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Le monopole bancaire français face au droit de l'union européenne

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par Romain Bony-Cisternes
Université Panthéon Sorbonne Paris 1 - Master 2 droit financier 2013
  

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TITRE 1:

REGULATION DES ENTITES DU SHADOW BANKING SYSTEM

La régulation des entités du shadow banking entretient des liens étroits avec le démantèlement des monopoles bancaires car il existe entre eux un lien qui est selon nous indissociable. En effet, la libéralisation des monopoles bancaires, qu'elle doit de facto (en raison des insuffisances des banques) ou de jure (lorsque le droit met fin aux monopoles) accroit, mécaniquement, le rôle des entités de shadow banking. C'est la raison pour laquelle le régulateur envisage conjointement la question de la libéralisation et celle de la règlementation des entités nouvellement créées. En pratique, la règlementation applicable aux entités de SB françaises est surtout d'origine européenne, l'Union ayant décidé, avant même de libéraliser les monopoles, de s'attaquer aux entités pouvant, déjà, intervenir sur le marché du financement sans heurter les monopoles bancaires et qui prennent une importance croissance face au crédit bancaire (Chapitre 1er). Elle est aussi d'origine nationale dans la mesure où le règlement CRR a obligé la France à instaurer une nouvelle forme d'établissement financier non-bancaire fournissant du crédit, qu'il a fallu réguler (Chapitre 2).

Chapitre 1er : Réglementation européenne des entités du shadow banking

Avant même de songer au démantèlement du monopole bancaire français, l'UE était consciente de l'existence, au sein du marché unique, d'entités qui, bien que ne fournissant pas des crédits au sens juridique du terme, fournissaient des services analogues à ceux des banques. Ainsi, elle a entrepris de réguler un certain nombre de ces entités. En conséquence, cela a impacté les entités françaises de shadow banking, que celles-ci soient déjà exemptées du monopole bancaire ou non. Nous verrons ainsi, brièvement, les règlementations applicables aux OPCVM, aux fonds d'investissement alternatifs, et celle devant intervenir en matière de fonds monétaires.

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L'intervention sur les marchés financiers à travers les différentes structures d'OPCVM expose les investisseurs à des risques de plusieurs natures151, notamment le risque de marché152, le risque de contrepartie153, le risque de liquidité154.

Afin d'encadrer ces risques, les autorités ont défini des règles de base 155qui délimitent la composition des actifs. Ces actifs doivent répondre à des critères d'éligibilité. Les risques liés aux actifs composant le portefeuille des OPCVM sont mesurés par plusieurs types de ratios. Ces ratios s'appliquent aux différentes catégories d'OPCVM avec des contraintes plus ou moins souples en fonction des investisseurs auxquels ils sont destinés. On peut ainsi citer l'exemple du ratio de risque global dont l'objectif est limiter le risque de marché et de contrepartie sur contrats financiers ou instruments financiers à terme du fait de l'amplification possible par l'effet de levier. Ce ratio a pour objectif de s'assurer que l'OPCVM est à tout moment en mesure de répondre à ses engagements. Il vérifie que le risque global lié aux contrats financiers n'excède pas la valeur nette totale du portefeuille156. Il existe également le ratio de composition des actifs 157et le ratio émetteurs158.

Ainsi, la gestion collective constituée sous forme d'OPCVM est relativement bien encadrée ; mais tel n'est pas le cas des fonds d'investissement alternatifs, ce qui a pu jouer un rôle dans la crise de 2008 car les actifs gérés par ces fonds représentent des montants d'une telle importance qu'ils peuvent influencer le cours du marché et permettre la propagation des risques159. Or, ces fonds étaient relativement peu surveillés. C'est désormais moins le cas avec l'adoption de la directive dite « AIFM » pour « Alternative investment fund management »

151 V. art. 313-53-3 RGAMF

152 Risque de perte pour l'OPCVM résultant d'une fluctuation de la valeur de marché des positions détenues imputable à une modification de variable du marché telles que les taux d'intérêt, les taux de change, les cours d'actions et de matières premières, ou à une modification de la qualité de crédit d'un émetteur

153 Risque de défaillance de la contrepartie, l'une des parties pouvant faire défaut à l'une de ses obligations présentes ou futures, conditionnelles ou occasionnelles (retour des titres mis en pension, versement des intérêts, etc.) avant que l'opération ait été réglée de manière définitive. La qualité de l'émetteur peut influer sur sa solvabilité

154 Risque qu'une position, dans le portefeuille de l'OPCVM, ne puisse être cédée, liquidée ou clôturée pour un coût limité et dans un délai suffisamment court, compromettant ainsi la capacité de l'OPCVM à se conformer à tout moment aux dispositions qui prévoient que les parts ou actions doivent pouvoir être rachetées

155 Directive 2009/65/EC on the coordination of laws, regulations and administrative provisions relating to undertakings for collective investment in transferable securities (UCITS). This directive replaces the previous UCITS Directive 85/611/EEC.

156 Il mesure le risque de perte en cas d'évolution défavorable des conditions de marché. La méthode de calcul (calcul de l'engagement ou calcul de la valeur en risque) est fonction de la stratégie de gestion et de la nature des contrats financiers détenus en portefeuille.

157 L'objectif est de limiter les risques de marché et de liquidité en fixant des seuils par nature d'opérations et d'instruments financiers (afin de permettre la diversification des émissions)

158 L'objectif est de limiter le risque de marché ou de crédit et de contrepartie ou sur une même entité par la diversification des contreparties

159 Op.cit. GRANIER T., et al. in « Les fonds d'investissement », Lamy, Axe Droit, Janvier 2014

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même si, selon un auteur160, cette directive ne vise pas l'activité des fonds et se contente de régir le capital et les fonds propres. La directive AIFM 161vise à imposer des exigences communes en matière d'agrément et de surveillance des gestionnaires de FIA afin d'établir une approche cohérente quant aux risques liés aux activités de ces fonds et à leur incidence sur la stabilité financière162. Le champ d'application de la directive est non pas les FIA mais les gestionnaires de FIA : ainsi, les règlementations relatives aux investissements des FIA ainsi que la définition de ce que recouvre cette catégorie relèvent du droit national. Comme elle l'indique à son article 1er, la directive se borne à prévoir des règles en ce qui concerne l'agrément, l'activité et la transparence des gestionnaires de FIA. On peut s'interroger sur la pertinence de cette directive en termes prudentiels et en termes de stabilité économique car elle ne vise pas les activités des FIA ni ne les définit de façon précise.

Ce caractère inabouti de la directive AIFM est analogue au domaine des fonds monétaires qui ne sont pas encore règlementés, bien qu'ils présentent des risques spécifiques à leur activité tournée vers le marché monétaire et les instruments financiers à court-terme, ce qui rapproche ces entités de banques : elles collectent des quasi-dépôts et font des quasi-prêts, bien que juridiquement s'agisse de gestion collective et non pas de crédit163. Pourtant, ces fonds présentent des risques particuliers que la proposition de règlement européen 164reprend.

Les fonds monétaires sont un instrument commode pour les investisseurs en raison de leurs similitudes avec les dépôts bancaires: accès instantané aux liquidités et stabilité relative de leur valeur. Compte tenu de ces caractéristiques, les investisseurs considèrent les fonds monétaires comme un substitut sûr et plus diversifié aux dépôts bancaires. Pourtant, les fonds monétaires sont des fonds de placement classiques, soumis aux risques de marché inhérents à tout fonds. Ainsi, lorsque le cours des actifs dans lesquels les fonds monétaires sont investis

160 Op.cit BONNEAU T., « Régulation bancaire et financière européenne et internationale », p148, n°223, Bruylant, 2013

161 Directive 2011/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs et modifiant les directives 2003/41/CE et 2009/65/CE ainsi que les règlements (CE) n ° 1060/2009 et (UE) n ° 1095/2010 Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE

162 Contrairement à la directive OPCVM qui règlemente à la fois les produits de la gestion collective (les fonds) et les acteurs de la gestion collective (société de gestion, dépositaire), la directive AIFM est essentiellement une directive « acteurs » qui harmonise la législation applicable aux gestionnaires. Cette différence d'approche apparait surprenante dans la mesure où les dispositifs OPCVM et AIFM devraient se compléter pour couvrir l'ensemble des OPC, or, ici, le parallélisme n'est pas total.

163 En Europe, quelque 22 % des titres de créance à court terme émis par des administrations ou par des entreprises sont aux mains des fonds monétaires, lesquels détiennent par ailleurs 38 % des créances à court terme émises par le secteur bancaire

164 Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL sur les fonds monétaires /* COM/2013/0615 final - 2013/0306 (COD)

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se met à baisser, en particulier en période de tension sur les marchés, la promesse faite aux investisseurs de rembourser immédiatement les parts ou actions émises et d'en préserver la valeur ne peut pas toujours être tenue. Si certains sponsors de fonds (surtout les banques) ont les moyens de soutenir, le cas échéant, la valeur des parts, d'autres (surtout les gestionnaires d'actifs) ne disposent pas nécessairement de capitaux suffisants pour le faire. En raison de l'asymétrie des échéances entre la liquidité quotidienne qu'un fonds monétaire offre aux investisseurs et la liquidité des actifs détenus dans son portefeuille, le remboursement immédiat risque de n'être pas possible à tout moment. La promesse de stabilité des prix de remboursement est souvent doublée d'une note AAA. Il est à craindre, toutefois, que les investisseurs, dès qu'ils sentent qu'un fonds monétaire risque de faillir à sa promesse de liquidité et de stabilité permanentes, demandent le remboursement et provoquent, partant, un désengagement massif (les « runs »).

Les désengagements massifs se caractérisent par des demandes de remboursement soudaines et de grande ampleur émanant de groupes importants d'investisseurs désireux d'éviter les pertes et d'obtenir un remboursement au prix le plus élevé. Ils présentent une importance systémique car ils forcent les fonds monétaires à vendre leurs actifs à bref délai pour répondre aux demandes de remboursement à satisfaire. La spirale des remboursements accélère pour sa part la baisse de la valeur liquidative (VL) du fonds, dont la régression se trouve dès lors démultipliée, de même que s'intensifient les craintes d'instabilité pesant sur le marché monétaire dans son ensemble. Du fait que les fonds monétaires jouent un rôle déterminant dans le financement à court terme d'entités telles que les banques, les entreprises ou les administrations, les désengagements massifs dont ils font l'objet peuvent avoir des conséquences macroéconomiques plus étendues.

En conséquence, la proposition de règlement préconise l'instauration de normes communes pour accroître la liquidité des fonds monétaires et assurer la stabilité de leur structure. Des règles uniformes seront établies pour garantir un niveau minimal de liquidité à un jour et à une semaine. Des principes normalisés seront arrêtés pour permettre au gestionnaire de fonds de mieux connaître sa clientèle d'investissement. Des règles communes garantiront en outre que les fonds monétaires investiront dans des actifs de grande qualité et bien diversifiés jouissant d'une bonne qualité de crédit. Ces mesures doivent garantir que le fonds présente une liquidité suffisante pour faire face aux demandes de remboursement des investisseurs. La stabilité des fonds monétaires sera assurée par la création de règles claires et harmonisées pour la valorisation des actifs dans lesquelles ils investissent. Ces règles de valorisation consacreront une évidence, à savoir que les fonds monétaires sont des fonds de placement

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normaux, dont les actifs sont soumis aux fluctuations des cours. Outre ces dispositions, une règle commune en matière de notation garantira que les gestionnaires de fonds et les investisseurs cessent de s'en remettre à des notations externes du crédit qui pourraient nuire au fonctionnement du marché monétaire en cas de dégradation. Ces mesures seront accompagnées d'exigences de transparence renforcées afin que l'investisseur soit correctement informé du profil de risque et de rendement de son investissement.

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L'ensemble de ces règles (OPCVM, FIA, fonds monétaires) ont vocation à s'appliquer, en France, à des entités qui certes appartiennent au domaine du shadow banking, mais qui peuvent exercer leurs opérations sans nuire au monopole bancaire : soit qu'elles en soient exemptées au sens de l'article L511-6 du code monétaire et financier pour certaines de leurs activités, soit que leur activité ne tombe pas sous le coup de l'interdiction. Pour autant, à cette règlementation européenne vient s'ajouter une règlementation cette fois purement nationale. Elle concerne, en effet, les sociétés de financement, entités de shadow banking nouvellement introduites en droit français et ne correspondant ni à la qualification d'OPCVM, ni à celle de FIA, pour la raison suivante : il ne s'agit pas de gestion collective mais bien d'activité de crédit.

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