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Formation en informatique. Ouverture sociale et sexisme. Le cas Epitech.

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par Clémentine Pirlot
Université Paris VII Diderot - Master II Sociologie et Anthropologie option genre et developpement 2013
  

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Chapitre VII : Quelques perspectives de transformation

1. Donner envie aux filles de venir à Epitech

2. Lutter contre la culture hostile aux femmes

3. Initiatives existantes pour renforcer le nombre de femmes dans les sciences

4. Le sexisme dans les entreprises informatiques

4.1 Réaction à la dénonciation du sexisme

4.2 Actions des entreprises pour une meilleure représentation des femmes Conclusion

Conclusion

Bibliographie

Annexes:

Résultats du questionnaire

Description des personnes rencontrées

Grille d'entretien

Tableau synthétique des personnes rencontrées

Annexe disponible : entretiens retranscrits

1

Avant propos : La règle de grammaire de proximité a été utilisée ici pour les accords,
plutôt que celle qui veut que le masculin l'emporte.

Introduction

Le milieu de l'informatique est, depuis quelques décennies, un milieu en plein essor, où il fait bon travailler. Les recrutements, en hausse depuis les années 1990, se sont stabilisés pour la première fois depuis le début de l'année 20131. Les formations d'informatique, dispensées par les seules écoles d'ingénieur.e jusqu'aux années 1990, sont maintenant nombreuses et variées, à l'université ou dans des écoles privées. Les femmes, aujourd'hui très nombreuses à faire des études supérieures, sont néanmoins toujours cantonnées dans les mêmes domaines : « La progression spectaculaire des scolarités féminines n'a pas ébranlé les lois de la reproduction sociale, puisque les filles continuent, grosso modo, à s'orienter vers les mêmes filières que les générations précédentes » (Couppié et Epiphane, 2006). Elles sont très peu représentées dans le milieu de l'informatique en particulier, car bien qu'elles représentent, en 2012, en France, 33% des diplômé.e.s en Sciences et Technologies, elles sont moins de 10% des diplômé.e.s en sciences et technologies de l'information et de la communication2. L'informatique est l'un des secteurs les moins féminisés en France, avec seulement 25% de femmes y travaillant3. Nous avons vu dans le mémoire de Master 1 les mécanismes de mise à l'écart des femmes dès le plus jeune âge, qui consistaient en une association entre mathématiques et informatique, un mythe du « hacker » comme étant un jeune homme, et une culture sexiste dans le monde du travail. Nous avons également exploré le thème de la mobilité sociale, notion complexe et multidimensionnelle. Nous nous attacherons ici à analyser l'ouverture sociale dans une école d'informatique française et l'incidence de celle-ci sur la proportion de femmes.

Présentation de l'enquête : contextualisation et problématique

L'École pour l'informatique et les nouvelles technologies (Epitech) est un établissement d'enseignement privé qui propose une formation pratique en cinq ans, et qui revendique avoir « 20% du marché des étudiants BAC + 5 en informatique en France »4. Jusqu'aux années 2000, les meilleurs postes et salaires dans

1 http://www.rtl.fr/actualites/transports/article/emploi-le-secteur-informatique-recrute-toujours-7760657931 2 http://www.cnisf.org/upload/pdf/mutationnelles_2012vf.pdf

3 http://lecercle.lesechos.fr/entrepreneur/social-rh/221168497/role-femmes-linformatique

4 https://return.epitech.eu/?p=861 portail des étudiant.e.s, fait par des étudiant.e.s. Discussion autour de la question du prix de l'école

2

l'informatique étaient réservés aux étudiant.e.s des écoles d'ingénieur.e.s mais la création de nouvelles écoles comme Epitech, non certifiée ingénieur.e permettant d'accéder à des postes et salaires similaires semble avoir amorcé une ouverture sociale dans le milieu de l'informatique. L'élitisme (concours d'entrée et classes préparatoires) n'est pas de mise dans cette école, qui accepte tous les profils et tous les bacs. Epitech propose une pédagogie particulière qui bouleverse la notion traditionnelle de temps scolaire. Les heures sont à rallonge, les « piscines », premières semaines intensives de l'année, ayant lieu de 8h à 23h, et l'école étant ouverte 24h/24. Les vacances scolaires n'existent pas, et pour les personnes qui entrent en première année, les cours ont lieu jusqu'en juillet et un stage doit être effectué entre juillet et décembre. Il doit être d'au moins quatre mois, les élèves ayant la possibilité de prendre deux mois avant ou après le stage. Les cours ont ensuite lieu jusqu'en juillet, puis ne s'arrêtent qu'en août pour reprendre en septembre. Epitech a été créée en 1999, par un ancien élève de l'école Epita, école certifiée ingénieur.e. Depuis, Epitech a ouvert des établissements dans onze villes de France, les étudiant.e.s devant cependant obligatoirement effectuer la cinquième année à Paris. Le nombre d'élèves varie selon les promotions et les villes, l'école principale étant celle de Paris qui accueille plusieurs centaines de personnes chaque année.

D'autres écoles du même type qu'Epitech (écoles d'informatique non certifiées ingénieur.e) ont vu le jour, peu d'écoles existaient avant les années 2000 : Sup info, créée en 1965, et l'ESGI , créée en 1983, puis, de nouvelles écoles ont vu le jour, comme par exemple l'ENSIA, créée en 2000, l'Exia créée en 2004 et Intech info créée en 2002.

Le choix d'Epitech de ne pas être certifiée permet une autonomie plus grande et une pédagogie différente, où la pratique prime sur la théorie et où l'indépendance est indispensable pour réussir sa scolarité. Epitech accepte toutes les personnes ayant obtenu un bac (général, technologique ou professionnel), quel que soit son âge et quelles que soient ses notes. Seule la motivation est prise en compte, et Epitech, dans sa communication, insiste sur la possibilité pour tou.te.s d'entrer et d'obtenir un diplôme d'informatique, amenant à un statut de cadre et à une rémunération d'environ 36 000€ par an. Mais, comme le rappelle Marie Duru-Bellat : « la sociologie de l'éducation des années soixante dix qui a amplement montré qu'il ne suffisait pas d'élargir l'accès pour égaliser véritablement les chances scolaires » (Duru-Bellat, 2007). Le refus de l'élitisme prôné par Epitech permet-il une réelle ouverture sociale ? C'est la question à laquelle nous tenterons de répondre ici, à travers une analyse de la mobilité sociale, des parcours scolaires et des aspirations de quinze étudiant.e.s d'Epitech.

Le nombre de filles étudiant à Epitech oscille entre 2 et 7% selon les promotions. Les chiffres sexués pour les autres écoles ne sont pas très faciles à trouver et ne sont jamais affichés sur leurs sites internet. A titre de comparaison, l'administration de l'ESGI, contactée par email, annonce environ 30% de filles. Les autres écoles non certifiées n'ayant pas répondu aux sollicitations, nous ne disposons pas d'autres chiffres. Si l'on regarde du côté des écoles d'ingénieur.e, on trouve, pour toutes les écoles 15,8% de filles en 2011-2012,

3

d'après le Ministère de l'Enseignement Supérieur5. Epita, école du même groupe qu'Epitech annonce environ 10% (d'après l'administration), tandis que L'Ingesup, autre école d'ingénieur.e annonce entre 10 à 15 % d'étudiantes dans ses effectifs bordelais6. D'après le palmarès 2011-2012 des écoles d'ingénieur.e7, la moyenne est de 27% de filles, les chiffres allant, selon les écoles, de 0 à 80%, avec seulement 10 écoles sur les 188 à avoir un taux en dessous de 10%..

Le faible nombre de filles à Epitech en fait donc une minorité statistique, qu'il est très intéressant d'étudier, comme le dit Christian Baudelot, dans la préface du livre de Michèle Ferrand, Françoise Imbert et Catherine Marry, L'excellence scolaire : une affaire de famille : « les minorités statistiques les plus improbables -ici les normaliennes scientifiques- recèlent sous une forme concentrée des trésors de propriétés sociales qui informent davantage sur la structure du système, la logique de son fonctionnement, les lois de ses transformations et les possibilités de les contourner que la hiérarchie bien ordonnée des variables qui définissent la population des normaliens normaux. » La minorité de normaliennes étudiée dans le livre représente tout de même 25% des étudiant.e.s, ce qui est beaucoup plus qu'à Epitech. Une telle minorité (entre 2 et 7%) ne peut pas être dû à des choix personnels ou au hasard, il convient donc d'identifier les causes de cette sous représentation et de comprendre comment une école qui prône l'ouverture sociale affiche un nombre de filles si faible. Nous émettrons l'hypothèse que si une relative ouverture sociale est permise par Epitech grâce à un refus de l'élitisme propre aux écoles d'ingénieur.e, cette ouverture s'accompagne d'une forte culture d'exclusion des femmes, réservant ainsi l'ouverture sociale aux seuls hommes.

Méthodologie

La méthode choisie est une approche qualitative, à travers quinze entretiens semi-directifs (grille en Annexe), sept filles et huit garçons. Les premier.e.s enquêté.e.s ont été contacté.e.s par email par l'intermédiaire d'une connaissance à Epitech, puis chaque enquêté.e m'a ensuite fourni les contacts d'autres personnes. Une sélection a été faite selon le sexe, la ville et la promotion, afin de recueillir des expériences différentes. Tou.te.s les étudiant.e.s ayant participé aux entretiens avaient entre 18 et 26 ans, la relation qui s'est instaurée était donc facilitée par nos âges très proches. Je me suis présentée comme une étudiante en sociologie à l'université Paris VII, entreprenant des recherches sur l'informatique et sur Epitech, afin de ne pas orienter les réponses enquêté.e.s. Les entretiens ont eu lieu dans des cafés, autour d'un verre, ce qui a mis à l'aise les enquêté.e.s. Le tutoiement s'est naturellement imposé avec chacun.e, du fait de la proximité d'âge qui rendait un vouvoiement étrange. Un questionnaire en ligne a également été mis en place afin de recueillir les parcours scolaires et

5 http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/2012/06/4/DEPP-RERS-2012_224064.pdf 6 http://www.sudouest.fr/2012/03/29/la-fille-geek-a-de-l-avenir-672570-2780.php 7 http://www.dimension-ingenieur.com/classement-2012-ecoles-ingenieurs-les-plus-feminisees/3/3/0/675/

4

profession des parents des étudiant.e.s d'Epitech. Ce questionnaire anonyme a été diffusé sur les réseaux sociaux et par email aux étudiant.e.s d'Epitech, qui ont été 109 à répondre.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon