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Formation en informatique. Ouverture sociale et sexisme. Le cas Epitech.

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par Clémentine Pirlot
Université Paris VII Diderot - Master II Sociologie et Anthropologie option genre et developpement 2013
  

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Partie 1 : Ouverture Sociale

Chapitre I

Ouverture et mobilité sociale

La mobilité sociale qui nous intéresse ici n'est pas la mobilité intra-générationnelle, mais celle qui se fait sur plusieurs générations, donc inter-générationnelle. La notion de mobilité sociale est à distinguer du sentiment de mobilité, qui est la manière dont les personnes vivent et expliquent leurs trajectoires sociales. La mobilité sociale étudiée ici prendra en compte les multiples dimensions qui la composent : le statut socioprofessionnel, le niveau de revenu, mais également la migration qui influe sur les conditions de vie. Notre analyse de la mobilité sociale chez les enquêté.e.s s'appuiera sur leur parcours social et leur perception de la mobilité.

1. L'ouverture sociale permise par Epitech

1.1 La certification ingénieur.e

« L'appellation d'ingénieur recouvre en France deux grandes réalités qui coexistent sans se confondre. D'une part, les ingénieurs sont des personnes exerçant une activité professionnelle demandant plutôt une compétence technique. Mais on parle aussi d'ingénieurs commerciaux, en référence au statut social de l'ingénieur, plus qu'au contenu de son activité. Ce même vocable caractérise aussi les personnes ayant obtenu un titre d'ingénieur, titre qui sanctionne (aujourd'hui) une formation à Bac + 5, dans les écoles d'ingénieurs. En France, seul le titre d'ingénieur diplômé est protégé, l'exercice de la profession d'ingénieur n'est pas réglementé »

Cette définition, extraite du « Rapport du Women`s Forum dans le cadre du projet SciTechGirl » (2008), montre que l'appellation « ingénieur.e » concerne principalement un diplôme, mais n'est pas nécessaire pour exercer la profession d'ingénieur.e. La définition de la Commission des Titres d'Ingénieurs, CTI, précise bien la nature intrinsèquement évolutive de cette notion: «Le métier de base de l'ingénieur consiste à poser et résoudre de manière toujours plus performante des problèmes souvent complexes, liés à la conception, à la

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réalisation et à la mise en oeuvre, au sein d'une organisation compétitive, de produits, de systèmes ou de services, éventuellement à leur financement et à leur commercialisation. À ce titre, un ingénieur doit posséder un ensemble de savoirs techniques, économiques, sociaux et humains, reposant sur une solide culture scientifique.» Les écoles d'ingénieur.e.s ont donc l'obligation de dispenser des cours généraux de sciences, mais les écoles ne pouvant pas apposer la notion d'ingénieur.e sur leurs diplômes car ne remplissant pas les critères, verront également leurs étudiant.e.s employées en tant qu' « ingénieur.e ».

Sur les sites internet d'Epita (école certifiée ingénieur.e) et d'Epitech (école du même groupe, non certifiée par la CTI), les chiffres de salaire, et d'insertion des ancien.ne.s étudiant.e.s annoncés semblent être les mêmes. Pour la promotion 2010, 91% des élèves d'Epita et 96% des élèves d'Epitech sont aujourd'hui de salarié.e.s en CDI et le salaire moyen annuel des élèves de la promotion 2010 est de 37 000€ pour Epita et 37 500€ pour Epitech (voire 40 530€ si l'on ajoute les avantages), ce qui paraît illogique étant donné qu'Epita, certifiée ingénieur.e est associée à un élitisme (concours d'entrée, diplôme d'ingénieur.e). Pourtant Epitech permet d'arriver au même salaire, voire peut-être même aux mêmes emplois, car 49% des élèves de la promotion 2012 était embauché en tant qu'ingénieur.e.s en 2011 (voir Annexe 1). Le positionnement d'Epitech comme école technique plutôt que généraliste permet aux étudiant.e.s une insertion professionnelle plus grande, car les entreprises cherchent de plus en plus des diplômé.e.s formé.e.s techniquement : « si l'obtention d'un diplôme du supérieur limite la précarité et le déclassement, tous ne sont pas logés à la même enseigne : à niveau de diplôme équivalent, ceux issus de filières professionnelles entrent dans la vie active dans de meilleures conditions que les diplômés de filières générales » (Erlich et Verley, 2010). La formule pédagogique d'Epitech est d'immerger les élèves dans le monde de l'entreprise, à travers de nombreux stages, ce qui semble correspondre à l'évolution des formations en France : « outre l'évolution de l'offre et de la demande, la professionnalisation des études s'est accompagnée d'une hausse des stages, pour répondre là encore au souci d'insertion professionnelle des étudiants. En 2006, plus de 40% des étudiants déclaraient en avoir effectué un (hors stages de fin d'études) lors de la précédente année universitaire, alors qu'en 1997, ils n'étaient qu'un tiers » (Erlich et Verley, 2010). Erlich et Verley avancent une explication à la professionnalisation croissante des formations : « Une des lectures possibles d'une telle centralité de la perspective de professionnalisation des études peut être faite à partir de la situation des jeunes sur le marché du travail. Ils font face à une dégradation de leurs perspectives de mobilité sociale au risque de connaître une moins bonne réussite que leurs parents » (2010).

La brochure 2012-2013 d'Epitech entreprend même une comparaison avec les écoles d'ingénieur.e.s et suggère que leur taux d'embauche en CDI de 96% est « à comparer à la moyenne de 64% des étudiants sortant d'une école d'ingénieurs » et que « de même, 94% des étudiants d'Epitech sont embauchés sous la statut « cadre » ou « cadre supérieur » (pour 87% des étudiants sortant d'une école d'ingénieurs bénéficiant du statut « cadre ») ». Il y a donc un paradoxe ici, l'élitisme des écoles d'ingénieur.e semble perdurer sans vraiment avoir

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une raison d'être dans les formations d'informatique puisque Epitech semble apporter le même niveau social d'arrivée (cadre ou cadre supérieur), sans la certification ingénieur.e et sans concours. Isabelle Collet explique, dans son livre L'informatique a-t-elle un sexe ? que pendant la forte demande d' informaticien.ne.s des années 2000 beaucoup de formations en informatique ont été créés car « on s'est alors rendu compte que la politique de recrutement élitiste coûtait inutilement cher et que des techniciens pouvaient parfaitement accomplir les tâches des ingénieurs pour beaucoup moins cher » (2006). Catherine Marry, dans son ouvrage Les femmes ingénieurs, a montré que les grandes écoles étaient très élitistes. Mais depuis la fin des années 1990, de nouvelles écoles ont vu le jour, Epitech étant exemple, qui ne délivrent pas de diplômes d'ingénieur.e, sans pour autant être une formation technique mais qui fait des diplômé.e.s des produits parfaitement adaptés au monde du travail. Ces nouvelles écoles semblent refuser l'élitisme et prôner une certaine ouverture sociale, comme le montre cet extrait de la brochure Epitech 2012-2013 :

« Quel est le point commun entre un élève de première année venant d'un bac S, un autre sortant d'une première année de fac de lettres ou bien un autre en réorientation ? Ce sont tous des passionnés. Tous unis autour d'un but commun : devenir des experts qui sauront (ré)inventer le monde de demain. Epitech sélectionne ses étudiants selon leur appétence aux Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC). Peu importent les compétences, toute la promotion est mise au même niveau durant les premières semaines à l'école. »

Dans la brochure 2012-2013, Epitech réserve également une section « Comment financer ses études » à l'attention des futur.e.s élèves. Le premier moyen proposé étant les activités en entreprise : « Les étudiants peuvent travailler jusqu'à 2 jours par semaine en troisième année et 3 jours par semaine en quatrième et cinquième année [...] ce qui permet d'autofinancer les études. De même, les stages sont rémunérés dès la deuxième année. La moyenne de rémunération mensuelle du stage informatique est d'environ 645€, celle du stage professionnel (fin de dernière année) est d'environ 1500€. D'autres possibilités comme Cristal, l'association-entreprise de l'école, mais aussi les activités liées à certains laboratoires et celles internes à l'école donnent lieu à des rémunérations. » L'école a également établi des partenariats avec des banques pour faciliter l'obtention de prêts à « taux privilégiés » et souligne que « les récentes dispositions prises par l'Etat permettent aujourd'hui à tout étudiant d'obtenir un prêt garanti par ce dernier, sans caution personnelle, dans le cadre de ses études supérieures, quelle que soit sa situation personnelle et familiale. »

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld