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Associations paysannes et développement durable: entre discours et réalités. Etude de cas: projet de l'ONG Propetén en partenariat avec 3 associations maya Q'eqchi' du nord du Guatemala.

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par Sandra Benotti
Université Aix Marseille  - Anthropologie et Métiers du Développement durable 2013
  

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2-3-3 Des capacités financières encore limitées

Les trois associations du projet ont été légalisées en 2012, et donc reconnues par les municipalités. Chacune d'entre elle a pu ouvrir un compte à la banque pour déposer les cotisations de leurs membres, grâce à cette existence légale du statut d'association. Cet argent leur permet principalement de s'entraider localement, de préparer les fêtes traditionnelles et aussi d'entretenir les locaux, comme je l'ai vu à La Compuerta, où l'argent cotisé va permettre de refaire le toit abîmé de la maison associative.

Pour les projets plus coûteux, les associations peuvent faire appel aux ONG, qui sont de véritables intermédiaires financiers entre les villages et les bailleurs de fonds nationaux et

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Benotti. Mémoire de recherche appliquée ETHT7: Associations Paysannes et Développement Durable: entre discours et réalités. (2013)

internationaux. De même, elles peuvent multiplier les partenariats publics et privés pour pouvoir financer leurs projets.

Cependant, les associations paysannes ne peuvent pas prendre en main financièrement les projets tels que le projet de production de cacao, car elles ne disposent pas de l'autonomie financière suffisante. Les bailleurs de fonds sont plus confiants grâce au statut légal des groupes locaux qui leur confèrent une certaine légitimité. Il devient alors plus simple pour ces derniers d'accéder aux financements. Néanmoins, cela les placent dans une situation de dépendance vis-à-vis des institutions d'apports financiers (et parfois techniques) externes. Ceci reste un problème pour les associations, car elles rencontrent toujours cet obstacle financier pour développer leurs projets. Cette question financière paraît cruciale, car comme l'explique Omar Bessaoud dans son étude sur les organisations paysannes au Maghreb, elle conditionne souvent les possibilités d'action et constitue un indice sérieux pour leur durabilité (Bessaoud O., 2008 :16)33. Elle peut aussi largement diminuer l'autonomie politique des associations paysannes, particulièrement lorsqu'elles sont mono financées par une institution, car cette dernière acquiert alors plus de pouvoir sur le projet financé.

Nous verrons dans la troisième partie que ce problème financier n'est pas le seul que rencontrent les associations paysannes, et que d'autres freins restreignent les possibilités de cet « idéal » de développement local durable.

Au cours de cette deuxième partie, nous avons pu comprendre en quoi la gestion communautaire par les associations paysannes pouvait être une solution au développement durable local. En effet, cette gestion favorise une meilleure identification des besoins particuliers aux villages. Ensuite, les associations permettent une réelle capacité stratégique, dont la communication, car elles s'articulent dans deux types de niveaux (local et global), et deux « systèmes de sens ». » (Olivier de Sardan, 1995 : 141). Grâce à cette place médiatrice, elles peuvent développer un réseau avec différents groupes d'acteurs pour atteindre des objectifs communs. Cela leur permet aussi d'argumenter leur position et faire des propositions dans des instances de décisions à des niveaux extérieurs aux villages. Leur poids politique se trouve renforcé, ce qui permet une meilleure cohésion et une meilleure liaison entre les différents niveaux décisionnels.

33 BESSAOUD O., 2008, « Les organisations rurales au Maghreb », Économie rurale 303-304-305, Société Française d'Économie rurale : 15 p.

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Nous allons comprendre certaines limites et contraintes auxquelles sont confrontées les associations paysannes et le fonctionnement général du développement rural au Guatemala, ce qui nous fera relativiser l'approche idéale des associations paysannes.

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Troisième Partie : Des limites et difficultés qui relativisent cette approche idéale

Aujourd'hui, pratiquement toutes les formes d'organisations rurales et agricoles sont confrontées à des problèmes souvent liés au manque de ressources et de capacités (financières, matérielles, humaines), qui limitent leurs champs d'action. Les problèmes principaux résultent aussi de la forte dépendance vis-à-vis des structures extérieures, des difficultés liées aux discours du développement, ainsi qu'à des problématiques socioculturelles, économiques et politiques qui surplombent les associations paysannes. Nous dans aborderons dans cette partie ces limites à prendre en compte pour une approche plus relative de la question du développement rural au Guatemala.

3-1 Les difficultés liées aux discours du développement : Décalage entre objectifs et réalisations effectives

Aujourd'hui, la plupart des ONG ont développé autour de leurs principes et de leurs modes d'intervention un discours relativement homogène. Yves Guillermou synthétise ce discours par quatre caractéristiques principales :

« a) leur statut d'associations sans but lucratif et non gouvernementales garantit le caractère « indépendant » et « désintéressé » de leur action ; b) leur activité s'organise autour des besoins prioritaires de la population, et notamment des couches les plus défavorisées ; c) les actions concrètes sont définies à partir du terrain, sur la base d'un dialogue réel avec la population, et leur mise en oeuvre repose sur la participation consciente et volontaire de celle?ci ; d) en tant qu'intervenant extérieur, l'ONG ne constitue pas une structure propre et durable, mais un relais entre la population et les structures d'encadrement existantes.(Yves Guillermou, 2003 : 124)34

De tels principes conduisent généralement la majorité des ONG qui travaillent sur des projets ruraux à définir leur rôle principal en termes d'« appui aux initiatives paysannes ». Nous pouvons bien reconnaître dans ces quatre caractéristiques les principes de l'ONG ProPetén. Ce type de discours est attendu et apprécié par plusieurs acteurs. En effet, comme le fait remarquer Y. Guillermou, ces caractéristiques rencontrent généralement un écho favorable

34 GUILLERMOU Y., 2003 « ONG et dynamiques politiques en Afrique », Journal des anthropologues, n° 9495, Association française de anthropologues : p. 123-143

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auprès des autorités politiques du Sud, mais aussi des bailleurs de fonds et de l'opinion publique du Nord. On voit souvent ces caractéristiques apparaître au Guatemala à travers les appels d'offre des bailleurs de fonds, tels que l'Union Européenne (UE) ou la Banque interaméricaine de développement (BID). D'ailleurs, certaines de ces caractéristiques sont plus ou moins précises selon les époques et selon les courants de pensée du développement international. Par exemple, cette dernière décennie a été marquée par la composante « genre » dans les institutions de développement rural au Guatemala. Dans quasiment tous les projets, cette composante doit apparaître pour les bailleurs de fonds. Pour obtenir le budget dont elles ont besoin, les ONG parviennent à faire correspondre leurs projets aux caractéristiques demandées par les institutions donatrices. Cependant, ces discours peuvent quelquefois se transformer, lors de la concrétisation de ces projets sur le terrain. En effet, la traduction effective au niveau des populations concernées peut s'avérer aléatoire, ce qui conduit fréquemment à des décalages entre les objectifs que se fixent les ONG et leurs capacités de réalisation.

Afin de mieux comprendre ces décalages, nous allons nous intéresser à la logique de développement « top-down » qui peine encore à s'atténuer. Puis, nous verrons en quoi la question de la participation est un point crucial du discours actuel et ses discordances. Enfin, nous verrons en quoi les trop grandes différences de pensée traditionnelle et institutionnelle peuvent constituer des blocages pour la réalisation de l' « idéal de développement ».

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand