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Le juge de l'excès de pouvoir au Congo

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par Edson Wencelah TONI KOUMBA
Ecole Nationale dà¢â‚¬â„¢Administration et de Magistrature - Diplôme de là¢â‚¬â„¢ENAM (Option Magistrature, cycle Supérieur)  2011
  

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B)- Le modèle congolais du contrôle de la constitutionnalité des actes administratifs.

En remplaçant la formule trop timorée d'une fonction constitutionnelle conférée à la chambre administrative de la Cour Suprême104(*) par la création d'une véritable juridiction constitutionnelle à part entière, institutionnellement indépendante des rouages de la justice  ordinaire, le constituant du 20 janvier 2002 a fait une avancée considérable vers l'encrage de l'Etat de droit.

Nonobstant ce bond vers un véritable Etat de droit, il ne s'est pas inscrit dans le droit fil de ses homologues béninois et gabonais. Si le préambule de la constitution du 15 mars 1992 avait ouvert une brèche en ce sens (1), celle du 20 janvier 2002 a opté pour une autre démarche en instituant le recours en inconstitutionnalité (2).

1-Les jalons d'un contentieux de la constitutionnalité des actes administratifs posés par le Préambule de la Constitution du 15 mars 1992.

Le mouvement démocratique issu du libéralisme politique au Congo a donné naissance à une première constitution, celle du 15 mars 1992 qui en introduisant le concept de Ó « pouvoir judiciaire » a entrainé deux conséquences dans le domaine du contrôle juridictionnel des actes de l'administration.

D'abord, si sous le régime monopartite, « l'annulation d'une décision illégale prise par l'administration contre le citoyen [apparaissait] comme une gageur, un acte quasi exceptionnel de bravoure du juge »105(*), avec l'avènement de la constitution de 1992, le juge semble plus hardi et plus déterminé. En ce sens, le Président ILOKI estime que l'introduction de cette constitution « a semblé libéré les esprits tant du côté de l'administration que de celui des juges (...). Le contrôle de la légalité des actes de l'administration est en effet devenu plus audacieux »106(*).

Mais, ce qui est plus remarquable, c'est que la constitution du 15 mars 1992 a dans son Préambule inséré au milieu d'une litanie des textes internationaux relatifs aux droits et libertés fondamentaux la stipulation suivante :

« Proclamons (...) le droit de tout citoyen de saisir le Conseil constitutionnel aux fins d'annulation de toute loi ou tout acte contraire à la présente Constitution ».

Par cette disposition, la constitution congolaise du 15 mars 1992 avait ouvert la voie à tout un contentieux, celui du contrôle de la constitutionnalité des actes administratifs et en confiait la connaissance au juge constitutionnel. Il répondait ainsi à l'épineuse question que se posait le Président de la chambre administrative de la Cour Suprême du Benin : « lorsqu'aucune loi ne s'interpose entre l'acte attaqué et la constitution, quel est le juge compétent pour en connaitre la conformité ? »107(*).

Pour le constituant de 1992, l'annulation d'un tel acte relève non pas du juge administratif suprême mais plutôt du « Conseil constitutionnel sur saisine du citoyen congolais ». Il fait donc du Conseil constitutionnel juge de l'excès de pouvoir par dérogation.

La constitution du 20 janvier 2002 n'a pas repris cette disposition, elle a plutôt institué un recours en inconstitutionnalité et dans ce recours, le juge constitutionnel joue un rôle indirect dans l'annulation des actes administratifs contraires à la constitution.

2- L'option d'un rôle indirect dans l'annulation des actes Ó l'exception d'inconstitutionnalité.

Ni la Constitution du 20 janvier 2002, ni même l'Acte fondamental du 24 octobre 1997 n'ont repris la disposition du Préambule de la Constitution du 15 mars 1992 relative au contrôle de la conformité des actes administratifs à la Constitution.

Ce silence du nouveau constituant de 2002 soulève un problème dont la résolution mérite une analyse.

Lorsqu'un acte administratif pris en application d'une loi est attaqué pour inconstitutionnalité, quel est dans ce cas le juge compétent pour statuer sur sa conformité à la constitution?

En France, pendant longtemps le Conseil d'Etat s'est déclaré incompétent pour connaître de la constitutionnalité d'un tel acte. En effet, dans sa jurisprudence Arrighi de 1936, il crée la théorie dite de la loi-écran et affirme que Ó « Le juge administratif est seulement serviteur de la loi et non son juge »

de ce fait, pour lui Ó «annuler un acte administratif pour inconstitutionnalité reviendrait à dire que la loi sur le fondement de laquelle il est pris est inconstitutionnelle. Or, le juge administratif n'a pas à se prononcer sur la constitutionnalité de la loi »108(*).

Mais, cette position du juge administratif français n'épuise nullement la question car s'il se déclare incompétent, alors de qui relève cette compétence ? Serait-ce du juge constitutionnel garant de la légalité constitutionnelle ?

Ce n'est qu'en 2008 que le législateur français en instituant le principe d'inconstitutionnalité devant les juridictions administratives a apporté une solution à cette question. En effet, l'article 61-1 de la constitution française issue des modifications intervenues dans le cadre de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 dispose Ó « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la constitution garantis, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ».

Or, cette solution, la Constitution congolaise de 2002 l'avait déjà prévue dans son article 149 qui dispose que Ó « Tout particulier peut soit directement, soit par la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité invoquée devant une juridiction dans une affaire qui le concerne, saisir la Cour constitutionnelle sur la constitutionnalité des lois. En cas d'exception d'inconstitutionnalité, la juridiction saisie sursoit à statuer...».

Cette disposition a été reprécisée par les articles 43 à 52 de la loi organique du 17 janvier 2003 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

Ainsi, grâce à la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité, le particulier peut attaquer pour inconstitutionnalité une loi faisant écran entre l'acte administratif en cause et la Constitution. Fort de la décision qu'aura rendu le juge constitutionnel, il pourra alors engager une procédure devant le juge administratif (qui aurai au préalable sursis à statuer) au fin d'annulation de l'acte contesté.

C'est donc pour dire, qu'en constatant l'inconstitutionnalité du « texte ou de l'une de ses dispositions inséparables de l'ensemble du texte » et en annulant le texte inconstitutionnel, le juge constitutionnel ouvre la voie au juge de l'excès de pouvoir qui entérinant la position du juge constitutionnel, annulera l'acte pris sur

le fondement d'une loi déclarée inconstitutionnelle. Il apparaît donc que le juge constitutionnel intervient indirectement dans l'annulation d'un tel acte administratif.

Mais, ce cas de figure ne s'applique que lorsqu'une loi fait écran entre l'acte administratif et la disposition constitutionnelle. Cependant, la Constitution du 20 janvier 2002 reste muette quant à la question de savoir quel juge serait compétent pour annuler un acte portant directement atteinte à la Constitution.

De plus en plus soucieux de l'édification d'un Etat de droit, le constituant congolais a doté le juge constitutionnel d'une multitude de compétences et cela, dans divers domaines. C'est ainsi qu'il est considéré comme un juge électoral chargé de veiller à la régularité  des élections présidentielle, législative, sénatoriale et référendaire109(*). Mais à ce titre, peut-il être amené à annuler des actes administratifs ?

* 104 Article 73 de l'Acte fondamental du 24 octobre 1997

* 105 ILOKI (A) op cit p.7

* 106 ILOKI (A) idem

* 107 Compte rendue du 15ème Colloque des Hautes juridictions administratives. Montréal janvier 2009 p.11

* 108 CE 14 novembre 1936, Arrighi Rec. p.25

* 109Article 110 de la loi n°9-2001 du 10 décembre 2001 portant loi électorale

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