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Le devoir de diligence du transporteur maritime de marchandises en droit CEMAC

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par OUSMANOU HADIDJATOU
FSJP UNIVERSITE DE NGAOUNDERE - MASTER EN DROIT PRIVE GENERAL 2014
  

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PARAGRAPHE II- LA CONSECRATION DE LA RESPONSABILITE PERSONNELLE DU TRANSPORTEUR

Y a t-il un lien entre le caractère personnel du devoir de diligence et la faute nautique ? Puisquecette dernière n'a pas été consacrée par le CMM dans ses deux versions. D'uncôté nous avons une obligation de diligence qui est intrinsèque ou mêmeinhérenteà la personne du transporteuret de l'autre nous avons une situation qui exonère le transporteur de toute responsabilité dès lors que la défaillance dans la navigabilité du navire est causéepar ces préposés en cours du voyage. La consécration ducaractère personnel (A) explique la disparition du cas excepté (B) en ce que dorénavant, toute faute qui survient pour manquement au devoir de diligence quel que soit l'auteur engage la responsabilité du transporteur.

A- LE CARACTERE PERSONNEL DU DEVOIR DE DILIGENCE DU TRANSPORTEUR MARITIME

Il est certain que le transporteur fait preuve d'une certaine diligence en faisant visiter son navire par un organisme spécialisé telle qu'une société de classification. Il l'est également lorsqu'il s'arrange à ne recruter qu'un personnel éminemment qualifié pour participer au déplacement des marchandises. Cette mesure à elle seule est-elle à même de suffire pour l'exonérer lorsqu'il survient un dommage du fait des autres intervenants? La question mérite d'être posée et à ce propos, la jurisprudence est constante pour relever que le fait par exemple pour un transporteur de contracter avec une société de classification éminente comme la Lloyd n'est pas une preuve suffisante permettant d'affirmer que le transporteur a exercé toute la diligence requise.

Il a été jugé, en effet, que si l'innavigabilité est due à une fissure de la coque, le transporteur ne saurait se retrancher derrière des certificats de navigabilité établis par un organisme même réputé. Il doit nécessairement démontrer que cet organisme a bien accompli son devoir de vérification, particulièrement par un examen scrupuleux de la coque. Ainsi, considérer que l'obligation de faire diligence est une obligation personnelle du transporteur revient à dire que celui-ci reste responsable des fautes commises par le préposé de l'organisme chargé de la vérification.

Dans le même sens, l'arrêt « MUNCASTER CASTLE55(*) » précédemment cité est aussi marqué par l'idée que la diligence due par le transporteur pour mettre le navire en bon état de navigabilité est personnelle. Dans cette affaire, et selon P.BONASSIES, « les juges ont constaté que la jurisprudence était à peu près unanime à décider que le transporteur était responsable non seulement lorsqu'il n'avait pas exercé toute la diligence raisonnable pour mettre le navire en bon état de navigabilité, mais aussi quand l'absence de diligence était le fait d'une personne à qui il a confié la tâche ».

La jurisprudence a eu l'occasion d'affirmer le caractère personnel de
l'obligation de diligence56(*), ce qui implique que le transporteur ne peut, en aucune façon, la déléguer. Il est tenu des défauts du navire, quand bien même ces derniers sont imputables à l'intervention d'une tierce personne, d'un préposé ou d'un sous-traitant57(*). La Cour de cassation a eu l'occasion d'affirmer cette solution en retenant la responsabilité du transporteur maritime pour des dommages causés par des voies d'eau alors même que le navire sortait du chantier naval58(*). La situation de la partie faible qu'est le chargeur s'en trouve favorisée d'autant plus que les récentes révisions ici et par ailleurs ont fait disparaître le cas excepté de la faute nautique.

B- LA DISPARITION DU CAS EXCEPTE DE LA FAUTE NAUTIQUE

Il y a lieu de rappeler que l'innavigabilité du navire renvoie nécessairement et comme susmentionnée à un tryptique : l'innavigabilité commerciale, administrative et nautique.

Sous la législation internationale antérieure notamment celles issues des Règles de Bruxelles de 1924, le transporteur pouvait s'exonérer de sa responsabilité en invoquant la faute nautique qui est décrite comme : « des actes, négligence ou défaut du capitaine, marin, pilote, ou des préposés du transporteur, dans la navigation ou dans l'administration du navire»59(*). Il s'agissait d'une véritable calamité pour les chargeurs qui ont déployé leurs énergies aux fins de faire disparaître cette cause d'exonération du transporteur pour une faute avérée60(*). Cette disparition fut initiée avec les Règles de Hambourg et confirmée par les Règles de Rotterdam qui malgré la résurgence des cas exceptés disparus sous l'égide de la législation précédente61(*), n'ont pas osé le réintroduire.

Le CMM a fait sienne les innovations aussi bien positives que négatives des « Règles de Rotterdam ». Déjà avec l'ancienne version, le cas excepté de la faute nautique n'y a jamais vu le jour. Refus confirmé par la version révisée62(*). Quoi qu'il en soit cette institution sous l'égide des Règles de Bruxelles de 1924 toujours en vigueur dans certains Etats a été fixée par la jurisprudence.

L'article 4 alinéa 2 a de la Convention de Bruxelles entérinant ainsi les dispositions contractuelles du HarterAct, exonère le transporteur et le navire des actes, négligences ou défauts qui ne lui sont pas imputables causés par le capitaine ou plus globalement les préposés du transporteur. Cette règle, il faut le rappeler va à l'encontre du principe général ou de droit commun de la responsabilité du commettant pour les faits de ses préposés. Pour la jurisprudence actuelle, ce cas excepté de la faute nautique ne saurait concerner la navigabilité commerciale63(*) c'est-à-dire celles commises dans l'embarquement et le débarquement, l'arrimage, la manutention, et la conservation des marchandises. Aux fautes commises « in the navigation of the ship (faute nautique), l'on oppose la faute commises par les préposés «in the management of the cargo (faute commerciale)», cette dernière se distinguant de la faute « in the management of the ship (faute dans l'administration du navire) »64(*).

La faute de navigation ou la faute « in the navigation of the ship » est la faute dans la conduite du navire à la mer, la faute dans la lecture des cartes, dans le respect des règles de priorité de la mer, dans les fausses manoeuvres lors de l'accostage des navires65(*).

Enfin la faute dans l'administration du navire doit nécessairement être distinguée de la faute dans l'administration de la cargaison. Ici, c'est le critère de la destination de l'acte fautif qui est privilégié. Si l'acte fautif intéresse le navire, c'est une faute nautique, si ça intéresse la cargaison, c'est une faute commerciale. Par ailleurs, un autre critère de distinction est parfois pris en compte, celui de la sécurité du navire. L'acte fautif met-il en danger la sécurité du navire, faute nautique, sinon il s'agit d'une faute commercial. Mais la complexité de ces aspects amène généralement la jurisprudence à ne pas qualifier la faute nautique, mais plutôt la faute commerciale afin de refuser d'exonérer le transporteur66(*). C'est généralement le cas lorsque la faute d'arrimage est concernée, celui-ci visant à sécuriser aussi bien le navire que la cargaison. Ces difficulté a rendu sombre l'avenir de la faute nautique, jamais véritablement acceptée, toute chose ayant préjugé de sa disparition dans les conventions postérieures.

Pour conclure sur la matérialité de la due diligence, il sied de rappeler que ce dernier a un contenu et un caractère précis. D'une part, il s'agit d'un standard juridique qui permet d'appréhender le comportement du transporteur. A ce propos, il ne faudrait pas penser qu'il s'agit d'une subjectivation de la responsabilité du transporteur. Loin de là, il s'agit plutôt de relever qu'il s'est agi pour le législateur d'essayer d'appréhender l'attitude du transporteur ou de ses préposés et permettre que soit réintroduite la responsabilité de celui-ci qui a tendance à s'esquiver à travers les cas exceptés.

Par ailleurs, il n'est pas non plus inutile de rappeler le caractère personnel de cette obligation de diligence. Et ainsi, malgré que ce soit plutôt son préposé voire un auxiliaire ou un contractant qui ait agi en ses lieux et place, la responsabilité du transporteur demeure.

CONCLUSION PARTIELLE

La responsabilité du transporteur s'en allant grandissante, il sied de rappeler que celui-ci est astreint à une obligation de déplacement et de sécurité de résultat. La simple preuve du dommage subi par les intérêts cargaisons étant de nature à établir sa responsabilité. Le transporteur pour être exonéré devra établir que le dommage provient d'un cas excepté et qu'il n'a commis aucune faute. Mais il est admis suite aux précédents développements que le comportement du transporteur est également pris en compte pour permettre au chargeur de réintroduire sa responsabilité à travers la preuve de sa faute notamment son absence de « due diligence ». Le contenu de la diligence du transporteur va de la prise en charge à la livraison de la marchandise. Il se doit d'apporter des soins aussi bien au navire qu'à la cargaison. Cette obligation de diligence bien que n'étant pas un « absolute diligence » est une diligence de bon père de famille clairement renforcée. Par ailleurs, elle est liée à la personne du transporteur et ne saurait s'accommoder de toute volonté de la part de ce dernier de faire ressurgir le cas excepté de la faute nautique.

L'on pourrait dire qu'il en résulte une responsabilité du transporteur, mais comment est mise en oeuvre cette responsabilité ?

* 55House of lords, 7 déc. 1961, aff.duMuncaster Castle : DMF1963, p. 246 note P. Bonassies: la Chambre des Lords affirme expressément que la diligence raisonnable incombant au transporteur maritime pour mettre le navire en état de navigabilité ne doit pas se déléguer. L'obligation de navigabilité doit certainement être qualifiée d'obligation essentielle du transporteur maritime, obligation qui ne peut être éliminée du contrat.

* 56Cass. com.,20 févr. 1962 : DMF 1962, p. 335, note R. Rodière.

* 57V. CAAix-en-Provence, 8 nov. 1988, navire Hakkp-Minerva : DMF 1990, somm. p. 704 : dans cette affaire, le transporteur avait livré une cargaison d'huile polluée par les traces laissées par un produit chimique transporté lors d'un précédent voyage, en tirant argument de ce que le chargeur avait visité les cuves avant l'embarquement de l'huile.

* 58Cass. 20 févr. 1962 : DMF 1962, p. 335, note R. Rodière.

* 59WEI HOU, La liberté contractuelle en droit des transports maritimes de marchandises : l'exemple du contrat de volume soumis aux règles de Rotterdam, Thèse, Université Paul Cézanne, Aix-Marseille III, Ecole Doctorale Sciences Juridiques et Politiques, Faculté de Droit et de Science Politique, 2010, p. 54.

* 60 MOLFESSIS (N.), « Requiem pour la faute nautique », Etudes de droit maritime à l'aube du 21ème siècle, Mélanges offerts à BONASSIES Pierre, Ed. Moreux, 2001.

* 61 Règles de Hambourg

* 62 L'article 573 al. 2 CMM dispose : « Le transporteur est responsable, en ce qui concerne le transport exécuté par le transporteur substitué, des actes et omissions du transporteur substitué, ainsi que de ses préposés et mandataires agissant dans l'exercice de leurs fonctions ». Déjà l'article 372 annonçait le ton en prescrivant que : « L'armateur répond de ses préposés maritimes dans les termes du droit commun, sauf la limitation de responsabilité définie par le livre II Titre V du présent Code ».

* 63 Il y a lieu de rappeler que dans la version anglaise des Règles de Bruxelles, il est clairement disposé que l'irresponsabilité du transporteur concerne la faute « in the navigation or the management » of the ship ».

* 64 RODIERE (R.) et Du PONTAVICE (E.), Droit maritime, Dalloz 12ème Ed., 1997, p. 345, n° 367.

* 65 BONASSIES (P.) et SCAPEL (C.), op. cit., p. 752, n° 1097.

* 66 Bordeaux 31 mai 2005, DMF. 2005. 839 ; AUDE, Arrêt du 26 février 1991, DMF 1991.358, DMF 1992.158, Obs. BONASSIES.

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