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La décentralisation territoriale sous la constitution du 18 février 2006. Bilan d'une décennie d'application.

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par Jordy Panza
Université Protestante au Congo - Licence en Droit public 2016
  

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Chapitre Deuxième : LE BILAN D'APPLICATION DE LA DECENTRALISATION DE 2006

Au regard de la décentralisation consacrée, voici une décennie, par le constituant de 2006 et dans laquelle le pouvoir de l'Etat est exercé à deux niveaux complémentaires (niveau national où il est exercé par les institutions de la République et niveau provincial où il est exercé par les institutions politiques provinciales), il était nécessaire de mener une étude évaluative afin d'en connaitre les résultats.

Réalisant que la RDC est, sous peu, sortie d'un conflit, les partenaires internationaux se sont résolus d'apporter leur coup de pioche pour la reconstruction de ce pays que d'aucuns considèrent comme un cas d'école en matière d'Etat en faillite. Dans le cadre de cette coopération, l'apport de ces derniers est focalisé sur le rétablissement de la sécurité, la réduction de la pauvreté, l'amélioration de la gestion économique et la réhabilitation des infrastructures.

Néanmoins, nonobstant l'importance des finances octroyées et la mise à disposition des experts et consultants internationaux en la matière, le processus avance à pas de tortue, compte tenu de l'immense défi de reconstruction des institutions et du territoire congolais, ainsi que des tergiversations d'une partie des principaux acteurs de la décentralisation qui sont :

- le Parlement ;

- les Ministères du Gouvernement central : de l'Intérieur et Sécurité, Décentralisation et Affaires Coutumières, des Finances, du Budget, du Plan, de la Fonction Publique, de l'Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel152(*), de la Santé, des Médias, Relations avec le Parlement, de la Justice, de l'Agriculture et du Développement Rural (Le tout sous la direction et la coordination du Premier Ministre, Chef du Gouvernement et sous l'impulsion du Président de la République, Chef de l'Etat) ;

- les provinces ;

- les entités territoriales décentralisées ;

- les partis politiques ;

- les médias, la société civile et le secteur privé ;

- les partenaires techniques et financiers. 153(*)

La mise en oeuvre de la décentralisation est devenue un véritable casse-tête politique, principalement pour les autorités provinciales et celles du pouvoir central qui ne cessent de manifester des intérêts divergents.

Le constituant congolais ne s'est pas du tout trompé en estimant que la décentralisation est la seule voie institutionnelle à même de relever le défi de la gouvernance dans un pays aussi vaste que le nôtre. Toutefois, il n'a peut-être pas mesuré l'ampleur de cette initiative dont il nous convient de dresser le bilan décennal d'application.

Ainsi, dans le présent chapitre, nous évaluerons les entités territoriales régionalisées (section 1) avant de relever l'absence des ETD organisées par les textes (section 2).

Section 1. L'évaluation des entités territoriales régionalisées

Avant l'entrée en vigueur de la Constitution de la RDC qui fut promulguée par le Président Joseph Kabila, le 18 février 2006, notre pays était composé de la ville de Kinshasa et de dix provinces. Il s'agissait de :

- Bandundu ;

- Bas-Congo ;

- Equateur ;

- Kasaï-Occidental ;

- Kasaï-Oriental ;

- Katanga ;

- Maniema ;

- Nord-Kivu ;

- Province Orientale ;

- Sud-Kivu.

Conscient de l'immensité du territoire national et soucieux de rapprocher les gouvernants des gouvernés, le constituant de 2006 a mis en place une nouvelle physionomie du pays. Au lieu de dix, les provinces sont dorénavant au nombre de 25154(*), en plus de la ville de Kinshasa. Cela a constitué une opportunité à saisir pour corriger la situation faisant du Congo un pays ayant des provinces trop vastes et difficilement gérables.

Les raisons politiques avancées pour justifier ce découpage territorial évoquaient la nécessité et le souci de faire bénéficier à chaque habitant des conditions de vie améliorées, de cerner les vrais problèmes de la population et d'en trouver les solutions urgentes et adéquates. De toute évidence, il a été décidé dans le seul but d'accélérer partout le progrès économique et social de la population.155(*)

Ce découpage territorial devait être entamé endéans trente-six mois après l'installation effective des institutions politiques prévues par la Constitution.

Pour ce faire, nous tenterons, dans la présente section, d'évaluer l'installation des provinces (sous-section 1) à la suite de quoi, nous dirons un mot sur le fonctionnement de leurs institutions politiques (sous-section 2).

Sous-section 1. L'évaluation de l'installation des provinces

Dans la présente sous-section, nous ferons une évaluation de l'installation des provinces avant la révision constitutionnelle du 20 janvier 2011 (§1) et après celle-ci (§2).

§1. Avant la révision constitutionnelle du 20 janvier 2011

Conformément à l'article 226 de la Constitution de 2006156(*), les nouvelles provinces créées (dont plusieurs étaient des districts) devaient devenir effectives dans les trente-six mois après l'installation des institutions politiques prévues (avant la fin de l'année 2010).

Jadis, le Gouvernement dirigé par le Premier ministre Antoine Gizenga, lequel avait pris ses fonctions en 2007, s'était assigné comme objectif principal l'accélération du processus de parachèvement de l'architecture institutionnelle.

Plus tard, le Gouvernement conduit par Adolphe Muzito, son successeur, avait réaffirmé cette orientation par la mise en avant, dans son programme présenté en 2008 à l'Assemblée nationale, de sa volonté d'accélérer le processus de mise en place des nouvelles entités territoriales régionalisées.157(*)

Malgré l'adoption par le Parlement et la promulgation, par le Président de la République, de différents textes légaux indispensables pour l'effectivité du démembrement, il n'y a eu aucune mutation. Cette question a fait couler beaucoup d'encre et de salive car, ne faisant pas l'unanimité dans tous les coins de la RDC.

L'on a assisté à l'émergence de deux camps opposés : l'un, soutenant le découpage immédiat et l'autre, s'exprimant par : « oui » à la décentralisation mais « non » au découpage tel que prévu.158(*)

Les positivistes justifiaient leur tendance par la nécessité et le souci de faire bénéficier à chaque habitant des conditions de vie améliorées et de rapprocher les administrés de l'administration, cela en vue de cerner leurs vrais problèmes et d'en trouver des solutions urgentes et adéquates. Pour eux, le but poursuivi était d'accélérer le progrès économique et social dans l'ensemble du pays.

De l'autre côté, les négativistes étaient d'avis que le démembrement était susceptible d'accroître les inégalités entre les provinces les plus pauvres et les plus riches, de déstabiliser l'unité nationale voire, de déclencher des conflits politiques et ethniques.159(*)

A titre d'exemple, le découpage territorial devant aboutir à l'installation des nouvelles entités territoriales régionalisées avait provoqué un tollé dans l'ex province du Katanga. Des déclarations tonitruantes et virulentes de quelques membres du Gouvernement provincial et des animateurs de l'Assemblée provinciale, des lettres ouvertes et des prises de position favorisèrent la signature d'une pétition par plus de cent cinquante mille personnes qui avaient manifesté leur hostilité.

En voici quelques arguments : «  Au Katanga, aucun élu n'avait reçu mandat de ses électeurs de couper le Katanga pour le mieux-être des Katangais. Donc le découpage du Katanga n'est pas une volonté populaire.
Au référendum constitutionnel, les voix s'étaient élevées contre le découpage mais parce qu'il fallait privilégier l'aboutissement du processus de la transition, lequel sans constitution, il n'y aurait pas d'élection, la population katangaise pour marquer son soutien...avait adopté massivement la Constitution, bien sûr, avec espoir de revenir après, sur certains points sur lesquels la population n'était pas d'accord, conformément à la disposition de l'article 218.

Tous les districts du Katanga...n'ont pas tous les mêmes possibilités économiques mais la population reste unie dans la mesure où lorsque le Gouvernement pose une action de développement dans un coin du Katanga, tous les Katangais sont unanimes qu'on construit le Katanga.

Mais à partir du moment où chaque district sera une province à part, la population de chacun d'eux voudra l'action de développement posée se réaliser dans chacune de ses entités. En ce moment-là, le déséquilibre économico-financier des districts va créer des aigris et entrainer des conflits des communautés, lesquels conflits ne sont pas au programme des cinq chantiers de la République... »160(*)

Toujours dans l'ex Katanga, il y a eu une contrariété concernant l'actuelle province du Lualaba. Deux courants s'affrontaient. Le premier considérait que la ville de Kolwezi devait être retenue comme chef-lieu de l'actuel Lualaba tandis que le second entendait voir cette ville (jadis district urbano-rural) devenir une province à part entière ou être annexée au Haut-Katanga.

Ce second courant estimait que les populations autochtones de Kolwezi étaient culturellement plus proches des populations du Haut-Katanga que de celles du Lualaba ou du Haut-Lomami.

Fort de cette dichotomie de positions et compte tenu de la non viabilité de certains districts, le pouvoir central va réaliser qu'il était difficile d'installer, dans le délai, les nouvelles provinces prévues à l'article 2 de la Constitution.

Cette évidence a mené à la modification de l'article 226 au cours de la révision constitutionnelle intervenue le 20 janvier 2011. Depuis, il est disposé comme suit :

« Une loi de programmation détermine les modalités d'installation de nouvelles provinces citées à l'article 2 de la présente Constitution.

En attendant, la République Démocratique du Congo est composée de la ville de Kinshasa et de dix autres provinces suivantes dotées de la personnalité juridique : Bandundu, Bas-Congo, Equateur, Kasaï-Occidental, Kasaï-Oriental, Katanga, Maniema, Nord-Kivu, Province Orientale et Sud-Kivu ». 

* 152 A ce jour, ce Ministère est scindé en deux. D'une part, il y a le Ministère de l'Enseignement Primaire, Secondaire et Initiation à la Nouvelle Citoyenneté et d'autre part, le Ministère de l'Enseignement Technique et Professionnel.

* 153 Ministère de l'Intérieur, Sécurité, Décentralisation et Affaires coutumières, « Etat du processus, les perspectives et les acteurs de la décentralisation en RDC à la date du 15 mai 2013 », CTAD, RDC, 2013, p.10.

* 154 Voir l'article 2 de la Constitution.

* 155 J. YAV KATSHUNG, La « décentralisation-découpage » en RDC : Une tour de Babel ?, Lubumbashi, in Contrôle Citoyen, 2009, pp. 8.

* 156 Il est question de l'article 226 de la version non révisée de la Constitution.

* 157Ministère de la Décentralisation et Aménagement du Territoire, « Cadre stratégique de mise en oeuvre de la décentralisation en sigle CSMOD », RDC, 2009, p. 10.

* 158 Voir J. YAV KATSHUNG, loc.cit., pp. 7.

* 159 Idem, pp. 8.

* 160 Idem, pp. 9.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard