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La grève dans le transport maritime en Côte d'Ivoire


par David GBENAGNON
Université catholique de l'Afrique de l'Ouest - Maà®trise en droit carrières judiciaires 2008
  

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B. De la responsabilité de l'article 1384 du Code Civil.

L'article 1384 du Code civil vise la responsabilité des commettants du fait de leur préposé, l'alinéa 1er dispose de la responsabilité des choses que l'on a sous sa garde.

Le fait de grève ne joue aucun rôle particulier en matière de responsabilité des commettants du fait de leurs préposés.

Le commettant ne sera pas responsable du fait de grève de ses préposés dans la mesure où ceux-ci ont agi «hors des fonctions auxquelles ils sont employés, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions »70(*).

Par contre la responsabilité du fait des choses que l'on a sous sa garde a donné lieu à des applications particulières à propos de faits de grève dans les ports.

Il faut tout d'abord préciser que ce sont les arrêts Champollion du 23 Janvier 1959 et Lamoricière du 19 juin 195171(*) qui ont adopté la solution suivante : «l'article 1384 alinéa 1er formule une règle générale qui s'applique à la navigation maritime toutes les fois qu'une disposition spéciale de la loi ne l'a pas explicitement écarté» (ainsi par exemple en matière maritime l'abordage est soumis à un régime spécial).

Tout navire pourra donc être considéré comme une chose au sens de l'article 1384 alinéas 1ers du code civil.

Ces arrêts ont ensuite précisé que le gardien serait, non pas le capitaine qui a certes des pouvoirs de direction pais qui reste un préposé mais l'armateur.

L'armateur se trouve dès lors responsable du fait de son navire sauf s'il prouve le fait du tiers, la faute de la victime ou la force majeure.

Un navire obstruant l'entrée d'un chenal du fait d'une grève emporte t-elle la responsabilité de l'armateur ?

C'est la question à laquelle ont eu à répondre les tribunaux français dans l'affaire du «France»72(*).

Lors de la dernière croisière du France avant son désarmement au Havre, les représentants syndicaux montés à bord à la dernière escale, ont contraint l'Etat major a stoppé le navire dans la rade d'entrée au Havre, obstruant ainsi le passage pour les navires à fort tirant d'eau.

Trois super tankers ne pouvant rallier Le Havre ont dû être détournés sur Rotterdam pour être allégés, leur armateur a donc assigné l'armateur du France sur le fondement de l'article 1384 pour les coûts supplémentaires engendrés par ce déroutement dans le port batave.

Pour que la responsabilité du gardien du fait des choses qu'il a sous sa garde soit retenue, plusieurs conditions sont exigées :

-En premier lieu, il faut que la chose, en l'espèce le navire soit la cause du dommage.

Le navire doit avoir participé matériellement au dommage : la position anormale, irrégulière du navire justifie cette condition. Dans l'affaire du France, c'est bien le mouillage irrégulier au milieu du chenal d'accès au port qui a occasionné le déroutement des pétroliers. Le navire, en lui-même, a été la cause génératrice du dommage.

-En deuxième lieu il faut que l'armateur ait conservé la garde du navire, c'est à dire ses pouvoirs de direction, d'usage et de contrôle. Or, la grève n'enlève pas la garde à l'armateur dès lors que les officiers ont continué à commander sur le plan technique et à réaliser les opérations exigées par la sécurité du navire. On peut considérer que c'est un critère relativement sévère car il est normal que l'état major assure la sécurité du navire.

-Enfin, l'armateur est responsable s'il n'établit pas un cas de force majeure. Or la grève, tout comme en matière contractuelle, ne pourrait-elle pas constituer le cas de force majeur ?

Il faut qu'elle soit imprévisible et irrésistible ; or la jurisprudence semble très sévère comme on a pu le vérifier précédemment pour admettre ces éléments.

Dans l'affaire du France, elle va estimer que l'imprévisibilité n'existait pas dans la mesure où les syndicats avaient fait savoir qu'ils s'opposeraient au désarmement par tous moyens.

Mais, on pourrait répliquer que la forme de l'action de l'action des syndicats restait cependant imprévisible alors que, de toute manière, l'armateur ne pouvait prendre aucune précaution pouvant l'empêcher.

La grève doit être irrésistible. Ici le caractère s'apprécie in abstracto : «normalement imprévisible». L'appréciation est plus sévère qu'en matière contractuelle.

L'extériorité est entièrement exigée, cet élément n'est pas contourné (alors que ce caractère n'était pas vraiment recherché dans la responsabilité contractuelle).

Il en résulte que la grève ne sera pratiquement jamais un cas de force majeure.

Comme on a pu le voir cette sévérité a été fortement critiquée par la doctrine ; en fait, il semble que la jurisprudence ait voulu établir une espèce de responsabilité de plein droit pour s'assurer dans des affaires semblables un responsable solvable.

C'est le même objectif, s'assurer un responsable solvable, qui a conduit les victimes de conflits sociaux à s'adresser aux pouvoirs publics pour obtenir réparation du préjudice subi.

* 70 Cass Plén., 19 mai 1988.

* 71 D. 1951, p. 717 et D. 1959, p. 281.

* 72 DMF 1979, p. 596.

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