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L'achat public responsable a-t-il vocation à  soutenir la performance globale du système de santé ?

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par Emilie POMMIER
Institut Léonard de Vinci - MBA Management Responsable et Performance des Organisations 2015
  

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Partie 2 : Etat des lieux et tendances en matière d'achats publics responsables

Les clauses sociales et environnementales dans les marchés publics se développent de façon continue en France, depuis que la réforme du Code des Marchés a rendu obligatoire la réflexion sur le sujet par le pouvoir adjudicateur45. Selon l'Observatoire Economique de l'Achat Public, entre 2009 et fin 2010, les marchés de plus de 90 000 euros comportant une clause environnementale ont augmenté de 350 % (6,7 % à fin 2010 VS 1,9 % en 2009) et ceux comportant une clause sociale, de 234 % (6,1 % à fin 2010 VS 2,6 % en 2009)46.

Des scores impressionnants mais associés, il faut bien le rappeler, à un stade de démarrage et qui confirment un certain amalgame entre injonctions au développement durable et injonctions strictement écologiques. Par ailleurs, l'OEAP observe que les clauses SE se retrouvent essentiellement dans les marchés de travaux, de fournitures & services et dans les achats de fournitures courantes ; et de façon bien moindre dans les marchés portant sur des biens et services standards.

Extrait des résultats de l'enquête « L'achat public durable » (Observatoire Economique de l'Achat Public, 2011)

45 Au 1er septembre 2006.

46 Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011).

 

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Extrait du 8ème Baromètre « Santé durable » (Squaremetric, 2015)

?Critères DD dans la politique d'achats : quels domaines ? quels types d'achats ?

 

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Le niveau d'intégration du développement durable : ce qui se fait en général

D'autres études récentes, notamment la 8ème édition du Baromètre « Santé Durable » et le Baromètre 2014 « Achats responsables » co-piloté par le ds et AFNOR Solutions Achats47, révèlent que -dans son principe- l'achat responsable et durable est plébiscité48, mais qu'un décalage perdure entre l'adhésion au principe et la réalité, complexe, de sa mise en oeuvre. Ainsi, 75 à 82 % des établissements de santé affirment avoir aujourd'hui mis en oeuvre une politique d'achats durables, mais seuls 25 à 31 % d'entre eux en ont réellement fait un critère de choix dans leur sélection des offres.

47 Présentation des premiers résultats en cercle fermé, lors d'une journée thématique organisée par le ds.

48 Réaliser des achats durables est la priorité n°2 des répondants à la 8ème édition du Baromètre Santé durable, à 73 % ; après la réduction de l'impact environnemental de l'activité (81 %) ; et avant le bien-être et la qualité de vie au travail des salariés (71 %) (SQUAREMETRIC, 2015).

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Dans le cadre de la 5ème vague du projet Armen49, une analyse des 450 actions identifiées a montré que « plus d'une centaine peuvent être considérées comme durables et éco responsables alors qu'elles n'avaient pas été identifiées comme telles au départ »50, démontrant qu'il est désormais possible de concilier exigences environnementales et performance économique. Pour autant, ce constat met surtout en exergue la difficulté - partagée par les établissements de santé et, fait plus inquiétant, les entreprises soumissionnaires - à identifier ce qui relève du développement durable et ce qui ne rentre pas dans ce spectre. Constat soutenu par les chiffres du Baromètre « Santé Durable » 2015 : seuls 23 % des établissements de santé et médico-sociaux répondants (sensibilisés aux thématiques durables, soit dit au passage) ont fait le choix de dispenser des formations en matière d'achats durables51.

