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Politique coloniale de lutte contre le paludisme. Cas de l'ancienne province de Léopoldville (1888-1960)

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par Leslie SABAKINU LUKWIKILU
Université de Kinshasa RDC - Licence en sciences historiques 2011
  

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3. Les problèmes de la lutte contre le paludisme au Congo belge

Nous avons démontré tout au long de cette étude que le paludisme fut l'une des maladies les plus importantes que le Congo belge ait connues. C'est ainsi que depuis le début de la colonisation, le pouvoir colonial s'était décidé { mettre des moyens nécessaires pour éradiquer cette maladie.

Néanmoins, les actions menées par le pouvoir colonial se sont butées à des difficultés énormes, de tout genre, ayant entravé le travail qu'il devait accomplir.

Premièrement, les difficultés rencontrées furent d'abord le manque de moyens financiers pouvant permettre l'éradication de cette maladie dans l'ensemble des territoires du Congo belge.

En effet, la lutte contre le paludisme si elle devait être menée correctement fait appel { un budget particulier. Puisqu'il s'agissait de mener des vastes campagnes de désanophelisation dans les grands centres, il fallait par conséquent prévoir un budget spécial auquel le gouvernement n'a pu s'y atteler292. Aussi, la situation économique de l'époque, particulièrement la crise des années 1929-30 avait eu un impact sur le budget du Congo belge ; ce qui a d'une part retardé les grands travaux d'assainissement qui étaient considérés comme l'un des principaux moyens de lutte antipaludique, dans le cadre de mesures prophylactiques293. Suite à toutes ces lacunes, l'administration coloniale n'avait effectué, au départ, que de manière partielle cette lutte, en ne portant ses actions que dans certains centres où seule la population européenne vivait, alors que la population congolaise représentait la population la plus nombreuse de la colonie. Il a

291 SCHWETZ, J., Art. cit, p. 12.

292 DROOGMANS, Art. cit, p. 20.

293 WERY, M., COOSEMANS, M. et alii, Art. cit, p. 17.

fallu attendre la fin de la seconde guerre mondiale, plus particulièrement le plan décennal (1949-1959) pour que des moyens appropriés soient mis à la disposition des services médicaux, et auxquels la lutte antipaludique a bénéficié294.

Deuxièmement, la méthode de lutte préventive, avec la prise de la quinine, a montré également ses limites. En effet, seule la population européenne a pu en bénéficier, car la population congolaise avait eu du mal à se familiariser avec ces méthodes préventives dont elle ne voyait pas forcément une issue favorable; de même, quininisée cette maladie revêtait un caractère grave au sein de la population congolaise295. Cette situation était due d'une part { la négligence des Congolais dans la prise de ce produit, or pour que celui-ci donne des résultats satisfaisants, il impliquait une prise régulière et quotidienne296 et d'autre part, il ne faut surtout pas oublier que la population congolaise se refusait { consommer ce médicament quand elle n'était pas malade297.

Troisièmement, les travaux pour la lutte contre le paludisme ont souffert sensiblement de l'insuffisance d'un personnel approprié. Cette absence a été aussi l'une des difficultés auxquelles les autorités devaient faire face. En effet, la lutte contre le paludisme n'est pas un domaine que tous les médecins connaissent ; cette lutte faisait appel à un personnel de tout genre, à savoir des ingénieurs hygiénistes, des entomologistes, des biologistes, etc., spécialisés en la matière. C'est ainsi que l'absence de ce personnel bien formé avait suscité des préoccupations auprès des autorités sanitaires, car pour entreprendre des mesures antimoustiques, ou antilarvaires, il fallait nécessairement disposer d'un personnel qualifié et spécialisé dans la lutte antipaludique298.

Enfin, le manque de matériels et produits nécessaires avait également ralenti les actions menées par l'administration coloniale. Ainsi, avant l'apparition des insecticides à effet rémanent, la lutte antimoustique n'occupait qu'une place minime dans la lutte

294 Conseil du gouvernement, Discours du G.G. Jungers E., 1949, p. 26.

295 Rapport sur l'hygiène publique, 1934, p. 21.

296 Rapport sur l'Hygiène Publique, 1932, p. 15.

297 Rapport aux Chambres, 1932, p. 15.

298 DROOGMANS, Art. cit, p. 640.

antipaludique, car les produits dont disposaient les services d'hygiène n'avaient qu'une faible activité. C'est ainsi que durant longtemps, il a été difficile { l'administration coloniale d'envisager une lutte { grande échelle. Quoique la situation s'améliora après la seconde guerre mondiale, avec l'introduction de nouvelles techniques et de nouveaux produits, notamment les insecticides à effet rémanent, nécessaires dans cette lutte contre le paludisme, il fut toutefois reconnu par les autorités que l'éradication totale de la maladie n'était plus possible, mais que seule une rétrocession considérable pouvait être envisagée299.

En outre, au-delà des préoccupations suscitées par le paludisme, il a été établi que malgré les moyens mis en place dès le début de la colonisation et malgré l'intensification de la lutte antipaludique amorcée vers la fin des années 40, le paludisme resta toujours en progression continue au sein de la population congolaise, et ce jusqu'{ la fin de la colonisation. Lorsqu'on examine le graphique 2, l'on se rend compte que la courbe de prévalence est en pleine croissance, de 0,2%o en 1918 { 69,3%o en 1958. L'évolution de cette prévalence témoigne donc de l'impuissance de l'administration coloniale { contrôler et à combattre efficacement cette maladie au sein de la population congolaise.

Il ne faut cependant pas perdre de vue que les priorités sanitaires de l'administration coloniale n'ont pas été les mêmes pour les deux populations. La santé de la population européenne fut la première préoccupation des autorités administratives, il s'agissait de défendre cette population contre toutes maladies en réduisant considérablement la morbidité et la mortalité qui leur étaient dues300. Tandis que les priorités concernant la population congolaise étaient relayées au second plan, leur santé ne fut au centre de ces préoccupations qu'en fonction des priorités économiques de la colonie. Puisqu'il fallait assurer le développement de l'entreprise coloniale, il convenait également d'assurer la santé de la principale main-d'oeuvre, sa base pour ainsi dire, sans laquelle il aurait été difficile voire même impossible d'assurer la prospérité de la colonie301. On comprend dès lors que la lutte contre le paludisme n'a pas été épargnée par cette politique sanitaire mise en place par l'administration

299 MOUCHET, Art. cit, p. 735.

300 Van der KERKEN, La politique coloniale belge, Anvers, ed. Zaïre, 1943, p. 181.

301 Idem, p. 226.

coloniale. Ce qui explique entre autres l'échec des stratégies élaborées par les autorités coloniales pour la maîtrise de la propagation du paludisme au sein de la population congolaise.

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