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L'usage des instruments de musique dans la communication chez les Kongo

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par Jean-Claude Moussoki
Université Marien Ngouabi - Thèse de Doctorat Unique 2015
  

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Chapitre 9 : Analyses ethnographiques des instruments de musique

Les instruments de musique des Suundi sont fonctionnels et significatifs. C'est une évidence. C'est là une de leurs principales caractéristiques.

Comme l'écrit Monique Brandily :

« La matière sonore [...] est soumise à l'observation des conventions dictées par des motifs qui ne doivent pas grand-chose à la recherche esthétique, mais répondent à la nécessité de demeurer signifiante 323».

Comme la musique, les instruments de musique sont indissociables de la dimension religieuse et des actes sociaux. Ils se présentent souvent comme un moyen de communication avec l'invisible : « la communication par la musique est le moyen privilégié de s'assurer la clémence des puissances qui contrôlent les forces naturelles324 ». Le lien entre instruments de musique et le symbole et aussi très prégnant : homme/femme, droite/gauche, pair/impair, registre timbre de l'instrument, tension de la peau. « Les choix musicaux sont sous la dépendance des significations d'ordres symboliques325 », ajoute-t-il.

Quelle est la portée symbolique de l'iconographie musicale véhiculée par les instruments?

Une telle interrogation porte sur le rapport de l'objet ou du contexte musical signifiant et de la substance symbolique ainsi signifiée.

323 M. Brandily, Introduction aux musiques africaines, Paris, ACTES Sud ? 1997, p.26.

324 Ibid., p.49.

325 Ibid., 61.

211

9.1. Les symboles des instruments de musique traditionnelle

Un symbole, une image, est un élément représentatif de l'ensemble d'une culture, donc d'un groupe de personnes se rattachant à celle-ci. Mais derrière l'idée de symboles se cache aussi l'idée de construction, de fabrication de ce même symbole, la construction socioculturelle du concept ou ce que l'on appelle « représentation ».

Le symbole326 n'est pas un signe qui ressemble à son référent, il est le signe dans lequel on intègre un ensemble de références construites. Il ne s'oppose pourtant pas la définition de la signification puisqu'il s'agit d'un élément ne manquant pas de signification sociale. Partie intégrante d'un message, d'un acte de communication, le symbole est le lieu d'interprétations que l'on construit en contexte, c'est-à-dire dans le contexte propre où il se trouve. Il est donc un élément produisant des significations :

« Une signification peut-être définie comme une interprétation que des énonciateurs construisent lors d'une situation de communication (...) les énonciateurs n'émettent pas directement du sens, ni même de la signification mais seulement des signes intentionnels ou non...organisés et interprétés selon des codes divers, y compris au plan symbolique. La signification ne se réduit pas au sens, ni au

326D'après le symbolisme universel, un signe luisant au-dedans est sonné au-dehors. C'est- dire qu'il est assumé, traduit et manifesté par quelque chose au-dehors. Il compose d'un signifiant (forme sonore qui détermine le signifié, bref l'expression) et d'un' signifié (l'aspect formel de l'entité dite signe, c'est-à-dire le contenu), tel que Barthes l'a illustré schématiquement à la hjemslevienne? C'est une réalité sensible qui se rapporte à une autre réalité qu'il est censé évoquer, Chaque signe entre dans un réseau de relations et d'oppositions avec d'autres signes qui le définissent, qui le délimitent à l'intérieur de la langue, GodwlnE, Ochiba, Essai sur la sémiotique comme instrument d'investigation littéraire, Rev. CAMES - Série B, Vol. 005 N°1-2, 2003, pp.334-335

212

message. Dans les faits se construisent effectivement toujours des significations plurielles327 ».

Quel sens peut-on donner aux représentations de certains instruments de musique des Suundi?

Chaque instrument de musique offre une opportunité d'accéder à l'harmonie secrète du monde si on sait en jouer. Il évoque, en fonction du contexte, les sentiments, le talent et le génie inventif de l'artiste. Ces dimensions, « forment et éduquent l'Homme, contribuant ainsi à son épanouissement moral et spirituel (...) », écrit D.I. Itoua328. Les symboles sont des créations culturelles qui obtiennent leur signification dans les rites, les cultes et les moments qui scandent la vie de leurs utilisateurs329.

Comment expliquer et comprendre que des instruments de musique reçoivent, dans le domaine del'art, de « belles parures », une manière de les rendre plus attractifs et plus beaux ? Ces instruments musicaux sont marqués, taillés, sculptés, modelés, gravés à cette fin. Si les marques sur le corps est fonction d'esthétique, parfois d'érotique, que dire de ces objets?

Suivant la réflexion anthropologique et sémiotique de Franck Ghitalla, de Dominique Boullier et de Fabienne Plégat-Soutjis330, comment ne pas s'interroger sur le symbolisme des instruments musicaux.

327 Roseline Le Squère, Une analyse sociolinguistique des marquages du territoire en Bretagne : toponymie, affiche bilingue, identités culturelles et développement régional, Thèse pour l'obtention du Doctorat de l'Université Rennes 2, Option sociologie du langage, 2007, p.149.

328Daniel Isaac Itoua, Instruments de musique traditionnelle des Mbôsi du Congo : secrets et applications, Paris : l'Harmattan, 2014, 127 p.

329C. Faïk-Nzuji, Symboles graphique en afrique, Ibib., p.121.

330 Les représentations et les usages des écrans en formation à distance, la notion de sémantique graphique analyse une forme spécifique de communication, c'est-à-dire celle des écrits d'écran périphériques aux modules de formation (fameuse interface), Fabienne Plégat-Soutjis, « Sémantique graphique des interfaces : représentations, valeurs et usages », In Communication et Langages, n°142, 2004, pp.19-32

213

En réinvestissant une démarche d'évaluation, nous établirons alors un dialogue indispensable à la compréhension de l'utilisation des instruments de musique (état physique) et visuels « interactifs », un dialogue entre un point de vue morphologique (déjà amorcé) et une approche sémiologique.

9.1.1. La sculpture des membranophones

En Afrique, lorsqu'on pense aux membranophones, on pense à l'esthétique, aux couleurs, à l'iconographie331, à la fabrication (design), etc...

La relation entre les instruments de musique, la musique, le musicien et la nature est un thème récurrent dans les mythologies du monde. C'est pourquoi on trouve des instruments anthropomorphes (sculptés en forme d'être humain) ou zoomorphes (sculptés en forme d'animal). Si ces éléments sculptés possèdent encore une forte signification symbolique dans certaines cultures, ils n'en constituent, pour d'autres, qu'un simple décor ; il en va ainsi des instruments de musique chez les Suundi.

Des survivances de l'analogie entre instrument de musique en forme humaine ou animalière se retrouvent dans certaines parties: pour les instruments à cordes, on parle de cordes attachées à la « tête », elle-même rattachée au « corps », c'est-à-dire la table d'harmonie, grâce au manche ; pour la flûte, la « tête » est la partie où souffle le musicien, l'air traverse le

331 On entend par iconographie musicale, l'étude des représentations figurées de la musique dans les arts visuels, quelle qu'en soit la technique. Elle est source importante pour témoigner (i) les objets musicaux tangibles : instruments de musique (dans leur morphologie et leur tenue de jeu), notations musicales manuscrites ou imprimées, (ii) les acteurs faisant ou écoutant la musique : ensembles musicaux et groupements témoignant de pratiques musicales, musiciens anonymes ou identifiés, conditions de la musique dans la société (iii) du rôle de la musique dans les sociétés, les thèmes musicaux étant porteurs de symboliques spécifiques tout en étant symptômes de cultures données, Daniel François Scheurleer, Iconographie des instruments de musique, La Haye, D.F. Scheurleer, 1914.

« corps »
appelle «

et sort par le « pie

d » ; pour

les tambours, c'est la peau qu'on tête », cette dernière étant tendue par-dessus le « corps ». De plus, ce que le nom désigne « tête » est souvent représenté p ar une

écoratio d n sculptée dans la partie correspondante.

vent.

On voit par ailleurs, d'autres éléments sculptés, qui, pour des raisons purement décoratives ; se trouvent sur des éléments qui n'ont aucune influence sur la production du son comme les instruments à

Figure n°

53 : Membranophone en bois

 

L'instrument

prototype d'instruments à

emoisell d e333 noire

anthropomorphe,

est le

représente une

n'est certainement pas,

de la musiq u

qui n'est pas

he du sonnet

rps féminin e

332 C. Duveille p.125

333Personne du sexe féminin

34 Dans la d

3 euxième strop

compare cette île avec le co 1861, p.13

e du monde :

musique de tradition orale

mariée

de Charles Baudelaire qui précise qu'il s'agit d'une île, et il

t avec la femme qu'il aime, Les fleurs du

, Aux sources

sco, 2010,

, Paris : Une

ibebook,

mal, Paris, B

214

ci-dessus est, de forme

332

figuratio n humai ne. Il d'un naturel coquet, qui encore, allée à la maternité et dont la beauté rappelle « (...) un paradis exotique, une nature abondante avec des arbres aux « fruits savoureux334». Cette beauté que Ch. Baudelaire renforce à travers son poème »Parfum

exotique»

en ces termes :

n soir cha

« Quan

d'autom

Je resp Je vois

onotone

d, les deux yeux fermés, en u ne,

ein chaleu reux,

ire l'odeur de ton s

se dérouler des rivages heureux Qu'éblouissent les feux d'un soleil m Une île paresseuse où la nature donne Des arbres singuliers et des fruits savoureux

ud

;

(...)335 »

Pendant que

mosaïques

certains instruments de musique basuundi s ont de sont monotones.

, d'autres

Sources :

Photo gal

lérie Kinz

Figure n °54: Membranophon de récipient

e (mosaïque) en forme

éngélé, Août 2008

215

Ce tambour à la forme d'un récipient, sorte de cruche, yuki, qui sert à recueillir et à conserver l' eau dans de meilleures conditions. Une eau dont l'importance aussi bien pour l es animaux , les animaux que les végétaux est sans pareille : « l'eau, c'est la vie » , dit l'adage populaire.

L'instrument qui est un tambour contient de l'eau qui donne la vie, qui peut ramener, selon les contextes, « les personnes mortes à la vie » car, la symbolique du récipient permet de conserver non seulement la pureté de cette eau mais aussi d'évider les consommateurs d'être infectés par les vecteurs de parasite s. Ainsi, l'être humain, qui boira de cette eau, sera en

3 35 Ch. Beaudelaire, Ibid

bonne santé et, économiquement, indispensable

336

est soit u ne gargoul ette, soit une caleb asse.

pour le pays. Ce ré

cipient

Certains membranop hones, comme ceux-ci-dessous, ont leurs parois sculptées. Comme des êtres vivants, ces tam-tams possèdent des sortes de supports, pieds, sur lesquels ils tiennent debout sur des pieds. Ce qui suppose debout pour inviter les populations à la danse et à la musique.

s décorés

Figure n°

55 : Quatre membranophone

Gallérie p

e (avril 20

Sources :

ersonnell

14)

Par sur pieds, surtout à

musique et à la dans

ailleurs, l'autre type de tam-tam disp

se joue assis. Cette sorte de tambour

Kabadis sou. De forme rectangulaire

cation des

e qu'à la

communi

osant des pieds, tambour

existe chez les Suundi,

, il sert davantage à la messages.

Gallérie p

e (avril 20

Figure n°

Sources :

56 : Un tambour sur

pied (iii)

ersonnell

14)

 

216

336 Th. Masui, Annales du Musée du Congo : les collections ethnographiques du Musée du Congo, tome 1, fascicule 1, Bruxelles : Imprimerie C. V Heighe, 18 99, p.28.

9.1.2. La sculpture de s aérophones

9.1.2.1. Les t rompes t raversièr es en cor nes de bo vidés

sonner

similitude

s au nive

Suundi et

les tromp

Ell es sont fa briquées avec des c ornes de buffles et d'antilop es. Ces trompes, aux mul tiples us ages, ser vaient g énéralem ent pour l'alarme ou l'alerte en vue d' organiser le rasse mblement des guerri ers afin de comb attre les troupes ennemi es. Nous avons relevé q uelques au des fonctions musical es entre les trom pes des s en usa ge chez le s Tchama n337 de la Côte-d'Iv oire.

Figure n°57 : Une siki, mpoka)

corne trav

14)

e (avril 20

ersière (mpungi,

Sources :

Gallérie p

ersonnell

que « (... ) dans

sonneur

appelle

: « Le

d'ajouter

A propos de ces types de trompes, E. Terray écrira le langage de la corne, chaque homme a son nom, et le avant l'expédition chacun des guerri ers du village» et

sonneur doit être sp défaite du village338

écialement protégé »

: sa mort

au comb

at entraîn

erait la

Dans ce même ordre d'idées, H. Zemp339 mentionne la fonction musicale et la signalétique que « la trompe en corne d'an tilope traversière, jouée, seule ne produit qu'un seul son, au maximum deux lorsqu' il s'agit d'une petite corne comportant un trou d'intonation. Intégrée dans un

e centrale,

217

337Aka Konin, Aspects de l 'art musical des tchaman de côte d'ivoire, Musée royal de l'Afriqu Tervuren (Belgique) 2010

338Terray (E.), L'Organisation sociale des Dida de Côte d'Ivoire, Annales de l'U niversité d'Abidjan, série F, tome I, fascicule II, Ethnosociologie, 1969, p. 3 06.

Série F, Tome I,

39Zemp (H.),

3 Trompes sénoufo, Annales de l'Univers ité d'Abidjan,
Fascicule I, Ethnosociologie, 1969, p. 48.

218

ensemble instrumental, elle a essentiellement un caractère rythmique et non mélodique.

Au contraire, les trompes du chef, qu'elles soient accompagnées de tambours et sonnent pour une danse ou qu'elles fournissent un signal pour le départ en guerre, ont un caractère mélodique : elles produisent 4 à 6 sonorités distinctes et accordées.»

9.1.2.2. Les trompes traversières en bois

Ce sont de grandes trompes traversières, creusées dans un bloc de bois. Ces instruments sont rectilignes, cylindriques sur deux tiers de la longueur, avec seulement un léger évasement du pavillon. Ils sont dépourvus de trou d'intonation ; un trou percé à même le tuyau et, situé vers l'extrémité, sert d'embouchure latérale. Certaines trompes en bois sont ouvragées : ainsi on y trouve des trompes anthropomorphes et zoomorphes. La partie supérieure (extrémité voisine de l'embouchure) de l'instrument figure une tête humaine.

9.1.2.3. Les trompes en ivoire

Elles constituaient un signe distinctif des riches bourgeois (la classe des aristocrates). Elles servaient les hommes riches dont elles animaient les cérémonies traditionnelles d'intronisation, c'est-à-dire « sortie dans la rue pour paraphraser H. Memel-Fotê340 qui parle du rituel d'ascension sociale :

340 H. Memel-Fotel, Le Système politique de Lodjoukrou, une société lignagère à classes d'âge (Côte d'Ivoire), Paris, Présence africaine et Nouvelles Éditions africaines, 1980, 479 p.

219

une participation

politique

pouvoir

« C'est un rite au cours duquel le candidat, membre d'une classe d'âge et d'un clan, expose au peuple, sous forme d'or, le fruit de son travail personnel, émerge de la masse des pauvres et de la masse de sa classe d'âge, s'intègre à la catégorie des riches, en y intégrant d'un cran l'ensemble de

triclan, cette sortie conquiert, par l'arme économique,

plus grande, une participation plén

réel détenu par les grands hommes » .

ou des

9.1.3. Les co rdophon es

Rappelons que les co rdophone s disposent des cordes tendues qui résonnent lorsqu'elles sont pincées (par les doigts), frottées, frappées ou

ctionnée a s par le vent : le piano à pouces, nsambi. Ces i nstrumentsétaient

décorés, sculptés et ornés d e figures particulières, véhiculant un

spécifique

son ma

ière au

messages

s.

Figure n°

Sources :

58 : Une

Gallérie p

e

e (avril 20

guitare traditionnell

ersonnell

14)

n'en use

instrument

9.2. Les instruments de musiqu

Quand on présente physiquement un instrument

pas artistiquement. Mais l a

se fait au sein

de musique, on

présentation esthétique du même

même de l'oeuvre. Ce fait entraine une

e et l'art

220

conséquence assez paradoxale : la présentation physique et discursive se donne comme présentation « la présentation esthétique (...) 341 » écrit Bernard Sève. C'est dire que la présentation esthétique de l'instrument, c'est aussi une manière de faire sentir la potentialité de l'instrument derrière la réalité sonore limitée qu'il est, pour l'heure, invité à produire, une forme de présentation esthétique. La décoration des instruments de musique, du point de vue du design (conception) peut être assimilée à des scarifications, des tatouages342, que l'être met sur son corps en signe de beauté extérieure. En parlant des scarifications, de la décoration et de la sculpture sur les tambours d'Ambrym, Jean Guiart343 ».

Nous avons, dans certaines localités344, trouvé des instruments de musiqueportant sur leurs paroisdes initiales ou des patronymes de leurs créateurs. Cette marque, ce cachet, indique l'appartenance de l'instrument à tel ou autre artiste. Tel est le cas, pour la majeure partie des instruments utilisés dans des églises. Ces empruntes se font à l'aide d'un morceau de fer chauffé que l'on fait, ensuite, passer sur les parties destinées à recevoir les écrits.

341Bernard Sève, « Utilisation et « présentation esthétique » des instruments de musique »,In Méthodos : savoir et textes, 2011, n°11.

342 Devenu un phénomène de société au même titre que bien d'autres fléaux tel que le tabagisme, le tatouage s'est dangereusement répandu dans les milieux juvéniles, sportifs et même dans celui des amoureux. En guise de beauté, de nombreuses personnes n'hésitent pas à se faire tatouer jusqu'au niveau des parties de leurs corps les plus inimaginables. Ces signes deviennent très en vue chez les stars des ballons (rond, oval etc...) sans oublier les jeunes dits branchés qui s'identifient à leurs idoles vus au cinéma ou à la Télévision.

343 «( ...) A côté des grands tambours sculptés, se dresse généralement un tambour de plus petite taille, simple cylindre évidé. Il existe aussi de petits tambours portatifs, en bois ou en bambou. Les joueurs de tambours sont des dignitaires de rang moyen, mais assez fortement spécialisés en ce qui concerne le jeu d'accompagnement des diverses danses : soit avec un grand et un petit tambour en batterie, (rites du Mage), soit seulement avec un instrument de petit; taille (rituels Luan). Il y a deux formules pour les tambours en batterie : soit un seul homme, assis sur une pierre et jouant d`un bras sur chaque tambour - soit un joueur pour chaque tambour; dans ce dernier cas celui qui a la responsabilité du plus petit tambour joue à deux maillets, mais toujours sur le côté droit », J. Guiart, « Notes sur les tambours d'Ambrym », Extrait Journal de la société des Océanistes, Numéro spécial consacré aux nouvelles Hébrides, Tome XII, 1956, p.335. (Coll. Cliché et Musée de l'Homme)

344 Il s'agit des villages de Kabadissou, de Kissenga, de Soukou-Bouadi, de Manzakala dont les tambours, surtout à fentes, étaient l'oeuvre du « Maître mukonzi » Jean Kinkouémi décédé le 12 mars 1976. Il avait réussi à imprimer à ces tambours un cachet spécial à telle enseigne qu'ils étaient reconnaissables par les habitants de l'espace suundi et, facilement perceptibles, étaient les sons émis.

église du

personn

elle (février

Figure n °59: Des in décorés, utilisés à l'

Sources :

2013)

razzavil B le

Gallérie

struments de musique, Centenaire de

Ain

si, en guis

e de repr

ésentation

s345, les ornements

, les décorations

345Disons que

instruments de

nthropologie a ,

tous les instruments de mu

musique congolais, Ibib., Ibib., : les idiophones, les

l'ensemble porteurs des signes distinctifs

uvres de l'esprit. Si certa i

créateurs des oe

de forme géométrique (trap

46Il s'agit d'

3 un

creuses

47C'est dire

3 q

dont le sens e

guerre; un a p
(
tifitrifi); un a
«
Notes sur les

'chaque grade

e trompe anthropomorphe

u'en dehors des rythmes d

st assez généralement conn

pel pour la ppel pour le s tambours d' A

du - il y a un

ézoïde), d'au

appel pour

circoncision

cérémonies

mbrym », I b

ns d'entre eux

tres ont de fo

sique répertoriés au Congo pp.60-64 et les Annales du

aérophones, les membranophones et les cordophones , des signatures, des marques déposées apposés par le

sont de forme humaine ( d

'accompagnement, très divers, il existe des appels au tambour,

u: à partir du grade Sagran, il y a un appel au tambour, pour

un mort, (tarum) différent suivant le g rade;- un appel pour la (sur deux tambours);un appel pour convoquer la population luan ou le masque tamake;- un appel pour la danse, J. Giart,

id., p.335.

retrouvée chez les Bembé

rmes variées :

'une tête de féticheur),

croissant, animal ou sablier.

qui représente quatre statues

par J.N. Ma quet, Note sur les Musée du Congo: ethnographies et

sont dans

s

221

sont légion.

A titre illustratif les trompes anthropomorphes346 o u les «figurations humaines » sont faites des mains d'artistes. Elles représentent chacune un

ersonna p ge et remplissent des fonctions particulières, écrit J. Guiart347.

Les instruments de musique dont la fente du tambour est enduite de kaolin à l'intérieur symbolisent la matrice primordiale, l'utérus du monde en gestation rythmique, là où le cosmos et en particulier la lune se régénèrent. L'oracle débute comme une émanation du corps maternel, comme un corps à corps avec l'ordre de la mère, issu de l'espace matriciel originaire figuré par la maison de réclusion.

particulier, sont

A l'image de général y compris

nthropo a morphes.

s aérop hones ci-dessus, les les Kunyi, et S uundi en

cordophones Kongo, en

parfois

Figure n (Kunyi du

°60 : Une Harp

Congo-Gabon)

e348

9.3.L'icono graphie34 9

A l' image des

s, l'iconographie

aux Suu n L'image,

di de transmettre dont la fonction

signes ( bidimbu) et des pic togramm e est une fo rme de « communi cation » q ui permet les messa ges à l'in térieur de leur com munauté.

ommuni c cationnell e est imp ortante, te nd à pren dre:

222

348Harpe - Fang - Gabon - In

struments de

musique sur www.bruno-mignot.com

 
 
 
 
 

349On entend par iconographie musicale, l'étude des représentations figurées de la musique dans les arts visuels, quelle qu'en soit la technique. L'iconographie musicale constitue donc une source importante pour témoigner - d'objets musicaux tangibles : instruments de musique (dans leur morphologie et leur tenue de jeu), notations musicales manuscrites ou imprimées, - d'acteurs faisant ou écoutant la musique : ensembles musicaux et groupements témoignant de pratiques musicales, musiciens anonymesou identifiés, conditions de l a musique dans la société - du rôle de la musique dans les sociétés, les thèmes musicaux étant porteurs de symboliques spécifiques tout en étant symptômes de cultures données.

223

« Une place sans cesse plus importante dans l'ensemble des systèmes de signes qui véhiculent la pensée, lesquels se sont créés au fur et à mesure de l'évolution des rapports sociaux : entre le système symbolique, discursif et conceptuel de l'écriture réservée à une minorité alphabétisée et la télévision en direct, qui permet une perception instantanée de l'événement, le cheminement est continu vers une plus grande convivialité. Mais l'image (surtout lorsqu'elle est médiatisée) n'est qu'un simulacre, une représentation du réel plus ou moins aseptisée, c'est-à-dire coupée de la réalité350 », écrit J.L. Chevanne.

Ici, les pictogrammes sont comme des signes graphiques351, iconiques et conventionnels ayant une fonction communicative sans pour autant transcrire le langage.

S'agissant des instruments de musique des Suundi et ainsi que des principaux acteurs, quelle perception nous en faisons-nous ?

La sansa ou kisansi, terme courant pour désigner une famille d'instruments idiophones à pincement répandu chez les Suundi352, le principe est la mise en vibration de lamelles métalliques ou de bambous, fixées sur une planchette de bois avec ou sans résonateur. Les lamelles sont fixées de manière à ce qu'on puisse les faire vibrer avec le bout des

350Jean-Luc Chevanne, « Son, image, imaginaire », In Journal des anthropologues, 79, 1999.

351 Emmanuelle Bordon, « Comment les pictogrammes sont interprétés par des ordinateurs », In Communication et Langage, n°142, 2004, pp.43-52

352 Antoine Moundanda et Albert Loussiala de la « poussière » ont été des professeurs de cet instrument de musique aujourd'hui en perdition.

224

doigts (les pouces). Baguées, on peut faire coulisser les lamelles pour les accorder.

A cet instrument, on y ajoute, parfois, des bruiteurs comme des coquillages, des capsules de bouteilles, des anneaux de fer blanc. Par ailleurs, la morphologie, la chromie sont autant d'éléments qui permettent de fixer l'instrument aussi bien dans l'espace que dans le temps. Ainsi au risque de paraître bien pragmatique aux iconographes, j'ai relevé de nombreux instruments de musique du point de vue de leurs représentations qui montre combien le langage visuel peut-être parfois irremplaçable pour affiner la connaissance d'un instrument, son évolution, son mode de jeu voire ses accessoires.

9.4. La tonologie, la phonologie353

De transmission orale, les langues bantoues ont été peu écrites de manière académique. Toute communication avait lieu à un moment donné, dans une situation donnée, dans un lieu donné ou à l'occasion d'un événement donné ! Ces paramètres inaliénables sont nommés « contextes de communication ». Ils signifient que la forme de communication émarge à un environnement culturel, technologique, socioéconomique, situationnel à telle enseigne qu'aucune communication ne peut se comprendre en dehors de son contexte354, dirait-on.

On dira que toute communication n'a de sens que dans le contexte dans lequel elle s'inscrit. Ainsi, sortie du contexte d'un repas, la

353 La phonologique est définie comme la capacité à percevoir, à découper et à manipuler les unités sonores du langage telles que la syllabe, la rime, le phonème. La prise de conscience d'unités phonologiques comme la syllabe et le phonème, ainsi que leur traitement explicite et l'apprentissage des correspondances entre unités orthographiques et phonologiques sont essentiels à l'acquisition de la lecture et de l'écriture

354 Par définition, le contexte est l'ensemble des éléments, des circonstances, qui entourent un fait

225

communication «passe-moi le sel» n'a pas beaucoup de sens. Le contexte de la communication dépend de facteurs multiples (culture, temps, technologie, cadre...) et des normes sociales ou des conventions qui régissent les relations interpersonnelles. Quoi qu'il en soit, le contexte est indissociable de la communication !

9.5. L'élément sonore

La musique, dans un contexte de communication, peut être considérée comme un langage indépendant du langage verbal. Elle a un vocabulaire propre qui nous renvoie directement à notre propre expérience sensorielle et esthétique.

Le « langage et la musique » : la question n'est pas neuve, et l'on peut en restituer la généalogie à travers les déclinaisons des formulations qui la présupposent, toutes dotées d'implications différentes et supposant des modifications constantes de point de vue (« parole et musique », « mise en musique du texte », « musique et littérature », « prima la parola... »). Cependant, telle qu'elle est posée, du fait de l'emploi du terme de « langage », cette question comporte des résonances sémiotiques. Au-delà même, elle semble s'inscrire dans le champ de la sémiotique structurale: sa forme duelle construit en effet de manière sous-jacente un système oppositif impliquant que les deux termes rapprochés ici, le langage et la musique, soient définis l'un par rapport à l'autre, l'un contre l'autre355.

La musique, dans sa forme simplifiée, le schéma classique de la communication musicale rappelle le modèle linguistique. Elle représente,

355Mathilde Vallespir, « Langage et musique : approches sémiotiques »,

http://www.fabula.org/colloques/document1274.php#, (consulté le 29 octobre 2013)

226

chez les Kongo, un langage, un système de communication qui s'apparente à l'analyse musicale schématisée par Geneviève Broutechoux et Daniel Bô356.

La musique et le langage constituent deux systèmes sémiotiques, caractérisés par leur aptitude à produire quelque-chose, diversement appelé sens (au singulier ou au pluriel), signification, signifiance, catégorisation. Tous deux partagent une double nature graphique et acoustique, sans pour autant que ces manifestations caractérisent identiquement ces deux systèmes. Ainsi, pour J.M. Klinkenberg, la musique est encodée graphiquement et la partition envisagée comme « métalangage357 ». Au contraire, l'écriture et la « réalisation orale » du discours sont considérées comme deux modes de réalisation différents du système verbal. En outre, musique et langage sont deux « chrono syntaxes », la première à signes simultanés ou potentiellement simultanés, le second à signes « asimultanés ».

En somme, les deux systèmes sont articulés différemment : si le verbal comporte une « double articulation », le musical répond à une articulation simple. D'un point de vue perceptif et productif, ils mobilisent deux canaux perceptifs similaires : le canal auditif et le canal visuel (pour la manifestation graphique de ces deux systèmes, quel que soit le statut qu'on donne à celle-ci). Ils partagent en outre la voix comme canal de production. Précisons toutefois d'une part que cette dernière constitue le canal exclusif du système verbal quand elle n'est qu'un canal parmi d'autres pour le musical, la production musicale pouvant être véhiculée par bien d'autres instruments. D'autre part, elle est utilisée différemment

356Geneviève Broutechoux et Daniel Bô, L'analyse musicale : présentation, s.l., sd, sn, p.11.

357 J.M. Klinkenberg, Précis de sémiotique générale, Points Essais - sciences humaines, De Boeck et Larcier, 1996, Seuil, Paris, 2000, p. 56

227

dans les deux systèmes : selon les contraintes du langage articulé pour le système verbal et selon les paramètres de la musique (timbre /hauteur/ rythme). Ceci implique la mobilisation d'éléments anatomiques différents, qui peuvent être utilisés en même temps358, (comme c'est le plus souvent le cas dans des oeuvres chantées - avec « paroles »), et donnant ainsi lieu à un « stimulus composé »359. La voix apparaît donc comme point d'intersection privilégié entre musique et langage - ce qui explique d'ailleurs la fréquente réduction de la question de la relation entre langage et musique à la question musique/parole.

Ce serait là réduire un faisceau de connexions dont on peut à présent tenter de brosser une typologie.

Dans ce contexte, les Suundi se mettent en situation de communication interpersonnelle au moyen des instruments de musique ou non. Au sujet des instruments de musique, il s'agit de ce que Kristeva considère comme étant les « événements sémiotiques », c'est-à-dire « (...) la syntaxique nouvelle360 ». D'une certaine façon, on relève dans la production théorique le fait que la musique est plus souvent considérée comme le produit d'un langage, alors qu'on fait dériver ses éléments de l'idée de fonction communicative, voire métalinguistique. Cet état de fait est lié au genre de musique (dont les études tiennent compte. On y relève le plus souvent une primauté donnée aux musiques tributaires d'une certaine tradition verbale et expressive, comme la musique classique et romantique, dans lesquelles l'aspect symbolique de la composition est

358 Voir Le cerveau musicien, neuropsychologie et psychologie cognitive de la perception musicale, B. Lechevallier, H. Platel, F. Eustache, De Boeck et Larcier, 2006, « Analyse des différents stimuli auditifs : musique, langage et bruit. Etude comparative. », C. D'Alessandro, p. 33 et sq.

359 Lechevalier, ibid.,

360 J. Kristeva, cité par Godwin E. Ochiba, « Essai sur la sémiotique comme instrument d'investigation littéraire », Ibid., p.333.

228

constant. Or la musique ne fait pas que s'apparenter à un instrument de communication- à « la musique comme volonté de représentation 361» dont parle A. Schaeffer.

Les roulements de tambour mettant en relation deux personnes se font entendre et se font comprendre suivant une synchronisation qui rappelle la rétroaction (anglais feedback).

Cette situation est schématisée à l'aide de la "boucle de la communication", des théoriciens de la communication, qui présente les principaux éléments impliqués dans une interaction à savoir:

a) la production d'un message (encodage) ;

b) la transmission d'un message ;

c) la réception d'un message (décodage).

Emetteur

===4

Canal

===4

Récepteur

Si les éléments ci-dessus sont présents non seulement chez l'émetteur mais également chez le récepteur, on obtient ainsi une boucle fermée qui illustre une communication bidirectionnelle.

Dès lors que l'on adopte les termes d'objet-sonore et d'objet-musical, on est à même de s'apercevoir qu'on est en train de parler d'objets concrets. Or, l'objet concret lui-même n'est rien moins qu'une quantité d'air dérangée en un mouvement vibratoire périodique ou apériodique, mouvement vibratoire qui se met en résonance dans un autre corps, et excite une pure sensation. Même à ce niveau où l'on peut

361 Silvio Ferraz, « Sémiotique et musique : une approximation supplémentaire », In Applied Semiotics / Sémiotique appliquée 3 : 6/7 (1999) 33-44

229

concevoir l'implication d'un être humain - une oreille - l'objet-sonore n'existe pas encore. Il ne devient possible de délimiter un objet perçu comme unitaire qu'à partir de l'action d'un Signe, c'est-à-dire d'une médiation entre Objet et Sujet. Cet objet unitaire et intermédiaire se situe au seuil entre le champ du phénomène physique même et celui du phénomène sémiotique, au seuil entre la sensation de vibration et la perception de l'objet-sonore, au sens que lui donne André Schaeffer.

Dans la logique de la sensation, les rapports entre vibration-de-l `air et vibration-d `un-corps sont des relations efficientes, mais ils n'en sont pas dans une tentative de qualifier l'idée de son362. Un son composé d'une seule fréquence (un son "pur") est donc définie dans le monde physique par sa fréquence, son intensité et son évolution temporelle. Un son complexe est composé d'un ensemble de fréquences différentes que la perception fusionne en un seul "évènement». Pour les membres d'une même communauté, dès que certains types de sons sont émis véhiculant des messages, qui arrivent sous forme d'échos, tous sont instantanément informés et, tous accourent se rassembler vers le lieu indiqué dans le message.

9.6. Les instruments de musique et la symbolique animalière

Comme dans les figurines des jeux d'échec chez les Turcs de Tuva, en Sibérie méridional, les instruments de musique traditionnels au Congo, renferment aussi des sortes de symbolisme tel que le « symbolisme

362La définition physique de ce qu'est un son renvoie à une onde de pression engendrée par une action sur un matériau et transmise par un milieu (en général au final l'air) jusqu'à nos oreilles. L'oreille interne reçoit cette onde de pression et la transforme en influx nerveux, Anne Faure, Des sons aux mots, comment parle-t-on du timbre musical ?, Thèse pour l'obtention du grade de Docteur de l'EHESS ; Discipline Sciences cognitives, mention Psychologie Cognitive, Paris : EHESS, 2000, p.72.

230

animalier363». Un symbole est une chose que l'on peut associer en partie à une autre grâce à une ressemblance produite pas l'imagination, l'histoire ou la réalité. Une civilisation ou un grand nombre de personnes doivent lui donner le même sens pour pouvoir communiquer avec. Quelle symbolique peut-on faire sur les quelques instruments de musique ?

Nous allons les examiner au niveau des deux types de clans : majeurs et mineurs.

9.6.1. Les clans majeurs

9.6.1.1. Le lion

Puissant, souverain, le lion est le symbole scolaire et lumineux à l'extrême. Il est l'incarnation même du pouvoir, de la sagesse et de la justice mais son excès d'orgueil et son assurance en font parfois un tyran alors qu'il voudrait être un bon père, un bon souverain. Il peut donc être admirable aussi bien qu'insupportable, c'est entre ces deux pôles qu'oscille sa symbolique : de protecteur tyran. Symbole de justice, il est à ce titre garant du pouvoir matériel ou spirituel.

C'est à ce titre qu'il est considéré, selon la légende africaine comme étant le « roi de la forêt ». Chaque chef, « M'fumu » est la personne qui incarne l'autorité. De cette manière, si un chasseur vient à rencontrer un lion au cours de sa chasse, il lui est formellement interdit de tirer sur l'animal car il pourrait s'agir du totem du roi. Cet animal reflète donc la croyance totémique kongo. C'est dire que la symbolique du lion sur un

363 Aubin Françoise, « Etudes mongoles... sibériennes », In Etudes des sciences sociales des religions, n°68/2, 1989, p.239.

231

instrument de musique (tambour de bois) signifie qu'il s'agit de quelque chose de puissant. Il ne doit pas être laissé à la merci d'un aventurier.

9.6.1.2. La panthère

Cet animal symbolise la paix et la victoire sur le mal. La panthère symbolise également la ruse. Elle est considérée comme l'animal le plus féroce de nos savanes, incarne la puissance du mal sur le totem régulateur de la paix, de la justice et de l'unité dans la communauté. Le chef supérieur qui endosse les plus hautes responsabilités du village en tant qu'auxiliaire des dieux sur la terre, fait de la peau de la panthère son marche pied pendant que les notables le portent uniquement sur le dos pour magnifier et célébrer la paix, la fécondité, l'amour, l'opulence, la concorde. Dans ce contexte, l'instrument de musique, sculpté de cette façon, est aussi puissant que l'animal auquel il fait référence.

9.6.2. Les clans mineurs

9.6.2.1. Le serpent

Le serpent est tout d'abord l'opposé de l'homme, ils sont rivaux. Il est à la fois craint et vénéré. Enigmatique, secret, on ne peut prévoir ses décisions pas plus que ses métamorphoses, il se joue des sexes comme des contraintes : mâle il est rapide comme l'éclair, invisible qui jaillit d'une faille ou crevasse, une bouche d'ombre pour cracher la vie ou la mort ; femelle il se love, embrasse, il étreint, il étouffe, déglutit, digère et dort.

Le serpent est considéré comme le protecteur de l'enfant, les jumeaux sont aussi assimilés au serpent ; une idée très répandue est l'existence des enfants-serpents ; ils troubleraient leur mère par leur

232

caractère imprévisible, un appétit immodéré. Le serpent à double-tête est le symbole de la puissance royale. La couleuvre, par exemple, un serpent inoffensif qui symbolise la croissance ; quand on le voit, on la recouvre de terre. La vipère symbolise le sacré, c'est pourquoi la femme enceinte ne doit en consommer.

9.6.2.2. La chèvre

Animal rituel, la chèvre fait partie des éléments qui entrent dans la constitution de la dot d'une femme, car elle est le symbole de la richesse et le nombre de chèvres apportées est souvent relatif à la fortune du prétendant. On s'en sert également lors de sacrifices pour ôter la malédiction des individus du clan.

9.6.2.3. La tortue

Elle est associée aux eaux primordiales supportant la terre naissante. Les quatre pattes symbolisent les quatre pôles de la création, elle est le symbole de la stabilité, de la sagesse et de la justice. La tortue est de ce fait utilisée lors des procès coutumiers pour régler les différends et déclarer l'accusé coupable ou non.

Ces symboles sont essentiellement rattachés aux cultures et aux traditions antiques dans lesquelles puise le monde contemporain, qui reste lui aussi très chargé de symboles. La tortue a toujours été essentiellement un symbole de longévité et de sagesse. Cela tient bien sûr à sa très longue durée de vie et à sa nonchalance, mais aussi à sa discrétion face aux événements qui rythment le monde. La lenteur de ses déplacements la fait également figurer comme une digne représentante de la sagesse et de l'art d'avoir toute l'éternité devant soi.

233

Cette harpe complète comporte une caisse de résonnance en bois, peau tendue et collée. Manche en bois dont l'extrémité reproduit une tête. Les cordes nylon et clavettes de réglage en bois. Elle produit encore des sons, à vous de les transformer en musique.

9.7. Les instruments de musique et la symbolique humaine, la figuration humaine (anthropomorphe)

Les objets, les masques, les statuettes, les tabourets décorés comme les parures, mais aussi les danses et la musique attestent la propension des Kongo pour la fête. Cela contraste avec la routine et les difficultés de la vie quotidienne.

La nécessité de maitriser les forces de l'environnement (naturel et surnaturel), le milieu de la vie et celui des morts, s'est réifiée dans les signes très divers qui vont des rythmes et des formes aux volumes et aux couleurs, ces messages ésotériques masquant en fait l'angoisse existentielle de l'homme face au monde de l'au-delà L'art kongo, en ce sens, est donc l'expression symbolique la plus élaborée de la force vitale de l'homme. C'est dans ce contexte que quelques instruments de musique traditionnels ont été présentés sous la forme des personnes humaines.

Les trompes traversières, mpungi364, sont la preuve de l'existence des instruments de musique traditionnels à figuration humaine. Elles sont présentes au sein de l'ensemble des tambours (masikulu), qui comporte

364Batsikama Ba Mampouya ma Ndawla Raphael, L'Ancien Royaume du Congo et les bakongo : Ndona Béatrice et voici les jagas : séquences d'histoires populaires, Paris : L'Harmattan, 1999, p.233.Mpûngi, du verbe kongo Vûnga, Hunga, Ghûnga, Wunga qui veut dire souffler. Mais, il signifie aussi paître, garder, surveiller les animaux, il est l'emblème qui symbolise la Paix, la Liberté.

. Les trompes ont alors les

deux tamb ours masikulu et cinq trompes mpungi

ppellatio a n s suivantes : mbin da, ndungu.

Figure n°61 : In umaine3

h 65

struments

à figuration

 

9.8. Les instruments de musique et la symbolique des couleurs366

Comme dans le domaine des arts plastiques, les Kongo avaient excellé dans celui de la fabrication des instruments de musique traditionnels. Ils les embellissaient, les coloraient (tantôt en blanc , tantôt en rouge, tantôt en noir et c...) à l'aide de mélanges d'écorces et des plantes afin d'obtenir les couleurs désirées.

9.8.

1. La cou

leur rouge

de vie367. es temps

La coule ur est le s ymbole de gaieté , de triom phe, de

Le rouge est synonyme de sang, de la vie terrestre et transitoire, avec s

palabre,

st morte

sique, de

pouvoir

politique

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e mort ou non car

dition orale

de la musiq u e des co ul

sco, 2010,

, Paris : Une

, Aux sources « Symboliqu

le 1412,

n Associa t edieval/vo u

ion médiév a s-en-saurez-

onmedievale

1412.e-monsi

s-au-moyen-nsidéré, che

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musique de tra

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s ainsi que c he

la source de

même de la v

s », comme l e principe et

z tous les p e ie (....), écr it

rée dans les c ultes syncréti

uples dits « primitifs » Stanilslaw Swiderski, 65, p.839.

ques au Gabo n », Anthropo s, 1970, vol.

365 C. Duveille

p.125

66 Judicael,

3

ttp://associat h i

lus/symboli p q

67 On sait qu

3 e

et « archaïque

« La harpe sac

e du monde :

eurs au m

te.com/pages /l age.html

z les Africai n

santé phy

d'échec, de souffrance, de reconnaître si une personne e

ou guer rier, et a ussi ses p ériodes de guer re. Le r ouge per met de

234

lorsque

défunt arborent un

là d'un as

l

de rouge,

sé car la

sassinat,

es membres de la famille du cela signifie qu'il s'agissait rouge permet aussi d'absoudre un accu front traduit son innocence face à l'accusation.

e tenue de deuil marquée d'accident... ; le

présence du rouge sur son

Figure n°

Sources :

2010)

62 : Un tambour pe

Photo gallérie personnelle

ge

(Brazzaville,

int en rou

, l'activité. Pour

du mot

La couleur rouge (vive) représente l'incandescence les hébreux, il est employé dans une série d'expressions dérivées « dam » qui signifie sang. O r, dans la pensée hébraïque, l e sang signifie la Vie. Chez les Kongo, en général, et les Suundi, e n particulier, les exemples ne manquent pas pour illustrer cette idée à commencer par les nombreuse s cérémonies créées autour des premières règles, et les coutumes liées aux interdits concernant la femme en me nstruation368. Le

rouge symbolisait l'

amour rég

énérateur

.

235

Dans l'art chrétien, il symbolise le Saint Esprit sous la forme du feu, chargé du pouvoir de régénération et de purification des âmes. La couleur rouge du sang et de la flamme représente et le combat, e t Mars le dieu du combat. Trop vif, il reste le symbole du feu, mais d'un feu ravageur . Il est

signe de c

olère de Dieu.

368 La femme en menstruation dont parlent plusieurs cantiques des différentes sectes syncrétiques est la mère éternelle de toute l'humanité. Elle est la soeur de de Dieu ; elle est en même temps considérée comme la tante et la co-créatrice de l'homme, rapporte Stanilaw Swiderski, op ., cit.

236

9.8.2. La couleur orange

Active et tonifiante l'orange éveille les sens, avive les émotions et provoque une sensation de bien-être et de bonne humeur. Dans l'art religieux, il symbolise la révélation de l'Amour Universel. Le langage symbolique chrétien emploie le safran ou l'orangé pour représenter la divinité illuminant l'esprit des fidèles. Cette couleur éveille les sensations du corps. La priorité est alors donnée aux plaisirs de la table, au corps, à toutes les sensations fortes, l'orange est la couleur qui exprime notre rapport au plaisir et au désir. "

9.8.3. La couleur jaune

Le jaune symbolise la lumière spirituelle. Il évoque le miel. Isaïe nous dit : " Celui qui viendra pour repousser le mal et instaurer le bien mangera du miel et du beurre. Etant d'essence divine, le jaune d'or devient sur Terre l'attribut des princes et des rois qui proclament l'origine sacrée de leur pouvoir. Il est devenu l'attribut des divinités solaires, telles qu'Apollon, le dieu égyptien Râ et les dieux du soleil chez les Incas et les Aztèques.

Dans la mythologie égyptienne, la chaleur et les rayons pénétrant du soleil passaient pour être le sperme d'or du dieu Râ, il symbole de l'estime de soi, de la confiance en soi, de l'égo, de la puissance, du pouvoir.

9.5.4. La couleur verte

Le vert est le symbole des oeuvres accomplies pour la régénération de l'âme et par extension de la charité. C'est l'emblème de l'éternité et des renaissances, le scarabée égyptien, signifiait, aussi quand il était vert, la régénération nécessaire pour naître à la vie spirituelle. Le vert est le

symbole de l'équilibre, du renouveau,

ompassi c on, de l'harmonie. "

de l'Amour, de l' ac

ceptation

, de la

Figure n°

Sources :

2014)

63 : Deux

Gallérie

tambours

personn

peints en vert

elle (Brazzaville

,

 

Dan

bleu apai s

Junon, le chrétiens

chrétienne Vierge.

9.8.5. La co uleur ble u

s le lang age sacré

e, calme profondé ment. · Il

dieu et la déesse du Ciel chez les Romains

avaient choisi le Bleu pour symboliser Dieu l

d'aujourd'hui l'utilise le plus souvent comme

e

égyptien,

le bleu symbolise l'Immortalité. Le est un des attributs de Jupiter et de

. · Les premiers

e père. L'église la couleur de la

Le noir est l'

Occident.

9.8.6. La couleur noir

Le noir est à l'ori

antithèse

e

du blanc. Couleur

gine, le symbole de

du deuil en Afriqu

la fécondité, coul

eur des

e et en

237

Dans l'art religieux, il est coutumier de représenter la Vierge portant des vêtements de diverses nuances de bleu. Le Bleu en tant que symbole de l'eau, qui nettoie, nourrit et rafraîchit. Elle transforme les substances en les dissolvants. L'eau sert à sanctifier et à consacrer l a vie du baptisé, symbole de la communication, de l'expression de soi, de l a créativité, de la

ranquillit t é.

238

déesses de la fertilité et des vierges noires, c'est le représentant du monde souterrain. Le noir correspond au ventre de la terre où s'opère la régénération du monde. Souvent symbole d'obscurité et d'impureté, il devient alors celui de la non manifestation et de la virginité primordiale. Obscurité des origines, il précède la création dans toutes les religions.

Tout comme l'hiver appelle le printemps, le noir évoque la promesse d'une vie renouvelée.

9.8.7. La couleur blanche

Le blanc est la couleur de l'unité, de la pureté. Il est associé aux rites funéraires. Il est la couleur des morts et de revenants. Dans certaines régions369, ce serait une couleur masculine (sperme) tandis que le rouge (sang des règles) serait féminin.

Le blanc, c'est la couleur de la pureté marquant que rien n'a été accompli: tel est le sens initial de la blancheur de la fiancée qui va vers ses épousailles. Elle est le symbole de la vie, celui de la pureté370. Tout ce qui est blanc est par-dessus le marché « bienfaisant ».

C'est ainsi que les cérémonies de purification (la sortie de deuil, etc...) doivent être comprises en fonction de l'unité et de l'identité de la métaphysique. Le côté « éthique » de la purification par le kaolin, par exemple n'est qu'un aspect extérieur de ce rite. Il est « administré » sur les fissures de l'ordre social comme pour cicatriser les blessures. C'est ainsi

369 Louis Perrois, « Aspects de la sculpture traditionnelle du Gabon », In Anthropos : International Review of Ethnologye and Linguistics, 1968, vol.63/64.

370 Miklos Veto, « Unité et dualité de la conception du mal chez les Bantou orientaux », In Cahiers d'études africaines, 1962, vol.2, n°8, p.4.

239

que lors de la sortie de deuil, les veuves sont enduites de kaolin sur le visage.

Loin de dédaigner le symbolisme des choses primaires, il convient dorénavant d'en prescrire la pratique. Même quand il se borne à de simples définitions, le symbolisme ouvre à l'intelligence humaine maintes portes dans les couloirs du savoir.

Comme l'écrit Jean Chevalier371 les symboles et autres formules peuvent bien s'appliquer sur les instruments de musique traditionnels kongo tant du point de vue de la morphologie, de la tonologie que de l'iconographie et de l'esthétique. Ces instruments de musique s'identifient à leurs fabricants, car chaque « créateur-auteur » voulant imprimer sa griffe, sa signature sur l'oeuvre d'art. Ils sont remplissent ainsi, selon les contextes, les mêmes fonctions.

Hier, réservés aux seuls hommes, que reste-t-il de l'appropriation des instruments de musique pour les « non-initiés? »

371 Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, Dictionnaire des symboles, Robert Laffont - Jupiter, Paris, 1982

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