Malgré les apports bénéfiques des considérations responsables et durables dans la relation B to B, la majorité des soumissionnaires confirment la prédominance des critères de choix qualité-coûts-délais dans l'attribution des marchés - cantonnant les clauses sociales et environnementales à un statut d'argument « nice to have52 ». Marc Bouche, adjoint au chef du Programme de performance hospitalière pour des achats responsables (PHARE) à la Direction Générale de l'Offre de Soin, définit pourtant l'achat durable selon quatre critères : « des "économies intelligentes", la prise en compte de l'intérêt des parties prenantes, la protection de l'environnement et l'intégration de toutes les étapes du marché et de la vie du produit53 ». Une définition qui considère bien les clauses sociales (« les intérêts des parties prenantes ») et les clauses environnementales (« la protection de l'environnement ») comme deux principes d'égale valeur. Or jusqu'à présent, non seulement la commande publique n'a eu que très peu recours à l'achat durable mais elle a, en plus, montré bien plus d'aisance avec l'intégration de dispositions environnementales qu'avec son pendant social.

N'importe quel soumissionnaire pourrait légitimement s'interroger sur la corrélation éventuelle entre l'intégration du développement durable dans son offre et le nombre de marchés qu'il a remportés. Mais, en tout état de cause, le lien n'est pas évident à établir. Selon l'interprétation faite du Code des Marchés Publics, les clauses sociales et environnementales ne constituent pas un critère déterminant54 et ne doivent surtout pas

49 Le projet Armen consiste, dans le cadre du programme PHARE, à identifier des opportunités de gains, par vagues de 10 domaines sur une durée de 3 mois.

50 DirectHopital, « Achats hospitaliers : la performance économique et les critères sociaux et environnementaux ne sont pas "contradictoires » (article par Morgan Bourven, 15 octobre 2015).

51 SQUAREMETRIC, 8ème édition du Baromètre Santé durable (2015).

52 « Un plus » « Un élément sympa à avoir, mais qui n'est pas essentiel ».

53 DirectHopital, « Achats hospitaliers : la performance économique et les critères sociaux et environnementaux ne sont pas "contradictoires » (article par Morgan Bourven, 15 octobre 2015).

54 En raison de la faible valorisation du développement durable dans l'évaluation de l'offre.

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devenir un critère discriminant55 dans le choix d'une offre. Dans ce cas, peuvent-elles représenter un motif d'exclusion ? Les Directives européennes, au même titre que la plupart des législations nationales sur les achats durables, énoncent une liste précise de conditions d'exclusion d'un candidat. Ces critères excluent, par exemple, les entreprises en faillite ou en liquidation judiciaire ; celles qui n'ont pas payé leurs impôts ou leurs cotisations sociales ; ou encore les entreprises ayant commis des crimes environnementaux et/ou ayant porté atteinte aux droits fondamentaux de la personne, et qui ont été condamnées à ce titre56. Lors de la phase d'examen des candidatures (et non lors de l'examen des offres), l'acheteur public peut donc écarter un soumissionnaire ayant commis une faute professionnelle grave, en lien avec un enjeu de développement durable. Cependant, un tel motif d'exclusion est difficile d'application en l'absence de condamnation, sanction économique ou amende administrative.

Différentes enquêtes menées auprès de fournisseurs des organismes publics corroborent l'ensemble de ces constats. Ces enquêtes prouvent que les entreprises soumissionnaires interrogées ne sont tout bonnement pas en mesure de citer d'exemple de marchés qu'elles n'ont pas obtenus, faute d'inclusion du développement durable, ou à l'inverse qu'elles auraient obtenus grâce à une offre performante en la matière57. Il semble donc que l'achat public responsable et durable reste, à date, très largement porté par une approche de gestion des risques.

Cette approche « risques » est intimement liée à la notion de conformité réglementaire, notamment le respect des principes fondamentaux de la commande publique, énoncés dans les Directives du Parlement européen et du Conseil de 2014. Ainsi, les cas de jurisprudence58 en matière d'inclusion de clauses sociales et environnementales rappellent-ils davantage la nécessité de respecter ces dispositions (concurrence, non-discrimination, transparence, lien avec l'objet du marché, offre économiquement la plus avantageuse) plus qu'ils ne rappellent au pouvoir adjudicateur l'obligation de moyens qui pèse sur lui (considérer le développement durable lors de la définition de son/ses besoin(s)). La portée juridique de cette obligation reste tellement imprécise qu'« à l'évidence, tous les acheteurs n'ont pas perçu le caractère obligatoire du questionnement » selon Patrick Loquet, Maître de conférences en Droit et consultant, dédié aux clauses sociales dans les marchés publics59.

