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L'éloge du matriarcat dans "la mémoire amputée de Werewere-Liking

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par Arnaud TCHEUTOU
Université de DoualaCameroun - Diplôme d'études approfondies 2008
  

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II- REVUE DE LA LITTERATURE.

Le féminisme est l'oeillère principale à travers laquelle la littérature des femmes africaines en général et de Werewere-Liking en particulier est lue. Et comme la discrimination est le sujet de prédilection de ce courant, elle est aussi le thème focal du discours critique. Le manque d'intérêt accordé aux oeuvres des femmes dès leur entrée dans la scène littéraire est associé à une volonté de ségrégation. La critique littéraire africaine en général et camerounaise en particulier, ayant pour objet d'analyse la femme, n'a pas été très florissante après la publication des premières oeuvres à vocation féministe. Les critiques ne trouvent pas certainement en la femme ou en l'écriture féminine un sujet de réflexion fondamentale. D'aucuns pensent même qu'il s'agit-là d'une discrimination, comme le démontre ce propos :

9 - Pour nous, la Grèce antique est pour l'Occident ce que l'Egypte pharaonique est pour l'Afrique noire. En d'autres termes, la civilisation gréco-latine est l'ancêtre de la civilisation occidentale tout comme l'Egypte pharaonique est le berceau de la culture de l'Afrique noire. Nous nous inspirons de cette affirmation de Cheikh Anta Diop : « L'Egypte a joué vis-à-vis de l'Afrique noire le même rôle que la civilisation gréco-latine vis-à-vis de l'Occident. Un spécialiste européen d'un domaine quelconque des sciences humaines, serait malvenu de vouloir faire oeuvre scientifique s'il se coupait du passé gréco-latin. Dans le même ordre d'idées, les faits culturels africains ne retrouveront leur sens profond et leur cohérence que par référence à l'Egypte » in Civilisation ou barbarie, Paris, Présence Africaine, 1981, p. 387.

10 - Nicole Loraux, Les Enfants d'Athéna, Paris, Maspero, 1981, p.77.

« La parution de Rencontres essentielles (1969) de T. Kouh-Moukouri, première romancière camerounaise, est passée sous silence aux dires de l'auteur et de nombreux critiques entre autres, Joseph Ndinda et Irène D'Almeida qui, eux aussi, ont perçu ce vide lors de l'élaboration de leurs premiers articles sur cette écrivaine. `'Tout se passe comme s'il y avait une conspiration du silence''»11.

Les premiers à s'intéresser à cette préoccupation trouvent que la femme est méprisée en Afrique, qu'elle n'a aucun pouvoir, aucune valeur autre que celle de procréer et de faire le ménage, eu égard à ce témoignage :

« Il faut rappeler que les premiers travaux sur la femme africaine durant la période coloniale ne lui ont pas toujours été favorables. On en veut pour preuve, l'article `'L'esclavage de la femme noire'' par soeur MarieAndrée de l'enfant-Jésus dans lequel la femme africaine est considérée comme une bête de somme »12.

Les critiques estiment que ce statut de la femme noire est lié aux idées préconçues des colons au sujet des sociétés africaines, mais aussi qu'elle est liée aux pesanteurs des traditions nègres qui opposent de façon conflictuelle l'homme et la femme :

« Ces préjugées générées par les incompréhensions et la différence culturelle se poursuivent par les traditions de l'intérieur qui admettaient très mal l'accès de la femme à la connaissance. La réticence à la scolariser vise à montrer que les rapports sociaux de sexe sont antagoniques et conflictuels depuis bien des lustres. D'où son arrivée tardive à l'écriture »13.

Les premiers critiques soutiennent que la culture négro-africaine est à l'origine du mauvais traitement infligé à la femme africaine. Ainsi, l'on

11 - fr.wikipedia.org, Op. Cit., p. 1.

12- fr.wikipedia.org, Op Cit., p. 1.

13- fr.wikipedia.org, Op Cit., p. 1.

s'accorde à reconnaître que leurs analyses se fondent sur des approches socioculturelles et socio-historiques:

« Les premières critiques qui se sont penchées sur l'écriture des femmes africaines en général et camerounaises en particulier telles que la Congolaise Milolo Kembé, Anny-Claire Jaccard, D. Ndachi Tagne ont eu pour but d'orienter leurs analyses vers des approches socioculturelle et socio-historique ».14

D'autres penseurs trouvent que la polygamie est une injustice faite aux femmes, un abus de la société traditionnelle dont la dénonciation constitue une sorte de révolte :

« Cette révolte subtile [...]. Cette esthétique entre ouvertement en dissidence avec la société phallocentrique. Elle se montre plus osée, devient de plus en plus virulente envers la gente masculine. Odile Cazenave dans Les Femmes rebelles et Béatrice Rangira-Gallimore dans L'oeuvre romanesque de Calixte Beyala, montrent la déviance créatrice de C. Beyala avec la liberté sexuelle et l'écriture du corps tandis qu'Irène D'Almeida montre l'originalité et l'audace scripturaires de WerewereLiking »15.

Parlant plus particulièrement de Werewere-Liking, ses oeuvres en général, et La Mémoire amputée en particulier, ne connaissent pas une abondante critique. Outre le style original16 et l'audace scripturaire relevé ci-dessus, les analyses démontrent que les ouvrages de Liking, et notamment son roman qui nous sert de corpus, sont des répertoires des pratiques culturelles africaines. Ce qui fait dire à Yvette Balana que « l'africanité est au centre de l'oeuvre de Liking »17. Cependant, les avis sont partagés à cet effet. Le colloque organisé du 03 au 04 mai 2005 à l'Université de Douala à l'intention de cet auteur le prouve.

14- fr.wikipedia.org, Op Cit., p. 2.

15- fr.wikipedia.org, Op Cit., p. 3.

16- La romancière dit que La Mémoire amputée est un « chant-roman », un genre dont elle est l'inventrice. Voir l'inscription marquée sur la première de couverture du roman pour préciser le genre littéraire.

17 - Yvette Balana, « L'africanité chez Werewere-Liking : de l'Afrique-musée à l'Afrique-laboratoire », in fr.wikipedia.org, 05 mai 2009, p.1.

Ce colloque a connu la participation des critiques de la littérature négroafricaine tels qu'Yvette Balana et Clément Mbom. Nombre de participants opposaient à l'africanité l'universalité de l'écrivain dans ses oeuvres, bien que les organisateurs aient concilié ces deux dimensions dans leur projet :

«» L'hypothèse à partir de laquelle s'élabore notre projet est que cette oeuvre synthétise et traduit, dans les langages et formes contemporaines les savoirs séculaires africains porteurs de valeurs universelles. Elle pourrait donc être fortement recommandée à la consommation, à titre principal, des publics d'Afrique soucieux de retrouver les fondements de leur civilisation» »18.

Les organisateurs de ce colloque estiment que l'oeuvre de Liking est une interpellation du public africain à s'abreuver aux sources de sa civilisation. Même lorsque certains critiques analysent la dimension féministe ou matriarcale de ses oeuvres, c'est pour parvenir à ce dessein. D'ailleurs, l'écrivain les y encourage lorsqu'elle dit :

« Ceux qui peuvent se payer le luxe de jouer les amnésiques ont leur histoire déjà écrite, conservée en sons, images et microfilms, et en diverses versions : les subjectives, les trafiquées, les revues et corrigées, les profanes, les ésotériques et les sacrées, etc. Ils pourront toujours s'y retremper le moment venu, pour témoigner de leur passage sur cette terre et de leur part de l'humanité. Alors que nous autres, nous n'avons pas suffisamment formulé notre expérience pour nous permettre l'amnésie. Aussi, pour nous, se souvenir ne devrait-il pas être un combat de tous les instants ? » (M.A., 386).

Cet extrait invite incessamment le peuple africain à se rappeler son passé, à le publier massivement pour qu'il fasse tâche d'huile et s'incruste dans les moeurs de l'universel. Yvette Balana s'inscrit dans cette logique lorsqu'elle analyse ce propos de l'écrivain en ces termes : « Liking a donc tranché le débat : nous devons trouver l'universel dans l'africanité, nous devons travailler

18-Yvette Balana, Ibid., p. 1.

à inventer la négritude qui entrera dans la culture universelle à venir »19. Le discours de Liking, comme ceux de la plupart de ses critiques, dénonce l'occidentalisation des peuples négro-africains et prône leur re-africanisation, quitte à ce que cette attitude paraisse chauvine :

« La course vers l'`'universel `' qui hante les Africains, confirmant ainsi que le `'moi est haïssable» peut nous être préjudiciable, car l'universel se réduirait alors à l'histoire et aux valeurs de ceux qui ont assumé leur moi et qui ont entretenu leur mémoire. Liking semble nous dire qu'il nous faut faire du chauvinisme »20.

C'est bien de ce chauvinisme qu'il s'agit dans notre investigation. Soulignons toutefois la nuance qui existe entre notre approche du matriarcat et celle des critiques ayant investigué sur le même sujet. La perspective de ceux-ci s'inscrit dans la dynamique du combat féministe déployé sur le terrain africain alors que la nôtre remet en cause cette doctrine qui n'a pas de raison d'être dans un environnement où la femme jouit du plein pouvoir sur tous les plans. Il est absurde de vouloir conquérir ce qu'on détient déjà fermement et sans partage. Les femmes africaines doivent prendre conscience de la valeur prégnante que leur accorde la culture africaine et jouer pleinement leur rôle pour le bien-être et le salut de tout le « Pays des Batu »21. Tel est le motif de cette réflexion.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius