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Autopsie du phénomène migratoire tunisien : entre "rationalité" de l'émigré et pragmatisme politique

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par Raef JERAD
Ecole Nationale d'Administration de Tunis - Cycle Supérieur de l'ENA 2011
  

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§2. Drainage de devises

Les pouvoirs publics tablent sur les flux des transferts monétaires des émigrés vers leurs familles restées en Tunisie, pour améliorer une balance de paiements déficitaire et disposer d'une réserve de devise pour couvrir les importations78. L'apport financier des émigrés tunisiens est d'autant plus convoité que les spécialistes se demandent si la politique migratoire menée vis-à-vis de la diaspora tunisienne ne constitue pas, en dernier analyse, un ensemble de dispositifs et de mesures pour solliciter et pérenniser ces flux financiers. Selon la Banque Centrale, le montant global des transferts des

78 Selon des statistiques publiées par la Banque mondiale, dans les pays les plus pauvres de la planète, contre un dollar de capitaux étrangers, six autres dollars proviennent des travailleurs émigrés. Ceci étant, les transferts financiers des migrants présentent l'avantage d'être beaucoup plus stables que les capitaux privés. Ils ont un effet stabilisateur puisqu'ils augmentent dans les périodes de récession économique, au moment oil, les capitaux spéculatifs s'échappent, Comité Français pour la Solidarité Internationale, Phénomènes migratoires : flux financiers, mobilisation de l'épargne et investissement local, Groupe Agence Française de Développement, avril 2004, p. 16.

Tunisiens résidents à l'étranger s'élève, pour l'année 2010, à 2 904 millions de dinars, montant correspondant à 4.5 % du Produit National et à 20.5% de l'épargne nationale. De par leur importance, ces transferts se situent à la quatrième place des ressources du pays en devises79. Ces flux marginaux pour les pays d'accueil, n'en constituent pas moins une manne dont l'État tunisien ne saurait plus se passer aisément80. La masse et la fréquence des fonds envoyés témoignent que la diaspora tunisienne se classe parmi celles qui maintiennent des liens monétaires forts avec le pays d'origine. Les transferts pourraient avoir un double emploi, soit ils sont destinés à améliorer la situation économique et sociale des familles restées en Tunisie en couvrant les dépenses de consommation en biens et services, soit ils sont affectés à l'épargne pour qu'on puisse s'en servir, antérieurement, lors du retour définitif81. Qu'il porte sur des dépenses de consommation ou sur l'épargne, le comportement de transfert de l'émigré est indéfectiblement encouragé par les pouvoirs publics tunisiens. Toutefois, le dit comportement dépend de plusieurs autres variables qui peuvent influencer aussi bien la propension de transférer que le volume des montants rapatriés. Nous avons pu identifier quatre variables majeures qui pourraient interférér dans ce processus. La première étant le statut socio-économique du migrant dans le pays d'accueil,

en effet, un bon niveau de stabilité professionnelle et d'intégration sociale luiconfère une capacité de transfert plus grande. La deuxième variable est le

79 Mohamed ENNACEUR, Ministre des Affaires Sociales, allocution prononcée à l'ouverture du colloque international La contribution des Tunisiens résidant à l'étranger au développement économique et social de la Tunisie post-révolutionnaire, Gammarth, 22 juin 2011 ; voir ANNEXE I.

80 BOUHDIBA (Abdelwahab), « Le poids de l'émigration et l'avenir des rapports de l'Europe et du Maghreb », in Quêtes sociologiques : continuité et ruptures au Maghreb, Collection Enjeux, Cérès Edition, Tunis, 1996, p. 24.

81 TALHA (Larbi), « Les effets de l'émigration sur les économies maghrébines », in LACOSTE (Camille et Yves) (Dir.), /'ÉtatTdu TO DIKreE, Cérès Edition, Tunis, 1991, p. 481.

nombre de parents restés au pays et le type de lien de parenté, puisque autant que le nombre est important et le lien de parenté est fort, autant que le comportement de transfert est vivace et régulier. La troisième variable consiste dans l'objectif et la durée de la migration. Ceci dit, l'appartenance du migrant à deux espaces différents constitue un des éléments déterminant du comportement de transfert, et ce, selon que le projet migratoire s'oriente vers le pays d'origine, notamment en terme de retour ou, plutôt, vers le pays d'accueil, en terme d'installation définitive ou prolongée. La dernière variable concerne les mesures prises dans le pays d'origine, c'est-à-dire la capacité et l'efficacité des institutions financières et politiques du pays destinataire à mettre en place des programmes incitatifs en termes d'attraction des fonds82.

Néanmoins, d'autres études récentes mettent en garde contre le tarissement éventuel des transferts de devises de certaines communautés émigrées, voire leur extinction définitive, même si la Tunisie semble, dans le présent et le futur proche, bien à l'abri de tels inconvénients sans pour autant les exclure, à plus long terme. La persistance d'un taux de chômage élevé et l'allongement de sa durée moyenne, la réduction des heures travaillées normales et supplémentaires, la précarisation croissante de l'emploi, l'avènement des nouvelles générations d'émigrés et le relâchement des liens avec la communauté nationale, sont autant de facteurs soupçonnés de tendre vers une éventuelle réduction future de la capacité de transfert des immigrés Tunisiens83. Quoi qu'il en soit, nous pensons que les transferts ne peuvent avoir de portée véritable sur le développement national que s'ils sont intégrés

82 Voir Comité Français pour la Solidarité Internationale, Phénomènes migratoires : flux financiers, mobilisation de l'épargne et investissement local, Groupe Agence Française de Développement, avril 2004.

83 TALHA (Larbi), « Les aides au retour et la problématique réinsertion des émigrés », in LACOSTE (Camille et Yves) (Dir.), L'État du Maghreb, Cérès Édition, Tunis, 1991, p. 545.

dans le cadre d'une planification homogène en faveur d'une stratégie de développement des régions les moins nanties de la Tunisie, laquelle stratégie se doit d'être, cette fois-ci, bien réfléchie et sérieusement entreprise.

Le moment de départ épousé référentiel, certains avantages fort convoités, étant situés sur le court et moyen terme, sont qualifiés d'avantages immédiats. D'autres, étant situés, plutôt, sur le long terme, sont identifiés comme avantages médiats.

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