communication, vol. I. n°1, Université de Yaoundé I, p.12

* 28 G.-M. NOUMSSI et FOSSO, « Le Français en Afrique noire au début du troisième millénaire : variations, problèmes sociolinguistiques et perspectives didactiques », in Présence francophone, n°56, pp.73-91

* 29 J.M. ESSONO, « La faute du français », in Langue et communication n°03, vol.2, oct.2003, université de Yaoundé I., p.219.

* 30 J. TABI MANGA, op.cit, p.40

* 31 J. TABI MANGA, 1990, op.cit pp.10-17

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