55 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la Directive 2004/18/CE.

56 Articles 53 et 54 de la Directive 2004/17/CE et article 45 de la Directive 2004/18/CE.

57 http://www.patrickloquet.fr

58 Arrêt Wienstrom du 4 décembre 2003, arrêt Concordia du 17 septembre 2002 et arrêt Beentjes du 20 septembre 1988.

59 http://www.patrickloquet.fr

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Le schéma ci-dessous illustre l'évolution des clauses sociales et environnementales, à travers un suivi sur trois ans de leur intégration aux documents de la consultation publique de produits de santé ; marchés pour lesquels l'entreprise B. Braun Medical était soumissionnaire. La période 1 (octobre 2012 - septembre 2013) correspondant à la mise en place de cet indicateur, une certaine marge d'incertitudes doit être considérée. Pour autant, les grandes tendances sont pleinement représentatives de la réalité, ainsi que le détail des pondérations du critère développement durable.

Suivi de l'intégration des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics pour lesquels B. Braun Medical était soumissionnaire (Annexe 3)

L'analyse de cet indicateur sur trois années consécutives permet de dégager quelques tendances fortes en matière d'intégration des clauses SE dans les marchés publics.

?Tendance n°1 : Le développement durable n'est plus une option.

Dans plus de 80 % des marchés publics de produits de santé observés sur la période 3, cette mention figure bien (stricto sensu ou sous une dénomination environnementale) dans l'un des documents de la consultation.

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?Tendance n°2 : Le développement durable se fait progressivement une place parmi les critères de jugement d'une offre (art. 53 du CMP)...mais avec de grandes disparités observées dans sa pondération (et son rattachement60).

?Tendance n°3 : La variété de pondérations peut être le signe de positionnements plus affirmés de la part des établissements de santé.

Et ce, dans les deux sens : qu'il s'agisse de positionnements « pro DD » (critère DD pondéré entre 8 et 15 % de la note globale) ou plus détachés (critère DD pondéré entre 0,5 et 4 % de la note globale). Dans les deux cas, le pouvoir adjudicateur semble confirmer sa position et assumer ses choix.

?Tendance n°4 : Les clauses sociales et environnementales ne constituent pas un critère déterminant dans le jugement des offres.

Ce qu'il faut retenir

En moyenne, le développement durable compte pour 5 % de la note globale attribuée. Une valorisation, certes, mais trop faible pour pouvoir être qualifiée de « déterminante ».

Les clauses SE, puis le développement durable ont été respectivement inscrits au Code des Marchés Publics en 2004 et 2006. Dix ans plus tard face aux amalgames, aux disparités entre types de marchés, aux principes reconnus mais pas ou peu appliqués, devant les différents niveaux d'expertise ou encore face l'absence de "rappel à l'ordre"...certains estiment qu'il serait temps de changer la logique de « ce qui est permis » pour passer à une logique de « ce qui est exigé ».

En France, si le développement durable n'est pas un critère déterminant61, s'il doit veiller à ne pas être discriminant et s'il est (très) peu excluant, il se crée progressivement une place dans la commande publique. En comparaison, les pays scandinaves - malgré leur avance prise sur le sujet - intègrent les clauses SE dans seulement 36 % de leurs marchés et pondèrent en moyenne ce critère à 3,3 % de la note globale62.

60 Critère DD en propre ou intégré, comme sous-critère, à un critère d'attribution plus large (ex : Performance fournisseur, Valeur technique, etc).

61 5 % en moyenne de la note globale attribuée à une offre.

62 MARTY Frédéric, « Les clauses environnementales dans les marchés publics : perspectives économiques » (working paper, 2012) faisant référence à une étude de Parrika-Alhola et al. (2006).

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery