WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les critères du procès administratif equitable en droit positif camerounais

( Télécharger le fichier original )
par Jean Duclos Ngon a moulong
Universités de Yaoundé 2 soa - Master 2 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

i- L'allègement ou la suppression du contradictoire dans certaines procédures d'urgence

Le respect du caractère contradictoire de la procédure implique pour le juge administratif une gestion du temps, principalement au stade de l'instruction : temps d'informer, temps accordé pour répondre, temps d'organiser une éventuelle audience, etc467(*). Cette question se pose avec acuité chez le juge de l'urgence de sorte qu'un respect excessif du contradictoire peut constituer un obstacle à la célérité procédurale. De ce fait, afin de statuer d'urgence, le juge doit l'appliquer en l'adaptant à la particularité de la matière.Mais ce« sacrifice nécessaire »468(*) ne doit pas être considéré comme un prétexte pour moins de contradiction.Autrement dit, il doit rechercher un équilibre entre l'exigence du contradictoire et la rapidité dont requiert l'affaire pour ne pas différer les droits du requérant. C'est cet équilibre qui est prescrite par le code de justice administrative française, dont l'article L.5 dispose que : « l'instruction est contradictoire.Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence ».

Au Cameroun, La recherche de cet équilibre est également prévue ou non dans les textes et prend la forme soit d'un allègement dans les procédures accessoires de l'urgence, soit d'une exclusion dans certains cas du débat contradictoire.

À propos de l'allègement du contradictoire à l'instruction, il est, au regard des textes et de la pratique du juge, visible dans les procédures d'urgence accessoires, c'est-à-dire dans le sursis à exécution et le référé administratif. Elle se traduit non seulement par la possibilité d'échanger les pièces et mémoires, mais aussi par la reconnaissance au juge la possibilité de se prononcer dans un délai suffisamment raisonnable pour ne pas priver sa décision de tout effet.

En effet, relativement par exemple aux matières respectivement de sursis et deréféré, l'article 30 alinéa 2 de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 énonce que le Président du tribunal administratif peut, saisi d'une requête, ordonner le sursis à exécution, « après communication à la partie adverse » de la demande de sursis ; tandis que l'article 27 alinéa 2 de la même loi dispose que, la notification de la requête aux fins de référé « est immédiatement faite au défendeur éventuel, avec fixationd'un délai de réponse ne pouvant excéder cinq (5) jours», avant que le président du tribunal ou le magistrat qu'il délègue, ne puisse ordonner toutes mesures utiles. Ainsi libellé, il apparaît clairement que le législateur a prévu le contradictoire dans ces deux mesures d'urgence. Ceci est d'autant plus vrai même si le délai de cinq jours pour l'échange contradictoire apparaît être petit. En effet, cet état de chose ne saurait cependant interdire de regarder la procédure comme étant contradictoire: il est justifié par l'urgence et la nécessité d'accélérer la procédure. De même, il est vrai que l'on peut à priori penser que la contradiction est insuffisante, en ce qu'elle serait réduite à sa plus simple expression consistant dans la notification de la requête au défendeur, la réponse de celui-ci pouvant ne pas être communiquée au demandeur469(*). Une telle lecture serait cependant erronée car selon L'article 27 alinéa 1 de la loi n°2006/022, le président du tribunal peut «ordonner, en référé, toutes les mesures utiles ». Cette disposition laisse ouvertes toutes les possibilités d'instruction, notamment celle pour le président de prescrire la communication des pièces et mémoires, donc celui en défense.

Au demeurant, il apparaît qu'en ce qui concerne le référé administratif, le principe du contradictoire s'applique de deux manières dans la phase de l'instruction : d'une part, par une obligation de notification de la requête au défendeur, qui peut donner lieu à une réponse de celui-ci ; d'autre part, par une possibilité de communication des observations en défense et en réplique, laissée à la discrétion du président de tribunal. Réalisé de la sorte à l'instruction, la question est de savoir si le contradictoire est prolongé à l'audience. À ce propos, la réponse est négative car la convocation des parties à l'audience du référé n'est pas autorisée. En effet, l'article 28 de la loi précité dispose qu'il est statué par ordonnance de référé, c'est-à-dire que le juge décide seul, dans son cabinet, sans audience publique, de sorte que les parties qui ne sont pas convoquées et ne sont donc pas présentes, ne peuvent apporter contradictoirement de complément oral d'informations.

Contrairement au référé administratif, il apparaît dans la procédure de sursis que, les textes sont laconiques ou alors peu expressifs à propos de la durée et des modalités de déroulement de la procédure. Ce qui laisse sans doute un large pouvoir d'appréciation au juge, susceptible d'encourager une application inefficace de la logique du contradictoire pensée par le législateur. Cependant, il convient de préciser que, nonobstant cet état de chose, il est permis de penser que, n'importe comment, cette procédure demeure contradictoire. Même si la lecture des textes laisse croire qu'elle se réduit à une simple communication à sens unique, consistant dans la transmission de la requête au défendeur qui ne pourrait pas, en retour, produire ses observations en réponse. À ce propos, il convient de préciser qu'en réalité, le président de tribunal peut, s'il estime nécessaire, ordonner la communication des mémoires en défense et en réplique et des pièces de l'affaire. Aucun texte n'exclut d'ailleurs cette possibilité qui au contraire, « participe d'une bonne administration de la justice et est justifiée par la nécessité pour le juge de disposer des informations de nature à éclairer son jugement »470(*). Ceci étant dit, le contradictoire engagé dans ce cas ne peut se dérouler que dans les limites de temps impartis par le juge lui-même.

Ainsi, au-delà des indications textuelles au demeurantlaconiques et insuffisantes en matière de sursis et de référé, c'est « le juge qui fixe les limites réciproques et antagonistes du principe du contradictoire et de la rapidité de la procédure »471(*). L'analyse des ordonnancesrendues en matière de sursis et de référé par le juge administratif camerounaispermet de percevoir cela ; et donc au final, de dégager une limitation variée de la contradiction tant sur le plan matérielque sur le plan temporel.

La dérogation au contradictoire se traduit également par sa suppression dans d'autres matières. Elle répond au besoin de régler rapidement les contentieux soit inutiles, soit faciles à démêler, soit urgents. Cette suppression peut être provoquée ou normale c'est-à-dire prévue par les textes.

En effet, la suppression est provoquée lorsqu'il apparaît, « au vu de la requête introductive d'instance », que la solution de l'affaire est « d'ores et déjà certaine »472(*).Ainsi, le juge peut rejeter les requêtes dont il s'estime manifestement incompétent pour connaître ainsi que celles qui sont entachées d'une irrecevabilité évidente473(*). Les moyens ou les « exceptions » d'ordre public constituent l'un des champs d'application privilégiés de cette jurisprudence474(*). Il en est ainsi dans l'affaire UPC du 17 septembre 1992475(*).

La suppression de l'instruction contradictoire n'est pas toujours provoquée.Elle peut aussi résulter d'une disposition légale pour permettre au juge de statuer vite du fait du caractère urgent de l'affaire dont il est saisi. Ainsi, Il peut également juger sans instruction, lorsque l'affaire en cause en est dispensée par un texte spécial. Dans ce cas, la suppression de la contradiction est dite normale. La procédure instituée par l'article 13 al. 3 de la loi n°90/053 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association et l'article 8 al. 3 de la loi n°90/056 relative aux partis politiques, est celle d'ordonnance sur requête. Il résulte de ces articles qu'en matière de dissolution d'association et de refus de légalisation de partis politiques, le recours est formé sur simple requête devant le Président de la juridiction administrative qui statue par ordonnance. Ainsi, dans ces matières, l'instruction contradictoire est d'office exclue par les textes. Aussi, le juge statue sans avoir à avertir ou à informer la partie adverse. Il l'a clairement dit dans trois espèces rendues en matière de dissolution d'association le 26 septembre 1991 en ces termes476(*) : « Attendu que la procédure instituée par l'article 13 alinéa 3 de laloi n°90/053 du 19 décembre 1990 est celle de l'ordonnance sur requête, que parconséquent le Président de la Chambre Administrative se prononce sans avoirentendu la partie adverse et sans même que cette dernière ait été avertie ».

Par ailleurs, le juge a exclu la contradiction sans toutefois le dire, dans des espèces rendues en matière de refus de légalisation des partis politiques477(*), puisque l'Etat partie adverse, n'a ni été entendue ni même averti.

  • * 467EFFA (J-P), « Le principe du contradictoire dans la procédure administrative contentieuse au Cameroun », op. cit., p.261.

* 468RICHER (D). « Laprocédure contradictoire et le juge administratif de l'urgence », RFDA, 2001, p. 320.

* 469En effet, l'alinéa 2 de l'article 27 de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 prévoit que, le défendeur peut produire des observations en réponse, mais ne précisent pas qu'elles sont communiquées au demandeur. On peut ainsi envisager que cette transmission n'est pas obligatoire dans une procédure d'urgence, l'important étant d'informer le juge et de gagner du temps. En d'autres termes, le mémoire en défense peut ne pas être transmit au demandeur si le juge ne l'estime pas nécessaire, c'est-à-dire s'il dispose, avec les deux mémoires déjà produits, d'assez d'éléments pour statuer. C'est du reste ce que le Conseil d'Etat a jugé dans une situation semblable, en décidant que la communication au demandeur des observations en défense peut être refusée (voir CE, 29 mai 1981, M. Gubry, Req.02575). Il admet que l'urgence puisse dispenser le juge de communiquer la défense au demandeur (CE 29 mars 1985, Commune de Sisteron, req, n°62390), ou à l'inverse que l'urgence ne soit pas méconnue par la décision du juge de rapporter l'audience dans un cas où il estime nécessaire de communiquer la défense au demandeur (CE 29 octobre 1986, Société Locaver, req, n°74536). Note EFFA (J-P).

  • * 470EFFA (J-P), « Le principe du contradictoire dans la procédure administrative contentieuse au Cameroun », op. cit., p.264.

* 471GROS (M), « Le juge administratif, la procédure et le temps », RDP, 1999, p. 1718.

  • * 472GUIMDO DONGMO (B-R),Le Juge administratif camerounais et l'urgence : Recherches sur la place de l'urgence dans le contentieux administratif camerounais, op. cit., p.245.

* 473DUGRIP (O), op. cit., p 94.

* 474En l'espèce, le juge a eu à rappeler cette jurisprudence : « Attendu que les exceptionsd'ordre public peuvent être soulevées ou invoquées d'office, et en tout état de causepar le juge administratif ; Que peu importe que l'instance soit liée ou non parl'échange de mémoire entre les parties ; Que peu importe également le caractèrecontradictoire de l'instruction inquisitoriale du contentieux administratif, lorsqu'il y apossibilité de mettre un terme à l'instance sans continuation de l'instruction, s'ilapparaît au vu de la requête introductived'instance ou d'un certain niveau de l'instruction, que la solution est d'ores et déjà certaine ; Que cette procédure permet au Tribunal d'écarter les demandes manifestement irrecevables comme en l'espèce».

* 475CS/CA, jugement n°60/91/92 du 17 septembre 1992, affaire UPC contre Etat du Cameroun.

  • * 476Ordonnance n°19/O/PCA/CS du 26 septembre 1991, affaire O.C.D.H contre Etat du Cameroun ; ordonnance n°20/O/PCA/CS du 26 septembre 1991, affaire Kom Ambroise contre Etat du Cameroun ; ordonnance n°21/O/PCA/CS du 26 septembre 1991, affaire CAP-Liberté contre Etat du Cameroun. Voir GUIMDO DONGMO (B-R),Le Juge administratif camerounais et l'urgence : Recherches sur la place de l'urgence dans le contentieux administratif camerounais, op. cit., p.245.

* 477Dans ce sens, V ordonnance n°25/CS/PCA/91-92 du 18 septembre 1992, affaire RDR contre Etat du

Cameroun ; ordonnance n°26/CS/PCA/91-92 du 18 septembre 1992 , affaire PSLD contre Etat du Cameroun ; ordonnance n°28/CS/PCA/91-92 du 23 septembre 1992, affaire UNC contre Etat du Cameroun , ordonnance n°29/CS/PCA/91-92 du 23 septembre 1992, affaire FPS-PC contre Etat du Cameroun ; ordonnance n°32/CS/PCA/CS/91-2 du 30 septembre 1992, affaire Divine Kingdom people's party of Cameroon contre Etat du Cameroun ; ordonnance n°02/O/PCA/CS du 16 décembre 1992, affaire UPC - Manidem contre Etat du Cameroun. Voir GUIMDO DONGMO (B-R), op. cit., p. 246.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus